Snapchat, Instagram, TikTok : comment sont créés vos filtres préférés

Rencontre avec une startup qui sait vous amuser et vous faire briller

 
Devenu un élément aussi ludique pour les utilisateurs qu’essentiel pour les marques, le filtre Instagram, Snapchat, TikTok ou autre regorge désormais de créativité et d’interactivité. Rencontre avec Atomic Digital Design, un studio parisien qui a fait de la réalité augmentée votre délire sur smartphone.
Les filtres et Lenses ont la cote sur les réseaux sociaux
Les filtres et Lenses ont la cote sur les réseaux sociaux // Source : Frandroid / Atomic Digital Design

Nichés au cœur de Paris, dans un immeuble en fond de cour, cela bouillonne de créativité, de modélisation 3D et de réflexion dans les bureaux répartis sur deux étages. Sur les écrans, d’inattendus filtres façon Snapchat ou Instagram prennent vie.

Bienvenue chez Atomic Digital Design, une startup française spécialisée dans la réalité augmentée. Celle-ci a vu le jour en 2012 grâce à deux anciens du cinéma d’animation et du jeu vidéo, passés par chez Illumination (Moi, moche et méchant) ainsi qu’Ubisoft. Atomic Digital Design fait partie de ses acteurs de l’ombre dont les créations pour Snapchat, Instagram voire Facebook sont souvent sur le devant de la scène et sur les écrans de vos smartphones, parfois dans des proportions très virales.

Source : Atomic Digital Design

Vous avez peut-être testé l’expérience try-on d’Adidas en « mettant à vos pieds » les futures baskets de la marque, donné vie aux joueurs de l’équipe de France de football sur votre canette de Coca-Cola ou essayé ce magnifique sac Dior. À moins que vous n’ayez tenté l’expérience en réalité virtuelle de Snapchat pour le Jardin d’Acclimatation ou bien les filtres mis au point pour des marques aussi prestigieuses que Lancôme et Piaget ou même Samsung pour son Galaxy S21.

L’iPad 2 et les envies de gamification à l’origine des filtres

Ici, on crée notamment des filtres et « Lenses » parmi les plus populaires sur les applications phares de vos smartphones. Plus d’une centaine ont vu le jour l’an dernier et cette année devrait être aussi riche si ce n’est plus tant l’entreprise déborde de projets.

C’est l’iPad 2 en 2011 qui a donné l’idée à deux anciens camarades d’école de faire de l’animation et de monter leur société. « Pour la première fois, on avait accès à du contenu hybride entre l’ordinateur et le smartphone. On s’est dit qu’il fallait qu’on crée avec ça », se souvient Antoine Vu, l’un des cofondateurs de l’entreprise avec son acolyte Gabriel Picard. « C’était interactif, on pouvait y greffer des comportements de jeu vidéo. On s’est dit : on va faire du dessin animé interactif en essayant d’anticiper les comportements de demain ». Ainsi, ont vu le jour leurs premières applications mobiles avec de la gamification pour les entreprises ou encore l’Éducation nationale et des apps ludo-éducatives.

Les cofondateurs Antoine Vu à gauche et Gabriel Picard à droite // Source : Atomic Digital Design

Ils explorent alors de nouvelles pistes grâce au déploiement progressif de la réalité augmentée, « ce pouvoir de superposer du numérique sur du réel », en le pensant avant tout comme une valeur ajoutée qui va renforcer un propos. « Cela crée une connexion renforcée avec un utilisateur et c’est pour ça que les marques l’ont rapidement adoptée pour passer leurs messages », ajoute-t-il. « On est acteur de ce qu’on regarde, on vit ce qu’on nous transmet ». L’arrivée du format Story sur Snapchat sera le détonateur et « un véritable changement dans les usages des réseaux sociaux » ainsi que dans la vie de l’entreprise.

En ouvrant sa technologie dès 2018, Snapchat lance ainsi un marché pour de nouveaux créateurs qui viendront enrichir sa plateforme et Atomic Digital bascule alors toute son activité vers « la réalité augmentée sociale ». « C’est comme ça qu’on est devenu le premier partenaire de Snapchat, puis de Facebook, Instagram et TikTok par la suite », se félicite Antoine Vu. Il faut dire que rares sont les projets d’envergure, notamment dans l’Hexagone, qui échappe à l’entreprise parisienne qui a mis au point une technologie et un savoir-faire que les marques, notamment celles du luxe, s’arrachent (Gucci, North Face, Nike, Jean-Paul Gaultier, Lacoste…).

Créer des filtres qui ont du sens tout en étant ludiques

« On donne aux utilisateurs des outils qui leur plaisent grâce à la réalité augmentée et les marques cherchent cette audience avec de la nouveauté dans l’approche. Nous sommes juste là pour offrir aux deux parties des expériences qui ont du sens », avance-t-on chez Atomic Digital qui sait également réaliser des filtres AR pour expliquer les bons gestes de la palpation pour détecter le cancer du sein pour le Pink October ou bien d’autres propos.

Un filtre conçu pour l’Euro 2020 // Source : Atomic Digital Design

« Nous misons sur la réalité augmentée sociale », martèle le patron de la startup. « Chaque filtre doit raconter quelque chose, offrir une expérience différente à l’utilisateur. C’est du contenu interactif pour qu’il en soit bien plus qu’un simple spectateur. » Et cela se ressent dans la conception même des filtres. Dès la maquette virtuelle faite par un artiste 3D, il faut pouvoir penser comment cela sera animé sur le smartphone, en fonction de la personne, du moment, de sa disponibilité. « Il faut que ce soit fun et ludique avant tout », lâche-t-il. Deux mots-clés pour attirer aussi la jeune génération qui est le cœur de cible des produits maison et de leurs clients qui se servent bien souvent des filtres comme d’un nouveau moteur publicitaire.

Même s’ils s’appuient sur Lens Studio, l’outil de création open-source de Snapchat qui permet de donner vie aux filtres en réalité augmentée avant de les mettre à disposition sur l’application, les équipes d’Atomic Digital Studio planchent très en amont sur leur projet. Quelques secondes d’utilisation pour vous, des jours voire semaines de préparation pour eux entre la discussion avec une marque jusqu’à la publication dans l’application.

Des Lenses plus réalistes que jamais

Après avoir défini le projet avec la marque, en évitant parfois les idées trop farfelues, utopistes ou inconcevables, c’est l’heure de « jouer les réalisateurs », car les meilleures expériences sont celles qui mettent en scène l’utilisateur et il faut pour cela que ce soit le plus réaliste possible. Pour réussir sa mission, Atomic Digital Design s’est équipé d’une étrange machine baptisée GenARation. Posée sur son socle et sur des rails façon caméra pour travelling horizontal et vertical, elle est l’arme absolue de l’entreprise et une première en France. « Il n’y en a que cinq-six dans le monde, » se félicite Antoine Vu. « C’est un investissement, mais c’est aussi une véritable plus-value par rapport à la concurrence ».

Il s’agit là d’un appareil pour faire du scanner photogrammétrique. Un objet est posé sur un socle et l’appareil photo va prendre quelque 350 clichés pour numériser celui-ci sous tous les angles possibles afin d’en faire une création 3D en compilant le tout ensuite par ordinateur avec un maximum de détails et de définition. Une technologie qui séduit grandement l’industrie du luxe dès qu’il est question de numériser un sac, des chaussures ou des tenues onéreuses. Une fois le fichier crée, il sera alors plus facile de reproduire l’objet en réalité augmentée par les graphistes et développeurs afin d’en faire par exemple des chaussures virtuelles à essayer ou une robe de soirée à enfiler, quelles que soient votre taille ou vos envies de couleur. Une seule condition pour ce futur filtre : obtenir un fichier pas trop lourd (moins de 4 Mo) pour le basculer ensuite sur la plateforme de Snapchat, TikTok ou d’Instagram.

Les yeux AR vers Apple et Facebook

À l’avenir, chez Atomic Digital Design, on mise sur la multiplication des expériences en try-on. C’est-à-dire que les marques vont vouloir vous faire essayer leur produit sans les toucher. Snapchat a d’ailleurs annoncé de multiples innovations pour ses Lenses en ce sens et Apple, l’un des acteurs de la réalité augmentée grâce au LiDAR de son iPhone Pro, mise beaucoup dessus également.

« Ce n’est pas encore parfait dans le rendu avec les outils actuels, mais il y a du mieux et les marques savent que cela peut déjà inciter à l’achat, » prédit Antoine Vu qui rêve aussi son entreprise en fournisseur d’effets de réalité augmentée pour le cinéma ou la télévision, voire en partenaire de contenus pour les futurs produits AR d’Apple, Google ou Facebook. Du rêve à la vraie réalité qui sait.


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