Andy Rubin n’a pas à chercher bien loin pour remonter à l’origine de sa passion pour la tech. Elle lui vient de son père, un ancien psychologue devenu entrepreneur spécialisé dans la photographie d’appareils électroniques : « Une fois les produits immortalisés pour être insérés dans les catalogues de marketing, ils finissaient dans ma chambre. C’est comme ça que je mettais la main sur tous les nouveaux produits, et mon goût [pour la tech] s’est imposé. »
D’autant qu’à Chappaqua, la petite ville de l’État de New York où il grandit dans les années 1970, les distractions sont assez rares. Après des années de lycée sans histoire, il s’éloigne un peu de Chappaqua pour rejoindre l’université voisine d’Uttica où il étudie l’informatique et dont il ressort diplômé en 1986.
Les premiers pas professionnels du jeune ingénieur se font dans le monde de la robotique. Au sein de la firme Carl Zeiss A.G., Andy Rubin planche sur les communications entre les réseaux internes et les machines robotisées produites par l’entreprise. Sa carrière naissante l’amène ensuite en Suisse, où il continue de plancher sur la robotique… jusqu’à sa rencontre inattendue sur une plage des îles Caïman, en 1989, avec un ingénieur d’Apple, alors en plein boom de popularité grâce au succès du Mac.
Bill Caswell apprécie la générosité du jeune homme, qui propose de l’héberger en attendant qu’il se réconcilie avec sa copine. Une bonne action qui lui vaudra en retour de se faire offrir une place d’ingénieur chez Apple, acceptée volontiers par Andy Rubin. Au sein de l’entreprise cofondée par Steve Jobs, Steve Wozniak et Ronald Wayne, Andy Rubin se fait notamment connaître (et détester par certains collègues) pour ses blagues. Il s’amuse notamment à bidouiller le réseau interne pour que tous les appels internes apparaissent comme en provenance du directeur général, John Sculley.
Android Rubin
Ses 3 années chez Apple sont aussi l’occasion d’hériter du surnom d’Android, que ses collègues lui attribuent en référence à son amour des robots… Ce choix plaît visiblement à Rubin, qui en fera le nom (et l’URL) de son site personnel jusqu’en 2008. En 1992, l’ingénieur rejoint General Magic, une branche d’Apple dédiée au développement de produits mobiles et de communication.
Il s’immerge totalement dans la culture d’entreprise, au point de vivre à son bureau pour finaliser le projet à temps. Si certaines entreprises adoptent, dès 1995, ce système avancé pour téléphone mobile, le succès n’est pas suffisamment au rendez-vous. L’idée était-elle trop en avance pour son époque ? Quoi qu’il en soit, l’équipe de General Magic est dissoute et réaffectée à d’autres startups. Andy Rubin rejoint pour sa part Artemis Research, où il retrouve d’anciens employés d’Apple qui tentent de mêler Internet à la télévision — cette fois, le concept est en avance sur un certain Netflix… Andy Rubin choisit de rester au sein de l’équipe malgré son rachat par Microsoft en 1997. Mais il passe beaucoup de temps à bidouiller avec ses jouets préférés : les robots.
Si le talent du jeune prodige à lunettes impressionne ses collègues, il agace aussi Microsoft. L’ingénieur de 34 reçoit ainsi un coup de fil rageur de l’équipe de sécurité après avoir programmé un robot mobile, équipé d’une camera, d’un micro et d’une connexion Internet, pour le faire circuler au sein des couloirs. Un exploit, certes, mais qui tourne court lorsque l’équipe en question l’informe qu’il a été piraté au cours d’un week-end… C’est la fin d’une expérience prometteuse, mais éphémère.
Andy Rubin se lance ensuite dans sa première aventure en solo : un magasin de vente de robots en provenance du Japon. Mais son commerce ferme vite ses portes face au manque d’intérêt du public. Loin de se décourager, il se lance alors, à l’aune des années 2000, dans la conception d’un prototype de smartphone — un terme employé aujourd’hui, mais inexistant à l’époque.
Sidekick : flop commercial, succès d’estime
En 2002, l’ingénieur devenu entrepreneur peut se targuer d’avoir séduit les cofondateurs de Google, Sergey Brin et Larry Page. Les deux hommes passent en effet une bonne partie du printemps les yeux rivés sur ce smartphone à clavier physique capable d’accéder à Internet et, bien sûr, au moteur de recherche. Le fait que Google soit installé par défaut leur plaît beaucoup. La prouesse de Rubin est d’autant plus impressionnante comparée à la référence du marché naissant, le BlackBerry. Le Sidekick, de son petit nom, fait fureur dans la Silicon Valley… et permet de faire connaître la startup Danger Inc., dont Rubin a choisi le nom en référence à l’iconique robot de la série culte de SF Perdus dans l’espace, qu’il regardait enfant.
Sergey Brin et Larry Page sont tellement convaincus par le Sidekick qu’ils envisagent dès cette époque de créer un Google Phone. Malgré le succès critique du Sidekick, les ventes ne suivent pas : Andy Rubin accepte d’être remplacé au sein de la startup. En octobre 2003, il investit toutes ses économies — et emprunte 100 000 dollars en plus — dans Android, un système de navigation mobile qu’il veut ouvrir à tous : « Ce qui me motive, c’est de toucher un nombre important de personnes — s’il y a 3,1 milliards de téléphones sur le marché, c’est un bon moyen de le faire. Je veux [créer] quelque chose qui enchante ses utilisateurs et les incite à l’utiliser pour ce qu’il est. »
Direction Google
Cette fois-ci, l’intérêt pour son concept se manifeste aussi économiquement : Google, emballé, rachète l’entreprise dès 2005 pour au moins 50 millions de dollars. Ses équipes vont alors plancher sur le système de navigation mobile sous l’impulsion d’Andy Rubin. Quitte à passer par un retour conceptuel à zéro à la sortie de l’iPhone en 2007, qui chamboule ce domaine et oblige Google à abandonner l’idée d’un smartphone non tactile et doté d’un clavier. Andy Rubin le reconnaît lui-même pendant la keynote de Steve Jobs : « Merde. Finalement, on ne va pas commercialiser ce téléphone. » Le premier-né Android sera finalement le HTC Dream.
En mars 2013, Larry Page surprend le monde de la tech en annonçant le départ d’Andy Rubin de la division Android. Le père de l’OS — déjà déployé, à ce stade, sur 750 millions d’appareils et représentant 75 % des appareils vendus dans le monde — reste toutefois au sein de Google puisqu’il hérite de ses projets les plus ambitieux (et les plus risqués), ces technologies au grand potentiel, mais dont la concrétisation est loin d’être garantie (les fameux « moonshots » dans la langue de Shakespeare).
Comme les fameux robots de Boston Dynamics. Larry Page se dit ravi du travail accompli par Rubin : « Maintenant qu’il a largement surpassé les objectifs fous et ambitieux dont nous rêvions pour Android — et grâce à notre équipe solide en place actuellement –, Andy a décidé qu’il était temps de confier les rênes [à autrui] et de commencer un nouveau chapitre chez Google. »
L’Essential, un pari risqué (et mal parti)
Celui-ci sera toutefois moins réussi que le lancement d’Android et Andy Rubin quittera Google peu de temps après, en 2014. Depuis, il s’est lancé dans son nouveau projet : Essential, du nom du smartphone annoncé en 2005, qu’il entend faire rivaliser avec Apple et Samsung. Il mise sur un écosystème plus ouvert et amené à évoluer au fil des mois au lieu de devenir dépassé techniquement. Rubin adopte ainsi une posture complètement à rebours de celle de l’industrie du mobile.
Mais le lancement de l’Essential, en 2017, a été marqué par nombre de ratés techniques puis par une spectaculaire baisse de prix (de 699 dollars à 499 dollars)… et les ventes ne sont pas au rendez-vous, avec seulement 88 000 exemplaires écoulés en 6 mois. La promesse d’Andy Rubin — « créer un OS pour tout » — semble d’autant plus mal partie qu’il a dû prendre des congés de sa propre entreprise en fin d’année 2017 après des révélations sur les raisons de son départ de Google. Celui-ci serait dû à ses « relations inappropriées » avec une collègue de l’époque, même si Andy Rubin dément.
En cette période difficile, le père d’Android saura-t-il rebondir de nouveau ? L’homme a prouvé qu’il en avait les ressources. Reste à savoir si sa philosophie peut encore chambouler le marché. Les temps ont changé, mais pas Andy Rubin.
Votre café et votre dose de tech vous attendent sur WhatsApp chaque matin avec Frandroid.
Bonjour Matt, Il "le vaut bien". https://fr.wikipedia.org/wiki/Andy_Rubin
Oooooosef
Encore un article sur lui ?
Bonjour, Quelle déception de voir cet Essential aller à vau-l'eau ! Mais que s'est-il passé réellement ?
Je n'ai jamais affirmé le contraire ! Rien à voir avec mon commentaire
Si l'on prend en compte la vraie définition d'un smartphone qu'on associe a "applications" a tort. Je cite une partie de la définition: " il peut exécuter divers logiciels/applications grâce à un système d'exploitation spécialement conçu pour mobiles, et donc en particulier fournir des fonctionnalités en plus de celles des téléphones mobiles classiques comme : l'agenda, la télévision, le calendrier, la navigation sur le Web, la consultation et l'envoi de courrier électronique, la géolocalisation, le dictaphone/magnétophone, la calculatrice, la boussole, l'accéléromètre, le gyromètre la messagerie vocale visuelle, la cartographie numérique, etc. Les appareils les plus sophistiqués bénéficient de la reconnaissance vocale et de la synthèse vocale." Et entre autre, BlackBerry en 2001 via leur bbOS l'offrait. GPS, e-mail en push SVP, calendrier, contacts, etc... Donc oui, Apple n'est pas l'inventeur du smartphone. Apple a démocratiser l'écran tactile qui existait déjà sur un mobile en 2003/04 mais qui a été "mort-né". Ce premier modèle est dû à Nokia.
L'ironie c'est mieux quand c'est drôle, piquant ou inventif. Là ça ressemble à du troll de collégiens
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