Nos appareils numériques renferment des trésors. L’électronique de pointe dépend en effet de tout un tas de métaux très différents du cuivre, de l’aluminium ou de l’acier que nous rencontrons dans la vie quotidienne. Cela pose beaucoup de questions aussi bien environnementales que géopolitiques, des mines de cobalt en République démocratique du Congo à la production chinoise de terres rares, dont Pékin menace de limiter l’export dans sa guerre commerciale avec les États-Unis.
Les fabricants de smartphones sont peu bavards concernant les métaux rares utilisés dans leurs produits. Nous avons tout de même tâché de collecter des informations sur l’usage de ces éléments exotiques dans l’électronique de tous les jours.
Qu’appelle-t-on des « métaux rares » ?
Les « métaux rares » sont une appellation un peu fourre-tout qui couvre l’essentiel des atomes situés au milieu du tableau périodique des éléments. Cela fait plusieurs dizaines de matériaux élémentaires. Certains noms, comme le cobalt tout bleu ou le très lourd tungstène, nous sont relativement familiers. Mais l’on trouve aussi des choses plus surprenantes, comme le gallium, ce métal qui fond dans la main à la même température que le chocolat (30 °C). Permettons-nous de citer parmi d’autres noms : le tantale, le niobium, l’indium, le hafnium, ou encore le palladium.
Les métaux rares les plus connus sont un groupe de 17 éléments appelés les « terres rares ». Ceux-ci ont pour la première fois été découverts par le chimiste suédois Carl Axel Arrhenius en 1787 dans une roche du village d’Ytterby, sur une île près de Stockholm. Ils représentent un groupe de métaux avec des propriétés assez similaires les uns les autres et pouvant parfois être utilisés de manière interchangeable dans des alliages.
Il s’agit du scandium, de l’yttrium (nommé d’après le village d’Ytterby), et des 15 atomes de la famille des « lanthanides » : le lanthane, le cérium, le praséodyme, le néodyme, le prométhium, le samarium, l’europium, le gadolinium, le terbium (de « Ytterby » en enlevant deux lettres), le dysprosium, le holmium, l’erbium (« Ytterby » en enlevant trois lettres), le thulium, l’ytterbium (vous l’avez ?) et le lutécium. Parmi eux, le prométhium est à part, car il est radioactif et extrêmement rare à l’état naturel, avec seulement 500 grammes éparpillés dans la totalité de la croûte terrestre ; ses utilisations sont ainsi très réduites et spéciales.
Contrairement à ce que leur nom indique, les terres rares ne sont pas « rares » sur Terre. L’yttrium est ainsi 400 fois plus abondant dans la croûte terrestre que l’argent. Mais ils sont très dispersés et ne se présentent pas sous la forme de minerais facilement exploitables. On peut les extraire dans des mines de cuivre, de zinc, ou d’uranium, mais le processus est très cher et hautement polluant. C’est pour cela que pratiquement seule la Chine assume de s’y mettre, avec un monopole à presque 100 % sur le traitement des terres rares à partir des minerais d’autres métaux.
Où en trouve-t-on dans nos smartphones ?
Écrans et LEDs
Les premiers écrans tactiles étaient résistifs, c’est-à-dire qu’il fallait physiquement appuyer dessus avec son doigt ou un stylet. Nos smartphones modernes ont des écrans capacitifs, avec un champ électrostatique qui reconnaît les perturbations causées par le simple contact de la peau. Pour que cela fonctionne, il faut revêtir l’écran d’un film qui conduit l’électricité tout en étant transparent. Ce film est fait d’oxyde d’indium-étain (abrévié « ITO »), l’indium étant issu du minerai de zinc.
Une LED est schématiquement faite d’une puce semi-conductrice, montée sur un cadre métallique et encapsulée dans un morceau de plastique transparent. Le matériau semi-conducteur de la puce est généralement un composé de gallium (extrait du minerai d’aluminium) et d’au moins un autre atome, qui va déterminer la couleur « de base » de la LED. Avec de l’arsenic combiné à du phosphore, on obtient une lumière rouge orangé, tandis qu’avec de l’azote ou de l’indium, la LED apparaît bleue.
Mais pour faire de vraies belles couleurs avec une LED, il faut enduire la puce avec des poudres de phosphore. Et là-dedans, il n’y a pas que du simple phosphore. Les couleurs sont en effet réalisées avec différents cocktails de terres rares. Le plus courant, le grenat d’yttrium et d’aluminium (« YAG ») dopé au cérium, sert à faire une couleur jaune que l’on peut par exemple rajouter sur une LED bleue (à l’indium) pour la rendre blanche. D’autres phosphores à l’yttrium ou à l’europium permettent de faire du rouge, tandis que l’europium peut aussi servir au bleu et le terbium au vert. On peut également retrouver du lanthane et du gadolinium.
Son et vibrations
Quel est le point commun entre un micro, un haut-parleur et les vibrations d’un téléphone ? Tous ces éléments ont besoin d’aimants pour fonctionner. Ce sont eux qui, grâce à leur force d’attraction, produisent les vibrations qui peuvent faire trembler l’appareil en entier — ou produire des oscillations plus fines et traduisibles en son.
Mais il n’est pas question d’utiliser pour cela les mêmes aimants que sur son réfrigérateur. Il faut des aimants minuscules, puissants, et surtout qui ne s’affaiblissent pas avec le temps. La solution la plus éprouvée en la matière est un alliage de néodyme et de praséodyme, également utilisé dans les moteurs électriques et les turbines des éoliennes. Ce mélange peut aussi inclure un peu de terbium ou de dysprosium. Le tungstène, qui est deux fois plus lourd que l’acier, sert de poids pour amplifier les vibrations.
Batteries
Les batteries omniprésentes de nos appareils sont des batteries lithium-ion. On y trouve bien sûr du lithium, métal le plus léger du monde extrait notamment d’Australie et des déserts de sel d’Amérique du Sud. Mais il y faut aussi généralement du cobalt, sous la forme de dioxyde de cobalt et de lithium (LiCoO2), pour former la cathode de la batterie.
Circuit intégré
Un circuit intégré est une plaque de matériau semi-conducteur (généralement du silicium, parfois du germanium) à la surface duquel sont reliés des transistors, petits composants à trois pattes contenant également du matériau semi-conducteur. C’est ce qu’on appelle égalemet une puce. Pour rendre le silicium conducteur d’électricité à certains endroits seulement, il faut le « doper » en y rajoutant des impuretés : du phosphore, du bore, de l’arsenic, de l’antimoine, mais aussi de l’indium ou du gallium. Dans les transistors devant opérer à très haute fréquence, tels que ceux employés pour le Wi-Fi, le Bluetooth ou la 4G, le silicium est remplacé par de l’arséniure de gallium ou du silicium-germanium.
Avec le lancement de sa génération de 45 nm en 2007, Intel a commencé à utiliser du hafnium pour isoler les portes de ses transistors. Ces derniers sont reliés entre eux sur les circuits imprimés par des films de titane et de tungstène. La miniaturisation des puces pousserait les fabricants de semi-conducteurs à remplacer le cuivre, de moins en moins pratique à l’échelle nanométrique, par du cobalt ou du ruthénium.
Circuit imprimé
Les circuits imprimés sont les plaques en résine epoxy, souvent de couleur verte, sur lesquelles on soude des composants grâce à des pistes en cuivre. L’or et l’argent ne sont pas toujours classés comme « métaux rares », mais nous avons choisi de les mentionner en raison de leur importance en électronique. Excellent conducteur électrique, l’or se retrouve donc dans les circuits imprimés, constituant notamment les fils de liaison entre le silicium et les broches des différents composants. L’argent, lui, est présent dans la plupart des résistances. On retrouve aussi dans les circuits imprimés de très petites quantités de palladium, un métal de la famille du platine.
Enfin, un des composants fréquents que l’on soude sur les circuits imprimés est le condensateur, une petite citerne à énergie électrique. Les condensateurs standard utilisent de l’aluminium, mais ceux-ci sont trop gros pour rentrer dans un smartphone. Pour en fabriquer de très petite taille, on utilise du tantale.
Tous ces métaux aux noms étranges sont donc vitaux pour nos smartphones. Mais ils le sont aussi pour de nombreuses applications de pointe en chimie et en médecine, ainsi que pour la plupart des énergies propres. C’est un comble quand l’on sait que ces ressources sont « sales » à exploiter, écologiquement et politiquement. D’où leur enjeu, qui ira sans doute en grandissant à l’avenir.
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[…] also reduces the demand for materials such as neodymium, of which China holds a virtual monopoly in the world. However, we know that the European Union […]
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[…] polluante que celle d’une voiture thermique. En effet, la conception des batteries, et notamment la récolte des métaux rares qui servent à leur création, est une question écologique majeure pour les années à venir. En […]
[…] de grands moyens très polluant en puisant les ressources de notre planète à a recherche des terres rares et des métaux comme le cobalt et le tantale. Sans parler des conflits politiques et de sécurité, […]
[…] nécessite des terres rares, très polluantes à extraire et politiquement sensibles. Quant à des métaux tels que le cobalt […]
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[…] sorties des tréfonds la mine de Bayan Obo cent kilomètres au nord. Ces atomes, essentiels à la fabrication de nombreux objets technologiques, dont nos smartphones, y sont transformés dans des conditions sanitaires et environnementales […]
[…] la composition est la plus complexe. L’électronique nécessite des éléments les plus variés, dont des terres rares et d’autres métaux exotiques. Malheureusement, leur extraction s’opère souvent dans des […]
oui on en parle pas beaucoup et surtout pas dans les médias grand public. la presse est assez docile sur ce qui se passe la bas. De gros groupes très influent et très riche sont apparemment impliqués.
Niveau second degré toi aussi tu es limité. Moi je propose qu'on achète tous ses métaux rares aux chinois xomme ça plus de problèmes
Enfin un journaliste qui fait bien son travail et ne nous dit pas " on dit des terres rares car il y en a pas beaucoup..." Merci !
Les chiffres me paraissent énormes , etonnant que l'on n'en parle pas plus contrairement a d'autre situations beaucoup plus médiatisé .
Super article 👌
C'est un excellent choix de sujet si je peux me permettre. Tout à fait dans l'air du temps et qui nous concerne tous (tous = vos lecteurs), je savais 2-3 choses sur le sujet mais je n'avais jamais creusé plus que ça et c'est captivant. Vivement le prochain papier du coup!
Ca fait plaisir de voir un article qui sort de l'ordinaire ; En partie finale il aurait été bien de nous faire l'état des lieux du recyclage de high tech : ou en sommes nous en 2019 ?
Bon article, juste dommage qu'aucun passage de l'article ne parlent des exactions commises pour ces métaux et en particulier pour le Coltan. Massacres,viols, des milices payés par les multinationales brûlent les villages, tuent les bébés et les vieillards, violent et mutilent les femmes, envoyant hommes valides et enfants travailler dans les mines comme des esclaves. Mais bon article tout de même. https://www.portablesdusang.com/index.php
Très intéressant, offre du recul par rapport à la fabrication et à la consommation de smartphone d'autant que l'ensemble des métaux requiert des extractions et du raffinage conséquents. Le téléphone est loin d'être anodin pour l'environnement et TOUTES les marques chinoises (huawei, oppo, xiaomi etc..) ne fournissent aucune info quant à leurs approvisionnements et à leurs émissions de CO2.Ces marques favorisent l'essor de mines à ciel ouvert au détriment de toute norme écologique dans des conditions de travail déplorables... Je vous invite à consulter l'indice écologique greenpeace sur les constructeurs de smartphone et à lire "la guerre des métaux rares" de G.Pitron là-dessus. C'est important à mon sens de rappeler qu'un renouvellement annuel de smartphone ou dans un délai plus court encore est absolument néfaste pour la planète tant qu'aucune mesure coercitive de recyclage et de production durable n'est implémentée. Par ailleurs, la mainmise de la Chine sur ces métaux permet de comprendre l'essor des marques chinoises qui bénéficient d'un approvisionnement local à bas coût qui explique les prix cassés sur leurs téléphones. Mais à quel prix pour la planète, c'est la question principale à se poser lors d'un changement de tel. Aussi, indiquer des infos par rapport au recyclage du tel et de son potentiel allongement de cycle de vie serait une piste à explorer lors des tests et futurs articles à publier ;)
C'est sous-entendu dans la conclusion, en ouverture pour un autre papier. On a quelques idées qu'on aimerait développer sur le sujet 😉
Bravo l'article est très intéressant et très bien rédigé, donnez un CDI à Vic svp haha!
N'oublions pas le SIDA, la Coqueluche, le rhume des foins et bien évidemment l'homéopathie ainsi que l'autisme.
Commentaire aussi intéressant que l'article, merci!
Etre journaliste n'est pas quelque chose qu'on décrète, mais quelque chose qu'on démontre. Cet article le démontre amha
Merci pour cet article super intéressant 👍
Ma main a coupé ils l'ont leech
Superbe Article!
Vous êtes limité... La guerre favorise la propagation des maladies.. D'où l'épidémie Ebola persistante en centre Afrique. Le déplacement des populations à cause des attaques des milices..
Évidemment, faut bien que le pays se développe, enfin !
Quand on achète un téléphone on ne pense pas assez au fait que des enfants travaillent à leur conception et le processus est très polluant... Quand je pense qu'il y a des personnes qui changent de téléphone tous les 6 mois/tous les ans...
Merci pour cet article super intéressant qui change un peu news plus communes. Je suis chimiste et j'utilise quotidiennement des solutions composées de ces éléments. Je les savais présent dans nos produits high-tech mais pas à ce point là. Je suis pour plus d'article comme celui-ci, mélangeant, géo-politique, sciences et tech !
Les chargeurs sont de plus en plus perfectionné. On utilise le néodyme pour faire des chargeurs petit et puissant. L'or est aussi utilisé massivement pour les connecteurs externes.
Ces métaux rares sont aussi responsables de la longue guerre de pillage en centre Afrique au Congo. Guerre viol mutilation enfant soldat... Immigration massif.. Virus Ebola... Pollution en Chine....
Tu ne connais pas le sujet si tu dis qu'il n'y a de métaux rares en au Congo.. C'est l'une des raison de la guerre là-bas. Lit un peu la presse. Ou les enquêtes des ONG. Au lieu de raconter n'importe quoi
Article de qualité comme on aimerait en voir plus souvent :)
Toutafé et en plus les parents me filent du cashback !
Métaux rares responsables du virus Ebola ?!? 😳😲😳
Moi je change tous les 3 mois, c'est mieux pour filer du travail aux gosses ! 😁
Il n'y a pas de mine d'exploitation de métaux rares en Afrique ! Et les métaux rares ne causent pas le virus Ebola! _へ__(‾◡◝ )>
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