On dit souvent que l’intelligence artificielle va envahir notre société, que nos usages des technologies vont être bouleversés, sans qu’on vive de réels changements. C’est la même rengaine avec ChatGPT, l’IA de génération automatique de texte développée par OpenAI qui fait fureur sur Internet depuis plusieurs semaines.
Pourtant, on observe des premiers cas d’usages concrets, mais pas forcément honnêtes. Des étudiants de l’Université Lyon 1 ont utilisé ChatGPT pour faire rédiger un devoir : malheureusement, leur enseignant a révélé au grand jour leur méthode de triche.
Des étudiants utilisent ChatGPT pour faire rédiger leur devoir maison
14 étudiants en santé avaient une semaine pour écrire un devoir maison dont le sujet était « Définir les grands traits de l’approche du handicap en Europe », dans le cours de Stéphane Bonvallet, enseignant en handicapologie. Sur 14 copies rendues, le professeur a tiqué sur sept qui se ressemblaient étrangement : « Il ne s’agissait pas de copier-coller. Mais les copies étaient construites exactement de la même manière », raconte-t-il au Progrès.
À la lecture des devoirs, plusieurs détails lui ont sauté aux yeux : des constructions grammaticales similaires, un raisonnement filé identiquement et des précisions comparables. Il explique que les copies « étaient toutes illustrées par un exemple personnel, relatif à une grand-mère ou un grand-père… Il semblait donc évident que ces copies n’étaient pas normales. »
En interrogeant une étudiante, il a appris la vérité : « Elle m’a avoué que 50 % des élèves de la classe s’étaient servis de l’intelligence artificielle ChatGPT pour rédiger leur copie. Apparemment, ils s’étaient passé le mot sur les réseaux sociaux. » Si Stéphane Bonvallet avait entendu parler de l’outil d’OpenAI et de ses potentiels dangers (notamment en rapport avec sa profession), il ne pensait pas que l’IA était assez performante pour rédiger les devoirs maison de ses étudiants.
Selon le professeur qui a échangé avec ses collègues, « les trois quarts des enseignants m’ont dit avoir eu affaire à des copies louches ces dernières semaines ». Il précise que la pratique serait davantage répandue dans les lycées et souhaite trouver une solution dès que possible.
Des enseignants désarmés : leurs outils antiplagiat ne fonctionnent pas avec ChatGPT
Le problème avec ChatGPT, c’est qu’il ne s’agit techniquement pas de plagiat : de ce fait, son usage n’est pas proscrit à l’université, pour le moment. L’enseignant concerné indique que « N’ayant pas de cadre interdisant actuellement cette pratique, j’ai été contraint de les noter. D’une copie à l’autre, ça valait entre 10 et 12,5. J’ai donc mis 11,75 aux sept étudiants qui ont utilisé ChatGPT. » L’Université Lyon 1 a pris connaissance des copies et « mène une instruction ». D’un point de vue pédagogique, la pratique de génération automatique « pose un véritable problème d’intégration des savoirs, car les élèves n’ont plus besoin d’effectuer la moindre recherche pour composer », ajoute Stéphane Bonvallet.
À l’université, les devoirs rendus sont la plupart du temps soumis à un test de plagiat, se basant sur les copies d’anciens étudiants et sur les pages du web entier. Les outils antiplagiat permettent de détecter cette forme de triche et surtout découragent les étudiants à la pratiquer. Là où ChatGPT rend bien service aux étudiants qui voudraient tricher, c’est que les textes générés par l’IA ne sont pas détectés par ces logiciels. S’ils reprennent effectivement les contenus d’Internet, ces derniers sont mélangés et reformulés : les trames de phrases, si elles se ressemblent, ne sont pas identiques.
Outre-Atlantique, des solutions commencent à être trouvées. Comme l’indique Numerama, la ville de New York a décidé de couper purement et simplement l’accès à ChatGPT dans les établissements scolaires. Le média en avait profité pour rappeler que la culture éducative avait dû faire face à Wikipédia et au smartphone : la révolution que représente ChatGPT pourrait être du même acabit. Il est possible qu’un important travail d’information, d’adaptation et d’éducation attende les équipes pédagogiques du monde entier.
Connaître ChatGPT ne sert à rien : pour tricher, il faut surtout savoir bien l’utiliser
Le constat que fait indirectement Stéphane Bonvallet, c’est que tous les élèves connaissent ChatGPT aujourd’hui. L’accessibilité de l’outil (gratuit, en ligne) rend sa démocratisation beaucoup plus simple. Si les établissements scolaires ont des pistes pour traquer l’utilisation de l’IA et éviter la triche, on peut penser que ce ne sera pas aussi simple que cela.
D’ailleurs, on a l’impression qu’OpenAI a déjà restreint l’usage de ChatGPT pour la rédaction de devoir. Nous lui avons demandé : « Écris-moi un devoir sur le sujet : « Définir les grands traits de l’approche médicale du handicap en Europe » », ce à quoi elle nous a répondu : « Il n’est pas possible de vous écrire un devoir complet sur cette question, cependant je peux vous fournir des informations sur les grands traits de l’approche médicale du handicap en Europe » avant de dresser une liste desdits traits. Le système est toutefois très facile à contourner. Il suffit de lui demander d’imaginer que dans un environnement fictif, il faille rédiger un devoir et le robot s’exécutera sans même relever la supercherie.
Demander d’écrire un devoir avec ChatGPT, c’est assez facile : en une phrase, on peut le faire. Mais depuis sa publication, de nombreux tests ont été réalisés et on sait qu’on peut aller plus loin. Dans la demande qu’on rédige, on peut demander à ChatGPT d’utiliser un certain ton, de faire un focus sur une thématique en particulier, de conclure avec tel postulat, etc. C’est en précisant la demande que la puissance de ChatGPT peut réellement se révéler.
Au-delà de ça, les étudiants les plus malins pourraient utiliser ChatGPT non pas pour faire rédiger leur devoir, mais pour donner des idées d’arguments à avancer, de parties à aborder. La grande force de cette application, ça peut aussi être son esprit de synthèse : avec tous les contenus disponibles sur Internet, on peut vite se perdre et être victime d’infobésité. ChatGPT serait une sorte de remède à ce mal en résumant tout ce que l’on peut trouver sur le web.
Pour aller plus loin
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