Siri vous écoute en secret ? Apple attaqué en justice en France

 
Poursuivi depuis des années par l’affaire des écoutes humaines d’enregistrement Siri, Apple doit aujourd’hui faire face à une plainte au pénal en France.

Mise à jour le 15 février : Apple rappelle ses engagements pris en 2019 concernant l’affaire Siri.

En août 2019, Apple a annoncé suspendre son programme de notation de Siri. La firme affirme alors que seuls 0,2% des requêtes Siri et leur transcription ont été traitées et conservées. Selon Apple, les données traitées par Siri ne permettent pas d’identifier les utilisateurs : chaque appareil générant un identifiant alphanumérique, unique et anonyme.

L’entreprise rappelle par ailleurs avoir annoncé, en août 2019, des changements importants dans le fonctionnement de Siri, en rendant, notamment, la participation au programme d’amélioration du logiciel optionnelle, et en cessant de conserver les enregistrements déclenchés de manière accidentelle.

Le symbole est fâcheux pour d’Apple. Alors que l’entreprise se présente comme respectueuse de la vie privée, elle fait aujourd’hui face à une affaire explosive dans l’Hexagone.

Comme l’ont révélé Le Monde et Radio France, l’affaire des « écoutes » d’enregistrements Siri vaut à la firme un signalement auprès du procureur de la République et une plainte pour violation de la vie privée, traitement illicite des données personnelles et pratique commerciale trompeuse.

Des informations très personnelles

Similaire à la bataille qui vient de se régler aux États-Unis, la plainte portée par la Ligue des Droits de l’Homme en France s’appuie sur le travail d’un lanceur d’alertes qui a un temps travaillé pour un sous-traitant d’Apple.

Embauché comme data analyst en 2019 par la société Globe Technical Services, Thomas Le Bonniec se retrouve à devoir consulter, corriger et étiqueter certains enregistrements Siri pour améliorer l’efficacité de l’assistant vocal d’Apple. Un travail d’écoute humaine longtemps passé sous les radars, bien qu’inscrits dans les conditions générales d’utilisation du service. Alors que l’affaire des « écoutes » fait déjà parler d’elle à ce moment-là, Thomas Le Bonniec s’inquiète rapidement des informations personnelles contenues dans ces enregistrements souvent accidentels.

La nouvelle animation Siri // Crédit : Apple

« Il y a des moments banals, choquants ou gênants où vous entendez des choses très intimes, voire violentes, qu’on ne partage pas avec des inconnus. Des conversations où il est question de données de santé, comme quelqu’un qui parle de sa sclérose en plaques ou d’une fausse couche. On entend aussi des opinions politiques ou syndicales », indique l’homme à Radio France. Il quitte définitivement son emploi après l’écoute d’un enregistrement évoquant les fantasmes pédophiles d’un utilisateur.

Une entorse au RGPD ?

Plus que les écoutes en elle-même, c’est les conditions dans lesquelles elles sont opérées qui pousse Thomas Le Bonniec à tirer la sonnette d’alarme. En évitant au maximum d’étiqueter les fichiers reçus comme « enregistrements accidentels », l’entreprise multipliait ainsi « le volume d’enregistrements clandestins, mais traités par le groupe Apple et son prestataire », indique le lanceur d’alerte.

Pour ne rien arranger, ces enregistrements étaient parfois accompagnés de données personnelles stockées sur l’appareil, comme « les contacts, la géolocalisation, la musique, les films », indique celui qui a gardé de nombreuses captures d’écrans et documents relatifs à son travail d’écoute.

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Interrogé au sujet de la plainte, Apple assure que « les données Siri n’ont jamais été utilisées pour créer des profils marketing et n’ont jamais été vendues à qui que ce soit, à quelque fin que ce soit » et ajoute avoir « déjà, traité les préoccupations concernant la notation par des tiers en 2019 ». La LDH estime malgré tout que cette pratique, dont le fonctionnement n’a pas clairement été expliqué aux utilisateurs et utilisatrices de l’assistant vocal, est contraire au RGPD.


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