Le choc passé, l’heure est à l’analyse
Difficile de cacher notre inquiétude face au retour de Donald Trump à la Maison-Blanche. Pourtant, au-delà de nos craintes, il nous faut maintenant analyser lucidement ce que cette élection signifie pour l’avenir de la technologie américaine.
Car si ce résultat n’est pas celui qu’une grande partie de la Silicon Valley et du monde espérait, il va falloir composer avec cette nouvelle réalité pendant au moins quatre ans.
Le secteur technologique se réveille donc avec la gueule de bois, mais pas uniformément. Certains, comme Elon Musk, célèbrent leur victoire, tandis que d’autres commencent à mesurer l’ampleur des défis qui les attendent. Cette division reflète une fracture plus profonde au sein même de la Silicon Valley, longtemps bastion progressiste qui montre aujourd’hui un visage plus contrasté.
Le précédent Huawei : une guerre technologique aux lourdes conséquences
Le premier mandat de Trump nous a déjà donné un avant-goût de sa vision des relations technologiques internationales. L’affaire Huawei reste dans toutes les mémoires : en mai 2019, l’administration Trump plaçait le géant chinois sur liste noire, lui interdisant l’accès aux technologies américaines. Une décision qui a bouleversé l’industrie des semi-conducteurs et redessiné les chaînes d’approvisionnement mondiales.
Quatre ans plus tard, les conséquences de cette décision continuent de se faire sentir. Huawei, autrefois leader mondial des smartphones, a vu ses parts de marché s’effondrer hors de Chine. Mais cette politique a aussi accéléré la volonté chinoise d’autonomie technologique, poussant Pékin à investir massivement dans ses propres capacités de production de semi-conducteurs. Un effet boomerang.
Le jeu dangereux d’Elon Musk
L’alliance entre Donald Trump et Elon Musk mérite qu’on s’y attarde. Le patron de Tesla, SpaceX et X a joué un rôle essentiel dans cette élection, transformant la plateforme anciennement connue sous le nom de Twitter en véritable machine de guerre pro-Trump.
Les chiffres sont éloquents : selon plusieurs études, la désinformation sur X a augmenté de 250 % depuis le rachat par Elon Musk, avec une nette orientation favorable à Donald Trump. La suppression de nombreux mécanismes de modération et le retour d’utilisateurs bannis ont créé un environnement propice à la propagation de théories du complot et de fake news.
X (Twitter) : quand le réseau social devient arme politique
L’influence de X dans cette élection ne peut être sous-estimée. Contrairement à 2020, où Twitter avait joué un rôle de modérateur (notamment en signalant les fake news), la plateforme sous Elon Musk est devenue un amplificateur sans filtre du message trumpiste. Les algorithmes ont été modifiés pour favoriser certains contenus, tandis que les voix critiques se voyaient systématiquement réduites au silence.
Cette transformation d’un réseau social important en outil de propagande pose des questions fondamentales sur la régulation des plateformes numériques. Si même Facebook maintient encore une façade de neutralité, X a clairement choisi son camp, ce qui créé un dangereux précédent.
La guerre des puces : un nouvel ordre mondial
La rivalité technologique avec la Chine va probablement s’intensifier sous ce nouveau mandat Trump. Les restrictions sur l’exportation des semi-conducteurs, déjà sévères sous Biden, pourraient atteindre de nouveaux sommets. Mais cette fois, la Chine est mieux préparée.
SMIC, le plus grand fabricant chinois de puces, a déjà démontré sa capacité à produire des processeurs 7 nm malgré les sanctions. Une prouesse technique qui montre les limites des restrictions américaines. Le risque est réel de voir émerger deux écosystèmes technologiques parallèles et incompatibles, un scénario « guerre froide 2.0 » que personne ne souhaite vraiment.
L’immigration qualifiée en danger
L’une des forces de la Silicon Valley a toujours été sa capacité à attirer les meilleurs talents du monde entier. Les restrictions sur les visas H-1B durant le premier mandat Trump avaient déjà créé des difficultés pour les entreprises tech. Avec sa rhétorique anti-immigration encore plus dure cette fois-ci, le secteur craint une véritable pénurie de talents, particulièrement dommageable dans des domaines comme l’IA où la compétition mondiale fait rage.
Google, Microsoft, Apple… ces entreprises comptent des dizaines de milliers d’employés étrangers hautement qualifiés. Leur capacité à recruter et retenir ces talents sera directement impactée par les futures politiques migratoires de l’administration Trump.
Les autres GAFA dans la tourmente
Si Elon Musk sort grand vainqueur de cette élection, d’autres géants de la tech pourraient payer cher leur manque d’enthousiasme envers Trump. Google, déjà dans le viseur pour ses supposés « biais anti-conservateurs« , risque des représailles. Les menaces de poursuites antitrust, déjà présentes sous Biden, pourraient être utilisées comme levier politique.
Meta (Facebook) cherche à trouver sa place, avec Zuckerberg qui multiplie les signes d’apaisement envers Trump. Une stratégie compréhensible quand on se souvient des pressions subies lors du premier mandat.
L’Europe comme contrepoids ?
Face à cette nouvelle donne américaine, l’Europe pourrait émerger comme un acteur clé de la régulation technologique mondiale. Le RGPD a déjà montré que l’UE pouvait imposer ses standards au niveau global. Avec le DSA et le DMA, elle dispose maintenant d’un arsenal complet pour encadrer les géants du numérique.
Pour aller plus loin
Comment l’UE veut mettre fin aux abus des géants d’Internet, les « Gamam »
La divergence probable entre les approches européenne et américaine en matière de régulation tech (IA, protection des données, modération des contenus) pourrait créer des tensions transatlantiques, mais aussi des opportunités pour les entreprises européennes.
La menace Taïwan : une bombe à retardement pour la tech mondiale
Ne tournons pas autour du pot : Taïwan est une véritable bombe à retardement pour l’industrie technologique mondiale.
TSMC n’est pas juste une entreprise parmi d’autres, c’est l’usine du monde des semiconducteurs avancés.
Une aggravation des tensions avec la Chine, que Donald Trump risque d’alimenter avec sa rhétorique agressive, pourrait avoir des conséquences catastrophiques.
Imaginons un instant : une simple interruption de production chez TSMC, et c’est toute l’industrie mondiale qui se retrouve paralysée.
Les tentatives de construire des usines aux États-Unis ou en Europe ? Trop peu, trop tard. La réalité est brutale : nous avons mis tous nos œufs dans le même panier, et ce panier se trouve dans l’une des zones les plus instables géopolitiquement.
Le protectionnisme de Trump : un suicide économique ?
Soyons clairs : la politique commerciale de Trump est dangereusement déconnectée de la réalité de l’industrie tech. Des droits de douane à 60 % sur les importations chinoises ? C’est totalement irréaliste.
Un iPhone traverse une dizaine de frontières avant d’arriver dans nos poches. Les chaînes d’approvisionnement sont tellement imbriquées qu’essayer de les démêler brutalement revient à jouer au Jenga avec l’économie mondiale.
Le « Made in America » à tout prix, c’est sympa en slogan, mais dans la réalité, ça signifie des prix qui explosent et une innovation qui ralentit.
La victoire de Trump marque peut-être la fin d’une époque pour la Silicon Valley. L’âge d’or où la tech américaine régnait sur un internet mondial unifié touche à sa fin. À la place, nous nous dirigeons vers un monde numérique fragmenté, où la géopolitique prime sur l’innovation.
L’ironie, c’est que cette politique « America First » risque surtout d’affaiblir l’Amérique. Pendant que Donald Trump s’enferme dans son protectionnisme, la Chine accélère sa montée en puissance technologique et l’Europe pose les bases d’une régulation équilibrée. La vraie question n’est plus de savoir si la tech américaine va souffrir, mais combien de temps il lui faudra pour s’en remettre.
Les quatre années qui viennent vont être mouvementées. Entre les tensions avec Taïwan, la guerre commerciale avec la Chine et un patron de Tesla et X qui joue les apprentis sorciers avec la démocratie…
Bitcoin : la crypto-monnaie jubile
Le Bitcoin a explosé dès l’annonce de la victoire de Donald Trump,. Pas étonnant : Donald Trump, qui qualifiait autrefois les cryptos de « potentielle catastrophe« , s’est transformé en leur plus fervent défenseur. Son revirement n’est pas innocent : les groupes pro-crypto ont injecté des millions dans sa campagne. Et ça a payé. Sa promesse de licencier Gary Gensler de la SEC, le cauchemar des crypto-bros, a fait grimper le Bitcoin de 25 % en une nuit.
Mais attention au revers de la médaille. Donald Trump a lancé sa propre plateforme crypto, World Liberty Financial, avec ses tokens WLFI. Sur 20 milliards de tokens, seul 1 milliard a été vendu. Vous voyez où on veut en venir ? Un président des États-Unis qui possède sa propre crypto-monnaie, c’est un conflit d’intérêts monumental.
Quand Donald Trump promet de « libérer » le secteur crypto, il ne parle pas que de Bitcoin. Il prépare le terrain pour son propre business. Et pendant que tout le monde s’extasie sur le cours du Bitcoin, personne ne semble s’inquiéter du mélange explosif entre pouvoir politique et spéculation financière. La dernière fois qu’un président a mélangé ses intérêts privés et la politique monétaire… Non, en fait, ça n’est jamais arrivé. C’est du jamais vu, même pour Donald Trump.
Environnement : le grand retour en arrière
Les déclarations de Trump sur l’environnement donnent froid dans le dos. « Le réchauffement climatique ? Une demi-centimètre en 400 ans« , a-t-il déclaré récemment, balayant d’un revers de main des décennies de recherches scientifiques. Cette position n’est pas juste absurde, elle est dangereuse pour l’industrie tech.
L’Inflation Reduction Act de Biden, avec ses 369 milliards de dollars d’investissements verts, avait créé une vraie dynamique dans la Silicon Valley. Des startups aux géants de la tech, tout le monde s’était mis au vert. Tesla n’est plus seul : Intel, Microsoft, Google, tous ont fait des investissements massifs dans les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique. Meta a même dû renoncer à un nouveau centre de données faute de pouvoir garantir son approvisionnement en énergie verte.
Mais Donald Trump a déjà annoncé la couleur : tout ça, c’est fini. « La plus grande menace n’est pas le réchauffement climatique… c’est le réchauffement nucléaire« , a-t-il déclaré dans une interview avec Elon Musk. Une déclaration qui serait risible si elle ne venait pas du futur président des États-Unis. Et le plus inquiétant ? Même Elon Musk, supposé champion de la transition énergétique, n’a pas bronché.
Les conséquences pour la tech sont concrètes. Les data centers, qui représentent déjà 2 % de la consommation électrique américaine, vont voir leur empreinte carbone exploser avec le boom de l’IA. Sans incitations à l’énergie verte, c’est toute la stratégie environnementale du secteur qui est remise en question. Amazon peut dire adieu à son objectif de 100 % renouvelable d’ici 2025.
Le plus absurde ? Cette position anti-environnementale va à l’encontre des intérêts économiques américains. Pendant que Trump nie le changement climatique, la Chine est devenue le leader mondial des batteries, des panneaux solaires et des voitures électriques. Elle domine déjà 70 % de la chaîne de valeur des technologies vertes. Maintenir cette politique du déni, c’est garantir que les États-Unis rateront la prochaine révolution industrielle.
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