C’était un texte qui faisait craindre le pire aux associations de défenses des libertés numériques. En discussion depuis 2022, le règlement « établissant des règles en vue de prévenir et de combattre les abus sexuels sur enfants » devait permettre aux autorités nationales de jeter un coup d’œil sur les messages partagés via les applications type WhatsApp ou Signal, afin de détecter d’éventuels contenus pédopornographiques. Il a été abandonné le 20 juin par le conseil de l’Union, faute de majorité qualifiée prête à valider ces mesures, raconte Politico.
Il faut dire que la proposition a provoqué l’ire de nombreuses entreprises, associations et élus. Une lettre ouverte signée par la fondation Mozilla, Proton, Surfshark et d’autres dénonçaient une mesure susceptible de créer « des failles capables d’être utilisées par des acteurs tiers » et, sous-entendu, mal intentionnés. Meredith Whittaker, présidente de la fondation Signal, avait carrément mis la survie de son application de messagerie dans la balance.
Un répit de courte durée
C’est cependant la position d’élus allemands, autrichiens, polonais et tchèques qui aura scellé l’avenir du texte, bon nombre de ceux-là ne voulant pas du texte ou comptait s’abstenir. La France quant à elle a tenu une position ambiguë sur le dossier, affirmant qu’il fallait à la fois « lutter contre ce fléau abominable » qu’est la pédocriminalité, tout en garantissant que ce dispositif « n’affaiblira pas le chiffrement ». Une position technologiquement difficile à tenir.
Pour aller plus loin
N’en déplaise à Gérald Darmanin, les messageries chiffrées ont de beaux jours devant elles
Patrick Breyer, élu européen et membre du parti Pirate, a célébré dans un communiqué de presse une « immense victoire en faveur de la vie privée numérique » face à une volonté d’imposer « un contrôle totalitaire et aveugle sur les messageries instantanées ». Mais comme le relève l’élu, les réjouissances pourraient être de courte durée. « Pour l’instant, les partisans de la surveillance […] n’ont pas réussi à obtenir une majorité qualifiée. Mais ils n’abandonneront pas et pourraient bien retenter leurs chances dans les prochains jours. »
La proposition portée par la présidence belge de l’UE a effectivement été mise au placard, mais la Hongrie, qui s’apprête à prendre la tête du conseil, pourrait bien la remettre au programme. Le pays a déjà annoncé vouloir mettre « la politique familiale » au cœur de son mandat avec justement une reprise des discussions sur les problèmes de numérique et de pédocriminalité. La bataille n’est donc pas finie.
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