LeEco : comment un géant chinois est sur le point de s’effondrer, seulement six ans après s’être élevé

 
Bien qu’elle ne soit pas présente officiellement en France, LeEco est l’un des fleurons de la technologie chinoise. En proposant des services très diversifiés, l’entreprise s’est fait un nom parmi les grands. Mais suite à des investissements trop importants, elle fait face à de gros risques d’endettement. Retour sur le développement d’une marque qui a grandi trop vite, depuis son entrée en bourse il y a six ans.
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Imaginez : vous êtes un millionnaire enthousiaste et ambitieux à la tête d’une grande entreprise technologie. Ça donne envie, n’est-ce pas ? Permettez-moi maintenant de vous poser une simple question. Dans un tel scénario, seriez-vous du genre à investir votre argent tous azimuts pour faire grandir votre business ou seriez-vous plutôt du genre prudent en ne misant gros que sur le cœur d’activité de votre firme ?

La question peut paraître un peu bête mais elle est essentielle dans le développement d’une entreprise. La marque chinoise LeEco nous en apporte une preuve manifeste à travers une récente déclaration de son fondateur et PDG, Jia Yueting. Dans une lettre à ses employés, ce dernier écrit : « Nous avons dépensé aveuglément, et notre demande en argent a enflé. Nous avons sur-étendu notre stratégie internationale. Dans le même temps, notre capital et nos ressources étaient en fait limités ». 

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Jia Yueting, fondateur de LeEco.

Vous l’aurez compris, LeEco a grandi trop vite et risque aujourd’hui l’endettement. Autrement dit, l’entreprise paie le contrecoup de ses grandes ambitions. Si d’aucuns pourraient critiquer le trop-plein d’arrogance de son patron, d’autres pourraient se sentir pleins d’empathie pour ce riche passionné qui fait aujourd’hui face à une cruelle désillusion. Car jusqu’ici, LeEco, c’était une belle histoire, pleine d’optimisme mais qui risque de se terminer comme la célèbre fable de La Fontaine : La Grenouille qui se veut faire aussi grosse que le Bœuf.

 

Ascension fulgurante

Créée, en 2004, sous le nom de LeTV, l’entreprise connait un développement fulgurant. « L’une des croissances les plus rapides et flamboyantes jamais vues dans le milieu de la technologie en Chine », écrit The Verge. Et pour cause, après plusieurs années sans connaître de véritable succès avec sa plateforme sVOD semblable à Netflix, sa popularité grimpe tout d’un coup en flèche grâce à la production de contenus exclusifs.

En 2010, LeTV entre en bourse sous le nom de Leshi Internet Information & Technology Corp. Ce n’est que début 2016, en partant à la conquête des marchés occidentaux, que la marque se fera appeler LeEco, diminutif de Le Ecosystem. Entretemps, elle investira à foison dans divers secteurs (trop) variés.

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Historique non exhaustif de LeEco.

 

Réputé pour ses bons smartphones

Il est vrai que LeEco est essentiellement connu pour ses smartphones. Les terminaux de la marque chinoise bénéficient d’une bonne réputation même s’ils ne sont officiellement pas disponibles en France. On peut ainsi mentionner Le Max Pro dévoilé en début d’année lors du CES qui était le premier appareil à embarquer le Snapdragon 820 de Qualcomm. Ce dernier était aussi le tout premier à intégrer un capteur Snapdragon Sense ID.

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Plus récemment, la marque dévoilait le Le Pro 3 avec un Snapdragon 821 (comme sur les Google Pixel ou le OnePlus 3T) vendu à partir de 240 euros. LeEco se démarque aussi pour adopter une stratégie similaire à Apple en supprimant le port jack 3,5 mm. Sur Le 2, LeEco, Le Max 2 et le Pro 3, le branchement d’un casque audio se fait via l’entrée USB.

La branche dédiée au secteur du smartphone n’est pas celle à blâmer pour les difficultés rencontrées par l’entreprise chinoise. Baptisée LeMobile, ladite branche aurait vendu plus de 5 millions de terminaux en seulement un an, si l’on en croit les chiffres avancés par Phone Radar.

 

Des comptes minés par trop d’investissements

Mais à trop vouloir créer et maîtriser son propre écosystème, basé sur Android, LeEco s’est perdu en chemin et a fini par se noyer sous des investissements trop risqués et une gamme de produits bien trop diversifiée pour une entreprise si jeune. On vous rappellera à ce titre que les plus grands conglomérats technologiques (Google, Samsung…) se sont construits en plusieurs décennies.

LeEco, pour sa part, a vu trop grand, trop vite. Un tour sur le site officiel de la marque permet de se rendre compte qu’en plus du service sVOD et des smartphones, l’entreprise s’était également lancé — entre 2010 et 2016 — sur le marché des TV connectées, des casques sans fil, des voitures autonomes et même des vélos traqueurs d’activité.

Bien sûr, il est très certainement possible de constituer un empire en si peu de temps. Sauf que la multiplication rapide des activités de LeEco s’est faite par le biais de dépenses faramineuses pour une si jeune entreprise, qui a déboursé sans compter. Ainsi, le rachat de Vizio, fabricant américain de téléviseurs LCD, a coûté 2 milliards de dollars. Le prix de la conception du prototype de voiture autonome et électrique, LeSee, censée concurrencer Tesla, s’élève quant à lui, à 1,5 milliard de dollars.

 

Les États-Unis, trop gros morceau ?

Il est intéressant de voir que les plus importantes sommes ont été dépensées dans le but de conquérir le marché américain. La TV connectée et la voiture de LeEco ont en effet été dévoilées lors du lancement de la marque sur les terres outre-Atlantique.

Sauf que dépenser beaucoup d’argent ne suffit pas forcément à se faire une place aux États-Unis, terrain ô combien difficile à séduire pour les marques chinoises qui n’ont pas encore acquis un niveau de confiance suffisant auprès de l’Oncle Sam — ZTE peut confirmer.

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Quelles perspectives d’avenir ?

Abandonner ses activités superflues n’est bien sûr pas la solution pour LeEco car cela équivaudrait purement et simplement à jeter de l’argent par les fenêtres. Néanmoins, il ne serait pas étonnant de voir que l’entreprise décide de mettre entre parenthèses son ambition de concurrencer les grands acteurs du marché des voitures autonomes.

Côté smartphone, il est difficile de savoir si LeEco va se contenter des marchés déjà conquis ou si l’entreprise va quand même tenter le tout pour le tout et continuer son expansion dans ce secteur fructueux. On attend ainsi la marque en Europe.

Pour faire amende honorable, le PDG Jia Yueting, a annoncé réduire son salaire à 1 yuan, soit 13 centimes d’euros. Son patrimoine net étant estimé à 6 milliards de dollars, cette mesure temporaire ne devrait pas être trop difficile. En revanche, ses salariés disposent d’un matelas bien moins confortable que leur patron. Et si ce dernier tentera sans doute de maintenir l’optimisme des premières heures, la motivation des équipes de LeEco sera sûrement altérée.

La marque chinoise a toujours promis un écosystème complet, des technologies de rupture et des prix cassés. Ce leitmotiv sera mis à rude épreuve dans les prochains mois.

Et vous, pensez-vous que LeEco pourra se relever ?


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