L’affaire aura donc duré 10 ans. Dans un communiqué de presse inattendue, la cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) a indiqué ce 10 septembre 2024 qu’Apple allait bien devoir rembourser les 13 et quelques milliards d’euros que la Commission européenne lui réclamait depuis 2014. Un sévère coup sur la tête pour Apple, mais surprenamment aussi pour l’Irlande qui avait fait de ce montage financier un argument d’attractivité fiscale.
Rembobinons un instant. En 2014, le New York Times révèle qu’Apple évite des milliards de dollars d’impôts en installant des branches de son entreprise dans des paradis fiscaux comme le Luxembourg, les îles vierges britanniques ou l’Irlande donc. Plutôt que de payer les 12,5 % d’impôts réclamés aux sociétés irlandaises, Apple en payait moins de 1 % grâce à un duo d’accords signés en 1991 et 2007.
La fin du « double irlandais »
La situation était rendue possible grâce à un astucieux montage fiscal justement surnommé « double irlandais » et que bon nombre d’autres entreprises du web ont exploité (Google, Facebook et Microsoft en tête). Sentant le vent tourner, l’Irlande a mis fin à ce régime fiscal en 2015 et la Commission européenne est partie à l’attaque pour réclamer à Apple ce qu’elle estimait être d’importants arriérés d’impôts. 13 milliards, plus les intérêts exactement.
S’en est suivi une bataille homérique de 10 ans où Apple et Bruxelles se sont affrontés devant de nombreuses instances de justice européenne, gagnant des manches à tour de rôle jusqu’en 2020. Cette année-là, le Tribunal de l’Union avait semblé mettre un terme au débat, estimant qu’Apple n’avait pas à rembourser l’Irlande en raison des règles un peu trop floues de l’UE sur le sujet.
C’était sans compter sur la cour de justice de l’UE donc, plus haute juridiction de l’union, qui a estimé que « le Tribunal a commis des erreurs » en se fondant sur « des appréciations erronées sur l’imposition normale en vertu du droit fiscal irlandais ». Cette fois-ci, plus moyen d’y échapper, Apple devra donc payer pour rembourser « l’aide illégale » dont elle a profité.
10 % des bénéfices annuels d’Apple
Expliquant être « déçu » par cette décision, Apple a tout de même précisé à l’AFP que « cette affaire n’a jamais porté sur le montant des impôts que nous payons, mais sur le gouvernement auquel nous sommes tenus de les payer. Nous payons toujours tous les impôts dont nous sommes redevables, quel que soit l’endroit où nous exerçons nos activités, et il n’y a jamais eu d’accord particulier ». Manifestement, la CJUE ne l’a pas vu de cet œil.
Pour aller plus loin
394,3 milliards de dollars : comment Apple gagne autant d’argent
Même pour Apple, 13 milliards d’euros constituent une petite somme, puisque cela représente un peu plus de 10 % des bénéfices annuels de l’entreprise. Gageons qu’en 10 ans, la firme a eu le temps de mettre les sous de côté en cas de coup du sort, mais symboliquement, l’UE frappe fort et envoie un signal clair aux autres entreprises qui seraient tentées de jouer avec les règles fiscales des 27.
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