94 % contre Tesla puis retournement brutal : pourquoi ce sondage fait scandale

 
Elon Musk divise l’Allemagne. Un sondage qui donnait Tesla presque morte a soudain changé de direction grâce à ses fans. Simple riposte ou manipulation organisée ?
Tesla Model Y 2025 // Source : Robin Wycke pour Frandroid

Samedi dernier, 14 mars, Tesla fait la une en Allemagne : un sondage en ligne de t-online.de révèle que 94 % des 100 000 premiers votants ne veulent plus acheter de Tesla.

La nouvelle fait le tour des rédactions, reprise par la presse allemande et internationale, dont nous.

« Tesla est fini en Allemagne », titre-t-on, en pointant du doigt la chute vertigineuse des ventes (-70 % en 2025) et les frasques d’Elon Musk, accusé d’avoir terni l’image de la marque avec son soutien à l’AfD et ses dérapages publics.

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Mais quelques jours plus tard, surprise : avec 300 000 votes supplémentaires, les résultats s’inversent radicalement, passant à près de 45 % de « oui » pour Tesla. Que s’est-il passé ? Derrière ce retournement, des soupçons de manipulation émergent, et les réseaux sociaux allemands sont en ébullition.

100 000 votes anti-Tesla : un raz-de-marée organisé ?

Dès sa mise en ligne, le sondage « Würden Sie noch einen Tesla kaufen ? » (Achèteriez-vous encore une Tesla ?) attire une foule record pour t-online.de.

Les 100 000 premières réponses, collectées en un temps éclair, affichent un rejet massif : seuls 3 % envisagent encore un achat.

Ce résultat coïncide avec une vague de mécontentement envers Elon Musk, dont les prises de position pro-AfD et les gestes controversés (comme son salut jugé provocateur lors de l’investiture de Trump) ont scandalisé une partie de l’opinion allemande.

Sur X et Facebook, des appels à voter « non » circulent rapidement dans des groupes anti-Musk et des forums écolos critiques de Tesla.

« Elon Musk a voulu jouer au politique, maintenant il récolte ce qu’il a semé. Allez voter sur t-online ! ». Certains soupçonnent même des bots ou des militants organisés, vu la vitesse à laquelle ces votes se sont accumulés. Pourtant, aucune preuve tangible d’une campagne coordonnée n’a encore été mise au jour – juste une colère palpable, amplifiée par les gros titres.

La contre-attaque des fans de Tesla

Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Face à cette claque médiatique, les pro-Tesla se réveillent. Sur X, des comptes influents, souvent liés à la communauté des investisseurs ou des propriétaires de Tesla, lancent une contre-offensive.

« Le sondage de t-online est truqué par les haters de Musk, allez voter oui pour montrer la vérité ! », peut-on lire. Des groupes Facebook comme Tesla Fahrer und Freunde relaient le lien avec un mot d’ordre : « Sauvons l’honneur de Tesla ! ».

En quelques jours, 300 000 nouveaux votes affluent, faisant grimper la proportion de « oui » à près de 45 %. Sur le forum Aktienforum, un membre jubile : « 44,9 % disent oui, les anti-Tesla ont perdu ! » Cette mobilisation éclair soulève des questions : s’agit-il d’une réaction spontanée ou d’une opération orchestrée ? Certains pointent du doigt la facilité d’accès au sondage – ouvert à tous, sans restriction géographique ni limite de votes par IP –, ce qui rend ce type de « brigadage » presque inévitable.

Une guerre d’opinion en ligne

Les réseaux sociaux allemands deviennent le théâtre d’un affrontement acharné. D’un côté, les détracteurs de Tesla accusent les fans de manipuler le sondage pour masquer une réalité : la marque perd du terrain en Allemagne, avec des ventes en chute libre et une image abîmée par Musk.

« Ils peuvent voter autant qu’ils veulent, ça ne change pas les -70 % de 2025 », raille un internaute sur Reddit. De l’autre, les supporters dénoncent une cabale médiatique anti-Tesla, amplifiée par les 100 000 premiers votes qu’ils jugent biaisés.

Sur GoingElectric.de, un forum prisé des conducteurs de véhicules électriques, un utilisateur s’interroge : « 94 % de non dès le départ, vraiment ? Ça sent le vote militant plus qu’un vrai reflet des clients ». Les deux camps s’accusent mutuellement de fausser les chiffres, ce qui transforme ce sondage en un symbole de la polarisation autour de Tesla.

Les médias pris au piège

Pendant ce temps, la presse grand public reste focalisée sur les résultats initiaux. Computer Bild ou Frankfurter Rundschau titrent sur « le boycott massif de Tesla », liant le rejet à la dérive politique de Musk, sans vraiment suivre l’évolution des votes. Quand les pro-Tesla inversent la tendance, seuls quelques sites spécialisés comme Electrek notent le phénomène, mais sans enquêter plus loin. Résultat : deux récits coexistent. Les médias traditionnels campent sur l’idée d’un Tesla en crise, tandis que les réseaux sociaux documentent une bataille de chiffres où chaque camp revendique la victoire. « C’est un cas d’école de manipulation virale », commente un analyste sur Notebookcheck.com, soulignant que les sondages en ligne, par leur nature ouverte, sont des proies faciles pour les mobilisations passionnées.

Que retenir de ce fiasco ?

Alors, manipulation ou simple reflet d’une Allemagne divisée ? Les 100 000 premiers votes anti-Tesla semblent avoir été portés par une vague spontanée de colère contre Elon Musk, peut-être dopée par des appels informels sur les réseaux.

La riposte des 300 000 votes pro-Tesla, elle, porte les marques d’une contre-attaque organisée par une communauté déterminée à défendre la marque.

Sans données techniques (comme l’analyse des IP ou des timestamps), difficile de trancher sur l’ampleur exacte des biais. Une chose est sûre : ce sondage, devenu un champ de bataille entre pro et anti-Tesla, illustre à quel point l’image de la marque est désormais un enjeu explosif, bien au-delà des simples chiffres de ventes.

Si ce sondage de t-online.de a fait grand bruit, il ne faut pas le prendre pour argent comptant. Les vrais baromètres de l’opinion, ce sont les sondages réalisés par des instituts professionnels, qui suivent des règles strictes : échantillons représentatifs, questions neutres, contrôles pour éviter les biais ou les votes multiples.

Là, on est loin du compte : un sondage en ligne ouvert à tous, sans garde-fous, c’est une invitation aux manipulations, qu’elles viennent des anti-Tesla furieux contre Elon Musk ou des fans déterminés à redorer le blason de la marque. Ces batailles de clics donnent plus une photo des passions du moment qu’une vérité sur ce que pensent vraiment les Allemands. Pour savoir si Tesla est réellement en perte de vitesse, mieux vaut attendre des enquêtes sérieuses, avec une méthodologie en béton.

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Cela dit, au-delà des sondages, le verdict viendra du terrain : les chiffres de ventes des prochains mois, notamment avec le lancement de la nouvelle Model Y. Tesla mise gros sur ce modèle repensé pour reconquérir le marché allemand, où la concurrence gagne du terrain. Si les Allemands, et plus globalement les européens, boudent vraiment la marque, on le verra dans les immatriculations : une stagnation ou une nouvelle chute confirmerait un désamour durable, polémiques ou pas.


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