« Ta commande Amazon remboursée » : tout savoir sur refund, la combine des remboursements sur Amazon, Apple Store, etc.

On vous rembourse, vous gardez le produit

 
Sur Telegram, une nouvelle génération d’escrocs propose un service clé en main : obtenir le remboursement de vos achats tout en gardant les produits. Une pratique illégale qui repose sur des technologies sophistiquées.

Vous le savez sans doute, le droit de la consommation prévoit une protection forte des consommateurs en matière de vente à distance. L’article L221-18 du Code de la consommation accorde un délai de rétractation de 14 jours pour tout achat en ligne. Cette disposition, pensée pour protéger le consommateur, est aujourd’hui détournée par les adeptes du « refund ».

Qu’est-ce que le « refund » ?

C’est une pratique de plus en plus répandue, et BFM Tech a mené une des premières enquêtes sur le sujet en interrogeant plusieurs utilisateurs. Numerama évoque aussi le sujet d’un point de vue politique.

Sur Telegram, ça promet des gains faciles. « 2000 € par semaine garantis », « Remboursements à 100 % », « Sans aucun risque ». Ces arnaques au remboursement sont appelées « refund ». Le principe ? Commander des produits chez Amazon, Apple, Carrefour, Auchan, Ebay, Microsoft, Boulanger, Dyson ou la Fnac et se faire rembourser tout en les gardant.

Les plateformes prises en charge sont nombreuses, on peut voir les modalités pour chaque site d’e-commerce

Le « refund » exploite les politiques de remboursement. Pour rappel, ces politiques prévoient des remboursements automatiques dans certaines situations comme la non-réception de colis ou les produits défectueux. Les fraudeurs détournent ces mécanismes de protection client à leur avantage.

Régulièrement, ils partagent des photos des « coups réussis »

Sur Telegram, les annonces se multiplient avec des promesses qui donnent le vertige. Les organisateurs mettent en avant des captures d’écran de transactions réussies et des témoignages de clients satisfaits. Ils ciblent particulièrement les jeunes en quête de gains rapides, en minimisant les risques légaux et en présentant leur activité comme une simple exploitation des failles du système plutôt qu’une escroquerie.

Même des plateformes comme Airbnb sont touchées

L’écosystème du « refund » s’appuie sur plusieurs technologies : des cartes bancaires virtuelles, comme celles de Revolut, pour créer des identités éphémères, des bots automatisés pour gérer les opérations à grande échelle, et des réseaux de messagerie chiffrée pour coordonner les activités. Ces outils permettent de contourner les systèmes de détection traditionnels des plateformes.

Le modèle économique

Les organisateurs de ces fraudes proposent leurs services contre une commission, généralement autour de 30 % jusqu’à 50 % du montant remboursé.

Ils prennent en charge l’ensemble du processus technique, depuis la création des comptes jusqu’à l’obtention du remboursement. Les gains peuvent atteindre plusieurs milliers d’euros par semaine, ce qui explique l’attrait pour cette pratique illégale.

Les risques pour eux

Au regard du droit pénal français, le « refund » constitue une escroquerie caractérisée. L’article 313-1 du Code pénal définit l’escroquerie comme « le fait, soit par l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit par l’abus d’une qualité vraie, soit par l’emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d’un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque« .

Les peines prévues sont sévères :

  • 10 ans et 1 million d’euros pour l’escroquerie en bande organisée
  • 5 ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende pour l’escroquerie simple
  • Jusqu’à 7 ans et 750 000 euros d’amende en cas de circonstances aggravantes

L’utilisation de réseaux Telegram et de systèmes automatisés peut même qualifier la circonstance aggravante de bande organisée. Pour rappel, la jurisprudence considère qu’il y a bande organisée dès lors qu’un groupement est formé ou une entente établie en vue de la préparation d’une ou plusieurs infractions.

Les risques pour vous

Déjà, une fois repéré, vous serez banni à vie des principales plateformes (Amazon, Zalando, Airbnb…) et vos comptes bancaires peuvent être fermés.

De plus, les organisateurs du « refund » collectent vos vraies données personnelles (identité, adresse, coordonnées bancaires) et peuvent les utiliser pour vous faire chanter. Beaucoup de clients se font arnaquer : paiement de la commission sans remboursement, vol des données bancaires, réutilisation de vos papiers pour d’autres fraudes.

Participer au « refund », même en tant que simple client, vous expose à des poursuites pour complicité d’escroquerie en bande organisée. Les sanctions sont lourdes : jusqu’à 5 ans de prison et 375 000€ d’amende. Votre casier judiciaire sera marqué à vie, bloquant votre carrière professionnelle et vos projets futurs.

D’ailleurs, les plateformes finissent souvent par détecter la fraude et exigent le remboursement total avec pénalités.

Amazon a déjà lancé des poursuites massives aux États-Unis contre ces réseaux de fraudeurs. En France, les sites de e-commerce s’équipent de nouveaux outils de détection basés sur l’intelligence artificielle. Ils partagent leurs données pour identifier plus rapidement les fraudes. « Les problèmes de remboursement sont devenus notre priorité numéro un », confie un responsable sécurité d’une grande plateforme.

Les arrestations se multiplient. En décembre 2023, la police a démantelé un réseau qui avait escroqué plus de 500 000 € à plusieurs e-commerçants. Les « clients » n’ont pas été épargnés : perquisitions, saisies des produits frauduleux, poursuites judiciaires. Certains doivent aujourd’hui rembourser des dizaines de milliers d’euros.


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