Le champion de la vie privée, Apple, sanctionné par la CNIL

 
La CNIL, l’autorité française de protection des données, a infligé une amende de 8 millions d’euros à Apple pour violation de la vie privée. Bien que ce montant soit insignifiant pour une entreprise de l’envergure d’Apple, il met en lumière une pratique controversée d’Apple concernant la vie privée de ses utilisateurs, une valeur chère à l’entreprise.
Source : Adnan Mistry sur Unsplash

C’est une mesure voulue pour le bien du plus grand nombre, mais qui a fait des dégâts à tout un marché de la publicité. En juin 2020, lors de la conférence WWDC des développeurs, Apple avait annoncé l’arrivée dans iOS 14 de l’App Tracking Transparency (ATT), une fonction imposée aux développeurs pour qu’ils obtiennent le consentement des utilisateurs de suivre et partager leurs données personnelles avec d’autres sites et services.

Imposée à des millions d’applications, il s’est avéré qu’Apple ne respectait pas sa propre règle et plus globalement la réglementation sur la protection des données personnelles. En effet, Apple diffusait de la publicité ciblée sans le consentement de ses utilisateurs. Apple a donc fait l’objet de plaintes pour pratique antitrust.

L’Autorité de la concurrence française a été saisie par plusieurs associations représentant différents acteurs de la publicité en ligne (régie internet, agence de publicité, médias, éditeurs, agences marketing mobile…). Ils contestaient alors toutes les pratiques « mises en œuvre par Apple à l’occasion des modifications à venir de son système d’exploitation iOS 14 ».

Apple reçoit une amende de 8 millions d’euros

La plainte la plus médiatisée est celle de l’association française France Digitale qui a déposé une plainte devant la CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés) pour violation des règles de l’Union européenne vis-à-vis de la confidentialité et des règles régissant la concurrence. Apple ne serait pas tenu aux mêmes exigences que les autres développeurs d’applications en matière de confidentialité et du traitement des données de suivi des utilisateurs.

Apple s’est mis en conformité, avant même que la Cnil ne se prononce sur la plainte déposée par France Digitale. Ce 4 janvier 2022, la Cnil a sanctionné Apple avec une amende de 8 millions d’euros. Un montant plus élevé que les recommandations du rapporteur du régulateur, qui a plaidé mi-décembre pour une amende de 6 millions d’euros.

C’est une annonce importante. Elle met en défaut Apple sur son créneau du respect et de la protection de la vie privée de ses utilisateurs. De plus, cela va alimenter d’autres actions antitrust contre Apple.

Un marché de la publicité qui a perdu des milliards d’euros

En effet, le marché de la publicité mobile a perdu des milliards d’euros depuis la mise en place de l’ATT. Cela a eu des conséquences négatives sur les revenus de petits éditeurs, mais aussi d’importants acteurs comme Meta (Facebook, Instagram, WhatsApp), Snapchat et ainsi de suite.

Pour vous rendre compte de l’impact de l’ATT, il s’avère que le taux de consentement est entre 50 et 60 % en France, ce qui est supérieur à celui des autres pays d’Europe pour tous types d’applications, selon des données d’Appsflyer.

Quant à Apple, ils ont développé leurs revenus publicitaires. Ils prévoient même que leurs revenus publicitaires pourraient atteindre 11 milliards de dollars en 2025.

Concernant la confidentialité, le message d’Apple depuis le début de l’année 2019 est le suivant : « Ce qui se passe sur votre iPhone reste sur votre iPhone ». S’en sont suivies plusieurs campagnes, à la TV, en affichage abribus, mais aussi sur internet, en particulier lors des keynotes d’Apple.

La question sur la protection de nos données est devenue progressivement un critère d’achat pour les consommateurs. Apple a donc tout misé sur la vie privée et assure que « ce qui est privé devrait rester privé ». Force est de constater qu’Apple n’est pas si blanc.

Apple conteste

Le responsable de la confidentialité d’Apple, Gary Davis, a contesté l’argument de la Cnil et a souligné qu’Apple était attaché à la confidentialité de ses utilisateurs. Apple a également déclaré que la plainte de France Digitale n’avait aucun fondement juridique et qu’elle était « malavisée dans son intention ».

Politico annonce qu’un porte-parole d’Apple a déclaré dans un communiqué qu’Apple était « déçu » et ferait appel de la décision : « Apple Search Ads va plus loin que toute autre plateforme de publicité numérique que nous connaissons en offrant aux utilisateurs un choix clair quant à savoir s’ils souhaitent ou non des publicités personnalisées. De plus, Apple Search Ads ne suit jamais les utilisateurs dans les applications [tierces] et sites Web et n’utilise que des données de première partie pour personnaliser les publicités ».


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