L’USB-C arrive sur l’iPhone 15 : pourquoi Apple a été contraint de changer

 
Les iPhone 15 dévoilés par Apple sont les premiers smartphones de la marque à se doter d’un port USB-C. Ils disent ainsi adieu au Lightning. Un changement que l’on doit plus à l’Union européenne qu’à la marque à la pomme.
Un câble s’approchant du port USB-C de l’iPhone 15

Ça y est ! Les iPhone 15 ont été dévoilés, les iPhone 15 Pro ont été révélés. Lors de la fameuse keynote de rentrée d’Apple. Il y a beaucoup de choses à dire autour de ces téléphones, mais l’une des grandes nouveautés que l’on retient est indéniablement l’intégration d’un port USB-C.

Certes, pendant la keynote, la marque a présenté ce changement comme une évolution logique de ses produits — sans pour autant en faire des tonnes comme nous aurions pu le craindre avant la conférence. Toutefois, cette transition n’est pas un choix qu’Apple a fait de gaieté de cœur. La pomme était très attachée à son port Lightning propriétaire sur les iPhone et c’est l’Union européenne qui lui a forcé la main avec une nouvelle loi. Permettons-nous un petit rappel des événements qui ont amené l’USB-C sur les iPhone 15, iPhone 15 Plus, iPhone 15 Pro et iPhone 15 Pro Max.

On va le voir, dans cette histoire, l’Union européenne campe le rôle de l’héroïne… ou de la méchante antagoniste selon le point de vue.

L’USB-C obligatoire en Europe

Retour en 2022. Après un petit feuilleton juridique qui anime l’été, la Commission européenne annonce le vote d’un projet de loi très important pour l’avenir de plusieurs appareils électroniques. En effet, c’est officiel depuis le début du mois d’octobre de la même année : l’USB-C va devenir le seul port de charge filaire autorisé pour plusieurs appareils, dont les smartphones, au sein de l’Union européenne.

Dès le départ, il est clair que la cible principale de la mesure est Apple, dernier constructeur majeur de smartphones à faire de la résistance face à cette connectique déjà largement adoptée par la concurrence.

Les iPhone 15 Pro et Pro Max // Source : Apple

En revanche, Apple a jusqu’à l’automne 2024 — et donc jusqu’aux iPhone 16 — pour se plier à la nouvelle réglementation européenne. Le géant de la tech ne fera finalement pas fait traîner le dossier ni le suspens en se résignant à intégrer l’USB-C dès l’iPhone 15, en 2023.

Contacté par Frandroid en 2022, le cabinet d’Alex Agius Saliba, le rapporteur européen chargé du dossier, rappelle que « l’idée d’un chargeur commun pour les téléphones mobiles et les appareils électroniques similaires n’est pas nouvelle. » Un premier protocole avait ainsi vu le jour en 2009 déjà. À l’époque, l’accord avait permis de « réduire le nombre de types de chargeurs sur le marché de 30 à 3. » À l’époque, l’objectif était centré autour du micro USB.

Quels sont les appareils concernés ?

Si l’on pense surtout aux smartphones, ces derniers sont loin d’être les seuls appareils électroniques concernés par la nouvelle directive européenne. À l’automne 2024, l’imposition de l’USB-C comme standard universel pour la charge filaire s’appliquera aussi aux produits suivants :

Un peu plus d’un an après, les PC portables seront également concernés par cette directive européenne.

Pourquoi Apple ne voulait pas de l’USB-C ?

Apple a toujours eu une position assez particulière sur l’USB-C. L’entreprise californienne a participé à l’élaboration de ce standard en tant que membre de l’organisation USB Implementers Forum. Aussi, elle l’utilisait déjà en tant que port de recharge sur certains de ses produits comme les MacBook ou les iPad — même l’iPad 10 s’y est mis. En revanche, sur ses iPhone et AirPods, la firme faisait de la résistance. Et fermement.

Par le passé, elle avait déjà défendu son port Lightning face à l’Union européenne. Apple affirmait en effet qu’obliger les constructeurs à adopter l’USB-C représentait un frein à l’innovation. Le géant de Cupertino estimait qu’une entreprise devait avoir la liberté d’utiliser le port de son choix pour pouvoir y implémenter les technologies de son choix. L’imposition d’un port de recharge universel « nuira aux consommateurs en Europe et dans le monde », selon les dires de la multinationale à l’époque.

La charge Lightning de l'iPhone 13
La charge Lightning de l’iPhone 13 // Source : Frandroid

Cet argument pouvait se défendre, mais il était mis à mal par une réalité : le Lightning se cantonnait à de l’USB 2.0 soit moins efficace sur les transferts que l’USB-C étroitement lié à des technologies plus modernes comme l’USB 4 par exemple, et même l’USB 4 2.0.

Quoi qu’il en soit, c’est pour ces raisons que, même si Apple n’était jamais explicitement cité dans le projet de loi européen, la firme à la pomme était au cœur du sujet.

Pourquoi l’Union européenne impose l’USB-C ?

L’instauration d’un standard universel et obligatoire pour la charge filaire en Europe est justifiée officiellement par deux choses. D’une part, il s’agit de simplifier la vie des consommateurs en leur permettant d’utiliser le même câble pour plusieurs appareils. D’autre part, cette initiative doit permettre la réduction des déchets liés aux nouvelles technologies.

En ayant moins de câbles à stocker chez soi, les consommateurs et consommatrices seront moins amenés à en acheter. In fine, on observerait donc une baisse de la production et de l’impact environnemental.

Le port USB-C de l’iPhone 15 // Source : Apple

Avec cette idée en tête, il était donc assez logique de se tourner vers l’USB-C. Cette connectique est déjà largement utilisée sur le marché de la Tech. Il est donc plus simple de l’imposer comme le standard universel.

Dans sa keynote de rentrée en 2023, Apple cite justement cet avantage en le reprenant à son compte en indiquant qu’on peut utiliser le même câble pour recharger les iPhone 15 et les nouveaux AirPods Pro qui goûtent aussi à l’USB-C. Un argument écoresponsable fait pour séduire Dame Nature personnifiée par l’excellente actrice Octavia Spencer dans un sketch intéressant par sa démarche, mais un peu gênant tant la séquence transpire le greenswashing.

Pourquoi Apple a cédé face à l’UE ?

Même après le vote de la nouvelle loi européenne, d’aucuns pouvaient imaginer que la firme de Cupertino allait camper jusqu’au bout sur sa position en refusant d’intégrer un port USB-C sur ses iPhone. Or, cela n’aurait pas été sans risque pour Apple. Certes, selon le cabinet d’Alex Agius Saliba, le texte ne prévoit pas de sanction financière. Le moyen de pression est plus simple et plus efficace.

Il faut en effet savoir que « les nouvelles dispositions s’inscrivent dans le cadre d’une révision de la directive RED ». Cela veut dire qu’à partir de l’automne 2024, si un appareil concerné par la directive a encore un port de charge filaire différent de l’USB-C, il ne sera tout simplement pas autorisé à être vendus dans les pays membres de l’Union européenne.

Reproduction de marquage CE // Source : MatthiasDD (via Wikimedia Commons)

La directive RED (fichier PDF) évoquée par le rapporteur encadre la mise en vente d’équipements radioélectriques. Pour être dans les clous, il faut que l’appareil se conforme à un ensemble de critères. Il reçoit alors un marquage « CE » prouvant qu’il a été jugé conforme par les autorités compétentes. Sans port USB-C pour la recharge filaire, un smartphone n’obtiendra pas le précieux sésame pour débarquer sur le marché européen.

Apple n’aurait pas eu de passe-droit et ses iPhone 15, s’ils étaient restés accrochés à leur port Lightning, n’auraient tout simplement pas pu être vendus officiellement en Europe. Un marché où la marque est très populaire et solidement ancrée. Un marché qu’elle ne peut et veut évidemment pas perdre.

Quid de l’USB-D ?

Projetons-nous un peu. Il est tout à fait envisageable que l’USB-C devienne un jour un standard obsolète, dépassé par les évolutions technologiques. Dans ces conditions, l’Union européenne a-t-elle prévu de faire évoluer la loi ?

Oui, rassure le cabinet d’Alex Agius Saliba. « Toute évolution technologique devrait se traduire par un ajustement opportun des exigences techniques/normes spécifiques au titre de la directive sur les équipements radio. Cela permettrait de s’assurer que la technologie utilisée n’est pas dépassée ».

Ainsi, l’Europe ne ferme pas la porte à une éventuelle évolution vers un supposé USB-D. Reste à savoir si lesdits ajustements évoqués pourront s’appliquer avec une bonne réactivité.

Vers un iPhone 100 % sans fil ?

Les iPhone 15 se dotent ainsi de l’USB-C. En revanche, et depuis un moment déjà, quelques rumeurs évoquent un potentiel iPhone 100 % sans fil dans un avenir relativement proche.

En sortant un tel produit, Apple n’enfreindrait pas la nouvelle loi européenne. Celle-ci impose l’USB-C uniquement pour les appareils proposant de la charge filaire. Un appareil ayant recours exclusivement à une solution sans fil ne sera pas concerné et pourrait donc sortir tel quel. Du moins, pour le moment.

Un chargeur MagSafe // Source : Apple

À partir de 2024, il est prévu que la Commission européenne (qui applique la loi au sein de l’UE) se charge de « demander aux organismes européens de normalisation de développer des normes appropriées en fonction du développement des technologies sans fil ». Ainsi, si Apple sortait un iPhone 100 % sans fil, dans les années suivantes, un texte de la sorte sur la recharge sans fil pourrait le concerner.

Technologiquement, un smartphone sans aucun port filaire n’est pas impossible, Vivo a déjà présenté de tels concepts. On peut néanmoins se demander s’il s’agirait vraiment de la solution la plus pratique pour les utilisatrices et utilisateurs. La recharge pourrait éventuellement se faire via MagSafe, mais aurait-elle le même rendement qu’une simple solution filaire ?

Malgré ces interrogations, il reste cependant probable que l’intégration de l’USB-C sur les iPhone ne soit qu’une étape relativement courte avant l’avènement d’un smartphone 100 % sans fil chez Apple. Affaire à suivre.


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