Le moins que l’on puisse dire, c’est que les récentes annonces d’Apple ont fait réagir beaucoup de monde. Pour rappel, la marque à la pomme a indiqué comment elle allait se mettre en conformité avec le Digital Markets Act (DMA). C’est la nouvelle législation de l’Union européenne qui a pour objectif de briser les monopoles des géants du numérique et de favoriser la saine concurrence dans ce secteur.
Dans le cas d’Apple, cela entraîne donc de gros changements sur les iPhone qui arriveront avec iOS 17.4. L’évolution la plus marquante concerne sans doute l’App Store qui s’ouvre à la concurrence et on devrait donc voir des magasins alternatifs arriver, potentiellement du côté du cloud gaming.
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Les nouvelles règles d’Apple
Toutefois, Apple n’a pas fait dans la simplicité en ouvrant ainsi son écosystème. L’entreprise indique que, en Europe, les développeurs d’application devront choisir entre deux options. Soit ils continuent avec les conditions d’utilisation qui existaient jusque-là et rien ne change. Soit ils décident de saisir cette opportunité pour ne plus dépendre à 100 % de l’App Store sur iOS, mais ils doivent alors accepter d’autres règles.
De nouvelles règles qui agacent prodigieusement de nombreux acteurs. Les responsables d’Epic Games, de Spotify ou de Mozilla sont ainsi montés au créneau pour dénoncer une forme d’hypocrisie dans le discours d’Apple. La raison principale de leur colère s’appelle Core Technology Fee.
Derrière ce nom anglais se cache un joli pactole sur lequel Apple pourrait mettre la main. Il s’agit en réalité d’une commission qui fait polémique. Lorsqu’une application dépasse le million de téléchargements, son développeur devra verser 0,50 euro à Apple chaque fois qu’un utilisateur l’installera pour la première fois sur une période de 12 mois. Pour les apps cumulant plusieurs millions, voire des centaines de millions de téléchargements, cela peut représenter une somme mirobolante.
En contrepartie, les développeurs qui opteront pour ces nouvelles conditions verront la commission d’Apple sur l’App Store se réduire (pour être comprise entre 10 et 17 %), mais l’argument ne semble pas convaincre.
« Une farce » et des « absurdités »
En réaction, Daniel Ek, le patron et fondateur de Spotify s’est fendu d’un communiqué pour critiquer Apple de manière acerbe.
Sous le faux prétexte de respect de la loi et de concessions, ils ont présenté un nouveau plan qui est une farce complète et totale. En fait, l’ancienne taxe étant devenue inacceptable dans le cadre de la DMA, ils en ont créé une nouvelle en prétendant qu’elle était conforme à la loi.
Il tacle une entreprise estimant que « les règles ne s’appliquent pas à elle » et va même jusqu’à dire qu’Apple a « atteint un niveau d’arrogance tout à fait nouveau ». Même son de cloche du côté Nikita Bier, fondateur de l’application sociale Gas (rachetée début 2023 par Discord). « Je ne lancerai jamais d’application en Europe », affirme-t-il sur Twitter/X après avoir livré un exemple chiffré.
Selon la nouvelle structure tarifaire de l’App Store pour l’Europe, si vous réalisez un chiffre d’affaires de 10 millions de dollars, la part d’Apple s’élève à 6,2 millions de dollars par an.
Tim Sweeney, fondateur et patron d’Epic Games, évoque une « conformité malveillante » pour décrire « le plan d’Apple pour contrecarrer le nouveau Digital Markets Act de l’Europe ». Il emploie aussi la notion de « hot garbage » que nous pourrions traduire non littéralement en français par « absurdités toxiques ».
À noter cependant qu’Epic Games exploite ce nouveau cadre pour annoncer le retour de Fortnite sur iPhone en Europe. Le jeu avait été banni de l’App Store pour avoir tenté de contourner le système de paiement imposé par la pomme. Il est toutefois possible qu’Epic soit confronté à une double commission. Le développeur propose l’Epic Games Store depuis lequel on peut télécharger le jeu Fortnite.
Or, on imagine que les deux services dépasseront chacun le million de téléchargements et que la fameuse Core Technology Fee s’appliquera à la fois à l’Epic Games Store et à Fortnite.
« Nous sommes extrêmement déçus »
De son côté, Mozilla grince aussi des dents. Les changements opérés par Apple permettent pourtant de changer plus facilement de navigateur web par défaut pour remplacer Safari sur iPhone. Et Firefox fait partie des alternatives concernées. Surtout, les navigateurs alternatifs peuvent désormais fonctionner à leur plein potentiel puisqu’ils ne sont plus obligés d’utiliser le moteur de rendu WebKit jusque-là imposé par Apple qui limitait leurs performances et fonctions.
Or, Damiano DeMonte, porte-parole de Mozilla est loin de se réjouir, car cette ouverture ne s’appliquera qu’en Europe. C’est ce qu’il explique à The Verge. « Nous sommes encore en train d’examiner les détails techniques, mais nous sommes extrêmement déçus […] ». « Cela aurait pour effet d’obliger un navigateur indépendant comme Firefox à créer et à maintenir deux implémentations distinctes du navigateur — un fardeau qu’Apple elle-même n’aura pas à supporter », ajoute-t-il.
Les propositions d’Apple n’offrent pas aux consommateurs des choix viables en rendant aussi difficile que possible pour les autres de fournir des alternatives compétitives à Safari. Il s’agit là d’un autre exemple de la création par Apple de barrières empêchant une véritable concurrence entre les navigateurs sur iOS.
L’Union européenne sur le qui-vive
En résumé, beaucoup estiment qu’Apple reste le seul véritable gagnant dans cette affaire. Et cette colère des développeurs pourrait attirer l’attention de l’Union européenne à rester vigilante. Le Commissaire européen au marché intérieur, Thierry Breton, a affirmé que « des mesures fermes » seraient prises « si les solutions proposées ne sont pas assez bonnes » au regard du DMA.
L’affaire n’est donc sans doute pas terminée.
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