Aux États-Unis, Apple fait l’objet d’une plainte déposée par le département de la Justice (DOJ) qui l’accuse de monopole illégal. Cette affaire — qui survient juste après le DMA européen — est forcément très suivie. Ainsi, la moindre incongruité ne passe évidemment pas inaperçue. C’est le cas, par exemple, d’un extrait de la plainte (PDF) qui a beaucoup attiré l’attention.
Dans le 92e paragraphe du document, le département de la Justice s’attarde sur une anecdote datant d’il y a deux ans.
En 2022, on a demandé à Tim Cook, PDG d’Apple, si la société allait résoudre le problème de la messagerie entre iPhone et Android. « C’est difficile », a plaidé l’interlocuteur, « sans vouloir en faire une affaire personnelle, je ne peux pas envoyer certaines vidéos à ma mère ». La réponse de M. Cook ? « Achetez un iPhone à votre mère ».
Le patron d’Apple n’y voyait sans doute rien d’autre qu’une plaisanterie à l’époque, mais celle-ci est aujourd’hui retenue contre son entreprise pour tenter de prouver l’attitude déloyale d’Apple vis-à-vis de la concurrence.
La plaisanterie de Tim Cook
Replaçons un peu le contexte. L’échange cité par le DOJ a eu lieu à la Code Conference 2022. Tim Cook, entre autres intervenants, est présent sur scène pour répondre à quelques questions du public. La personne qui l’interpelle lui demande en effet si la firme comptait faciliter les échanges entre iPhone et smartphones Android. À l’époque, le RCS sur iMessage n’est pas encore arrivé et plusieurs fonctionnalités sont donc cassées dès que l’on sort de l’écosystème d’Apple (vidéos HD, réaction par émoji, accusé de réception, saisie en cours, conversations de groupe…).
« Je n’entends pas nos utilisateurs nous demander d’y consacrer beaucoup d’énergie à ce stade », répond Tim Cook dans un premier temps pour botter en touche. Ce souci d’incompatibilité persistait pourtant seulement par l’inaction d’Apple.
C’est alors que l’homme dans le public, utilisant lui-même un iPhone, rétorque en disant qu’il ne peut pas envoyer certaines vidéos à sa mère et vice-versa. Et Tim Cook l’interrompt alors, en riant : « achetez un iPhone à votre mère ».
Pourquoi citer cette blague dans la plainte ?
D’aucuns y verront peut-être de l’arrogance, voire même une forme de mépris. On voit toutefois mal la Justice étasunienne condamner Apple parce que son dirigeant s’est montré hautain lors d’une conversation. En revanche, le DOJ espère sans doute utiliser cette séquence pour prouver que la firme à la pomme était consciente de ce souci de messagerie et a volontairement laissé traîner les choses.
En effet, Apple voulait faire en sorte qu’iMessage devienne si important dans l’expérience iPhone que la perspective de quitter le service dissuade quiconque de passer d’iOS à Android. Dans cette optique, l’entreprise avait tout intérêt à ne pas améliorer les échanges entre iPhone et smartphones Android.
Une affaire à rebondissements
Malgré ces possibles explications, il y a forcément quelque chose de surprenant à voir le département de la Justice aux États-Unis prendre le temps de citer une plaisanterie de Tim Cook dans un document très officiel. Par ailleurs, cette affaire devrait continuer à faire couler de l’encre.
Apple s’est déjà vu forcer d’admettre qu’il a tenté puis abandonné de rendre l’Apple Watch compatible avec Android tandis que des firmes brouillées avec la pomme se sont réjouis de la voir aux prises avec la Justice. De son côté, Tim Cook n’en est pas à sa première déclaration potentiellement coûteuse pour Apple.
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