En frappant WeChat et TikTok, les États-Unis vont faire mal à Apple

Victime collatérale

 
En voulant frapper la Chine par le biais d’un embargo sur WeChat et TikTok, les États-Unis risquent finalement de surtout faire mal à Apple.
Apple WeChat et TikTok
Apple, victime collatérale des embargos contre TikTok et WeChat ? // Source : Frandroid

C’est l’actualité la plus animée de cette fin de semaine : Donald Trump a signé deux décrets pour bannir les applications TikTok et WeChat des États-Unis. Il s’agit là d’un nouvel épisode dans le conflit auquel se livrent Washington et Beijing.

L’attention s’est d’ailleurs beaucoup portée autour de TikTok que les autorités américaines reprochent de collecter des données personnelles pour la Chine. Pour sauver les meubles — et faire une belle affaire au passage –, Microsoft songe à racheter la plateforme. En attendant, les responsables du réseau social extrêmement populaire, surtout auprès du jeune public, se disent « choqués » par l’attitude du gouvernement des États-Unis qu’ils critiquent très ouvertement dans un communiqué.

L’affaire semble déjà bien complexe comme cela, mais ce n’est pas terminé. Un autre souci de taille concernant ce double embargo fait peu à peu parler de lui, car il ferait beaucoup de mal à Apple.

En effet, il faut savoir que les décrets de Donald Trump bannissent TikTok et WeChat aux États-Unis, mais ils empêchent aussi les firmes américaines de faire affaire avec les propriétaires de ces deux applications, respectivement ByteDance et Tencent. Or, Apple n’a aucun intérêt à faire une croix sur ses accords avec ces deux compagnies.

L’ogre WeChat

Si lesdits décrets prennent bel et bien effet dans 45 jours, l’App Store d’Apple ne pourra plus proposer TikTok — qui n’est rien de moins que l’application la plus téléchargée dans le monde en 2020 — ni WeChat qui compte 1,2 milliard d’utilisateurs actifs par mois dans le monde.

En Chine, tout particulièrement, WeChat est une application incontournable et même — n’ayons pas peur de le dire — indispensable. Il ne s’agit pas seulement du principal service de messagerie dans le pays, mais aussi d’une plateforme de paiement mobile très largement adoptée par les utilisateurs et les commerçants. Au point que bon nombre d’enseignes n’acceptent plus les cartes bancaires, leur préférant les transactions via WeChat qui fait aussi office de fil d’actualités, de portail e-commerce, de réseau social, de scanner QR Code, etc.

Or, la Chine reste un marché important pour Apple, même si la pomme n’y est pas non plus en situation de grâce face au bulldozer Huawei qui domine son marché natal de la tête et des épaules. Sauf qu’il sera bien difficile de convaincre le consommateur chinois d’acheter un iPhone s’il ne peut pas télécharger WeChat facilement depuis l’App Store.

9 % de parts de marché en Chine

Apple comptait 9 % de parts de marché en Chine au premier trimestre 2020 selon Counterpoint Research. Cela peut ne pas paraître très impressionnant comme cela, mais il est bon de rappeler que 9 % du plus gros marché au monde reste une énorme part de gâteau. La pomme n’a sans doute pas envie de s’en voir privée.

On précisera au passage que, sur Android, la disparition de TikTok et WeChat du Play Store poserait techniquement moins de soucis, car télécharger un APK depuis une autre source reste assez simple, alors qu’il faudrait jailbreaker un iPhone pour faire la même chose sur iOS. En outre, en Chine, les utilisateurs n’utilisent pas le Play Store, Google étant interdit dans l’Empire du milieu.

Gageons qu’Apple sentira venir le danger et tentera de dissuader les autorités américaines de mener leur initiative jusqu’au bout. Reste à savoir si elles écouteront d’une oreille attentive ou écarteront ces inquiétudes d’un revers de la main.

Une aubaine pour Huawei ?

Enfin, on peut se demander si Huawei ne pourra pas essayer de tirer son épingle du jeu dans toute cette histoire. Si TikTok et WeChat disparaissent du Play Store et de l’App Store, les applications seront toujours disponibles dans le catalogue AppGallery.

En Chine, la marque pourra ainsi encore plus appuyer sa domination avec cet argument supplémentaire. Mais l’entreprise pourrait aussi être tentée de mettre cet élément en avant pour vanter les mérites de son écosystème dans le reste du monde où AppGallery est encore loin de s’imposer comme une alternative solide au Play Store et à l’App Store.

Ironie du sort, ce double bannissement américain offrirait sur un plateau deux alliés de poids à Huawei alors que ce dernier souffre lui-même d’un embargo du même acabit depuis 2019.


Utilisez-vous Google News (Actualités en France) ? Vous pouvez suivre vos médias favoris. Suivez Frandroid sur Google News (et Numerama).

Les derniers articles