J’ai participé à une course d’endurance en voiture électrique et j’ai fini troisième grâce à cette méthode décisive

 
À la base, une idée un peu folle : une course d’endurance de trois heures en voiture électrique. Le projet est signé Audi, on y a répondu et on a appris beaucoup de choses – y compris ce que la marque a derrière la tête. Voici notre expérience, entre « écopilotage », esprit d’équipe… et podium.

Qu’on reçoive des invitations pour essayer des nouvelles voitures, c’est (presque) notre quotidien sur Survoltés. Qu’on participe à une course d’endurance en voiture électrique… c’était une première.

L’invitation est signée Audi, qui souhaite braquer les projecteurs sur sa gamme électrique au travers d’un évènement assez inédit : une course de trois heures, sur le circuit du Castellet dans le Var, à bord d’une Audi RS e-tron GT. Le tout sans recharger, une contrainte de taille. On vous raconte tout, sans oublier l’objectif d’Audi derrière cette opération.

La théorie

Le rendez-vous était donc donné sur le mythique circuit Paul Ricard du Castellet, dans le Var, pour cet « Audi e-tron endurance experience ». L’idée : une course d’endurance en équipe, durant laquelle il faudra réussir à rouler plus vite que les 20 autres équipages sur piste… tout en consommant moins qu’eux, pour franchir la ligne d’arrivée sans avoir à recharger.

Source : Laurent Gayral / Rémi Chaillaud pour Audi

Si on tombe en rade, nous pourrons certes recharger grâce à des bornes rapides implantées pour l’occasion, mais une pénalité forfaitaire de 20 minutes sera appliqué. De quoi rayer tout espoir de performer, donc.

Notre destrier : une Audi RS e-tron GT, une berline électrique reprenant la plateforme du Porsche Taycan. Une voiture surpuissante, avec 646 ch en overboost, de quoi passer de 0 à 100 km/h en 3,3 s. Une puissance que nous ne pourrons que peu exploiter, vous l’aurez compris.

Source : Laurent Gayral / Rémi Chaillaud pour Audi

La ligne de la fiche technique qui nous intéresse bien plus, c’est la capacité de sa batterie : 84 kWh. De quoi promettre une autonomie de 472 km selon la norme WLTP et une consommation de 19,8 kWh/100 km en prenant en compte les pertes à la recharge.

Pour franchir la ligne d’arrivée, Stéphane, notre instructeur, nous indique qu’il ne faudra pas dépasser les 33 kWh/100 km. Une consommation ahurissante sur route ouverte… mais bien plus compliquée à atteindre sur circuit, comme nous allons le voir très vite.

En piste !

À la découverte de « l’écopilotage »

Le planning était limpide : l’après-midi du premier jour était dédié aux essais, la matinée du second à la course. Une première demi-journée pour le moins nécessaire, tant la conduite demandée pour maintenir la consommation n’a rien à voir avec une conduite « traditionnelle » sur circuit.

L’équipe de choc devant l’Audi S1 Hoonitron, ultime destier de Ken Block // Source : Laurent Gayral / Rémi Chaillaud pour Audi

J’avais déjà eu la chance de pouvoir rouler sur le Castellet, mais j’ai dû réapprendre de A à Z le circuit. Une reprogrammation totale du cerveau fut nécessaire : accélérer franchement jusqu’à 130 km/h, s’y maintenir avec un filet de gaz, puis maintenir la vitesse par à peu près tous les moyens.

Qui dit voiture électrique dit frein régénératif, où chaque décélération renverra un peu d’énergie aux batteries, mais les pertes associées font que les réaccélérations suivantes annuleront le bénéfice, et feront même augmenter la consommation totale. Les gros freinages sont à proscrire à tout prix, donc.

Source : Laurent Gayral / Rémi Chaillaud pour Audi

Notons ainsi la nécessité de laisser filer la voiture (l’e-tron GT, comme le Taycan, passant en roue libre au lever de pied), freiner le moins possible à l’abord des virages et adopter une trajectoire faisant perdre le moins d’allure possible, puis réaccélérer juste ce qu’il faut en sortie de virage, avant de se laisser de nouveau glisser jusqu’au prochain virage.

Pour aller plus loin
Essai de l’Audi RS e-tron GT : l’électrique épicée

Rien à voir avec une conduite « traditionnelle », donc, et qui a pu être vécue comme frustrante par certains de nos confrères. C’est déstabilisant, mais au final assez plaisant : je me suis surpris à me prendre au jeu, à vouloir optimiser chaque virage et chaque réaccélération. Nous terminons cet après-midi d’essai avec une consommation de 30 kWh/100 km et 17 % de batterie restante, de bon augure pour la course du lendemain.

Un peu d’électronique

C’est d’ailleurs là toute notre stratégie, une sorte de « lièvre et la tortue 2.0 » : garder un rythme calme et régulier pour abaisser notre consommation au maximum. L’idée va plus loin que pouvoir franchir la ligne d’arrivée : nous voulons terminer le dernier quart d’heure avec le maximum d’énergie encore disponible.

Source : Laurent Gayral / Rémi Chaillaud pour Audi

La raison est très simple : plus une batterie est déchargée, moins elle peut envoyer de puissance aux moteurs. Sans compter que la voiture, strictement de série, bridera d’elle-même sa puissance sur les tout derniers pourcents, de quoi emmener le conducteur lambda à la borne la plus proche ou à un endroit où il pourra stationner en sécurité.

Vous l’aurez compris : les équipages qui n’auront pas réussi à suffisamment bien gérer leurs consommations devront conduire avec ce mode « dégradé » dans les derniers tours, et notre objectif est de les doubler à ce moment-là grâce à notre réserve d’énergie (et donc de puissance) dont ils sont privés. Ça, c’est pour la théorie.

Une météo facétieuse

Au réveil de la seconde journée, problème : le temps est menaçant, et l’intégralité de nos applications de météo annoncent plusieurs averses durant les trois heures de course. Et ça, ça implique des consommations en hausse comme nous l’expliquions dans un dossier dédié – pas exactement ce qu’on recherche.

Les prédictions se révèlent vraies : la prégrille s’effectue sous une pluie battante, et la course démarre sur une chaussée détrempée. Notre départ de la 16° place, suite à une qualification de nuit la veille, nous donne une motivation supplémentaire. Évidemment, les premiers tours, grisés par la course et plombés par la pluie, sont sévèrement sanctionnés par la consommation : il faut à tout prix se calmer si on veut finir la course.

Source : Laurent Gayral / Rémi Chaillaud pour Audi

Et on s’y applique plutôt bien, avec une consommation qui baisse au fil des tours, allant se caler parfaitement avec les objectifs. C’est Raphaëlle de Numerama qui s’occupe du dernier relai, avec une certaine appréhension… qui s’est accentuée à trois tours de la fin, où l’ordinateur de bord lui annonce une batterie à 0 %. Fort heureusement, la réserve de la batterie a joué son rôle, de quoi lui permettre de rallier l’arrivée – avec ce fameux mode « dégradé », donc.

Et un podium !

Un mode dégradé qui est apparu bien plus tard que d’autres équipages, puisque nous terminons à une fière troisième place dans la catégorie média. Un podium à savourer après ces trois heures qui ont demandé concentration et application.

Source : Laurent Gayral / Rémi Chaillaud pour Audi

Nous repartons donc avec un petit trophée et de sacrés souvenirs… sans oublier qu’Audi n’a pas organisé cette course pour la beauté du geste. Bien au contraire.

Toute une stratégie autour de l’électrique

Cette « Audi e-tron endurance experience » n’est en effet qu’un pan de la stratégie d’Audi pour promouvoir sa gamme électrique. J’ai ainsi pu m’entretenir avec Marc Ouayoun, alors directeur d’Audi France (depuis remplacé par Robert Breschkow) pour en savoir plus sur la vision de l’électrification d’Audi.

Source : Laurent Gayral / Rémi Chaillaud pour Audi

L’idée est simple : dès 2027, Audi ne lancera plus que des modèles 100 % électriques en Europe – avant, bien entendu, l’interdiction pure et simple de la vente de voitures thermiques et hybrides en 2035. Il est donc nécessaire de paver le terrain et de donner envie aux clients potentiels, encore très attachés à l’image des surpuissantes versions RS thermiques, de passer à l’électrique.

Le timing n’est pas non plus étranger. Après plusieurs années sans aucun lancement (la voiture la plus récente de la gamme, le Q4 e-tron, a été dévoilé en… 2021) dû à des retards de développement, 2024 sonne le retour d’Audi dans l’électrique, avec le lancement du Q6 e-tron, inaugurant chez Audi la plateforme PPE, reprise en fin d’année par l’A6 e-tron et son dérivé break Avant.

Audi S e-tron GT (2024) // Source : Audi

Quant à notre chère e-tron GT, elle vient de recevoir une copieuse mise à jour mécanique, avec encore plus de puissance, des temps de charge encore plus rapides et une autonomie encore améliorée. De quoi présager d’une seconde édition l’année prochaine ?


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