J’ai conduit sur circuit la Fiat 600 électrique version Abarth : 280 ch, un châssis affuté et beaucoup de fun

 
Les voitures électriques s’invitent dans le sport automobile, notamment en Formula E. Les constructeurs tirent parti des avancées technologiques issues de la compétition, à l’image de Stellantis. Certaines marques du groupe exploitent ces innovations pour concevoir des modèles électriques sportifs, comme l’Abarth 600e, que nous avons pu essayer sur circuit.

On a souvent tendance à penser qu’une voiture électrique n’est pas destinée à rouler sur circuit. Il est vrai que l’on parle plus souvent d’efficience que d’accélération ou d’adhérence. Pourtant, certains constructeurs font le pari de modèles résolument sportifs. C’est le cas d’Abarth avec sa 600e, que nous avons pu prendre en main sur le circuit de l’Auxois Sud.

L’Abarth 600e : la technique

Pour sa nouvelle sportive, Fiat est partie de la base d’un SUV électrique. Je vous l’accorde, l’énoncé ne fait pas rêver, mais les ingénieurs de la marque italienne sont de véritables passionnés. En témoigne Francesco Morosini, directeur de la marque, qui a fait le voyage depuis l’Italie jusqu’en Bourgogne au volant de son Abarth 695 Competizione.

Bien qu’électrique, cette 600e devait perpétuer la réputation d’Abarth, un constructeur qui a bâti son histoire en compétition. Un héritage que Christophe Pont, aujourd’hui à la tête de la collection Abarth du château de Savigny, constituée par son père Michel Pont, aime rappeler.

Modèle Abarth 600e
Dimensions 4,19 m x 1,98 m x 1,56 m
Puissance (chevaux) 280 chevaux
0 à 100km/h 5,85 s
Niveau d’autonomie Conduite semi-autonome (niveau 2)
Vitesse max 200 km/h
Taille de l’écran principal 10,25 pouces
Prise côté voiture Type 2 Combo (CCS)
Prix entrée de gamme 44900 euros
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Deux motorisations et une même batterie

Abarth a conçu cette voiture comme une véritable sportive. D’abord avec un moteur électrique de 240 chevaux, mais il semblerait que les pilotes d’essai aient réclamé plus de puissance, le châssis s’étant révélé particulièrement efficace. Les ingénieurs sont donc retournés au bureau, moins d’un an avant son lancement, pour mettre au point une version de 280 chevaux. Aujourd’hui, Abarth propose deux versions au catalogue : la Turismo de 240 chevaux et la Scorpionissima de 280 chevaux, toutes deux développant un couple de 385 Nm.

Les deux modèles utilisent une batterie de 54 kWh. On pourrait croire qu’elle est identique à celle de la Fiat 600e, puisque sa capacité reste inchangée, mais en réalité, un travail de fond a été mené.

Les bus bars entre les cellules ont été renforcés pour délivrer plus de puissance, le refroidissement a été optimisé pour éviter toute perte de performance sur route comme sur circuit, et même après un tour complet du Nürburgring, la batterie ne surchauffe pas. De plus, le connecteur reliant la batterie au moteur a été surdimensionné.

Ces améliorations ne visent pas à augmenter l’autonomie, mais bien à maximiser les performances. D’ailleurs, l’autonomie diminue par rapport à la Fiat 600e, qui affiche 400 km en cycle WLTP.

L’Abarth 600e revendique 322 km, soit une baisse de 20 %, due à ses moteurs plus puissants et donc plus énergivores, mais aussi à son châssis plus affûté. Lors de notre essai, nous avons consommé environ 18 kWh/100 km pour rejoindre le circuit, soit légèrement en dessous de la consommation WLTP de 18,7 kWh/100 km annoncée par le constructeur. En revanche, une fois en piste mieux vaut ne pas regarder la consommation et s’assurer qu’une prise de charge est accessible à proximité…

Un châssis digne des meilleures sportives thermiques

Ce qui peut entraîner une hausse de la consommation électrique, et donc la perte d’autonomie annoncée en cycle WLTP, réside aussi dans le choix des pneumatiques. L’Abarth 600e chausse des Michelin Pilot Sport EV, une gomme conçue pour offrir un niveau d’adhérence maximal. Les flancs sont composés d’un mélange tendre, tandis que la bande de roulement centrale est légèrement plus rigide. Ce ne sont clairement pas les pneus à privilégier pour optimiser l’autonomie, mais plutôt pour signer de bons chronos.

Le châssis a été dimensionné en accord avec la motorisation plus puissante. Abarth a abaissé la suspension de 25 mm, tandis que les amortisseurs (à butées hydrauliques) sont plus fermes de 41 mm. La rigidité globale a été augmentée de 140 %, notamment grâce à l’ajout d’une barre antiroulis arrière.

Le freinage est digne de sportives au pedigree bien établi. Avec des disques de 380×32 mm à l’avant, pincés par des étriers à quatre pistons, et des disques de 268×12 mm à l’arrière avec des étriers monopiston, l’Abarth 600e surpasse même certaines références. À titre de comparaison, ses disques avant sont plus imposants que ceux d’une Toyota GR Yaris ou d’une Porsche 911 type 996 GT3, deux modèles déjà réputés pour leur efficacité au freinage. Pour l’anecdote, ces disques sont fournis par Alcon, le même équipementier qui équipe les voitures de compétition Stellantis en Rally2 et Rally4.

Par ailleurs, sur ses nouvelles sportives électriques – qu’il s’agisse de l’Abarth 600e, de l’Alfa Romeo Junior Veloce ou de la Lancia Ypsilon HF – Stellantis a fait le choix d’un différentiel à glissement limité de type Torsen sur le train avant, fourni par Jtekt. Un élément indispensable pour maîtriser les 280 chevaux envoyés aux seules roues avant. Ce différentiel bénéficie d’un verrouillage de 36 % à l’accélération et de 34 % à la décélération. Sans entrer dans des explications techniques qui mériteraient un dossier à part, retenez qu’il s’agit d’un équipement habituellement réservé à l’élite des sportives à traction.

Et en s’installant au volant de la version Scorpionissima, on est accueilli par de superbes sièges baquets Sabelt, identique à l’Alfa Romeo Junior Veloce, offrant un maintien imperturbable. Maintenant que les présentations sont faites, place à la conduite sur circuit.

Une bonne surprise sur circuit

La piste du circuit de l’Auxois Sud ne mesure que 1 500 mètres, mais elle offre tout de même une belle ligne droite et une courbe rapide, un tracé qui me fait penser à Tsukuba au Japon, que les joueurs de Gran Turismo connaissent bien. Un terrain suffisant pour juger du comportement de l’Abarth 600e.

En mode Scorpion Track, on profite de l’intégralité des 280 chevaux envoyés aux roues avant, permettant un 0 à 100 km/h en 5,8 secondes. Sur ce tracé sinueux, la vitesse maximale, bridée à 200 km/h, ne sera pas une contrainte.

Très vite, on constate que l’Abarth 600e ne se contente pas d’une fiche technique sportive : son comportement est à l’avenant. La direction est directe, la pédale de frein bien ferme, et dans ce mode de conduite, seul le freinage hydraulique est sollicité, offrant un meilleur ressenti sous le pied qu’une voiture combinant freinage régénératif et freinage classique.

Dès le premier tour, il apparaît que l’Abarth 600e requiert une certaine maîtrise et un minimum de concentration pour être exploitée pleinement. La sensation de vitesse est bien présente, mais pour faire pivoter cette voiture au comportement très neutre, il faut jouer du frein pour délester l’arrière. Et croyez-moi, ce n’est pas une mince affaire : décrocher le train arrière pour provoquer une glissade demande de l’engagement. Les novices apprécieront cette stabilité rassurante, tandis que les pilotes aguerris pourraient ressentir une pointe de frustration. L’Abarth 600e revendique un tempérament sportif, mais elle reste accessible au grand public.

Pour un freinage efficace, il faut prendre l’habitude d’écraser la pédale dès la prise de frein, juste à la limite du déclenchement de l’ABS, puis de relâcher progressivement à l’approche du point de corde. Une fois ce dernier atteint, on peut réaccélérer généreusement. Le travail du différentiel, en envoyant la puissance à la roue avec le plus d’adhérence, pousse la voiture vers l’intérieur du virage et compense l’effet de sous-virage typique des tractions puissantes.

Sur le revêtement lisse du circuit, l’autobloquant fonctionne à merveille. En revanche, sur route bosselée, la combinaison d’un train avant très sollicité et d’un différentiel mécanique peut rendre la direction plus exigeante : la voiture peut tirer à droite ou à gauche si l’on ne maintient pas fermement le volant.

Les suspensions, quant à elles, limitent efficacement la prise de roulis, permettant à l’Abarth de virer à plat. Le centre de gravité abaissé par la présence des batteries sous le plancher y contribue également. En revanche, au freinage, la voiture plonge légèrement, ce qui peut sembler surprenant, mais améliore l’adhérence du train avant en augmentant la charge sur les roues motrices.

Des sensations différentes

Vous dire que les sensations sur circuit en voiture électrique sont identiques à celles d’une thermique ne serait pas tout à fait exact. L’absence de moteur thermique supprime une partie des vibrations et du son, éléments qui participent à l’expérience. Et ce n’est pas le générateur sonore d’Abarth qui viendra compenser ce manque.

S’il peut être amusant en conduite sportive, son ton monotone devient vite agaçant à vitesse stabilisée, notamment parce qu’il ne simule pas une boîte de vitesses comme le fait le Hyundai Ioniq 5 N. Heureusement, il s’atténue au-delà de 80 km/h et peut être désactivé. Parfois l’absence de son dans une voiture électrique est préférable à un bruit mal généré.

Sans moteur thermique ni boîte de vitesses, les bruits d’air et de roulement sont davantage perceptibles sur piste. À la conduite, on se focalise plus sur les trajectoires, sans avoir à gérer le régime moteur. La puissance linéaire et instantanée du moteur électrique réduit l’implication nécessaire : il n’y a pas besoin de se soucier d’être dans la bonne plage de régime, contrairement à une voiture thermique qui manquera de reprise si l’on sort d’un virage sur le mauvais rapport.

Cette approche moins exigeante permet de trouver plus rapidement son rythme sur circuit. Comme je le disais, un débutant peut rouler vite avec l’Abarth 600e sans passer des heures à en comprendre le fonctionnement. De plus, l’ESP intervient de manière fluide et discrète.

Une personne peu habituée aux sportives y trouvera son compte. Un conducteur plus expérimenté appréciera également ses performances, mais pourra regretter le son et le caractère plus brut d’un moteur thermique.

Le circuit en voiture électrique fun ou pas ?

L’essai de l’Abarth 600e était déjà ma troisième expérience au volant d’une voiture électrique sur circuit. Une épreuve d’endurance chez Audi et un test de l’Alfa Romeo Junior Veloce s’ajoutent à cette nouvelle prise en main.

Et à chaque fois, je n’ai pas été déçu. Certes, l’émotion n’est pas la même qu’au volant d’une Toyota GR86 sur le sinueux circuit de Monteblanco en Espagne, mais on peut s’amuser, tout en réduisant les risques et surtout sans risquer son permis ! Avec des voitures électriques qui approchent ou dépassent les 1 000 chevaux, il devient plus que jamais nécessaire de mesurer le danger.

Que ce soit en cherchant la trajectoire idéale pour chasser le chrono ou en optimisant l’efficience lors d’une course d’endurance en Audi RS e-tron GT sur le Castellet, l’expérience peut être à la fois ludique et captivante, à condition de l’accepter telle quelle. Il y aura toujours mieux : une voiture thermique sera peut-être plus excitante, mais une fois au volant d’une superbe sportive V8, un autre modèle vous fera sans doute encore plus envie, c’est un cycle sans fin.

Prendre du plaisir sur circuit en voiture électrique, oui c’est possible ! L’Abarth 600e en est une bonne illustration. Mais attention, ce n’est pas une pistarde pure et dure. Certes Abarth a fait les choses correctement pour rendre le SUV Fiat 600e efficace, mais on reste en présence d’une voiture pour débutant, le comportement est très neutre et il est impossible de déconnecter l’ESP. Un pilote avec un peu de bagage sur circuit pourra trouver ça rapidement agaçant. Mais face aux propositions actuelles, Abarth et Stellantis ont la petite sportive la plus affutée, le caractère sportif est plus présent dans l’Abarth 600e que dans une Alpine A290 ou une Mini Cooper SE !

Mais après avoir pris le volant une journée de l’Abarth 600e, sur route et sur circuit, on se rend compte qu’on aimerait une pointe d’émotion supplémentaire. Une fois l’accélération bien expérimentée, on se rend compte qu’il manque ce que l’on apprécie dans une voiture sportive, la liaison entre le conducteur et le moteur. L’absence de son et de vibration enlève une part de l’expérience de conduite. Il va malheureusement devoir s’y habituer. Il y aura à l’avenir plus de sportives électriques présentées que de sportives thermiques ou hybrides. Si les petites sportives doivent survivre au passage à l’ère électrique, elles feraient bien de s’inspirer de l’Abarth 600e, ou de l’Alfa Romeo Junior Veloce, cousin et concurrent direct de l’Abarth 600e.

Prix et disponibilité

Avec leurs SUV électriques sportifs, Alfa Romeo et Abarth prouvent que la passion automobile est loin d’être morte. Le grand public a droit à des voitures dynamiques et performantes. On aimerait un peu plus d’émotion à leur volant, mais rappelons que nous n’en sommes qu’aux débuts des sportives électriques. Les modèles thermiques ont mis plusieurs décennies avant d’atteindre le niveau d’excitation qu’ils procurent aujourd’hui.

L’Abarth 600e débute à 44 900 euros en version Turismo de 240 chevaux, la version Scorpionissima de 280 chevaux, limitée à 1 949 exemplaires est disponible à partir de 48 900 euros et reste éligible au bonus écologique car est considérée comme un pack optionnel.

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