Impossibilité d’ouvrir certaines fenêtres ou d’utiliser le toit-solaire : la faillite de Fisker et les voitures qui cessent (presque) de fonctionner du jour au lendemain

 

Ça y est : après des mois d'agonie, Fisker est officiellement en faillite. Pour les propriétaires de l'Ocean, la voiture électrique de la marque, l'heure est désormais à la débrouille pour garder leurs véhicules en état de marche. Ce qui n'est pas si évident que cela, notamment à cause de la connexion permanente au cloud.

Fisker Ocean // Source : Fisker

Le marché de la voiture électrique est sans pitié, et Fisker en a fait les frais : la marque américaine, qui commercialise le SUV Ocean, a officiellement fait faillite après des mois de péripétie. Voilà qui n’arrange pas les propriétaires de cette voiture électrique, qui se retrouvent sans garantie, ni assistance, ni entretien.

L’heure est donc à la débrouille, et le média américain InsideEVs nous relaie la création du Fisker Owners Association (FOA), qui regroupe 2 000 propriétaires du SUV électrique, et qui déborde d’idées pour maintenir leurs voitures en état de marche. Ce qui n’est pas si évident que cela.

Un accès aux pièces détachées…

Pour mieux se faire entendre, le groupe a annoncé s’être rapproché d’un cabinet d’avocat, Cooley, pour les représenter en justice. La première idée fut de demander le remboursement des garanties, avant d’être abandonné : devant le nombre de créanciers, la probabilité d’aboutir était quasi nulle, déclare José De Bardi, propriétaire d’une Fisker au Royaume-Uni et l’un des fondateurs de la FOA.

Fisker Ocean // Source : Frandroid / Fisker

« Ce qui est beaucoup plus important, c’est que nous puissions continuer à utiliser nos voitures », a-t-il poursuivi, ce qui englobe plusieurs éléments. La première, ce sont les pièces détachées ; pas une mince affaire, puisqu’elles n’étaient pas faciles à trouver même lorsque la marque était opérationnelle. « Il est évident qu’il s’agit d’un élément clé si nous voulons que les voitures restent sur la route, car il y aura toujours des pièces qui cassent », déclare – à juste titre – M. De Bardi.

…et au logiciel de bord

L’autre élément crucial du maintien des Fisker Ocean sur les routes, c’est bien entendu la partie software, un point peut-être encore plus compliqué que l’accès aux pièces détachées.

Le software de l’Ocean n’a jamais brillé par sa fiabilité – c’est d’ailleurs une raison principale de ses méventes – mais, maintenant que Fisker est sous le régime de faillite, les mises à jour risquent fort de disparaître pour de bon. Face à ce constat, la FOA se bat pour accéder à l’outil de diagnostic de Fisker, afin de détecter et corriger les pannes logicielles – avec une panne logicielle, le meilleur mécanicien du monde ne sera pas d’une grande aide.

Fisker Ocean // Source : Fisker

Cela va plus loin, et l’association veut également se rassurer sur la connectivité de l’Ocean. Ce qu’il faut savoir, c’est que cette voiture électrique dépend énormément de son cloud, qu’il utilise pour de nombreuses fonctions… y compris des tâches basiques, comme l’ouverture du toit ouvrant !

En cas de désactivation du cloud, les Fisker Ocean risquent donc de rester au parking. Il faut également s’assurer de la poursuite de l’échange de données en lui-même. Actuellement, le service est fourni par T-Mobile, et l’arrêt du partenariat pourrait rendre la vie des propriétaires encore un peu plus compliquée, avec l’arrêt par exemple de la navigation.

C’est ce qui pousse les journalistes à dire qu’une vieille DeLorean DMC-12 de 1981 est plus facile à réparer qu’une Fisker Ocean.

Une chose que cherche donc à éviter l’association, et la FOA cherche à accéder à la partie logicielle de la voiture et de pouvoir maintenir le cloud et les fonctions électroniques – l’association, d’après M. De Bardi, comprend de nombreux propriétaires pointus sur le sujet, et lui-même est directeur technique d’une entreprise spécialisée. « Nous ne nous attendons pas à ce que ces voitures puissent encore diffuser Netflix dans 20 ans, mais dans 10 ans, vous devriez encore pouvoir ouvrir votre toit ouvrant », a-t-il déclaré.

Un bon exemple de la dépendance des voitures actuelles à la connectivité

L’espoir de la FOA, c’est qu’American Lease, une société new-yorkaise qui loue des voitures à des VTC, a accepté d’acheter le stock restant de Fisker, soit quelque 3 000 Ocean, pour un montant pouvant aller jusqu’à 46,25 millions de dollars. Un accord qui doit encore être approuvé par un juge des faillites du Delaware, mais qui inclut l’accès au code source et aux logiciels nécessaires à la maintenance des voitures.

Fisker Ocean // Source : Fisker

Une source d’espoir pour l’association, qui ouvrirait à elle aussi les accès à ces fonctionnalités clefs… sauf si American Lease décide à son tour de ne pas partager.

Voici en tout cas un bon exemple de la complexité et de la mainmise des constructeurs sur la maintenance des voitures modernes, et spécifiquement électriques. « Un fabricant devrait-il avoir la possibilité de vous empêcher d’ouvrir votre toit ouvrant s’il a envie que ses serveurs ne fonctionnent pas un jour, sans parler d’une faillite ? », a déclaré M. De Bardi.