Free : l’inspection du travail s’attaque au centre d’appels Centrapel

Un « contexte pathogène »

 
Les centres d’appels de Free ne sont pas critiqués pour la première fois de leur histoire. Ici, Mediapart révèle que l’inspection du travail s’attaque au centre d’appels Centrapel pour diverses raisons que nous allons vous expliciter.

Free a beau être souvent vu comme le chevalier blanc des télécoms en France, du fait qu’il ait cassé les prix des abonnements sur le fixe comme le mobile… Tout n’est pas si manichéen. Pour ses employés des centres d’appels, Free peut au contraire être un chevalier noir.

Cash Investigation l’a démontré en 2017, et la situation n’a pas nécessairement évolué pour le mieux en 2019. C’est le journal Mediapart qui le démontre après avoir pu consulter deux courriers de l’inspection du travail en direction de Centrapel, centre d’appels parisien fondé par le groupe Iliad.

Free noie le poisson sur des suppressions de poste

L’inspection du travail estime en effet que la situation n’a pas changé de 2017 à aujourd’hui, malgré le fait que Mobipel (épinglé par Cash Investigation) et Centrapel sont différents. Les salariés ne sont toujours pas traités de manière adéquate ni informés correctement.

Plus précisément, les attaques de l’inspection du travail sont particulièrement liées à la fermeture du service « SAV 1 » d’une centaine de personnes au milieu de l’année. L’entreprise aurait présenté aux représentants du personnel une opération de transfert de leurs contrats de travail, alors qu’il s’agissait en réalité d’une suppression de l’ensemble des postes. Free s’en défend, argumentant qu’il s’agit d’une simple modification de contrats de travail sur la même entité.

Plus encore, cette fermeture n’aurait pas été dûment présentée aux représentants des salariés. Bien au contraire : les salariés ont été présentés avec la possibilité de choisir entre trois mobilités possibles, et poussés à conserver leur travail quoiqu’il arrive, ce qui n’est pas le cadre légal prévu.

D’ordre général, il est reproché à la direction de Free de refuser de communiquer précisément ses décisions, quand Centrapel indique que tout s’est effectué sur la base du volontariat. L’interprétation des dirigeants est donc différente de celle des salariés, mais l’inspection du travail va dans le sens des derniers. Les représentants du personnel notent : « La direction refuse de communiquer précisément, et ne dit surtout pas où vont passer ces postes supprimés. Nous savons bien qu’ils risquent d’être confiés à des sous-traitants en Afrique : en plus de nos centres d’appels français, nous travaillons déjà avec le Bénin ou le Cameroun ».

Un contexte pathogène

Mais plus que ces communications contradictoires, le contexte de travail est également pointé du doigt. Centrapel a été mis en demeure par l’inspection du travail après contrôle des locaux.

Le bruit dans ces derniers est jugé dangereux pour les salariés, et les méthodes de contrôle des employés sont également pointées du doigt avec « l’existence de situations dangereuses dans ce centre d’appels liées aux pratiques d’évaluation, de classement et de communication de la performance  individuelle des salariés et des encadrants ».

Le variable lié aux performances des salariés est affiché publiquement par les managers sur leur groupe Facebook at work et pousse à la compétition entre les salariés. De là naissent de nombreux débordements au sein des équipes qui peuvent « prendre la forme de violences au travail exprimées verbalement et sous forme de menaces entre salariés, pour certaines d’entre elles à caractère raciste et sexiste » selon l’inspection du travail.

Free s’en défend en argumentant qu’il s’agit d’un cas isolé et depuis « corrigé et retiré », mais il n’en est rien selon les découvertes de l’inspection du travail. D’ordre général, Centrapel est donc accusé de ne pas avoir fait suite aux signalisations déjà données en 2017 et début 2019 pour le bien de ses salariés.

Des centres d’appels en souffrance

Depuis quelques années maintenant, les centres d’appels français sont en souffrance. Il semble que face à leur concurrence toujours plus acharnée, les opérateurs français décident de couper leurs fonds si rapidement que le facteur humain n’est plus un aspect important pour eux.

On a aussi pu l’observer chez SFR : les centres d’appels n’ont plus le même attrait qu’auparavant pour les acteurs télécom avec l’avènement des suivis en ligne, moins coûteux à maintenir et pouvant facilement être délocalisés. Reste que si modifications il doit y avoir en interne, elles n’empêchent pas de suivre la législation française et de respecter des salariés qui ont travaillé dur toute leur vie.

Pour aller plus loin
« Pour Drahi, on est des lignes dans un fichier Excel » : SFR raconté par ses salariés lésés


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