Conscient de son statut d’outsider par rapport aux poids lourds du secteur, Fujifilm poursuit son itinéraire original jalonné de quelques (très) belles réussites. Le fabricant a ainsi choisi de faire l’impasse sur les capteurs photo full frame 24×36 pour déployer une gamme aussi particulière que pertinente de boitiers APS-C et moyen format. C’est notamment dans cet univers réservé très longtemps aux productions professionnelles les mieux dotées (publicité, mode) que Fuji a récemment frappé quelques-uns de ses plus grands coups. Après la sortie d’un boitier stabilisé de 100 millions de pixels à un tarif qui relevait jusque là du fantasme des passionnés les plus fantaisistes, voici donc cet alléchant GFX 50s II. Sa promesse : un moyen format de 50 mégapixels performant y compris en extérieur au tarif du haut de gamme 24×36. Voyons donc si les performances sont à la hauteur des attentes.
Fiche technique du Fujifilm GFX 50s II
Fujifilm GFX 50s II | |
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Capteur | 51 MP, CMOS, moyen format 44 x 33 |
Écran | 8,1 cm, 2 360 000 points, orientable |
Viseur | Électronique, OLED, 3 690 000 points |
Sensibilité | 100 – 12 800 ISO (50 – 102 400 ISO en étendu) |
Rafale | 3 images/s avec suivi d’autofocus |
Vidéo | Jusqu’en Full HD 30p en h.264 |
Mémoire | SD, SDXC, SDHC (compatible UHS-I/II) |
Poids | 900 g |
Ce test a été réalisé avec un appareil photo prêté par Fujifilm.
Design du Fujifilm GFX 50s II
Le premier contact visuel avec le Fujifilm GFX 50s II est de bon augure : à l’image du premier GFX 50s, dont il reprend de très nombreux éléments, son encombrement est limité. Ses dimensions sont en effet inférieures à celles d’un reflex 24×36 expert d’il y a une dizaine d’années et légèrement supérieures à celles d’un hybride 24×36 haut de gamme : 150 (largeur) x 104 (hauteur) x 44 (épaisseur au plus fin) / 87 (poignée) mm. La poignée est suffisamment généreuse pour garantir une bonne qualité de préhension, d’autant plus qu’elle est recouverte d’un revêtement antidérapant efficace, comme la partie arrière sur laquelle repose le pouce.
Autre élément de bon aloi : son poids, un peu plus de 900 g avec carte et batterie, en plus de donner une indication sur la solidité des matériaux employés, permet d’assurer un bon niveau d’équilibre une fois équipé d’objectifs souvent assez lourds en moyen format. Non content de faire la part belle aux éléments métalliques, le boitier est également muni de nombreux joints qui assurent l’étanchéité à la poussière et au ruissellement. Le GFX 50s II a donc bel et bien été conçu pour faire face aux exigences de la photo en extérieur. Ne vous amusez pas pour autant à plonger en eau salée sans caisson.
Visée du Fujifilm GFX 50s II
Robuste, ce moyen format n’est pas rustique pour autant, puisqu’il propose un viseur numérique. Il s’agit bien d’un boitier hybride, très confortable avec un viseur doté d’une belle dalle OLED (pour l’appréciation des contrastes) de 0,5 pouce de diagonale et de 3,69 millions de points. Le dégagement oculaire de l’ensemble, de 23 mm, est confortable, les porteurs de lunettes apprécieront, et le grossissement proposé est de 0,77 x.
Sur la face arrière, on trouve un écran tactile très bien défini (2,36 millions de points) et inclinable sur deux axes. Si ce dispositif permet à la fois une inclinaison très utile verticalement et horizontalement, il ne s’agit pas d’un montage sur rotule totalement orientable (tant pis pour les selfies !).
Connectique
Côté connectique, le GFX 50s II est plutôt bien pourvu. On retrouve ainsi une sortie mini HDMI type D, une sortie casque, une entrée micro stéréo au format mini-jack 3,5 mm, une prise télécommande, et un connecteur USB-C permettant d’assurer la recharge de l’appareil et la connectique vers un ordinateur.
Il est par ailleurs doté de deux slots pour cartes SD/SDHC/SDXC compatibles avec le format rapide UHS-II. Vu la taille des fichiers générés (un peu moins de 110 Mo pour un Raw 14 bits), c’est appréciable.
Objectif de kit du Fujifilm GFX 50s II
C’est souvent là où le bât blesse avec les capteurs de dimensions généreuses et exigeants : ils imposent l’emploi d’objectifs lourds et encombrants. Et, d’un coup, les belles promesses de compacité s’envolent. Le fabricant japonais est porteur d’une longue histoire dans le domaine du moyen format argentique pendant laquelle il a déjà pris des paris originaux : il a tout de même produit, entre autres, des compacts argentiques moyen format dotés de zooms commandés électriquement (à cadrage vertical par défaut au format 4,5×6 cm). Que les curieux aillent voir, ça vaut le détour, croyez-moi. Bref : Fujifilm n’a pas reculé devant l’obstacle.
Un nouvel objectif, d’ailleurs proposé en kit (l’appareil est évidemment aussi disponible boitier nu), accompagne donc la sortie du GFX 50s II. Chose peu courante en moyen format — même s’il y a quelques précédents –, il s’agit tout d’abord d’un zoom. Celui-ci est doté d’une finition tout temps assortie de nombreux joints (appellation « WR » chez Fuji) et surtout il est rétractile ! Le choix a ses avantages (compacité/résistance aux intempéries accrue) et ses inconvénients (durée de mise en route de l’ensemble grevée du temps de le déployer), mais il a le mérite de l’audace et de la polyvalence, qualité rare dans le domaine.
Il faut par ailleurs signaler aux habitués de boitiers plus classiques qu’en moyen format les objectifs sont de manière générale moins lumineux. En effet, la grande surface du capteur impose l’acheminement d’une plus grande quantité de lumière à sensibilité égale. Le choix d’un zoom renforce par nature le phénomène, et l’ouverture proposée peut donc paraître modeste et étonnante à ce niveau de prix : f/4,5-5,6. De même, l’amplitude du zoom (x2) est limitée afin de maintenir un niveau de compacité acceptable : 35-70 mm (équivalent à 28-55 mm en 24×36).
Grâce à un beau niveau de performance visuelle, son emploi en conditions réelles fait apparaître la pertinence du choix : à rebours du modèle dominant dans un univers où les focales fixes règnent en maître, on dispose grâce à lui d’un ensemble cohérent. En effet, là où le GFX 50s II fait le pari de la compacité et de la versatilité à un tarif étudié (pour du moyen format), l’obligation de se munir de plusieurs focales fixes aurait été particulièrement regrettable. Que les spécialistes ne s’inquiètent pas pour autant, le reste de la gamme optique GFX reste disponible. Cerise sur la gâteau : le tarif est à l’avenant. Là où la quasi-totalité des références affiche des prix supérieurs à 1000 euros, ce zoom original est fourni en kit pour 500 euros (1000 euros seul).
Autonomie du Fujifilm GFX 50s II
L’alimentation en énergie est un souci récurrent avec les boitiers hybrides, d’autant plus lorsqu’ils sont dotés d’écrans et de viseurs très définis. On peut saluer la reprise de la batterie présente sur le GFX 100S : elle propose un encombrement réduit de moitié environ par rapport à la génération précédente, pour une autonomie sensiblement identique.
Cependant, lors du test elle a tenu deux heures en conditions de pratique intensive en extérieur.
Or, la course à la limitation budgétaire apparente à des conséquences : comme trop souvent chez d’autres fabricants — bonjour Sony, qui n’est malheureusement pas seul — aucun chargeur externe n’est fourni et, en son absence, c’est l’appareil qui fait le job et se retrouve ainsi immobilisé. L’achat d’un ou deux accumulateurs supplémentaires, ainsi que d’un chargeur est donc fortement conseillé, pour ne pas dire indispensable en pratique (compter environ 70 euros par élément).
Ergonomie du Fujifilm GFX 50s II
Le Fujifilm GFX 50s II reprend la très bonne conception ergonomique de son grand frère, le GFX 100S. On retrouve ainsi, sur le capot supérieur à gauche du viseur, le barillet de choix des modes (P,S,A,M…) ainsi que le sélecteur photo/vidéo. À droite ont été positionnées deux touches personnalisables ainsi qu’un écran affichant les réglages. Exit donc les nombreuses molettes dédiées de la version précédente (sensibilité, correction d’expo, etc.), car, désormais, tout se fait au moyen de deux molettes assignables situées sous l’index et le pouce que l’ont doit légèrement enfoncer afin de changer le paramètre que l’on souhaite faire varier. En pratique, ça demande un peu de temps pour s’habituer, mais, à l’usage, on finit par obtenir un bon niveau de réactivité. À titre personnel, je préfère tout de même un moyen plus direct pour le choix de la sensibilité afin d’éviter des erreurs de manipulation, et donc une perte de temps précieux sur le terrain.
Sur la face arrière, on retrouve, à gauche du viseur, les touches drive (sélection de la cadence de prise de vue) et celle servant à la suppression des images. Le sélecteur du mode de mise au point AF ainsi que la touche AF ON sont positionnés à droite du viseur. Le joystick (très utile), les boutons de mémorisation de l’exposition, d’accès au menu, d’affichage des infos et de lecture des images ont été placés à droite de l’écran. Enfin, la touche permettant par défaut d’accéder au pratique Quick Menu se trouve à droite du repose pouce. Il faut signaler que la presque totalité des touches est paramétrable et qu’avec un peu de temps chacun pourra créer un pilotage taillé sur mesure.
Les menus sont pour le moins fournis, et on se passerait volontiers de certaines fonctions telles que le filtre de lissage de peau (pour les fans de lifting, Photoshop marche très bien), surtout sur un boitier dédié aux experts. Cela étant, le foisonnement de fonctions est la norme sur les boitiers haut de gamme censés répondre aux besoins variés d’utilisateurs exigeants. Heureusement, pour un usage courant, le couple Quick Menu/écran tactile fonctionne très bien.
Bref, à part l’absence d’une troisième molette pour la sensibilité, l’ensemble est à la fois assez intuitif et très complet.
Obturateur du Fujifilm GFX 50s II
Il existe deux catégories d’obturateurs : le système central et le plan focal. Le premier, contenu dans les objectifs, à l’avantage de proposer des vitesses d’obturations synchrones avec les flashes externes très élevées et est traditionnellement plutôt orienté vers des usages en studio. L’obturation à plan focal à le mérite de la discrétion et de la modération tarifaire. Le GFX 50s II étant taillé pour l’extérieur et pour un public moins exclusif, c’est cette seconde option qui a été retenue. La vitesse de synchro flash est donc limitée au 1/125e de seconde, ce qui permettra des usages en studio uniquement sur des sujets peu mobiles (nature morte, portrait).
La cadence en rafale peut également sembler limitée au regard du 24×36 ou de l’APS-C, mais la fréquence de 3 images par seconde représente un niveau de performance tout à fait respectable en moyen format. De toute manière, ces appareils ne sont pas faits pour ça.
Autofocus du Fujifilm GFX 50s II
Avec un capteur aussi exigeant (50 Mpx), il est très difficile, pour ne pas dire impossible, de travailler en mise au point manuelle avec une réactivité suffisante pour les sujets en mouvement. Pour un boitier affichant des prétentions aussi marquées pour la photo en extérieur, la question de l’autofocus est cruciale. Si l’on note l’apparition d’un nouveau processeur affublé du joli sobriquet de X Processor 4, le choix de conserver, comme sur la version précédente, un module fondé sur la technologie de détection de contraste (plutôt que la corrélation de phase, à ce jour plus performante, mais qui impose un changement de capteur) n’était a priori pas de très bon aloi.
En pratique, il faut tout de même bien constater que le GFX 50s II s’en sort néanmoins plutôt bien. Tant que le niveau de luminosité est suffisant, l’autofocus (AF) est réactif et précis sur le terrain. La fonction détection des yeux fonctionne bien et les portraitistes apprécieront d’autant plus que la profondeur de champ tend à se réduire avec l’augmentation de la surface des capteurs (c’est là l’un des principaux intérêts du moyen format).
On note néanmoins une baisse de performance sensible, typique de ce type de dispositif, lorsque l’intensité lumineuse diminue, notamment sur les sujets peu contrastés.
Le suivi automatique des sujets en mouvement est par contre moyennement efficace. Dans ce mode, on note une trop forte tendance à privilégier les sujets situés au premier plan, alors même que la désignation tactile du sujet à suivre sur l’écran arrière n’est pas possible. Lors de nos tests, nous avons pu constater que le suivi des sujets en mouvement est correctement assuré tant que le sujet se situe dans la partie centrale de l’image. Par contre, ils sont perdus lorsqu’ils atteignent les zones périphériques.
Bref, le GFX 50s II n’est pas fait pour les amateurs de photo sportive ou animalière. Cela dit, ce genre de boitier n’est par nature pas taillé pour ce genre de pratique…
Stabilisation du Fujifilm GFX 50s II
Compte tenu de la définition et l’orientation vers un public en général amateur de tirages grand format, Fuji a pris le soin d’équiper le GFX 50s II d’une stabilisation mécanique du capteur sur 5 axes. Signalons tout d’abord qu’à main nue, sans stabilisation, avec le 35-70 mm réglé à 70 mm, nous sommes parvenus à des résultats très satisfaisants avec une majorité d’images nettes ou acceptables jusqu’au 1/60e de seconde inclus. C’est un des avantages notables des hybrides sur le système reflex : la disparition des miroirs dans le système de visée, qui se relèvent à grande vitesse lors des déclenchements, permet une suppression très sensible des vibrations mécaniques.
Une fois la stabilisation activée, nous obtenons des résultats comparables jusqu’au 1/13e de seconde, soit un gain de 2,3 IL. Pour un boitier doté d’un tel niveau de définition, ces performances sont d’un très bon niveau. Si l’on est assez loin des 6,5 IL affichés par le fabricant (norme ISO), la promesse de proposer un moyen format capable d’assurer des prises de vues nettes lorsque la luminosité générale diminue est donc bien tenue.
Notons au passage que ce système permet également de réaliser des images de 200 mégapixels à partir de plusieurs prises de vue grâce à un mode pixel shift. Celui-ci met à profit le module de stabilisation pour réaliser de très légers mouvements du capteur entre chaque déclenchement. Bien entendu, ce mode ne peut fonctionner correctement que sur des sujets parfaitement inertes, quand l’appareil est monté sur un pied.
Qualité d’images du Fujifilm GFX 50s II
Le capteur qui équipe le GFX 50s II de 33 x 44 mm, au format 4/3 donc (comme l’ensemble des moyens formats numériques) propose une définition utile de 50 Mpix. Il est associé à une puce de nouvelle génération X Processor 4.
En raison de l’orientation experte du GFX 50s II, c’est à partir des fichiers RAW (dit « RAF » chez Fuji), développés dans Capture One avec les réglages par défaut du logiciel, que nous avons fondé nos observations de sa sensibilité. Notons ici que le niveau d’échantillonnage des fichiers RAW est de 14 bits.
La sensibilité maximale de base étant de 12 800 ISO, nous ne sommes parvenus à extraire des images de sensibilités supérieures qu’en jpeg à partir des modes utilisateurs. À partir de 25 600 ISO, les fichiers sont donc des jpegs directement générés par le boitier. Comme vous pouvez le voir sur les images, la montée en sensibilité est excellente. Même la sensibilité de 12 800 ISO est parfaitement exploitable pour une très grande majorité d’usages. La sensibilité supérieure (25 600 ISO) est toujours de très bonne tenue globalement, et les choses ne se gâtent réellement qu’à partir de 51 200 ISO. La sensibilité maximale de 102 400 ISO est à réserver aux situations d’impérieuse nécessité.
La dynamique est par ailleurs excellente, et elle permet le rattrapage de scènes complexes, notamment dans les ombres, dans des proportions inaccessibles en 24×36 avec une telle définition. Dans l’exemple ci-dessous, vous pouvez voir un rattrapage de 4 IL de sous-exposition (!!!) avec le logiciel Capture One à partir d’une image RAW réalisée à 400 ISO.
Voilà pour les éléments techniques, certes prometteurs. Il restait à l’éprouver en conditions réelles. Taillé pour l’extérieur ? Chiche… j’ai pris le fabricant au mot et je l’ai emmené… en manif ! Histoire de voir comment il s’en sortait au milieu de la foule en conditions mouvementées.
En pratique, le GFX 50s II répond aux attentes et c’est un vrai bonheur de retrouver un usage du moyen format en extérieur tel qu’il existait avec certains boitiers argentiques. Le rendu esthétique, qui n’est pas totalement réductible à des mesures techniques, est lié pour beaucoup à la taille du capteur et aux solutions optiques correspondantes. Il est donc, par nature, inaccessible au 24×36.
Pour aller plus loin
Appareils photo : la démocratisation du moyen format est en marche
Fonctions vidéo du Fujifilm GFX 50s II
Équipé d’une entrée micro stéréo et d’une prise casque, toutes deux au format mini-jack 3,5 mm, ainsi que d’un écran doublement inclinable (horizontalement et verticalement), le GFX 50s II semblait disposer d’une conception plutôt bien adaptée à la vidéo.
Un rapide tour d’horizon des formats d’enregistrement proposés montre néanmoins quelques sérieuses limitations : il n’enregistre au maximum qu’en full HD en 30p avec un codec limité (50 Mb/s). L’UHD est donc indisponible. Autre élément négatif : l’autofocus manque de précision et peine à discerner certains sujets. De même, il se révèle trop souvent incapable de suivre les sujets en mouvement.
Pour aller plus loin
H.265, 4:2:2, 10 bits, UHD ou 60p : tout comprendre aux formats et à la compression vidéo
Il n’en reste pas moins que le moyen format permet de produire des images caractérisées par une faible profondeur de champ et une très belle qualité de flou. Les spécialistes capables de travailler manuellement trouveront donc, dans le GFX 50s II, un boitier capable de produire des images d’une grande finesse esthétique.
Prix et disponibilité du Fujifilm GFX 50s II
Le Fujifilm GFX 50s II est disponible depuis fin septembre. Il est proposé nu au prix de 3999 euros, ou en kit avec un objectif 35-70 mm (f/4,5-5,6) à 4499 euros.
Certains liens de cet article sont affiliés. On vous explique tout ici.
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