Mise à jour le 23 août : Psychonauts 2 s’apprête à sortir ce mercredi 25 août. Le jeu sera disponible sur Xbox, PlayStation, PC et dans le catalogue du Xbox Game Pass. Le titre est déjà un petit succès critique.
Il aura fallu plus de 15 ans avant de voir les Psychonauts signer leur retour. Entre les premières aventures de Razputin Aquato et maintenant, de l’eau a coulé sous les ponts de Double Fine, studio totalement barré auquel on doit aussi l’étrange Grim Fandango ou encore Day of Tentacles. Il est notamment devenu depuis 2019 l’un des membres les plus éminents des Xbox Studios.
« Qu’est-ce que cela m’a apporté d’être devenu un des Xbox Studios ? J’ai pu récupérer une bonne partie de mon cerveau », lâche à Frandroid Tim Schafer, directeur de Double Fine. Tout est toujours question de trait d’esprit et de parcourir l’esprit humain pour le truculent créatif qui repart explorer les tréfonds de l’âme humaine.
Psychonauts 2, la santé mentale au cœur du gameplay
Avec Psychonauts sorti en 2005, il avait mis sur la table le sujet de la santé mentale en concevant un jeu se déroulant dans l’esprit des personnages, chaque niveau étant lié à des soucis mentaux et à des pensées négatives. Et cette fois-ci, son cerveau a pu être totalement libéré de tous les aspects difficiles et « prise de tête » de la création. « Je n’ai pas eu besoin de courir partout pour présenter mon jeu et le vendre », reconnaît-il. « J’ai pu me concentrer sur des choses créatives. C’est tout ce que j’ai eu à faire, comme le reste de l’équipe. Davantage de temps pour la créativité, moins pour les pitches et autres aspects mentalement contraignants. Ça permet d’aller à l’essentiel sans stress. »
Comme pour le premier opus, Psychonauts 2, attendu le 25 août sur consoles et dans le Xbox Game Pass, aborde le sujet des peurs, angoisses et difficultés psychologiques de chacun à travers les péripéties de son héros, un agent secret psychique. Et cela signifie passer en revue différents niveaux et autant de maladies mentales. « Nous nous sommes concentrés sur qui étaient les personnages, sur la façon dont nous pouvions nous amuser de leurs problèmes mentaux spécifiques et rendre cela unique avec des contenus inédits, » résume le boss du studio.
Ainsi, les différents niveaux du jeu vont successivement évoquer les phobies, les angoisses, la schizophrénie… des thématiques chères aux Psychonauts pour comprendre les personnages, mais aussi inciter à mieux saisir le genre humain de manière générale. « L’idée d’empathie fait partie des mécaniques du jeu. Vous voyez le monde du point de vue de quelqu’un d’autre et cela vous amène naturellement à réaliser la situation, à comprendre que tout le monde a des choses dans la tête que vous ne saisissez pas toujours et que cela peut expliquer le comportement d’une personne », souligne Tim Schafer. « Même les méchants du jeu vivent ça et vous ne le comprenez qu’en vous mettant dans leur esprit. » Un pari réussi et on se plaît à prendre « possession » de l’esprit des différents protagonistes ou à user de nos multiples pouvoirs dans cet univers coloré et excentrique.
Le jeu vidéo, « une pratique émotionnelle pour la vie »
Le jeu s’ouvre sur un message expliquant les différentes maladies mentales qui seront évoquées au fil de l’histoire (ainsi qu’un improbable message à l’attention des phobiques dentaires). Il n’y a aucune tromperie ou volonté de se servir du jeu comme excuse. Chez Double Fine, on admet que le premier opus n’avait pas vraiment pour but de servir de porte-drapeau à la cause, mais que l’esprit était plutôt voué à être « un terrain de jeu amusant ».
Ce genre de jeu a fini « par nous parler et par faire avancer la réflexion autour de ces problèmes. Le sujet était devenu une évidence pour nous, » reconnaît-on du côté du studio californien. Les difficultés psychiques deviennent là des atouts pour progresser en se servant de la télékinésie, de la projection astrale dans un autre corps pour repousser les cauchemars, ou encore de la connexion mentale pour reprogrammer un cerveau. Il faut alors réfléchir pour relier les idées afin d’obtenir une pensée plus positive.
« Dans un jeu vidéo, vous ressentez les hauts et les bas de votre personnage. Cela permet d’imaginer les situations. C’est une façon de se développer émotionnellement et de mûrir en comprenant qui vous êtes, sans vous prendre la tête », souligne Tim Schafer. « C’est une forme d’art qui a quelque chose à apporter dans toutes les situations, peut vous faire ressentir tellement de choses différentes. Une pratique émotionnelle pour la vie. »
L’aire de jeu est d’ailleurs le cerveau cartographié du Dr Lobato, méchant du premier épisode devenu gentil, mais pris de doutes et regrets. Une exploration en multiples étapes pour prendre conscience… inconsciemment.
Trouver un équilibre entre humour du jeu et sérieux du sujet
Quinze ans plus tard, le jeu mise sur le même humour pour, non pas banaliser les différentes maladies mentales jamais évoquées comme tel, mais pour les rendre plus concrètes d’une certaine façon en les glissant dans le quotidien du héros. Celui-ci doit trouver un moyen de les contourner ou les solutionner, comme transformer la peur du risque et de l’échec d’Hollis Forsythe en vision bénéfique pour les Psychonauts dans leur mission. Transformer le négatif en positif comme en évoquant avec Lily la maladie de son père, dont on comprend qu’il souffre de dépression ou de paranoïa.
« Le cerveau humain ne peut pas toujours être drôle. Il fallait trouver cet équilibre entre humour et sérieux pour faire un jeu, avec une mécanique de gameplay basée sur les différents pouvoirs », explique Lauren Scott, aux commandes du design des systèmes. Raz se sert donc de ses facultés mentales pour évoluer. Une façon par miroir d’aider ceux qui souffrent de problèmes mentaux à trouver aussi des réponses en jouant. « Nous ne nous présentons pas comme un manuel sur les phénomènes psychologiques, » tient à préciser Tim Schafer. « Nous sommes là pour accompagner, pas pour apporter des réponses. Nous ne documentons rien, mais nous avons échangé avec des médecins pour concevoir le jeu correctement et respectueusement. »
Le papa de Broken Age explique d’ailleurs qu’un des avantages d’avoir désormais le soutien d’un géant comme Xbox est l’accès à de multiples ressources, dont des experts en tous genres. « Nous avons regardé ce que nous pouvions ajouter au jeu maintenant que nous avions accès à de multiples supports grâce à Microsoft, à des tests, des groupes comme Takethis.org qui nous ont aidés à définir nos besoins, à affiner notre message. Nos intentions étaient bonnes et nous voulions être sûrs qu’elles soient bien présentées », précise-t-il.
Ainsi, les équipes de Double Fine ont échangé avec des spécialistes pour s’assurer que les éléments intégrés au jeu n’incluent pas de choses trop « stigmatisantes ». « Parfois, ça pourrait être juste des mots que vous utilisez qui peuvent montrer du mépris pour les personnes concernées, les proches ou ceux qui souffrent de maladie mentale. On ne voulait pas prendre de risques alors qu’il suffisait juste de changer un peu de texte, modifier un élément et ça aiderait beaucoup de personnes ensuite », souligne Lauren Scott. « Il faut traiter simplement les choses comme elles surviennent réellement et pas en utilisant des stéréotypes. Cela pourrait être blessant pour certains joueurs au lieu de les aider et d’aider les autres à en prendre conscience ».
« On m’a dit un jour, pour le premier Psychonauts, que chaque niveau était un peu comme un remède, une façon de soigner. C’est un beau compliment alors que ce n’était pas le but recherché. Tous ces esprits quelque part, on les a laissés en meilleur état qu’en arrivant. On fait toujours du bien aux esprits avec ce jeu », explique Tim Schafer.
Des jeux pour évoquer les maladies mentales
La pandémie et les confinements successifs n’ont pas été sans effet sur les individus, notamment les plus isolés. En mai dernier, lors d’une étude réalisée pour Xbox, 71,7 % des joueurs interrogés avaient reconnu que le jeu vidéo les avait aidés à se sentir moins seuls, une routine indispensable pour la santé mentale, comme l’évoquait Tara Voelker, co-responsable du handicap et du jeu chez le constructeur américain. Et pour les joueurs admettant souffrir de maladies mentales, 84 % estimaient que le jeu vidéo avait eu un effet largement positif durant la période pour oublier stress émotionnel, douleur physique ou pour garder le contact avec la vie réelle.
Depuis plusieurs années, le jeu vidéo ne se contente pas de se reposer sur des sujets « positifs ». L’être humain et ses failles sont de plus en plus souvent mis au centre du jeu. La santé mentale n’y échappe pas, autant pour son impact actuel sur la société et ses dérives que pour montrer une certaine réalité pour de nombreuses personnes. Apprendre par le jeu pour ceux qui sont concernés, mais aussi leur entourage.
À travers des expériences immersives et des gameplays adaptés, plusieurs jeux ont ainsi mis le sujet au cœur de titres loin d’être confidentiels. Hormis la saga Psychonauts, on peut aussi évoquer Hellblade : Senua’s Sacrifice, l’histoire d’une guerrière celte aux prises avec sa psychose.
Le studio Ninja Theory avait alors travaillé de manière approfondie la thématique, avec des scientifiques, des neuroscientifiques, mais aussi des personnes concernées par la maladie, entendant des voix ou ayant des visions et des croyances singulières. « Le jeu a pu avoir des conséquences sur certains fans, en leur permettant de mieux comprendre certains problèmes mentaux, d’échanger et de discuter de leur propre expérience, » expliquait alors Dominic Matthews, l’un des responsables du studio. « Développer le réel potentiel des jeux vidéo pour aider certaines personnes à mieux gérer leur santé mentale fait désormais partie de notre mission chez Ninja Theory, comme vous pourrez le voir avec The Insight Project. »
Créer un « outil puissant » pour mieux comprendre le sujet et améliorer le bien-être mental, c’est aussi le parti pris d’Electronic Arts avec le jeu Sea of Solitude. L’histoire d’humains transformés en monstres dès qu’ils se sentent trop seuls. Il faut alors choisir d’aller au-delà des apparences et de comprendre l’individu pour progresser dans ce voyage personnel. Mais l’un des plus connus reste sans doute Celeste et la lutte de Madeline contre ses démons intérieurs.
Bien d’autres titres ont su mettre en lumière les errances psychologiques, la schizophrénie, l’anxiété ou la dépression. Le jeu vidéo a cela de vrai qu’il apporte une forme de bien-être mental. De multiples études ont d’ailleurs démontré l’impact mental et moral sur les joueurs, de la stimulation mentale du cerveau poussé à réfléchir à la distraction contre les douleurs et traumatismes psychologiques, en passant par la lutte contre le trouble de l’attention avec hyperactivité. Mais face à certaines crises mentales, comme la peur de l’échec, apprendre à échouer et recommencer pour réussir est l’une des forces du jeu vidéo. Un outil notamment très utile, et de plus en plus utilisé avec les enfants pour les aider à évacuer le stress engendré.
Des bienfaits sur les fonctions cognitives, mais aussi des aspects négatifs à encadrer
Une étude de l’INSERM en 2018 avait mis en exergue l’apport des jeux et leur potentiel rééducatif intéressant sous-exploité. « Introduire des scénarios plus complexes, plus excitants, plus structurés pourrait augmenter leur impact sur le cerveau et ses fonctions », notaient les chercheurs, avançant l’usage thérapeutique qui pourrait en découler pour les patients souffrant de troubles mentaux avec réduction ou altération de certaines zones du cerveau. Cela les obligerait à mobiliser leurs fonctions cognitives simultanément pour traiter les informations.
Évidemment, il a également été démontré que passer trop d’heures devant sa console ou son PC pouvait aussi avoir des effets négatifs (perte de sommeil, anxiété, asociabilité), notamment avec des jeux plus violents, de tir ou de combat à la première personne. Mais dans leur ensemble, tous les jeux peuvent être bénéfiques. Comme toujours, le trop est l’ennemi du bien. Pour la santé mentale comme le reste, de l’intéressé comme de son entourage qui se retrouve souvent démuni.
Psychonauts 2 sort sur Xbox One et Xbox Series, PS4/PS5 et PC dès le 25 août 2021.
Envie de retrouver les meilleurs articles de Frandroid sur Google News ? Vous pouvez suivre Frandroid sur Google News en un clic.
[…] Guidelines). Celle-ci s’enrichit d’ailleurs de nouvelles pratiques sur la santé mentale (sujet abordé dans le jeu Psychonauts 2), le travail sur la taille du texte ou encore le mal des […]
[…] les airs, sur toute la planète et par toutes les météos. Si vous aimez les jeux d’aventure, Psychonauts 2 et son univers décalé autour des maladies mentales est à faire absolument. Avec ses étranges personnages, son héros Raz et la dextérité […]
[…] annonce la firme américaine, mais l’occasion sans aucun doute d’en savoir un peu plus sur Psychonauts 2 disponible dès le lendemain, Halo Infinite qui se fait attendre, Forza Horizon 5 ou bien sur les […]
[…] Lire la suite […]
Ce contenu est bloqué car vous n'avez pas accepté les cookies et autres traceurs. Ce contenu est fourni par Disqus.
Pour pouvoir le visualiser, vous devez accepter l'usage étant opéré par Disqus avec vos données qui pourront être utilisées pour les finalités suivantes : vous permettre de visualiser et de partager des contenus avec des médias sociaux, favoriser le développement et l'amélioration des produits d'Humanoid et de ses partenaires, vous afficher des publicités personnalisées par rapport à votre profil et activité, vous définir un profil publicitaire personnalisé, mesurer la performance des publicités et du contenu de ce site et mesurer l'audience de ce site (en savoir plus)
En cliquant sur « J’accepte tout », vous consentez aux finalités susmentionnées pour l’ensemble des cookies et autres traceurs déposés par Humanoid et ses partenaires.
Vous gardez la possibilité de retirer votre consentement à tout moment. Pour plus d’informations, nous vous invitons à prendre connaissance de notre Politique cookies.
Gérer mes choix