Comment Microsoft profite de la législation pour faire payer Teams au prix fort

 
Microsoft est dans le collimateur de la Commission européenne depuis le mois dernier, cette dernière devant évaluer si l’intégration de Teams à Office 365 était une pratique anticoncurrentielle. La firme a décidé de prendre les devants en dissociant son outil de communication de la suite Office.
Source : Microsoft

La Commission européenne a lancé le mois dernier une enquête antitrust envers Microsoft pour avoir intégré son outil de communication Teams à sa suite Office 365. Le sujet de cette enquête était d’évaluer si Microsoft avait enfreint les règles du marché face à ses concurrents.

Les outils de collaboration et de communication à distance comme Teams sont devenus indispensables pour de nombreuses entreprises en Europe. Nous devons par conséquent nous assurer que les marchés de ces différents produits restent compétitifs et que les entreprises sont libres de choisir les produits qui répondent le mieux à leurs besoins.

Margrethe Vestager, commissaire européenne à la Concurrence

C’est d’ailleurs Slack, le concurrent direct de Teams, qui est à l’initiative première de l’enquête : la société avait déposé une plainte en 2020 à l’encontre de Microsoft pour pratiques anti-concurentielles, en proposant dans la même offre sa suite bureautique largement leader et son outil de collaboration.

Afin de se prémunir de toute mesure punitive et d’apaiser les autorités de régulation européennes, Microsoft a décidé de prendre les devants.

Microsoft retire Teams de sa suite Office 365

À compter du 1er octobre 2023, Microsoft Teams ne fera plus partie de l’offre Office 365 pour les entreprises dans l’Union européenne et en Suisse. Les clients pourront profiter d’une réduction de 2 euros par mois ou 24 euros par an sur toute la suite de logiciels bureautique de Microsoft, mais sans Teams. C’est cette mesure qui avait été proposée en coulisse par Microsoft à l’Union européenne, mais les deux entités ne s’étaient visiblement pas mises d’accord sur toutes les modalités d’un tel changement d’offre.

Pour les entreprises qui voudront utiliser Microsoft Teams, il faudra souscrire à un abonnement supplémentaire à hauteur de 5 euros par mois ou 60 euros par an. C’est donc un surcoût de 3 euros par mois sur la note finale. Pour les petites et moyennes entreprises, l’offre Office 365 intégrant Teams sera toujours disponible, avec la possibilité de retirer Teams pour un coût moins onéreux.

Aujourd’hui, nous annonçons des changements proactifs qui, nous l’espérons, commenceront à répondre à ces inquiétudes de manière importante, alors même que l’enquête de la Commission européenne suit son cours et que nous y collaborons.

Nanna-Louise Linde, vice-présidente Microsoft Europe des affaires gouvernementales

Microsoft annonce aussi une interopérabilité avec les solutions concurrentes afin que des applications comme Slack, Zoom ou encore Salesforce puissent fonctionner en harmonie avec ses outils de communication (Outlook, Exchange, Teams).

Slack vs. Teams, un duel qui dure

La plainte de Slack datant de 2020 n’est qu’une partie de l’équation qui l’oppose à Microsoft. Le président de la société, Stewart Butterfield, avait déclaré la même année auprès du média The Verge : « Microsoft est peut-être anormalement préoccupée à nous neutraliser et Teams est leur moyen de le faire ». Les deux outils se sont pour ainsi dire tirés dans les pattes pendant la pandémie de Covid-19 alors que les usages de conversations et visioconférence étaient en plein boom avec la recrudescence globale du télétravail.

Source : Microsoft

Microsoft Teams s’est largement démocratisé au sein des grandes entreprises alors que Slack se voit davantage utilisé au sein des start-ups et moyennes entreprises. Les différences entre les deux services sont nombreuses : Teams se concentre plutôt sur les appels audio et vidéo, dans la suite logique de Skype, et Slack sur la collaboration via messagerie instantanée (même l’application s’est lancée dans l’audio puis la vidéo à partir de 2021).

On attend donc la décision de la Commission européenne, qui devra décider si cette initiative de Microsoft restaure une concurrence saine au sein du marché. Si ce n’est pas le cas, la firme devra faire face à sa première enquête antitrust depuis une quinzaine d’années, la firme avait par la suite dû payer une amende de 561 millions d’euros en 2013 pour avoir manqué de proposer aux utilisateurs de choisir leur navigateur web dans son système d’exploitation Windows 7.


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