Xbox va-t-il mourir du rachat d’Activision Blizzard ?

 
Depuis le début de l’année, plus rien ne va pour Xbox et ses fans : les jeux exclusifs promis ne sont pas encore là, certains jeux deviennent multiplateformes et, bien pires, les licenciements et fermetures de studios s’enchainent. Si les finances sont bonnes pour Microsoft, l’état de la marque Xbox semble au plus bas.
Source : Frandroid

Le mardi 7 mai 2024, à la surprise générale, Microsoft a annoncé la fermeture de quatre de ses studios de jeux vidéo sous la branche Zenimax Bethesda : Arkane Austin (Prey, Redfall), Tango Gameworks (Hi-Fi Rush), Alpha Dog Studios et Roundhouse Games. Ces deux derniers sont absorbés par Zenimax Online, le studio chargé des MMORPG de la firme comme The Elder Scrolls Online. La nouvelle a été un véritable séisme pour toute l’industrie du jeu vidéo. C’est la première fois que Microsoft procède à la fermeture de studios depuis 2016 et la fermeture de Lionhead Studios. Pour les fans, c’est une trahison, pour les journalistes et les analystes, le signe d’un véritable changement de stratégie pour Microsoft et sa marque Xbox.

Xbox devient Microsoft Gaming

Il convient d’abord de faire un état des lieux de la branche jeu vidéo de Microsoft. La firme a consenti de lourds investissements dans sa branche au cours des dernières années avec le lancement, à perte, de deux nouvelles consoles de jeux, mais aussi les investissements dans le Xbox Game Pass, le Xbox Cloud Gaming, et surtout le rachat de nombreux studios, d’abord indépendants puis carrément des éditeurs comme Bethesda et Activision Blizzard. L’intégration de ce dernier a profondément transformé l’activité jeu vidéo de Microsoft. Ainsi, grâce aux revenus d’Activision Blizzard, la division Microsoft Gaming a dépassé Windows en chiffre d’affaires pour la première fois de son existence. Microsoft est même en bonne position pour devenir numéro 2 du jeu vidéo, derrière le leader Tencent, mais devant ses rivaux Sony, Apple, Google et Nintendo. Le même trimestre où Microsoft enregistrait 22 milliards de dollars de bénéfices. L’entreprise est numéro 1 en bourse à l’échelle mondiale, devant Apple, avec plus de 3000 milliards de dollars de valorisation.

En réalité, avec le rachat d’Activision, cette branche jeu vidéo a tellement grossi que Microsoft a souhaité en faire une nouvelle entreprise séparée du reste du groupe : Microsoft Gaming. Elle a été annoncée en janvier 2022 avec le rachat de l’éditeur américain. Phil Spencer en est le CEO et répond toujours directement à Satya Nadella, CEO de Microsoft. Dans l’organigramme, on retrouve aussi Sarah Bond, présidente de Xbox, et Matt Booty, qui a évolué pour aujourd’hui être en charge des Xbox Game Studios et de Bethesda. L’éditeur Activision Blizzard garde, lui, son indépendance dans l’organigramme, pour le moment.

Cette mise en perspective est importante, car si les chiffres d’Activision Blizzard permettent de faire apparaitre un Microsoft Gaming en très bonne santé, ce n’est pas forcément le cas de la marque Xbox. Depuis le début de la génération, il se vend en moyenne deux PlayStation 5 pour une Xbox Series, malgré la présence d’une Xbox Series S à très petit prix, dont l’objectif est de faire du volume. Par ailleurs, on sait que Microsoft est déçue des résultats du Xbox Game Pass, son service d’abonnement au jeu vidéo qui a déjà séduit 34 millions de joueurs, mais dont la croissance a sérieusement ralenti. Aujourd’hui, c’est bien la vente de jeux et de DLC (Call of Duty, Sea of Thieves, Minecraft, Candy Crush)  sur PC, PlayStation, Switch, smartphones et Xbox qui font grimper les chiffres. En janvier, Microsoft avait déjà annoncé le licenciement de 1900 personnes dans son activité jeu vidéo. Vous le comprenez, l’activité Xbox n’est plus le fer de lance du jeu vidéo chez Microsoft.

Le seul succès Xbox et le studio est fermé

Après cet état des lieux, on en arrive à la fermeture des studios, et en particulier celle de Tango Gameworks. Il s’agissait du seul studio japonais de Microsoft, pourtant pays historique de cette industrie. On trouve à travers les années de nombreuses déclarations de Sarah Bond et Phil Spencer sur l’importance de la présence de Xbox au Japon, même si le constructeur n’a jamais été populaire sur ce marché, pour convaincre les développeurs locaux de venir sur son écosystème. Encore à l’édition 2023 du Tokyo Game Show, Phil Spencer déclarait vouloir investir dans les studios Xbox au Japon.

Hi-Fi Rush était un succès, mais le studio ferme // Source : Bethesda Softworks

De plus, Tango Gameworks est l’un des seuls studios à avoir sorti un jeu exclusif pour l’écosystème Xbox en 2023 dès le début de l’année avec Hi-Fi Rush, avant le lancement de Redfall, Starfield et Forza Motorosport et avec des succès en demi-teintes. Hi-Fi Rush a reçu une très bonne réception critique et remporté de nombreux prix pour Xbox, l’un des seuls jeux ces dernières années qui ont remporté des prix pour la firme. En avril 2023, Aaron Greenberg, le directeur du marketing chez Xbox, déclarait sur Twitter (X) que le jeu était un succès selon tous les critères de Microsoft : « Hi-Fi RUSH a été un succès retentissant pour nous et nos joueurs dans toutes les mesures et attentes clés. Nous ne pourrions être plus satisfaits de ce que l’équipe de Tango Gameworks a livré avec cette sortie surprise ». Tellement satisfait, qu’un an après la sortie du jeu, Microsoft annonce la fermeture pure et simple du studio. Un an ou presque avant l’annonce de cette fermeture, le 4 mai 2023, Phil Spencer déclarait : « Quand une équipe comme Rare veut faire Sea of Thieves, quand une équipe comme Obsidian veut faire Grounded, quand Tango veut faire Hi-Fi Rush alors que tout le monde pensait qu’ils allaient probablement faire The Evil Within 3… Je veux donner aux équipes la plateforme créative qui leur permettra d’aller au bout de leurs capacités et de leurs aspirations ».

Le 1er mars 2024, Sarah Bond félicitait le studio Tango Gameworks sur Twitter à l’occasion du 14e anniversaire du studio en indiquant « vouloir en célébrer beaucoup d’autres ». Deux mois avant la fermeture du studio. Le genre d’éléments qui illustrent à quel point Microsoft semble toujours naviguer à vue dans le jeu vidéo, sans une stratégie à long terme qui tienne dans la durée. Autre exemple, le studio Arkane Austin continuait de travailler sur une mise à jour pour le jeu Redfall quelques heures encore avant l’annonce de sa fermeture. Une mise à jour qui ne sera, a priori, jamais déployée.

« Vous n’avez rien appris, Xbox »

L’annonce de la fermeture d’Arkane Austin et Tango Gameworks marque une véritable cassure pour de nombreux fans de la marque. On a ainsi vu de fervents défenseurs de Xbox sur les réseaux sociaux interpeler la marque sur sa stratégie. On pense, par exemple, à Klobrille, 163 000 abonnés et qui a déjà pu travailler avec la marque sur sa communication. Il a remis la main sur un extrait du documentaire de Xbox sorti en 2021 pour fêter les 20 ans de la marque. Dans ce documentaire, Microsoft revient notamment sur la fermeture de son studio Lionhead, responsable jusque-là de la franchise Fable.

D’après Sarah Bond, la fermeture de Lionhead Studios devait servir de leçon pour éviter que Microsoft répète les mêmes erreurs. D’après Klobrille : « Malheureusement, vous n’avez absolument rien appris, Xbox ».

On retrouve aussi des extraits du documentaire de Double Fine Studio, racheté par Microsoft en 2019, sur la production de Psychonauts 2. Le documentaire aborde le rachat par Microsoft et on peut y voir un Matt Booty tentant de rassurer les développeurs sur leur avenir. L’un d’eux y déclare, telle une prémonition : « Phil Spencer et Matt Booty sont de super gars, ils vont venir et nous afficher de grands sourires en nous disant de continuer à faire ce qu’on sait faire. Deux ans plus tard, Stew de la compta et Bill du marketing se ramènent et là nous avons des problèmes ».

Pourquoi Microsoft a-t-il fermé ces studios ?

Alors pourquoi une entreprise qui réalise plus de 10 milliards de dollars de bénéfice en trois mois ressent le besoin de fermer plusieurs studios de jeux vidéo et de laisser des salariés sur le carreau ? D’après Matt Booty, il s’agit de réallouer les ressources de Microsoft pour mettre la « priorité aux titres à fort impact et à la poursuite des investissements dans le portefeuille de jeux à succès de Bethesda ». Il faut comprendre : miser sur les jeux à haut budget et les suites de franchise déjà connues comme Doom, qui devrait avoir un nouvel épisode dévoilé cette année, d’après nos sources, et c’est un secret de polichinelle à ce stade, dont on peut s’interroger sur l’exclusivité. La franchise historique Gears devrait aussi avoir le droit à la présentation d’un nouvel épisode en juin. Matt Booty pense aussi certainement au développement du prochain The Elder Scrolls ou au DLC de Starfield prévu cette année.

Ces nouvelles fermetures s’inscrivent aussi dans une crise plus large du jeu vidéo. Tous les éditeurs et studios annoncent des vagues de licenciements depuis plusieurs mois. Les raisons officiellement invoquées sont généralement un recrutement jugé trop fort pendant la pandémie, une croissance du marché au ralenti en raison de l’inflation, et des difficultés à trouver des financements. Les plus petits studios en particulier témoignent de difficultés à convaincre les banques et les investisseurs. Ce qui explique pourquoi certains indépendants se sont lancés dans des suites (Hades 2, Pony Island 2, World of Goo 2, etc.).

Pour revenir à Microsoft, le même Matt Booty va aussi déclarer, seulement quelques heures après la fermeture de Tango Gameworks, que l’entreprise a besoin : « de jeux plus petits qui nous donnent du prestige et des récompenses ». Comme le souligne The Verge, c’est exactement ce que proposait Tango Gameworks avec Hi-Fi Rush. On a donc du mal à comprendre la communication du géant vis-à-vis de ses équipes et les raisons de cette fermeture.

D’après le journaliste Jason Schreier pour Bloomberg, Microsoft a en réalité choisi les studios qui étaient entre deux cycles de production. Alors que les autres studios du groupe sont déjà au travail sur leur prochain gros titre, ce n’est pas le cas de Tango Gameworks qui a rendu Hi-Fi Rush et Arkane Austin qui a rendu Redfall. Les deux studios étaient en train de pitcher leurs prochains jeux à Microsoft quand la firme a décidé de licencier les équipes. On croit donc comprendre que les responsables des finances chez Microsoft auraient réclamé des fermetures au sein de Xbox, et que les cadres de la branche jeu vidéo ont tranché là où c’était le moins dommageable pour les productions en cours.  Dans les colonnes de Bloomberg, Jill Breaff, la présidente de Zenimax Bethesda indique « Il est difficile de soutenir neuf studios répartis dans le monde entier avec une équipe centrale restreinte dont la charge de travail ne cesse de croître ». On pourrait arguer que c’est Microsoft qui a décidé de racheter autant de studios et ne semble visiblement pas réussir à recruter les cadres nécessaires pour maintenir le paquebot à flot.

L’effroi chez les autres studios

Et les recrutements ne vont pas devenir plus simples à l’avenir pour l’entreprise parfois surnommée le Embracer américain, du nom du groupe européen de jeu vidéo qui a licencié et supprimé de nombreux studios au fil des derniers mois. En effet, Microsoft et Xbox étaient vu jusqu’à présent, à tort ou à raison, comme une sorte d’El Dorado du développement de jeu vidéo. Un endroit où l’on pouvait facilement trouver des finances pour des jeux tels que Grounded, Pentiment ou Hi-Fi Rush. Un endroit susceptible d’accueillir des studios différents des autres comme Double Fine, Obsidian ou Arkane. Au point où des joueurs espéraient voir Microsoft racheter encore plus d’éditeurs comme Sega ou Konami. En quelques mois, et plus particulièrement depuis la fermeture des studios, la situation s’est complètement renversée comme en témoigne le patron du studio Arkane Lyon, Dinga Bakaba, qui n’a pas mâché ses mots dans un fil sur Twitter, notamment en parlant d’un « putain de coup de couteau au ventre » pour ses équipes.

On peut lire chez The Verge qu’en interne, les développeurs tremblent désormais en attendant de savoir quels seront les prochains. Car Microsoft ne devrait pas s’arrêter là : « Les employés de Xbox se préparent à la suite des événements, car il semble peu probable que nous ayons vu la fin des licenciements et des réductions d’effectifs de Microsoft dans le secteur des jeux. Il se murmure parmi les employés que les principaux Xbox Game Studios seront les prochains à faire l’objet de réductions ». Et là il est difficile de ne pas penser aux studios qui devraient bientôt sortir leurs prochaines productions. Le studio Ninja Theory doit sortir Senua’s Saga Hellblade 2 le 21 mai 2024, soit dans 8 jours au moment où cet article est écrit. Microsoft n’a toujours pas commencé la campagne marketing autour du lancement de ce jeu, qui ne bénéficiera même pas d’une version physique vendue en magasin. Il s’agit pourtant d’un jeu très attendu, annoncé en même temps que la Xbox Series X lors des Game Awards 2019, avec l’ambition d’être un porte-étendard du jeu solo au même titre que les grosses productions de PlayStation. Si, comme on peut facilement le prédire, les ventes du jeu déçoivent Microsoft, le studio Ninja Theory risque-t-il aussi la fermeture ? Quid du studio Obisidian ? Les développeurs préparent la sortie du RPG Avowed à l’automne 2024 qui ne semble pas réussir à fédérer un enthousiasme généralisé chez les joueurs.

Source : Frandroid

Call of Duty, Candy Crush, Minecraft, The Elder Scrolls et Fallout sont-elles devenues les seules franchises importantes aux yeux de Microsoft ? Quels sont les studios en danger si Tango Gameworks et Arkane peuvent être fermés du jour au lendemain ? Les Xbox Game Studios comprennent beaucoup de spécialistes des projets de taille moyenne comme Compulsion Games ou Double Fine Productions. Quid enfin du studio The Initiative, créé de toutes pièces par Microsoft en 2018 et qui semble avoir bien du mal à rendre son premier jeu Perfect Dark.

Que reste-t-il de Phil Spencer ?

Ce n’est pas la première crise que traverse Xbox. En fait, on peut même dire que la marque y est habituée. Au moins, depuis le lancement de la Xbox One en 2013, on ne compte plus les problèmes et les bourdes de la marque. Console trop chère, pas assez de puissance, développement complexe, culture du crunch (comme dans le reste de l’industrie), turnover très important, notamment en raison d’une surutilisation de contractuels, manque de jeux, manque de communication et événements décevants, la liste est très longue. Une personne parvenait jusque-là toujours à ramener le calme, notamment parmi les fans de la marque : Phil Spencer. Le très charismatique patron de Microsoft Gaming s’en sort toujours très bien en interview et arrive à communiquer un amour pour le jeu vidéo qui paraît bien plus franc que celui des exécutifs habituels de son niveau. Difficile de croire le patron d’EA Games quand il indique aux investisseurs avoir joué au prochain Battlefield, mais on n’a pas de mal à imaginer Phil Spencer manette en main. Notamment parce que ce dernier affiche publiquement son activité vidéoludique sur son profil gamertag XboxP3. C’est à double tranchant, un joueur a récemment détruit la base de Phil Spencer dans le jeu Fallout 76.

Pourtant, le patron semble avoir complètement disparu d’Internet ces derniers jours. Son compte Twitter, habituellement très actif pour parler de la vie de la marque, mais aussi pour rassurer en cas de problèmes, n’a pas donné signe d’activité depuis le lundi 6 mai. À la place, c’est la présidente de Xbox, Sarah Bond, qui est montée en front dans l’une des meilleures illustrations de la « falaise de verre » à ce jour. Il s’agit d’un phénomène où les femmes sont davantage susceptibles d’arriver à des postes à responsabilité pendant les périodes de crise.

Interrogée par Bloomberg, dans le cadre de l’annonce de l’ouverture du Xbox Store sur smartphone en juillet, Sarah Bond semble surprise et n’arrive pas vraiment à trouver les mots pour justifier la fermeture de Tango Gameworks. Elle indique que les critères de succès changent d’un studio à l’autre ou d’un jeu à l’autre. Elle indique que Microsoft regarde « de nombreux facteurs » quand il s’agit de prendre cette décision. Pendant sa déclaration, l’extraordinaire croissance de Xbox est affichée à l’écran, comme pour souligner encore davantage le caractère incongru de cette fermeture.

Phil Spencer a pris les rênes de Xbox en 2013, suite au très mauvais lancement de la Xbox One. Cela fait donc désormais 10 ans qu’il est à la tête de la division, un temps suffisamment long pour dessiner un bilan, même si, il faut le rappeler, Phil Spencer n’est devenu vice-président de Microsoft qu’en 2017 seulement. On estime que c’est à cette date que Satya Nadella s’est laissé convaincre de donner carte blanche et un budget visiblement très élevé pour faire de Xbox un champion du secteur. Quelques mois plus tard, Microsoft commencera à racheter des studios en série. Un temps également suffisamment long pour que l’on se pose la question du remplacement de Phil Spencer. Lors de l’annonce du rachat d’Activision Blizzard, on pensait que le dossier serait son dernier coup d’éclat avant de laisser la main, peut-être à Sarah Bond ou Matt Booty. Finalement, le dirigeant est toujours là et doit désormais annoncer une série de mauvaises nouvelles : jeux multiplateformes, licenciements et fermetures de studios. Une façon de ne pas trop savonner la planche pour le successeur ?

Xbox a-t-il été victime du rachat d’Activision ?

À la lecture de tous ces éléments, on en vient à se demander si le rachat d’Activision Blizzard par Microsoft n’a pas tout simplement condamné l’avenir de sa marque Xbox. Les chiffres de ventes mirobolants de Call of Duty sont-ils en train de pousser l’entreprise à devenir un éditeur multiplateforme ? La firme a promis une nouvelle génération de consoles au gap de puissance démesuré, certainement pour l’horizon 2028. La marque Xbox ne devrait donc pas disparaitre de si tôt, mais Microsoft semble de plus en plus mettre l’accent sur son activité multiplateforme au détriment de ses consoles et son abonnement. The Verge révèle par exemple que la firme hésite à proposer le prochain Call of Duty dans le Xbox Game Pass dès le lancement du jeu, ce qui est pourtant la grande promesse de son service d’abonnement. Microsoft pourrait aussi faire le choix de réserver le jeu phare à l’abonnement le plus cher, le Xbox Game Pass Ultimate, dont le prix augmenterait, au passage. On en arrive au point où l’on se demande si ce n’est pas Activision Blizzard qui est en train d’absorber Xbox et non l’inverse.

À quel point est-ce que les cadres de Microsoft ne laissent aujourd’hui plus le champ libre aux dirigeants de sa branche Gaming pour mener à bien leur stratégie et en demandant des comptes, alors que l’industrie du jeu vidéo traverse une crise sans précédent ? Phil Spencer a-t-il eu le dernier mot sur la fermeture de ces studios ? Se concentrer sur des franchises au succès toujours fragile et incertain avec des coûts de production démesurés est-il la bonne stratégie alors que tous les récents succès du jeu vidéo ont été développés par de petites équipes, quand ce n’est pas une seule personne (Palworld, Balatro, Manor Lords, Vampire Survivors) ? On revient à ce qui semble être le problème fondamental pour Microsoft depuis 20 ans : le jeu vidéo n’est pas le marché tech. C’est une industrie, oui, mais inscrite dans l’art et la pop culture. On ne développe pas un jeu vidéo comme on crée un logiciel ou un PC Surface. Créer des succès comme le font Nintendo ou Sony demande de la stabilité dans le temps et une stratégie bien ancrée. Ces deux derniers peuvent connaitre des échecs, mais cela ne les fait pas fléchir et ils n’en viennent pas immédiatement à tout reconsidérer sur leur place dans le secteur. Quand Nintendo sort la Wii U, le géant japonais persévère et crée le succès avec la Nintendo Switch, mais aussi le développement de jeux révolutionnaires comme The Legend of Zelda Breath of the Wild grâce à des développeurs que le studio a su pérenniser et fidéliser. Dans le même ordre d’idées, lors de la sortie de Final Fantasy VII Rebirth, Square Enix a confié que l’équipe de développement était composée pour l’essentiel de vétérans déjà présents lors de la création de Final Fantasy VII Remake, facilitant la création d’une suite.

Avec un Activision Blizzard dont les jeux doivent rester multiplateformes, contrats passés durant la procédure de rachat obligent, et une activité console de jeu toujours au point mort malgré de longs efforts, les cadres de Microsoft sont-ils sur le point de condamner Xbox ? On espère, en particulier pour les équipes, que la firme comprendra l’importance de s’attacher à une stratégie sur le long terme et fera confiance aux développeurs et artistes qui tentent chaque jour de créer les meilleurs jeux possibles. Un élément bien difficile à discerner au milieu des feuilles de calcul Excel.