C’est un fait : très rares sont les vélos électriques entièrement fabriqués en France. Il ne faut d’ailleurs pas confondre « fabriquer » et « assembler ». Les marques aiment jouer avec les mots. « Assembler » consiste à réceptionner des pièces déjà fabriquées et à les imbriquer les unes avec les autres. En résulte alors un vélo tout neuf.
Une région du monde en particulier est réputée pour fabriquer les cadres de vélo : l’Asie. Chez Moustache, c’est plus précisément une usine taïwanaise qui réalise cette tâche. Les cadres sont ensuite envoyés en France, dans les ateliers Moustache de Thaon-les Vosges. À ce moment-là, le processus d’assemblage peut débuter.
Ciao Taïwan
Déterminée à révolutionner ses méthodes, réduire son empreinte carbone et mettre le circuit court au cœur de son cahier de charge, Moustache, a pour la première fois de son histoire, pris son indépendance vis-à-vis de Taïwan. L’idée étant de fabriquer un cadre made in France, voué à équiper son tout dernier vélo électrique : le Moustache J.
Frandroid s’est entretenu avec la marque durant les ProDays 2023, à Paris en juin, pour comprendre les tenants et aboutissants de ce projet, ainsi que les coulisses de fabrication. L’occasion pour nous d’échanger avec Clément Bonneau, responsable des relations presse de l’entreprise.
Le cœur du cahier des charges a été pensé autour d’une idée précise : produire un cadre ouvert et suspendu aussi rigide qu’un cadre fermé. Pour ce faire, Moustache évoque un procédé de fabrication inédit dans le milieu du vélo : « Nous utilisons la fonderie, un procédé avec lequel nous faisons couler de l’aluminium dans un moule », nous explique-t-on.
Et de poursuivre : « Par gravité, cela va boucher les interstices », indique Clément Bonneau. Dans un dossier technique envoyé à Frandroid, Moustache précise : « Nous avons pu créer un moulage avec un corps creux capable d’intégrer les éléments d’une assistance électrique tout en conservant des qualités dynamiques de résistance et de rigidité », assure la marque.
« C’est le vélo le plus costaud de la gamme Moustache »
Résultats : le cadre se débarrasse de toute trace de soudure, et affiche un aspect très fluide. Esthétiquement, c’est aussi ce que l’on peut apercevoir sur les vélos électriques Cowboy, par exemple. La firme vosgienne insiste en expliquant avoir ajouté des renforts internes pour garantir ce fameux niveau de rigidité voulu.
Selon Clément Bonneau, ce Moustache J surpasse les normes européennes sur ce domaine. « C’est le vélo le plus costaud de la gamme Moustache ».
Le partenaire fondeur de Moustache « utilise un alliage d’aluminium de première fusion, en provenance de fournisseurs français et italiens », expose la marque. « Il est affiné directement du minerai, sans retraitement de crasses ou autres résidus d’aluminium divers. Tous les rebuts et surplus de matière sont recyclés par refonte. »
Cela veut aussi dire que cet alliage n’est pas issu d’aluminium recyclé. Le groupe aurait sinon parlé d’alliage de seconde fusion. Imaginé en deux parties, le cadre est coulé à Vitrolles, dans les Bouches-du-Rhône, avant d’être envoyé à Poligny dans le Jura, pour l’usinage.
Le thermolaquage, qu’est-ce que c’est ?
« Plusieurs petites sondes viennent notamment palper les endroits du cadre pour voir si tout est aligné », nous explique M. Bonneau. C’est une étape importante pour garantir la fiabilité et la bonne conception des pièces.
La phase suivante consiste à tout envoyer à Schirmeck en Alsace, pour le thermolaquage. Ce procédé revêt plusieurs avantages : « Nous avons fait le choix d’une peinture en poudre, et non d’une peinture vernie. Cela offre une meilleure durabilité, protège des rayures, ne contient aucun solvant et utilise aussi cinq fois moins d’eau », énumère Clément Bonneau.
La dernière étape est chapeautée par les ateliers de Moustache, à Thaon-les Vosges, juste à côté d’Épinal : il s’agit de l’assemblage des deux parties du cadre, puis du montage complet du vélo. Toute cette danse 100 % tricolore permet à Moustache de réduire considérablement l’empreinte carbone de son cadre.
« Concernant le chemin complet de la production, nous sommes passés de 15 000 km depuis Taïwan, à moins de 1000 km avec ce nouveau processus », précise Clément Bonneau. « C’est ici du circuit court ».
Un vélo électrique 100 % français, vraiment ?
Peut-on pour autant parler de vélo électrique 100 % français ? Pas vraiment. Certes, Moustache réalise ici une belle prouesse qu’il convient de saluer et que l’on espère inspirante pour les autres marques. Mais les moteurs et les batteries Bosch proviennent tout de même d’Allemagne, par exemple. Et encore.
Comme l’explique Bosch sur son site officiel, la production des moteurs a lieu dans l’usine Miskolc en Hongrie, alors que la production des batteries a été externalisée aussi en Hongrie… mais également à Penang, en Malaisie. L’empreinte carbone de ces composants peut être notable.
Toujours est-il que fabriquer un cadre en France, par une usine française et en circuit court, reste un choix fort de la part de Moustache. Cette méthode de fabrication est probablement coûteuse pour la marque, qui se lance néanmoins dans un projet noble pour la planète et l’environnement.
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