Les plus anciens trouveront le nom « Razer Edge » familier. Et ce n’est pas pour rien : ce n’est pas la première fois que le constructeur singapourien utilise ce surnom pour l’un de ses produits. Mais qui se souvient vraiment de la Razer Edge originale, une sorte de PC tablette avec deux manettes en forme de PS Move rattachées sur les côtés ? Ceci étant dit, le retour de cette catégorie prouve bien que la marque aux trois serpents pense au marché des consoles portables. Et cette nouvelle Razer Edge de 2023 est peut-être son meilleur essai en la matière, bien qu’il ait le goût d’un prototype inachevé.
Fiche technique
Modèle | Razer Edge |
---|---|
Dimensions | 26 cm x 1,1 cm x 8,5 cm |
Support | Support de carte mémoire MicroSD |
Définition maximale | Full HD |
Wifi | Wi-Fi 6E |
Bluetooth | Oui |
Poids | 264 g |
Prix | 499 € |
Fiche produit |
La machine est prêtée par Razer pour ce test.
Design
Pour comprendre ce goût de « prototype inachevé », il faut d’abord bien comprendre une chose : « Razer Edge » n’est vraiment que le nom du produit en forme de smartphone qui s’intègre au centre des Razer Kishi V2 Pro, une manette mobile se connectant en USB-C. Cette dernière fait concurrence au GameSir X2 Pro et autres Backbone One de ce monde, quand le Razer Edge semble surtout être un prototype de Razer Phone abandonné, puis ressuscité pour créer une console. Qui a déjà connu les smartphones du constructeur sera en effet en terrain connu, puisque le produit de 8,45 x 16,78 x 1,08 cm a tout d’un smartphone en main. Surtout en considérant ses grandes lignes rectangulaires qui faisaient la force de l’entreprise, avant qu’elle n’abandonne le marché.
Toujours est-il qu’à 263 grammes pour une diagonale de 6,8 pouces, il s’agit d’un produit assez massif pour être considéré comme une petite tablette. Ce qui sort vraiment le Razer Edge de cette impression de prototype de smartphone est que tous ses éléments sont organisés à l’horizontale, y compris le capteur photo intégré bien au centre de l’écran en mode paysage. Mais de l’autre côté, les bords arrondis de son écran connotent plutôt une vision « smartphone » de l’ensemble, alors qu’à l’usage, ces derniers sont plus une nuisance qu’une caractéristique dans le cadre du jeu vidéo. En prime bien sûr du ratio 20:9, loin des 16:9 utilisés majoritairement dans la plupart des jeux et sur les téléviseurs.
Autrement, le produit est bien pensé. En haut, on retrouve les sempiternelles touches de volume et de verrouillage. En bas, la trappe permettant d’accueillir une microSD jusqu’à 2 To. À gauche, le port USB-C qui servira principalement à connecter les Razer Kishi V2 Pro fournies d’office. Et des deux côtés, un haut-parleur. C’est peut-être la plus grande déception du produit, surtout en se remémorant les caractéristiques du premier Razer Phone : ces haut-parleurs ne sont pas placés à l’avant, ce qui aurait été parfait pour une console.
À bien des égards donc, le Razer Edge est un produit un peu bâtard. Certaines des caractéristiques de cette console nous laissent penser qu’elle veut avant tout plaire aux joueurs mobiles, quand d’autres vont plutôt dans le sens des joueurs cloud/remote play. Mais au bout, elle ne réussit pas à être parfaitement optimisée pour l’un ou l’autre.
Manette
Les manettes Razer Kishi V2 Pro sont fournies d’office avec le Razer Edge. Ces dernières ont le mérite de parfaitement s’adapter au format de la console, faisant qu’elles l’enserrent parfaitement bien. Ce n’est pas le cas de toutes ces solutions, les téléphones arrondis ayant une tendance marquée à la bougeotte à l’usage sur ce genre de périphériques.
Pour rappel, il s’agit de manettes extensibles qui se connectent par le biais du port USB-C, ce qui permet d’éviter la latence ajoutée par l’usage du Bluetooth. La disposition des boutons est inspirée par les manettes Xbox, bien qu’on note un grand absent : il n’existe pas de moyen d’appeler la touche Xbox, qui peut pourtant être très utile sur de nombreux services comme le Xbox Game Pass ou les interfaces cloud utilisant le mode Big Picture de Steam.
On y retrouve des joysticks similaires à ceux des Joy-Cons de la Nintendo Switch, et des boutons qui utilisent des switchs clicky bien audibles comme Razer sait les faire. Leur précision est excellente, et la solution fait des miracles sur la croix directionnelle incroyablement confortable des Kishi V2 Pro. L’ajout le plus controversé de Razer est la présence de deux touches de raccourcis M1/M2 qui se posent à côté et viennent raccourcir les gâchettes L2/R2. Résultat ? Malgré leur grande course, les gâchettes sont moins confortables que d’ordinaire.
C’est d’autant plus décevant que ces touches M1/M2 sont moins utiles qu’on ne pourrait le croire. Nous en parlons dans la partie logicielle.
Connectique
Outre la connectique USB-C à la norme 3.0, le Razer Edge profite du Wi-Fi 6E, du Bluetooth 5.2 et d’une prise jack 3.5mm lorsque les Razer Kishi V2 Pro sont connectées. Une connectique plus que décente en considérant que les consoles Android font trop souvent l’impasse sur des SoC modernes proposant les dernières technologies réseaux, quand bien même ces dernières sont importantes pour le remote play et le cloud.
Webcam et audio
Nous avons un simple capteur 5 mégapixels à l’avant, dont les caractéristiques précises ne sont pas communiquées par le constructeur. Et on le comprend, puisque le capteur est plus relatif à celui intégré à un PC portable qu’à celui d’un smartphone. Le Razer Edge propose de pouvoir diffuser en direct ses parties sur Facebook Live ou YouTube (et non, pas de Twitch), mais qui voudrait vraiment profiter de cette capacité sur un appareil mobile en sachant les mouvements que l’on doit faire pour jouer ? La pensée est assez amusante. Au moins, la solution a le mérite d’exister et d’être bien intégrée.
La déception vient plutôt des haut-parleurs. Outre leur placement sur les côtés de la machine, peu optimisé, le son prodigué par ces enceintes est loin d’être de qualité. L’entreprise possède pourtant THX, mais rien n’y fait : les aigus sont criards, surtout à haut volume, les basses sont totalement absentes, et les médiums à peine discernable. Là encore, la comparaison avec le Razer Phone fait mal, lui qui avait un excellent système de son.
Écran
Le Razer Edge intègre une dalle AMOLED de 6,8 pouces supportant une définition maximale de 2400 x 1080 pixels, soit un ratio 20:9. Cette dalle est compatible avec un taux de rafraîchissement maximal de 144 Hz, réglé à 120 Hz par défaut.
Sous notre sonde et avec le logiciel DisplayCal, nous retrouvons une excellente couverture de 188,8% de l’espace sRGB pour 133,7% de l’espace DCI-P3. La luminosité maximale est mesurée à 447 cd/m², soit décemment lumineux pour le jeu en extérieur. Là où le bât blesse, c’est la colorimétrie : la température de couleurs est trop froide à 7134K, et le Delta E00 moyen mesuré sur l’espace DCI-P3 est de 3,49, un score passable aujourd’hui dans l’univers des smartphones et tablettes.
Soyons cependant honnêtes : dans le cadre d’une console portable, ces scores sont déjà excellents. Le Razer Edge est après tout la seule console sous Android du marché à proposer un affichage à 144 Hz. La vraie déception à l’usage vient donc une nouvelle fois de ces bords arrondis, qui viennent cacher certains éléments importants des interfaces en jeu.
Logiciel
Le Razer Edge est propulsé par Android 12, sans aucune interface propriétaire qui viendrait modifier l’expérience. Les services Google, dont le Play Store, sont préinstallés. Et c’est peut-être la plus grande déception du produit, qui ne dispose pas d’un lanceur d’applications créé spécifiquement pour lui, comme c’est le cas de la Logitech G Cloud. Ni même de quelconques contrôles relatifs au matériel, comme la possibilité de régler manuellement la puissance du ventilateur par exemple.
En lieu et place, nous avons donc Razer Nexus, l’application liée à la Razer Kishi V2 Pro, qui fait office de « lanceur par-dessus le lanceur » pour assurer la compatibilité. Il est presque dommage que le constructeur n’ait pas fait l’effort d’en faire un véritable lanceur pour le Razer Edge, mais passons. L’usage est excellent, l’application Nexus servant aussi bien de base de contrôle que de curateur de contenus optimisés pour les manettes. Que ce soit sur le Google Play Store ou sur le Microsoft Game Pass d’ailleurs, puisque ce dernier bénéficie d’une intégration.
La fonctionnalité principale de Nexus est sa capacité à créer une manette virtuelle pour les jeux qui ne sont pas compatibles nativement. Ainsi, il vous est possible de définir des zones de l’écran liées à une touche. Cette fonctionnalité est exclusive à la Razer Kishi V2 Pro, et n’est pas si simple à mettre en place sur d’autres appareils : c’est une réussite pour Razer et son périphérique. Mais pas particulièrement pour la Razer Edge, qui n’a pas vraiment de petites choses en plus pour elle. Notez qu’en prime, certains jeux qui ont une compatibilité manette, comme Call of Duty Mobile, ne reconnaissent pas la Kishi V2 Pro : il vous faudra passer par la manette virtuelle, encore une fois.
Qui dit Play Store dit naturellement compatibilité les jeux Android, mais aussi avec toutes sortes de plateformes cloud comme GeForce Now, Xbox Game Pass Ultimate ou Shadow. Et dit aussi compatibilité avec les applications de remote play, comme Steam Link ou Xbox. Notez cependant que l’application officielle de remote play de Sony n’est pas compatible : il vous faudra passer par des solutions alternatives comme Chiaki ou PSPlay.
Autre sujet important : les touches de raccourci M1/M2. Celles-ci sont en vérité limitées au fait de dupliquer une touche déjà existante dans la liste déterminée par Razer. Et pire encore : elles ne peuvent pas être utilisées au-delà, pour définir les raccourcis d’un émulateur ou émuler la touche Xbox par exemple. Leur intérêt est donc vite limité.
Performances
Voilà le grand point de différence du Razer Edge. Notre modèle est en effet équipé du Snapdragon G3X Gen 1, un SoC mobile sorti début 2022 et dédié aux consoles portables. À bien des égards, il s’agit d’une version légèrement overclockée du Snapdragon 888+.
Sur le Razer Edge vendu en France, nous retrouvons en prime 6 Go de RAM LPDDR5 et une mémoire interne de 128 Go en UFS 3.1. Ces 6 Go de RAM sont peut-être la plus grande déception, et nous allons voir immédiatement pourquoi.
Benchmarks théoriques
- AnTuTu 10 : 873172
- CPU : 227576
- GPU : 288082
- MEM : 151282
- UX : 206232
- PC Mark 3 : 14669
- Wild Life : 5479 / 32,81 FPS
- Wild Life Extreme : 1428 / 8,56 FPS
- Aztek Vulkan High : 38/26 FPS
- Car Chase : 51/62 FPS
- Manhattan 3.0 : 115/147 FPS
- Geekbench 5.2 : 900 / 3324
- Geekbench 5.2 Open CL : 4487
- Geekbench 5.2 Vulkan : 4193
- Geekbench 6 : 1338 / 3665
- Geekbench 6 OpenCL : 4195
- Geekbench 6 Vulkan : 4245
- R/W séquentiel : 1445 MB/s – 700 MB/s
- R/W random : 66,3 IOPS – 66,2 IOPS
C’est ici que l’on peut voir une grosse différence théorique, surtout en comparant l’usage avec un Oppo Find X5 équipé du Snapdragon 888 : la RAM est à 8 Go sur ce dernier. C’est ce qui peut potentiellement expliquer les différences entre les benchmarks plus bureautiques, à l’avantage de l’Edge, et ceux dédiés à la 3D : un pool de RAM plus grand est nécessaire pour tirer le meilleur parti de la configuration.
En jeu
C’est d’autant plus dommage que ces 6 Go de RAM ont de réelles conséquences sur les possibilités de la machine. Si on maintient tranquillement les 60 FPS en poussant Fortnite à fond, lui qui est d’ailleurs facilement disponible grâce à la présence du launcher Epic Games dans Razer Nexus, Genshin Impact et son large univers éprouvent plus de mal à maintenir leurs performances en très élevé à 60 FPS. Le 30 FPS reste heureusement assez fluide.
Mais surtout, c’est du côté de l’émulation que nous sommes quelque peu déçus. Si un God of War 2, l’un des jeux les plus complexes à émuler de la PS2, tourne à la perfection même en poussant la définition interne à x2, les jeux Switch sont une autre affaire. Avec 6 Go de RAM, aucun jeu 3D complexe n’accepte de se lancer, y compris les Zelda. Il faudra se limiter à des jeux plus modestes de la plateforme, mais ce n’est pas exactement ce que l’on a en tête en se payant un appareil premium de la sorte.
Côté cloud gaming et remote play, il faut bien avouer que l’écran 144 Hz en ratio 20:9 est bien souvent gâché. La Xbox et la PS5 n’offriront jamais plus qu’un simple 16:9 à 60 FPS, au même titre que le cloud gaming du Game Pass Ultimate. Dans nos tests, seuls Shadow et GeForce Now peuvent vraiment tirer parti de cet écran, pour un résultat grisant en main.
Refroidissement et bruit
Le design thermique du Razer Edge est similaire à celui de la Nintendo Switch. Une rainure sur le bas du dos de l’appareil lui permet d’aspirer l’air frais, qui est expulsé sur la rainure dédiée en haut.
L’appareil ne dépasse pas les 47,6°C en façade pour 43,3°C à l’arrière, ce qui est honnête en considérant sa puissance. Mais surtout, le ventilateur de Razer sait rester discret et n’est qu’à peine audible. Seule chose qui surprendra l’utilisateur moyen : l’entendre tourner même lorsque l’appareil est en veille.
N’oubliez pas que le grand avantage des produits Android avec ventilation active n’est pas de pouvoir booster les performances du système, mais de les maintenir plus longtemps. Ainsi, à fiche technique égale avec par exemple le Find X5, le Razer Edge saura véritablement tenir ses performances maximales, quand le Find X5 abandonnera au bout d’une dizaine de minutes.
Autonomie
Le Razer Edge est équipé d’une batterie plutôt commune de 5000 mAh, et est livré avec un simple câble USB-C pour la recharge. Vous devrez donc disposer de votre propre bloc d’alimentation.
Si le constructeur avance une autonomie de plus de 10 heures en streaming, soit via le cloud ou le remote, tout cela est bien facile : les SoC mobiles sont faits pour optimiser la vidéo au maximum. En usage natif comprenant des jeux 3D, on retrouve plutôt une autonomie d’environ 5/6 heures qui reste tout à fait honnête pour ce type de produit, particulièrement en considérant le haut taux de rafraîchissement utilisé.
Prix et disponibilité
Le Razer Edge est commercialisé en France au prix de 499,99 euros. Ce prix intègre les Kishi V2 Pro, qui sont fournies dans le pack.
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