« Maintenant on fait la course » : pourquoi les patrons de Renault et Peugeot s’opposent sur la voiture électrique

 
Alors que la réglementation européenne CAFE, qui fixe les quotas de CO2 des constructeurs, va être durcie au 1 janvier 2025, tous les dirigeants ne sont pas d’accord sur le sujet. C’est notamment le cas des patrons de Stellantis (Peugeot, Citroën, Fiat, etc) et Renault, qui sont particulièrement opposés sur la stratégie à adopter.
Carlos Tavares (PDG de Stellantis) et Luca de Meo (PDG de Renault)

On le sait, l’Union Européenne fait la chasse aux émissions de CO2 et aux voitures jugées polluantes. C’est notamment pour cela qu’elle va interdire la vente de véhicules thermiques sur son territoire à partir de 2035, de même que les hybrides rechargeables, jugés nocifs pour l’environnement.

Un profond désaccord

Mais cela ne va pas se faire du jour au lendemain. Bruxelles a ainsi mis en place la réglementation CAFE (Corporate Average Fuel Economy) depuis le 1er janvier 2021. Pour mémoire, cette dernière concerne tous les constructeurs qui vendent des voitures sur le sol européen. L’ensemble des voitures neuves vendues en Europe doit respecter une moyenne d’émissions de CO2, actuellement fixé à 115,1 grammes par kilomètre.

Le plafond varie cependant selon les marques, puisqu’il était en 2020 de 91,6 g/km pour PSA (devenu Stellantis depuis la fusion avec le groupe Fiat) contre 130,6 g/km pour Jaguar-Land Rover. Et gare à ceux qui ne respectent pas cette règle, car l’amende est particulièrement salée. Et pour cause, les constructeurs qui ne se tiennent pas à ces objectifs doivent payer une amende de 95 euros pour chaque gramme de CO2 supplémentaire et par véhicule vendu. À noter qu’il est possible pour les marques qui émettent beaucoup d’acheter des crédits-carbone à celles qui rejettent moins de gaz, comme Tesla.

Carlos Tavares, le président du géant de l’automobile Stellantis
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Oui mais voilà, à partir de 2025, cette réglementation va devenir encore plus sévère, puisque la moyenne européenne va tomber à 93,6 g/km (une réduction de 15 %). Cela ne plaît pas vraiment aux constructeurs automobiles, déjà sous pression. Car en plus de devoir réduire leur part de voitures thermiques, ils font face à de grosses difficultés pour vendre leurs autos électriques puisque la demande est en baisse.

Ainsi, un document non signé mais qui émanerait de Luca de Meo, patron de Renault et président de l’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA) à l’attention de Bruxelles, demande un report du durcissement des règles à 2027.

Mais tous ne sont pas de cet avis. C’est notamment le cas de Carlos Tavares, le dirigeant du groupe Stellantis. Cité par le site américain Bloomberg, ce dernier a montré sa vive opposition à son homologue de la marque au losange. Pour lui, « il serait surréaliste de changer maintenant les règles ». Il explique que « tout le monde connaît les règles depuis longtemps, tout le monde a eu le temps de se préparer, et donc maintenant on fait la course ».

Des situations bien différentes

La position de l’homme d’affaires peut sembler très surprenante, quand on sait à quel point ce dernier a pris la parole pour s’opposer à la marche forcée vers le tout électrique au cours des dernières années. Mais malgré la baisse des bénéfices du groupe et les difficultés liés aux ventes en baisse de la Fiat 500e et aux livraisons de la Citroën ë-C3, Carlos Tavares est très confiant. Il estime pouvoir tenir les objectifs, notamment grâce au développement de sa gamme électrique « abordable » : l’ë-C3, mais aussi la Fiat Grande Panda ou le duo Citroën ë-C3 Aircross / Opel Frontera Electric.

Tout n’est pas rose non plus du côté de chez Renault, qui semble réellement craindre de ne pas être en mesure d’atteindre les objectifs fixés par l’Union Européenne. En effet, le constructeur misait beaucoup sur le succès de sa petite Dacia Spring, dont les ventes ont fortement chuté avec la suppression du bonus écologique du fait de sa production en Chine. De plus, la Mégane E-Tech se vend assez moyennement, une baisse cependant compensée par le succès du Scénic E-Tech. Ce dernier s’est placé sur la 3ᵉ marche du podium en France en août.

Luca de Meo, PDG de Renault aux côtés de la Renault 5 E-Tech

De fait, Luca de Meo menace : en reprenant le mix de 2024, il faudrait baisser la production de plus de 2,5 millions de voitures thermiques pour atteindre les objectifs CAFE 2025, au risque de devoir payer plus de 13 milliards d’euros d’amende.

La firme au losange espère cependant pouvoir compter sur sa R5 E-Tech, qui démarre à 25 000 euros et qui devrait rencontrer un franc succès grâce notamment à son style rétro, pour remonter la pente. Le constructeur prépare également le lancement de sa Renault 4 E-Tech, que nous devrions découvrir lors du prochain Mondial de l’auto de Paris qui ouvrira ses portes le mois prochain, avant la présentation de la Twingo électrique, promise à 20 000 euros hors subventions, qui devrait arriver en 2026.


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