Road trip : on a roulé 1100 km à travers l’Europe en une journée à bord d’une voiture électrique

 
L’avenir est à la voiture électrique, mais les longs voyages continuent de poser des problèmes, mais peut-être moins qu’on le pense. Pour l’occasion, nous avons traversé 3 pays de Paris jusqu’au fief de Skoda, en République tchèque, en passant par l’Allemagne. Soit 1 100 km sur une seule journée, en Skoda Enyaq Coupé RS, et nous sommes toujours vivants ! Récit de notre périple.
Skoda Enyaq Coupé RS

Gros rouleur nécessitant peu de pauses, je ne vois en l’électrique que contrainte et perte de temps. Comme un abandon de ma liberté de mouvement sur l’autel d’une technologie plus vertueuse… parait-il. C’est donc avec une logique désarmante que je décide de me rendre au musée Skoda, 1 100 km et 2 frontières plus loin, avec le tout nouvel Enyaq Coupé RS iV, 100 % électrique.

4h48, un pluvieux dimanche matin de début septembre. Plein cœur de Paris, 97 % de batterie. Je programme la destination : Mlada Boleslav, fief du constructeur Tchèque, et regarde, dubitatif, ce que le planificateur d’itinéraire embarqué de l’Enyaq me propose. Ce sont 260 km à parcourir avant une borne rapide Ionity. Un planificateur tierce me propose ce même arrêt, mais avec une courte recharge de 12 min du côté de Reims entre temps. J’accepte la mission proposée par le SUV électrique et traverse la Champagne sans marquer d’arrêt avant d’arriver à l’aire de Verdun St Nicolas avec un reliquat de 13 % de batterie. L’Enyaq avait donc raison et m’évite de chercher l’une des 1 millions de bornes que compte l’Hexagone.

La vitesse, une question de préférence

Je décide alors de le laisser décider, j’accepte mon asservissement à un algorithme, de ne plus choisir quand et où je m’arrête. La technologie le sait mieux que moi. 40 petites minutes, un café et 73 % de batterie plus tard, je reprends la route. Prochain arrêt indiqué, seulement 61 km, puis 220 km supplémentaires pour le suivant. Un calcul rapide me laisse imaginer que ma consommation moyenne actuelle de 22 kWh aux 100 km et la batterie de 77 kWh utiles me permettent de rallier la 2ème borne sans arrêt, en roulant très tranquillement.

Mais traverser à 110 ou 120 km/h les mornes plaines endormies est d’un ennui profond qui pourrait me pousser à l’endormissement. Certes, les nombreux arrêts de recharge et les doses de caféine qui les accompagnent tiennent éveillé, néanmoins, je choisis de rouler à la vitesse autorisée, 130 km/h. Advienne que pourra. Le planificateur s’adapte en fonction de la consommation pour indiquer soit une autre borne, soit un temps de recharge plus ou moins long et j’ai, de toute façon, abandonné l’idée de réfléchir de moi-même.

Je suis docilement les recommandations pour découvrir une borne Ionity tristement installé sur un parking désert de supermarché. Je pouvais réellement l’éviter puisqu’elle m’aura valu un détour total de 13 km par rapport à la route directe. Tant pis, je recharge de 70 à 84 %. 18 minutes s’écoulent. Je regarde la brume danser sur le parking, les pourcents d’électrons s’accumuler, je me questionne sur les idées qui me passent par la tête.

Longtemps objet de liberté, la voiture, en devenant électrique, nous oblige à une certaine servitude. Nous conseillant fortement de nous arrêter quand et où. Elle en a besoin, d’autant que l’infrastructure en France ne se développe pas aussi vite qu’annoncée. Cela peut parfois empêcher un détour par tel lieu, ou telle route à l’aspect sympa sous peine de ne pas trouver de borne et de risquer la panne avec un bestiau de 2,1 tonnes. Je reprends la route, sans remords, les détours volontaires n’étaient de toute façon pas à l’ordre du jour. Je cède définitivement les rênes à la technologie et me focalise sur ma conduite, sur l’Enyaq RS Coupé que nous avions déjà essayé il y a quelques mois.

Un bon compagnon de route

Celui-ci bénéficie étonnamment à la fois d’un très fort capital sympathie et d’une stature encore jamais éprouvée sur une Skoda. Il est parfaitement surprenant de voir ce conducteur d’Audi squattant la file de gauche se décaler du bon côté de la chaussée de lui-même à mon arrivée. Sans doute est-il impressionné par les lignes tendues et la vulgaire calandre lumineuse. En lisant, sur la malle arrière, Skoda écrit en gros, il doit se dire que l’on ne l’y reprendra plus. Tant pis pour lui, je suis passé et de nombreux autres conducteurs auront cette même réaction. En ville, l’Enyaq attire regards et pouces levés d’une façon quasi incompréhensible. Le très beau Vert Mamba doit en être la raison principale, le design général du modèle étant sympathique pour son espèce sans être exceptionnel.

Prochain arrêt, Hockenheim. Non pas pour poser les roues de ma RS sur le célèbre circuit mais, plus prosaïquement, pour effectuer une nouvelle recharge. Une seule borne avec deux prises de 150 kW, occupées par une dame en Hyundai Ioniq 5 qui s’affaire sur un tricot à peine débuté – sans doute comme sa recharge – tandis qu’une Golf GTE, vide, et son chargeur embarqué de seulement 3,7 kW squatte la seconde.

L’Allemagne étant particulièrement bien équipée en borne, et bien que la Hyundai fasse partie des plus rapide des VE à se recharger, je ne m’attarde pas et m’arrête 25 km plus loin (merci la courte recharge précédente). Si mon arrêt à Hockenheim aura été aussi rapide qu’un pit stop en compétition, celui à Sinsheim est long comme un jour sans pain. Le chargeur se borne à me délivrer moins de 70 kW en pointe avant de délicatement ralentir. Le célèbre musée étant trop loin, je trompe l’ennui pendant 54 minutes et déversant tout mon fiel sur ce que je pense des voyages en véhicule électrique et en profite pour m’attarder sur l’habitacle de la verte Tchèque.

Skoda Enyaq Coupé RS
Source : Etienne Rovillé

Malgré quelques plastiques durs inopportuns, notamment où les genoux reposent, le choix des matériaux de cette finition RS est agréable avec une suédine gris foncé agrémentée de surpiqures vertes qui habille les sièges un peu trop fermes, le tableau de bord ou encore les contre-portes. J’apprécie particulièrement le design sobre de l’intérieur et l’éclairage d’ambiance tandis que le minuscule écran d’instrumentation me rebute.

Très petit bien que lisible, il n’affiche que très peu d’information et oblige de passer par celui, tactile de 13 pouces, de l’infodivertissement. Ce dernier n’étant pas un parangon de réactivité et d’ergonomie, il oblige à bien trop de manipulation pour faire des opérations simples. Se débarrasser de l’aide au maintien dans la voie, heureusement peu envahissant, est une véritable tannée qu’il faut recommencer après chaque démarrage… Autant dire trop souvent sur un long trajet rempli d’arrêts de recharge.

222 km à parcourir pour l’aire de Rasthof Oberpfälzer, de quoi profiter de l’autoroute allemande peu empruntée le dimanche et découvrir un Enyaq relativement sensible au vent latéral. Ceci est principalement dû à son amortissement trop souple. Encore que, il est relativement ferme sur cette déclinaison RS, parfois cassant et en même temps enclin au pompage sur route dégradée. Pour autant, les quatre roues motrices garantissent un grip très satisfaisant. Là où le RS fait plaisir, c’est sur les performances. Avec 299 ch et 460 Nm, il accélère de 0 à 100 km/h en 6,5 secondes et les reprises sont largement suffisantes en toutes circonstances sans pour autant jamais impressionner.

Mlada, c’est encore loin ?

Cela fait 8h50 que je suis parti lorsque je m’arrête pour cette quatrième recharge. Ce sont 18 % qui restent dans la batterie et j’ai 208 km à parcourir jusqu’à la prochaine borne. Je bois de l’eau, tente avec des cartes ce que ce trajet n’est pas, une réussite, médite, m’évade dans le monde virtuel, m’ennuie… C’est long, très long. Pourtant, en arrivant à 80 % de charge, j’insiste. Le fournisseur EnBW ayant la bonne idée de fournir la courbe de puissance de charge. Comme déjà remarqué, l’Enyaq ne tient jamais sa capacité maximale annoncée, mais surtout, celle-ci descend bien vite et s’effondre effectivement après le seuil des 80 %, sans surprise. Néanmoins, Le temps théorique de 36 minutes pour passer de 10 à 80 % annoncé par le constructeur semble assez proche de la réalité. Finalement, un trajet en électrique dépend de nombreux facteurs et notamment de la vitesse de recharge de la voiture.

Un court arrêt à la frontière Tchèque pour me délester de 19 euros en échange du droit d’utiliser autant que je le souhaite les autoroutes du pays pendant 10 jours puis un arrêt plus long dans les environs de Prague. Cette fois, je n’essaie même plus de tromper l’ennui et y plonge complètement, amorphe pendant les 32 minutes de charge, dépité de tout ce temps perdu.

Skoda Enyaq Coupé RS
Source : Etienne Rovillé

J’arrive finalement à destination à 17h40, le musée est fermé depuis 40 minutes, ça attendra demain. En attendant, je fais le bilan de ce trajet. J’aurais donc parcouru 1 100 km en 12 heures et 57 minutes dont 3h56 ont été dévolues à la recharge, soit près d’un tiers du temps total. Cela nous donne une vitesse moyenne de 87 km/h, ce qui est assez faible pour un trajet autoroutier.

Bilan de ces 1 100 km en voiture électrique

Néanmoins, il convient de relativiser ce bilan. Si cela ne correspond pas du tout à mon usage et que je me suis particulièrement ennuyé durant ses longues pauses, il est bon de noté qu’en plus d’être un compagnon de route plutôt agréable, l’Enyaq RS Coupé permet de conduire 2 heures d’affilées sur autoroute, grâce à sa consommation moyenne finale de 20,2 kWh aux 100 km (une agréable surprise) ce qui l’en rapproche d’un usage assez classique pour la majorité des conducteurs.

Si l’on considère une vitesse moyenne de 118 km/h lors des phases de roulage et une pause de 15 minutes toutes les deux heures, un véhicule thermique aurait eu besoin de 10h28 pour ce même trajet. A-t-on réellement besoin d’économiser ces 2h30 de plus lorsque l’on part à la journée pour un si long trajet ?

Et le bilan financier ? Franchement à l’avantage de l’électrique, ne m’en déplaise. L’ensemble de mes recharges m’aura coûté 74,32 euros pour ce trajet. Avec un véhicule de même gabarit, mais diesel, il est très peu de chance de consommer moins de 6 litres aux 100 km au rythme choisi pour ce roadtrip, soit un minimum de 130 euros au prix du litre actuel. Si le temps de l’argent, le prendre peut aussi nous en faire gagner. Chacun se fera son opinion, mais pour vous aider à vous faire la vôtre, un roadtrip de 1 000 km qui n’a nécessité qu’une heure de charge sera très bientôt publié dans nos colonnes. Il s’agit de l’essai longue durée de la Mercedes EQE.

La bonne voiture pour les bons trajets

Ce qui prouve que certaines voitures sont bien plus adaptées aux longs trajets que d’autres modèles. Pour pouvoir profiter de longs trajets sans trop ajouter de temps du fait des recharges, il faut bien choisir. Pour cela, il faut tenir compte de l’autonomie de la voiture, sa consommation, mais également et surtout, sa vitesse de recharge. Nous vous avons préparé un comparatif sur les meilleures voitures électriques pour les longs trajets, que ce soit en termes de durée, mais aussi de coût.

Surtout, la durée des longs voyages dépend aussi du nombre des bornes de recharge, et de leur puissance. À ce titre, leur développement est lent, mais la France est l’un des trois pays d’Europe avec le plus de bornes par nombre de voitures électriques.

Et si vous voulez voir ce que donne un long trajet de 4 000 km en Ford Mustang Mach-e en plein chassé-croisé entre juillettistes et aoutiens, vous pouvez jeter un œil au récit de notre périple 100 % électrique.

Pour aller plus loin
On a parcouru 4000 km en voiture électrique en plein chassé croisé d’été : récit de notre périple


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