Le soir de l’annonce de l’Alpha 7R V, Sony France avait convié la presse à un événement, auquel nous avons participé. L’occasion de rencontrer des ingénieurs venus du Japon, de découvrir des subtilités intéressantes et, surtout, de prendre en main l’appareil afin de se faire un premier avis.
En fil rouge, le Sony A7R V nous rappelle à quel point les appareils photo professionnels sont, paradoxalement, ceux avec lesquels les débutants réussiraient le plus de photos, et donc à quel point les innovations étrennées auprès des professionnels bénéficient à terme au grand public, lorsqu’elles se démocratisent.
Certes, un appareil photo professionnel ne compose pas les photos à votre place. Mais, en l’occurrence, la principale innovation de l’A7R V, c’est-à-dire son autofocus assisté par une intelligence artificielle, neutralise presque totalement toute frustration relative à la mise au point.
Autofocus : la révolution de l’IA
Pour commencer, lors de la présentation, Fabrice Abuaf, chef produit image numérique chez Sony, a précisé que l’intelligence artificielle ne fonctionnait pas sur l’un des deux processeurs d’image Bionz XR, contrairement à ce que nous avions compris, mais sur une puce dédiée séparée. C’est l’algorithme d’apprentissage profond (deep learning) fonctionnant sur cette puce qui permet à l’autofocus de faire la mise au point sur l’œil avant même qu’il n’entre dans le champ, et même si le sujet porte des lunettes de soleil. L’intelligence artificielle a pour cela été entrainée à reconnaitre la posture des humains, c’est-à-dire à reconnaitre les corps, les membres et les têtes, afin d’en déduire en trois dimensions la position des yeux. Il n’a plus besoin de reconnaitre un œil, il le « devine ».
Nous l’avons expérimenté sur place avec un A7R V de présérie : l’appareil affiche un petit carré vert là où il pense qu’un œil se trouve, avant même que le sujet ne se retourne. Ce n’est pas toujours parfait, comme on peut le voir dans l’exemple ci-dessous. Mais, d’une part, ce sera peut-être mieux sur les appareils de série. Et surtout, d’autre part, ça n’empêche pas l’appareil d’estimer correctement la profondeur, soit tout ce qui compte pour la mise au point, et ça lui permet d’anticiper l’entrée de l’œil dans le champ afin d’affiner instantanément la mise au point.
Si l’autofocus n’a pas assez d’informations pour estimer la position de l’œil, il détermine alors la position de la tête.
Il est loin le temps où il était nécessaire de faire une mise au point ponctuelle sous le collimateur central avant de recomposer. Désormais on peut faire une confiance quasi aveugle à la mise au point continue et réduire considérablement le nombre de « déchets ».
Toutefois l’autofocus n’est pas devin et il arrive qu’il fasse la mise au point sur un autre œil, un autre visage ou, plus généralement, un autre sujet que celui souhaité. Mais Sony a aussi travaillé l’ergonomie. On peut affecter la commande de son choix au défilement de sujet : lorsque l’appareil détecte plusieurs personnes, l’utilisation de cette commande permet de passer d’un sujet à l’autre, sans avoir à le pointer sur l’écran tactile ou à le désigner laborieusement avec le joystick lorsqu’on utilise le viseur électronique. On optimise ainsi sa réactivité pour ne pas manquer une photo spontanée. On peut aussi enregistrer des visages prioritaires, ceux de ses proches par exemple. Enfin, on peut discriminer les types de sujets, afin que l’autofocus se concentre sur les animaux, voire plus spécifiquement sur les oiseaux ou sur les insectes, ou bien sur les voitures, les trains ou les avions, afin de ne pas avoir à désigner manuellement son sujet lorsque plusieurs de ces sujets sont dans le champ.
Revers de la médaille : bien qu’il s’agisse de l’interface inaugurée sur les A7S III, A7 IV et A1, les menus sont extrêmement riches. Si bien qu’il faut du temps pour les apprivoiser et s’y repérer, surtout compte tenu de la taille de l’écran, qui passe de 3 à 3,2 pouces de diagonale, mais reste bien inférieure aux grands écrans auxquels les smartphones nous ont habitués.
Ergonomie améliorée
En parlant d’ergonomie, ce n’est pas évident à l’œil nu, mais l’A7R V est sensiblement plus épais que son prédécesseur. C’est dû, au moins en partie, au nouveau système de dissipation thermique du capteur photo, hérité de l’A7S III spécialisé en vidéo, qui lui permet de filmer environ 30 minutes d’affilé en 8K à 25 images par seconde. L’avantage c’est que la poignée est plus prononcée.
Le boîtier nu ne pèse « que » 723 grammes, ce qui en fait un poids plume comparé aux 1005 g d’un Nikon D850 (46 mégapixels) ou aux 1015 g d’un Canon EOS R3 (réputé pour son autofocus). Mais une fois équipé d’objectifs dignes de ses 61 mégapixels, tels que les focales fixes ou les zooms Sony G Master — par exemple les 980 g du Sony FE 135 mm F1.8 — il demande toujours une certaine force et une certaine endurance.
L’écran à la fois inclinable et orientable apporte davantage que la somme de ses parties, comme dit le dicton. L’ensemble peut paraitre fragile, mais les mécanismes font appel à du métal rigide. L’avantage, c’est que le mécanisme permettant d’incliner l’écran à la verticale au dos du boîtier permet de l’en éloigner lorsqu’on l’oriente pour, par exemple, photographier à la verticale au ras du sol, afin que votre poignet ne gêne pas la visibilité.
En termes de commandes enfin, l’A7R V accueille, sous le barillet de sélection des modes d’exposition (PSAM…), le barillet de sélection photo/vidéo/ralentis. Celui-ci permet de bien séparer les univers photo et vidéo de l’appareil, d’effectuer des réglages très différents entre l’un et l’autre (profil colorimétrique S-Log 3 et angle d’obturation en vidéo, mais pas en photo, par exemple), et de basculer de l’un à l’autre en un éclair. Et le barillet dédié à la compensation d’exposition est désormais une molette personnalisable, ce qui permet, par exemple, d’avoir une molette d’accès direct aux 3 réglages du triangle d’exposition (ouverture du diaphragme, vitesse d’obturation et désormais sensibilité). Les menus, quitte à être difficiles à apprivoiser, offrent une très grande marge de personnalisation et chacun verra midi à sa porte.
Un appareil haute résolution plus polyvalent que jamais
En somme, à première vue, le Sony Alpha 7R V remplit sa promesse : bien qu’il utilise le même capteur que son prédécesseur, c’est bien un nouvel appareil photo, en particulier grâce à son autofocus assisté par une intelligence artificielle, mais aussi grâce aux autres évolutions, notamment ergonomiques (écran, commandes et menus). Il démontre ainsi, s’il le fallait, que le logiciel joue un rôle prépondérant, non seulement sur les smartphones sur lesquels il faut compenser les limites des petits capteurs et des petits objectifs, mais désormais aussi sur les « vrais » appareils photo.
Résultat : « rien » qu’avec un nouvel autofocus, Sony ouvre sa série R haute résolution à un champ d’application plus large, à l’animalier, à l’automobile, etc. Ainsi, en attendant les prochains renouvellements, il ne reste aux Alpha 9 II (A9 II) et Alpha 1 (A1) quasi que leurs capteurs empilés et leurs cadences de prise de vue de 20 et 30 images par seconde (contre « seulement » 10 pour cet A7R V). À condition que la qualité d’image de l’A7R V, que nous n’avons pas pu vérifier lors de notre prise en main, soit au rendez-vous. Mais il faudra un test complet pour le vérifier.
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