Tesla n’est clairement pas une marque automobile comme les autres. On ne va pas parler ici du fait qu’elle est 100 % électrique dans un monde encore majoritairement thermique. Ni du fait qu’en moins de 20 ans elle dépasse déjà les ventes de quelques pontes centenaires. Non ici on va plutôt parler d’expérience d’achat. Et il faut bien avouer que de la prise de commande à la livraison, et même encore un peu après, on est loin de ce qui se fait chez les constructeurs automobiles historiques.
En l’occurrence ici, nous allons nous baser sur l’achat et la livraison tout récemment d’une Tesla Model Y Propulsion. Et première surprise, ça a commencé par la présentation le 28 août dernier de cette version d’entrée de gamme du « petit » SUV de la gamme qui, contre toute attente, est venu se placer sous la Tesla Model 3 en terme de prix.
Ce qui, on le rappelle, n’aurait pas dû être le cas, les versions Grand Autonomie (Long Range) et Performance étant affichée quelques milliers d’euros au-dessus. Mais tant que ça joue en notre faveur, hein, on va essayer de ne pas penser à l’acheteur qui, quelques jours auparavant, se résignait à prendre une berline Model 3 au lieu d’un Model Y plus pratique pour essayer de faire quelques économies. Sauf évidemment quand le vent ne sera plus dans notre sens…
Pas d’humain, tout se fait en ligne
On le sait, l’achat d’une voiture a fortement changé ces dernières années. D’ailleurs les constructeurs ne s’y trompent pas en boudant les grands salons automobiles pour se rapprocher de leur clientèle via des évènements dédiés. Et puis il y a la dématérialisation, tout se fait en ligne. Et là-dessus, Tesla fait clairement figure de chef de file depuis quelques années, avec des constructeurs qui suivent de plus en plus, y compris chez Peugeot par exemple.
Aussitôt la Model Y Propulsion et son prix annoncés, c’est directement sur le site que l’on achète la voiture, d’abord en déposant un acompte de 250 euros. Un montant déductible de la facture finale. Sauf si vous annulez la commande évidemment. Une manière de vous lier à votre commande pour ne pas perdre votre argent bêtement. En tout cas, tout se fait en quelques minutes seulement.
Cette manière de faire, si elle est très rapide et simplissime dans le cas de Tesla, remplace le plaisir empirique d’aller voir le concessionnaire, découvrir la voiture, en apprendre plus sur ses technologies, toucher, sentir… Pour ça, vous avez le site Tesla, bien détaillé, quoiqu’un peu vague sur certains équipements. Comme les aides au stationnement, nous y reviendrons plus tard.
L’ordinateur, c’est bien, mais la chaleur humaine manque dans tout ce processus d’achat. Et la possibilité de négocier et de faire baisser le prix ou de se faire offrir une option ou deux aussi ! Pas de remise chez Tesla pour un véhicule neuf, ou alors de manière très aléatoire, mais là aussi, nous y reviendrons plus tard.
Le yoyo de la date de livraison
Ça y est, nous voici en possession d’un bon de commande d’une Tesla Model Y Propulsion. Que l’on attend évidemment avec impatience. Et en ces temps perturbés de pénuries où nombre de constructeurs automobiles affichent des délais de livraison d’un an ou plus, savoir que notre voiture devrait arriver dans les trois ou quatre mois ne fait que monter l’impatience.
Pour ça, on s’accroche à son smartphone, à l’image de notre future voiture qui s’affiche sur l’application, et à la date qui y est indiquée juste en dessous. D’abord avec une fourchette plutôt large, de quelques semaines, qui se réduit au fur et à mesure jusqu’à la date finale. Et très vite on se prend à regarder plusieurs (voire bien plus) fois par jour que la date change ou non.
Car oui, la fourchette de départ peut aussi bien être avancée que repoussée un peu plus tard, pour des raisons que l’on peut comprendre, de production, de livraison, de transport, surtout pour une voiture qui vient par bateau de Chine (production à la Gigafactory de Shanghaï). On peste dès que la date est repoussée de quelques jours (au mieux). On se réjouit et on loue Tesla dès que la date est avancée. Un peu absurde, mais la haine du changement quand il ne va pas dans notre sens doit être inscrite dans le génome humain.
Que dire alors quand du jour au lendemain, la date de livraison disparaît complètement de l’application ? On se précipite sur le site en espérant que ce soit une erreur sur le téléphone. Non. Alors on s’inscrit à tous les groupes Facebook d’amateurs et/ou possesseurs de Tesla pour se rassurer. Ouf ! Il semblerait qu’on ne soit pas le seul à ne plus avoir de date. Un petit coup de fil à un « TA » est quand même le bienvenue pour en savoir plus.
Un « TA » à qui se raccrocher… ou pas
« TA », c’est l’acronyme de Tesla Advisor, le seul contact humain que l’on a avec la marque pour laquelle on vient de dépenser quelques dizaines de milliers d’euros. Suffisant pour se rassurer ? Au moins un peu.
C’est lui qui se fend d’un mail ou d’un coup de fil pour vous aider par exemple à finaliser votre achat, pour vous expliquer les démarches et les étapes qui suivent, à vous dire les bons documents à envoyer en vue de l’immatriculation… Quand on achète sa voiture en ligne, ça rassure. Et en général, il répond assez rapidement aux mails. Mais dès qu’on lui pose trop de questions, même sur la voiture, on sent rapidement les limites.
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Dans le cas de la Tesla Model Y Propulsion, comme on ne connaissait ni la puissance de la voiture, ni la capacité de sa batterie, c’est au TA qu’on se raccroche pour en savoir plus. Mais visiblement, il a potassé le même site internet que l’acheteur, à savoir le site officiel de Tesla et ce qui est écrit dessus. Alors quand il s’agit d’en savoir plus sur les données techniques, il botte en touche. Posons alors la question de la date de livraison. Mais là non plus la réponse n’est pas plus précise que sur l’application.
À la décharge de ces Tesla Advisor, au demeurant très sympathiques, à lire les commentaires de certains acheteurs sur les réseaux sociaux, ils doivent vraiment être appelés pour tout et n’importe quoi. Si un jour l’un d’entre eux sort un livre compilant les perles, ça devrait être savoureux.
Pochette surprise
Il faut dire qu’il y a de quoi s’inquiéter quand on achète une Tesla, car on ne sait pas forcément ce qu’on va trouver dans sa voiture. Et dans le cas de la Model Y Propulsion, on a beau avoir acheté un modèle qui flirte avec le premium, dont on sait qu’il est technologique, il n’y a toujours pas d’aide au stationnement (NDLR : ce n’est plus le cas depuis le 24 mars 2023, environ 4 mois après les premières livraisons).
Alors on savait (du moins on se doutait) que les capteurs ultrasons ne seraient plus équipés sur la voiture. Et que le système Tesla Vision remplacerait ces capteurs pour offrir au conducteur des aides bienvenues lors d’un stationnement de ce beau bébé de 4,75 m de long et 2 mètres de large, au rayon de braquage limité. Mais il se trouve que depuis les premières livraisons mi-novembre, l’aide au stationnement avec visualisation des distances est toujours inexistante. Et ce même si il est en test sur le FSD Bêta. Mais aux USA, pas chez nous.
Oui on peut se garer sans « bip-bip ». Oui les caméras aident déjà bien. Mais la voiture est censée avoir l’aide au stationnement. Et pas une technologie « quand elle arrivera ». Faire passer les clients pour des cobayes, des « bêta-testeurs », risque de ne pas plaire à tout le monde.
Pas de concession, pas de champagne
Repoussée, disparue puis enfin réapparue, la date de livraison est enfin là, et notre voiture nous attend tel jour à telle date. On est fixé. À moins que… Bon, dernier changement de date à une semaine de l’échéance, mais c’est pour venir la chercher plus tôt. Si ça va dans notre sens, ça va ! Encore faut-il pouvoir se rendre disponible au pied levé, ce qui n’est forcément possible pour tout le monde.
Rendez-vous est donc donné, en dépit d’une demande de livraison à Nantes, au « showroom » Tesla le plus proche, à Saint-Jacques-de-la-Lande, en banlieue de Rennes. On a beau regarder sur le site de la marque, il n’y a pas de concession Tesla là bas. Et pour cause !
Un petit tour sur Google Maps à l’adresse indiquée permet de découvrir que la voiture sera livrée dans une zone industrielle, sur le parking d’un hangar de ce qui semble être une ancienne société de transport. Glamour ! Parce que oui, si vous vous attendiez à être reçu comme un prince dans une concession, avec petits fours et coupette de champagne, vous risquez d’être déçu !
C’est évidemment un peu exagéré, mais sans aller jusque-là, un tour de la voiture avec une personne de la marque eut été la bienvenue. Au lieu de cela, vous arrivez, vous êtes reçu sur un quai de livraison, les voitures livrées le jour même sont disposées dehors. À vous de trouver la vôtre en fonction de votre immatriculation. On a de la chance, ce jour là, il ne pleut pas !
Un barnum pliant (à l’effigie de la marque, quand même !) a été dressé sur le quai. Vous donnez deux papiers, on vous donne les cartes de la voiture (il n’y a pas de clé), on vous dit de flasher un QR Code qui vous décrit les premiers pas avec la voiture (appairer son téléphone, régler sa position de conduite, lancer la navigation…). Et c’est tout.
Un QR Code pour vous aider
Alors dans tout ça il n’y a rien de bien sorcier. Pour peu que l’on sache flasher un QR Code. Mais l’on se met à la place de clients qui ne connaissent pas la marque, dont c’est la première Tesla, qui n’ont jamais pu en essayer une avant : un petit coup de main n’est jamais de trop ! D’autant qu’une Tesla étant un smartphone/ordinateur sur roues, on sait qu’on n’est pas à l’abri de bugs !
Bon, il y a bien une ou deux personnes de la marque prêtes à aider et qui viennent aider si jamais ce premier contact n’est pas simple. Comme ce couple d’un certain âge qui n’arrive même pas à déverrouiller la voiture avec sa carte pour rentrer dedans. C’était pratique les clés aussi, non ?
Pour autant l’accueil (humain) est très chaleureux, la personne de l’accueil très souriante, il y a même une machine à café et trois chaises en cas d’attente !
Une voiture à demi-chargée
Étant habitué, en tant que journaliste essayeur, à tester des Tesla depuis quelques années, pour nous la voiture n’a pas, ou peu de secrets. On se met vite en route après avoir fait un check complet de la voiture, intérieur, extérieur, pour s’assurer qu’il n’y a pas de rayures, que les câbles de recharge sont bien là… Car oui, ça peut arriver.
Et à lire les commentaires sur les forums dédiés à la marque, il semblerait que ça arrive régulièrement. Une jante rayée par ci, une marque de frottement sur la peinture par là, un câble de recharge T2 de 4 mètres pour certains et de 7 mètres pour d’autres… Ça semble être, là encore, au petit bonheur la chance.
C’est évidemment un bonheur de prendre la route dans sa nouvelle voiture, mais il faut déjà penser à la charger, car elle nous a été donnée avec un peu moins de la moitié de charge de batterie. 47 %. Un premier détour par un Superchargeur s’impose. Un Superchargeur dont certains propriétaires profitent gratuitement la première journée, le temps que Tesla active officiellement leur compte, et d’autres non car le compte a été activé immédiatement. C’est évidemment notre cas.
Notre essai Tesla Model Y Propulsion
Essai Tesla Model Y Propulsion : un excellent rapport qualité / prix
Options offertes, Superchargeur gratuit…
On aurait pu s’arrêter là : ça y est on a notre voiture. Elle convient parfaitement à nos attentes. C’est un régal de rouler tous les jours à son bord. De profiter de son silence. De sa technologie. Que demander de plus ? C’est vrai, rien.
Sauf que depuis la livraison début décembre, Tesla n’a pas lésiné sur les offres commerciales concernant son Model Y Propulsion, n’arrivant visiblement pas à les écouler aussi bien qu’il le pensait (ce qui n’est sans doute pas sans rapport avec les prix de reprise de la Model 3 qui ont chuté). De quoi rendre l’achat de ce SUV au volume de chargement gargantuesque encore plus intéressant qu’il ne l’était à la base. Et comment ne pas s’agacer de cette situation quand on n’a profité de rien ?
C’est vrai qu’on ne va pas aller se plaindre quand on achète une botte de carottes au marché à un certain prix et que quelques jours plus tard, elle est vendue moins chère. Mais quand on parle d’un achat à près de 50 000 euros, ce n’est pas pareil ! Ainsi, Tesla, pour écouler son stock de Model Y Propulsion dont les bons de commande ont été annulés par des propriétaires de Model 3 rebutés par le prix de rachat de leur berline, a d’abord proposé aux acheteurs des options gratuites. Deux. Avec la possibilité d’avoir par exemple les jantes de 20 pouces et un crochet d’attelage, ou une peinture extérieure noire et l’intérieur blanc, gratuitement. Une belle ristourne d’au moins 2400 euros selon les options choisies.
Puis voyant encore un peu plus la fin d’année arriver et pour gonfler ses chiffres de ventes, et faire partir les voitures en stock, la firme basée au Texas a ajouté 10 000 km de recharge gratuite aux Superchargeurs. Là encore un beau cadeau.
Jusqu’au coup d’éclat que même ceux qui ont profité de ces beaux cadeaux ont peut-être eux-mêmes regretté : une baisse de prix éclair sur le site Tesla, permettant de bénéficier du bonus maximal de 6000 euros et faire baisser le prix de son Model Y à 40 990 euros… Gloups.
Et depuis le début 2023, avec l’arrivée du nouveaux barême du bonus, voilà le Model Y qui se réajuste encore pour pouvoir profiter des 5000 euros. Tout pile sous la barre maximale fixée par le gouvernement de 47 000 euros, à 46 990 euros, le « TMY Prop » s’affiche à 41 990 euros avec le bonus. Pour une version sans options. Certains prix s’affichent même sous les 40 000 euros pour des voitures en stock !
On ne peut pas plaire à tout le monde
Cette expérience d’achat telle que nous l’avons vécue dresse un tableau peu reluisant de l’expérience d’achat d’une Tesla. Peut-être un peu pessimiste par rapport au bonheur qu’est de rouler dans cette voiture tous les jours. Cela n’engage évidemment que nous et bien sûr que ça ne gênera pas tout le monde. Et que certains, selon la région ou le centre de livraison, ont été reçus directement en concession, en intérieur, au chaud.
On comprend évidemment que cette livraison sur un quai de livraison (quoi de plus logique en réalité ?) en zone industrielle est surtout liée au rythme effréné des arrivées de camions qui remontent notamment de Barcelone où des bateaux déchargent à longueur de journée les voitures qui rouleront demain dans l’Europe entière.
On le sait, Tesla reçoit tout d’un coup, puis plus rien pendant quelques temps. À titre d’exemple, notre « delivery center » procédait à 30 livraisons par jour quand nous y sommes allés, « bien plus calme que les deux semaines précédentes » nous a assurée la personne de l’accueil, expliquant qu’ils tournaient à 60 véhicules livrés quotidiennement.
La nature humaine semble ainsi faite que plus on en a, plus on en veut. Et malgré cette expérience d’achat en dents de scie, il faut se rappeler ce qui nous a fait acheter la voiture en premier lieu. À savoir un véhicule technologique, bien équipé, très agréable à rouler, à la consommation mesurée, au volume de coffre immense, et le tout pour un prix défiant toute concurrence. Car même au prix des premiers Model Y Propulsion, les autres constructeurs n’arrivent pas à suivre. Alors certes il y a eu des conditions plus intéressantes par la suite, mais ça a toujours été le cas chez Tesla avant, sur la Model 3 notamment. Et puis en concession, chez les constructeurs traditionnels, certains acheteurs sont meilleurs en négociation que d’autres.
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