La conduite autonome sur une Tesla est-elle vraiment d’actualité ? Si l’on se réfère aux six niveaux différents de conduite autonome, le compte n’y est pas. En effet, bien que baptisée « capacité de conduite entièrement autonome », l’option idoine de la firme d’Elon Musk n’est en réalité qu’un système de niveau 2.
C’est d’ailleurs le cas sur tout ce que Tesla propose depuis 2016, à savoir l’Autopilot, l’Autopilot amélioré (3 800 euros) et la fameuse capacité de conduite entièrement autonome (7 500 euros). Cette dernière option est connue aux États-Unis sous le nom de FSD pour full self-driving : c’est ce qui est le plus abouti à ce jour.
Jusqu’à présent, les trois options d’assistances à la conduite étaient toutes en bêta chez Tesla, certaines depuis 8 ans. Mais après 3 ans et demi de FSD bêta aux USA, les choses changent : place au FSD Supervised, c’est-à-dire la conduite entièrement autonome supervisée.
Si à l’automne 2020 lors des premiers tests en comité restreint, le FSD bêta impressionnait déjà, quels progrès ont été faits depuis ? Peut-on imaginer rouler en Tesla sans aucune intervention humaine ? Et si tel est le cas, doit-on tout de même rester attentif ? Quid du robotaxi qui doit être présenté cet été ? Faisons le point sur les avancées du fameux FSD que l’on attend toujours en Europe mais qui pourrait bien finir par arriver sur le Vieux Continent.
Une Tesla où tout est en bêta, même payant
Ce n’est pas nouveau, bien au contraire, mais la plupart des technologies embarquées dans une Tesla sont en bêta. Ce terme passe-partout en 2024 permet surtout à la marque de se cacher dernières certains choix inadmissibles, comme l’absence de capteur de pluie, de radar ou de capteurs de stationnement à ultrasons.
C’est ainsi que l’on retrouve les essuie-glaces automatiques en bêta, l’assistance au maintien de cap en bêta, le parking auto en bêta, et bien entendu le pilotage automatique en bêta. Pour autant, le développement de toutes ces fonctionnalités continue, mais de manière inégale. Nous avons déjà parlé notamment du statut de l’Autopilot (qui combine un régulateur de vitesse adaptatif et l’assistance au maintien de cap) en Europe, qui stagne, et va même parfois à reculons depuis des années.
Si les options sont bel et bien en bêta, elles affichent un prix qui ne l’est pas : 7 500 euros en France pour la capacité de conduite entièrement autonome, qui aujourd’hui n’offre rien de plus que l’Autopilot amélioré (3 800 euros) à part la réaction aux feux de signalisation et aux panneaux stop (c’est-à-dire que la voiture s’arrête quand il y a un stop ou un feu).
Ces prix et fonctionnalités s’entendent en France, là où leur utilité n’est vraiment pas garantie. Par contre, de l’autre côté de l’Atlantique, le prix comme les possibilités changent. Contre 12 000 dollars (11 000 euros hors taxe) à l’achat, ou 200 dollars (185 euros) par mois sous forme d’abonnement, il est possible de profiter de l’option de conduite autonome la plus capable à ce jour chez Tesla, qui était jusqu’à présent en bêta. Mais désormais, elle change de nom et laisse le bêta de côté.
Une conduite autonome, mais supervisée
Ce que l’on connaissait comme FSD bêta jusqu’à présent sera donc appelé FSD supervisé, rappelant par la même occasion que Tesla n’est pas en mesure de proposer une conduite 100 % autonome sans aucune action ni responsabilité du conducteur.
Sur les différents niveaux d’autonomie rappelés sur l’infographie ci-dessus, tout ce que Tesla propose reste du niveau 2. Dit plus simplement : le conducteur reste responsable dans 100 % des cas, et doit faire preuve d’attention. L’approche de Tesla diffère de certains autres constructeurs, comme Mercedes qui est en capacité de proposer du niveau 3 dans des circonstances bien particulières.
Cependant, Tesla est reconnu pour permettre d’utiliser ses fonctionnalités en toutes circonstances ou presque, quand d’autres choisissent de restreindre à certaines conditions seulement (vitesse limitée, routes pré-autorisées).
Quoi qu’il en soit, après 3 ans et demi de FSD bêta dont on peut constater l’évolution de l’interface graphique ci-dessus, on est aujourd’hui en FSD Supervisé, et Elon Musk veut que les clients en fassent l’expérience pour inciter à l’achat. Le PDG de Tesla a d’ailleurs demandé à ses équipes de présenter lors de la livraison le fonctionnement du FSD pour que les clients mesurent bien toutes les capacités du système.
Bien que le FSD supervisé reste du niveau 2 seulement, force est de constater qu’il permet d’aller d’un point à un autre sans intervention humaine dans de nombreux cas. On pourrait même imaginer que Tesla donne un peu plus de liberté aux conducteurs qui restent attentifs, puisque aujourd’hui, il faut toujours garder les mains sur le volant sous peine d’être rappelé à l’ordre, en plus du fait que la caméra intérieure surveille que les yeux sont bien en direction de la route.
Tesla ne prend pas encore le risque de déresponsabiliser le conducteur, alors que beaucoup de vidéos montrent des trajets sans aucune intervention humaine qui se passent bien. Le fait est qu’en cas de souci, charge au conducteur de rapidement reprendre le volant et les pédales, chose impossible à imaginer si la voiture annonce être en capacité de tout faire elle-même.
Les 12 000 dollars demandés ne permettent donc pas d’aller dormir à l’arrière de sa Tesla, mais autorisent les propriétaires à mettre un pied dans le futur de la conduite autonome, en regardant le système manœuvrer en toutes circonstances, et en envoyant des données sur les serveurs de Tesla. De quoi accélérer la disponibilité du FSD ailleurs qu’aux États-Unis ?
À quand un FSD hors des États-Unis ?
Malheureusement, l’état de la capacité de conduite entièrement autonome en France est le même depuis près de 5 ans. En pratique, seules deux choses sont proposées par Tesla dans toute l’Europe avec l’option vendue 7 500 euros : la réaction aux feux et aux panneaux stop.
Oubliez donc les vidéos que vous avez vues plus haut, avec les changements de voie en ville, le suivi d’un itinéraire en dehors des autoroutes ou encore les négociations d’intersections et carrefours giratoires. Rien de tout cela n’existe sur le vieux continent. Il n’y a d’ailleurs même pas de bêta en comité restreint comme c’était le cas en 2020 aux USA.
Au bas mot, il y a donc 4 ans de retard en Europe par rapport aux USA sur ce FSD bêta, mais il y a aujourd’hui un espoir conséquent concernant enfin l’arrivée de cette conduite autonome de Tesla sur nos terres. La régulation de l’UNECE a été modifiée en mars 2024, et six mois plus tard, il devrait être possible pour Tesla de proposer certaines fonctionnalités supplémentaires, sous la forme d’une conduite autonome de niveau 2.
Malheureusement, le principal atout du FSD tel qu’il existe aux États-Unis réside dans la capacité de la voiture à prendre des décisions sans action du conducteur (changer de voie, mettre un clignotant, prendre un rond-point en autonomie, etc.), et ça ne devrait toujours pas être permis d’ici la fin de l’année 2024.
Attention cependant, il n’y a pas que la loi qui bridait Tesla hors des USA, puisque les règles sur la route, les panneaux, et la typologie des voies ne sont pas du tout les mêmes. À titre d’exemple, en France, nous retrouvons nombre de ronds-points, priorités à droite et voies partagées avec des autres usagers de la route, pour lesquels il faudra des centaines de millions de kilomètres d’apprentissage avant de savoir comment les négocier.
https://twitter.com/Tesla_AI/status/1776381278071267807
Si l’on considère qu’il aura fallu plus de 3 ans aux USA pour atteindre la barre du milliard de kilomètres roulés en FSD (autour de décembre 2023 si l’on en croit le graphique ci-dessus), et commencer à voir des progrès substantiels, le chemin pourrait encore être long pour l’Europe.
En outre, comme il n’y a pas non plus besoin de toucher le volant aussi fréquemment aux USA qu’en Europe, surtout si la caméra détecte que le conducteur est bien attentif à la route, l’incitation à utiliser le FSD est plus marquée outre-Atlantique. Ici, il faut tout de même que le volant détecte les mains plusieurs fois par minute, rendant toute conduite autonome bien moins reposante, et donc réservée potentiellement à ceux qui veulent vraiment faire l’effort de voir ce que le système a dans le ventre. Si l’on ajoute à tout ceci le coût prohibitif, bien malin celui qui pourrait annoncer le nombre de clients potentiels dans nos contrées.
Elon Musk avait pendant de nombreuses années mis en avant le FSD comme la promesse d’une conduite totalement autonome — à mettre au compte de ses promesses manquées —, mais aujourd’hui, la marque semble revenir à la raison : ce sera au mieux une conduite supervisée, notamment à cause des limitations matérielles. Sans radar, lidar et autres capteurs faisant grimper le coût du véhicule, Tesla se repose simplement sur des caméras pour l’instant.
Son robotaxi promis comme la révolution de la voiture autonome pour tout un chacun, doit être révélé le 8 août prochain, sur fond de rumeurs d’abandon de la Tesla Model 2 à 25 000 dollars balayés d’un revers de main d’Elon Musk. En proposant aujourd’hui un FSD aux USA à 12 000 dollars, il semble difficile de croire que la firme a les moyens de mettre sur le marché un véhicule 100 % autonome à fable coût.
Même si la législation ne sera bientôt plus un frein, les robotaxis de Tesla ne seront pas une réalité pour autant du jour au lendemain. Il reste de nombreux points à corriger, et il semble difficile d’imaginer une conduite réellement autonome avec le matériel présent sur les véhicules de la marque à l’heure actuelle. Autrement dit, ne vous attendez pas à pouvoir dormir et laisser votre Tesla vous amener à destination. Il faudra toujours rester maître du véhicule.
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