Voiture électrique : comment s’y retrouver dans la jungle des cartes de recharge ?

 
Malheureusement, rouler en voiture électrique implique souvent de posséder un nombre impressionnant de cartes permettant de se recharger en déplacement. Faisons le point sur ce phénomène qui peut gâcher l’expérience de certaines personnes.
Tesla Model 3 se rechargeant sur une borne iONITY // Source : Bob Jouy pour Frandroid

Voyager en voiture électrique est simple, si l’on s’en réfère aux diverses annonces des constructeurs et des opérateurs de recharge. La réalité toutefois est bien différente, avec un véritable casse-tête pour les utilisateurs qui souhaitent simplement recharger leur voiture. Nous allons revenir sur ce phénomène propre à la mobilité électrique et tenterons d’examiner les solutions existantes et futures pour faciliter l’accès aux bornes de recharge des différents opérateurs.

Un problème qui n’existe qu’en voiture électrique

Depuis de très nombreuses années, voyager en voiture thermique ne pose pour ainsi dire aucun problème. Soit le réservoir est assez rempli pour parcourir l’intégralité du trajet, soit un arrêt en station essence de quelques minutes tout au plus suffira à repartir pour plusieurs centaines de kilomètres, à l’aide d’un paiement par carte bancaire dans la quasi totalité des cas.

Total Energies

Un automobiliste qui passe de cette expérience à celle d’une voiture électrique aujourd’hui sera nécessairement très déçu, tant l’épreuve de la recharge sur les différentes bornes existantes peut être pénible. Dans l’immense majorité des cas, pour recharger sur une borne de recharge publique, il n’est pas possible d’utiliser une carte bancaire comme c’est le cas sur des pompes à essence.

À la place, il faut soit utiliser une carte appartenant à l’opérateur de recharge, soit scanner un QR Code et suivre un parcours en ligne pour démarrer une recharge, ou encore télécharger et utiliser une application mobile spécifique.

À l’heure où les pouvoirs publics font tout pour dynamiser la la mobilité électrique, il est important de rappeler que si les constructeurs poussent à l’achat d’un véhicule électrique avec la promesse d’une tranquillité lors des grands trajets, la réalité, encore en 2022, est parfois bien différente.

Un enfer pour tout nouvel électromobiliste

De nombreux nouveaux acquéreurs de véhicules électriques ne s’intéressent pas en détail à la gestion de la recharge en grands trajets. Pour eux, tant qu’ils trouveront un point de charge rapide, ils pourront en profiter comme c’est le cas pour une pompe à essence. Cependant, entre la difficulté qu’il peut y avoir pour comprendre comment démarrer une charge, le tarif qui sera appliqué et la puissance qui sera délivrée, un grand trajet peut vite tourner au cauchemar.

Si trouver une borne de recharge est aujourd’hui relativement aisé, soit directement depuis le système embarqué du véhicule, soit depuis une application mobile recensant les divers points de charge disponibles, une fois arrivé devant la fameuse borne, démarrer la recharge est souvent le processus le plus compliqué.

Certains réseaux proposent un badge de recharge à commander, qui se matérialise par une carte en plastique associé à votre compte préalablement créé. Ceci vous permettra lors des recharges de n’avoir qu’à passer votre badge sur la borne afin que votre véhicule commence à se charger. Les informations de paiement étant enregistrées sur l’espace client de l’opérateur de recharge, vous n’avez plus à vous en occuper à chaque fois que vous vous présentez devant une borne.

Sans ce badge de recharge, il y a aujourd’hui deux principales possibilités : l’utilisation d’une application ou le scan de QR Code. Le problème de ces deux méthodes est le suivant : elles requièrent un smartphone avec une connexion internet, ce qui n’est pas nécessairement possible selon les lieux (zones blanches, ou pays à traverser sans itinérance sur votre forfait mobile).

Démarrer une charge depuis l’application Ionity demande quelques étapes simples

Si l’utilisation d’une application mobile peut sembler une bonne idée, en pratique, cela veut souvent dire qu’à l’arrivée à une borne de recharge, il faudra télécharger une application spécifique à l’opérateur de recharge exploitant la borne, puis se créer un compte, renseigner ses coordonnées de facturation, puis indiquer sur quelle borne on se trouve, pour enfin pouvoir espérer démarrer la recharge. Tout ce processus est à la fois lourd et chronophage, ce qui ne devrait plus être la norme.

Le scan de QR code peut alors être préférable, vous redirigeant vers un site internet permettant, pour la plupart du temps, de démarrer immédiatement la charge en échange d’une empreinte sur votre carte bancaire. Le montant exact sera quant à lui débité à l’issue de la charge. Les tarifs seront alors rappelés, avec bien souvent un prix au kilowattheure, mais parfois au temps (c’est le cas de Ionity en France par exemple, qui facture à la minute).

Les cartes qui peuvent vous faciliter la vie

Tout cela manque d’abord de clarté — il est difficile de savoir, a priori, combien la charge va coûter – et bien entendu de simplicité. En effet, si vous souhaitez voyager à travers plusieurs départements ou régions, il vous faudra potentiellement de nombreux badges différents si vous ne voulez pas dépendre des QR codes à scanner, ou des applications mobiles à installer.

Les tarifs de recharge de Ouest Charge, qui demande 10 euros pour utiliser son badge

Le problème, outre le fait de devoir transporter une dizaine de badges dans sa voiture, est que l’envoi des cartes de recharge est bien souvent payant. Ouest Charge, par exemple, demande 10 euros avant d’envoyer un badge, avant même de pouvoir se recharger une seule fois. Si vous effectuez une opération comme celle-ci dans de nombreuses régions françaises, la facture peut vite grimper à plus de 100 euros, avant même d’avoir rechargé une seule fois votre véhicule.

De nombreux constructeurs offrent des cartes avantageuses selon le véhicule que vous achetez chez eux, avec parfois un abonnement mensuel à payer en échange d’un tarif préférentiel pour la recharge, comme c’est le cas chez Hyundai notamment, promettant une interopérabilité pour solutionner ce souci de multiplication des badges.

Les constructeurs ne sont pas les seuls à proposer des badges agrégeant différents réseaux de charge pour faciliter l’utilisation des bornes à travers l’Europe, certains services étant même spécialisés dans cette branche. La contrepartie de cette simplification dans l’authentification et l’utilisation des bornes de recharge est bien souvent un prix un peu plus élevé à payer qu’en passant directement par la carte ou l’application de l’opérateur de charge, avec une majoration de l’ordre de 5 à 10 % sur les tarifs proposés.

Carte Chargemap

Chargemap propose par exemple un Chargemap Pass qu’il faut commander contre 19,90 euros, puis prend une commission de l’ordre de 10 % sur les charges Ionity, facturant ainsi la minute de connexion à la borne 0,871 euro. Cela signifie que si vous rechargez une fois 30 minutes avec le Chargemap Pass, il faudra débourser au total 46,03 euros (en comptant la carte à 19,90 euros), contre 23,7 euros si vous étiez passés par l’application Ionity directement.

La simplicité d’utilisation peut alors coûter bien cher, mais pas nécessairement. Nous pouvons citer par exemple le nouveau venu Stations-e, le géant Shell Recharge, ou encore Chargepoint, qui offrent tous leurs cartes gratuitement. Mais un nouveau problème apparaît alors que tous ces acteurs souhaitaient simplifier le processus de recharge pour tous : quelle carte utiliser pour obtenir le meilleur tarif selon l’endroit où l’on se recharge ?

Quel prix selon la carte utilisée ?

Avec autant de réseaux différents qu’il y a de régions en France, et de multiples cartes promettant d’agréger elles-mêmes des cartes de tous les opérateurs de recharge, le cauchemar de la recharge n’est pas encore terminé. En effet, avec certaines cartes qui s’obtiennent gratuitement, un électromobiliste peut aisément se retrouver avec de multiples cartes disponibles « au cas où », et se retrouver devant une borne avec un choix à faire : laquelle utiliser pour payer le moins cher possible ?

Un service est alors né pour tenter de simplifier toute cette jungle de la recharge des véhicules électriques : Chargeprice. Basé sur les informations remontées par la communauté en plus des opérateurs de recharge, Chargeprice recense les tarifs appliqués par les différents acteurs de la mobilité électrique sur chaque borne où il est possible de payer avec leurs services.

Prix des cartes de recharge pour véhicule électrique
Les prix d’une recharge chez Ionity selon le badge de recharge utilisé

Chez Ionity notamment, où le prix public est affiché à 0,79 euro par minute, une charge de 30 minutes peut coûter entre 10 et 60 euros selon la méthode utilisée pour se charger. Il est alors primordial pour quiconque ne souhaitant pas débourser plus d’argent que nécessaire de prendre le soin de vérifier les tarifs associés à chaque carte qu’il possède.

Toute cette lourdeur dans la facturation, la nécessité d’installation d’une application ou encore le manque de visibilité sur le tarif à payer contribuent activement à la mauvaise réputation qu’ont les longs trajets en véhicule électrique. Il convient alors d’améliorer tout cela dans un futur proche, mais comment faire ?

Quelles solutions pour un futur plus simple ?

Celles et ceux qui ont déjà voyagé en Tesla se demandent sans doute ce qu’est l’enfer qui est décrit plus haut, tant il est éloigné de la réalité de la charge rapide dans les Model 3, Model S, Model X et Model Y depuis de nombreuses années.

Pour rappel, chez Tesla, une fois que des informations de paiement sont associées au compte client, il n’y a plus rien à faire d’autre que de se brancher à un Superchargeur pour commencer à recharger. Le tarif s’affiche sur l’écran du véhicule, il n’y a pas d’authentification avec une application mobile, un QR code à scanner, ni même de terminal de paiement nécessaire pour que le véhicule charge.

Une station de recharge Fastned

Longtemps inédite dans le monde des véhicules électriques, ce « Plug and Charge » (littéralement brancher et charger) commence à se démocratiser, pour le bien de tous. Fastned l’utilise dès aujourd’hui, avec une méthode très simple permise par l’échange d’informations entre la borne de recharge et la voiture lorsque l’on charge via le port Combo CCS. Ion

Le véhicule partage des informations permettant de l’identifier avec la borne, qui ensuite vérifie que ce véhicule est bien adossé à un compte Fastned créé au préalable, et la charge démarre. Le moyen de paiement associé au compte sera finalement débité, rendant l’opération aussi indolore que ce que Tesla propose.

Ionity a annoncé cette fonctionnalité également, avec certains constructeurs comme Volkswagen qui en ont profité pour annoncer une mise à jour à distance de leur flotte de véhicules électriques permettant de profiter de cela à l’été 2022. Lorsque cette méthode de recharge se généralisera, les charges rapides deviendront en effet plus simples qu’un plein d’essence : on se branche, et c’est tout.

BMW i4 sur Tesla Superchargeurs / Source : D. Nogueira

Malheureusement, il n’est pas encore possible à ce jour de profiter de cette fonctionnalité sur les bornes de recharges lentes (dans des parkings à l’intérieur des villes, dans les centres commerciaux, etc.), où la solution la plus simple pour tous serait de proposer le paiement à l’acte par carte bancaire, permettant à tous de charger sans encombre, sans application mobile ou QR code à scanner.

En attendant ce futur où la charge rapide sera simplifiée et où la charge sur les bornes publiques ne sera plus assujettie à la possession de différentes cartes d’opérateurs de mobilités et autres applications mobiles par dizaines, l’adoption massive des véhicules électriques sera obligatoirement freinée, tant l’expérience actuelle est déplaisante. Gageons toutefois que l’ensemble des acteurs arrivent à s’entendre et à améliorer la jungle actuelle de la recharge hors de chez soi.

Pour aller plus loin
Voiture électrique : les longs trajets sont-ils toujours plus économiques ?


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