Quand vous achetez une voiture, qu’elle soit électrique ou thermique, sur sa fiche technique, il y a toujours la consommation indiquée, relevée sous le cycle d’homologation en vigueur en Europe, à savoir le cycle mixte WLTP.
Pour en savoir plus sur comment sont réalisées ces homologations et comprendre pourquoi il y a aussi des différences entre les différents cycles d’homologation à travers le monde (CLTC en Chine, EPA aux États-Unis…), n’hésitez pas à consulter notre dossier dédié.
Vous l’avez sûrement constaté, entre les consommations indiquées selon le cycle WLTP et la réalité, il y a parfois un monde. Certes, ces différences ont été estompées avec le passage du cycle NEDC au cycle WLTP il y a quelques années en Europe, grâce à un nouveau protocole de tests censé se rapprocher de la réalité. Mais pour certains modèles, les écarts sont encore assez significatifs.
En ce qui concerne la voiture électrique, cela joue évidemment sur l’autonomie, puisque celle indiquée selon le cycle WLTP est souvent assez éloignée de la réalité. Lors de nos essais de voitures électriques, nous avons parfois constaté des écarts de plus de 25 % dans certains cas en usage mixte, et sans pour autant adopter une conduite à rythme soutenu.
Même la consommation indiquée sur l’ordinateur de bord de la voiture est déconnectée de la réalité, puisqu’elle ne prend pas en compte tous les paramètres, à commencer par les pertes d’énergie lors de la recharge. Des déperditions qui n’apparaissent pas dans le calcul des consommations, entraînant ainsi également des pertes financières pour l’utilisateur. Explications.
Comment est déterminée la consommation sous le cycle WLTP ?
Le Worldwide Harmonized Light-Duty Vehicles Test Procedure (WLTP) est obligatoire pour toute nouvelle immatriculation à partir du 1er septembre 2018. Le cycle WLTP remplace en Europe le cycle NEDC. Le cycle WLTP est annoncé comme étant plus proche de la réalité par rapport au cycle NEDC, notamment grâce à de nouvelles méthodes de calcul des valeurs de consommation, en l’occurrence, en termes de kWh / 100 km pour les voitures électriques. L’équivalent de la consommation en litres / 100 km pour les voitures thermiques.
La norme WLTP fait évoluer les conditions du cycle d’homologation NEDC vers une utilisation plus dynamique de la voiture. Elle s’appuie notamment sur des sondages statistiques ainsi qu’une évaluation précise des profils type de conducteurs. WLTP s’appuie sur des taux d’accélération plus rapides, des vitesses moyennes supérieures et des vitesses maximales plus élevées.
Les évolutions se poursuivent au niveau des conditions d’utilisation, puisqu’au lieu de simuler une circulation en cycle urbain, rural puis mixte, le véhicule est désormais essayé sur quatre vitesses différentes. WLTP a été développé sur des données collectées partout à travers le monde en couvrant de nombreuses situations de conduite. Le cycle considère également les équipements optionnels qui ont un impact direct sur l’aérodynamisme, la consommation ou encore le poids total de la voiture.
Le protocole est doublé d’un autre cycle complémentaire nommé RDE (pour Real Driving Emissions), qui est effectué aléatoirement et sur route ouverte. Cela permet de prendre en compte tous les paramètres extérieurs non reproductibles en laboratoire, et ainsi s’approcher plus facilement des conditions que peut rencontrer un utilisateur (météo, températures, reliefs…). Les données recueillies permettent de vérifier la cohérence avec les résultats obtenus en laboratoire.
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L’introduction du cycle WLTP a aussi permis de remettre les pendules à l’heure concernant certaines voitures électriques. À l’époque du cycle NEDC, les données étaient très ambitieuses et éloignées de la réalité. Par exemple, l’ancien Hyundai Kona electric, avec sa batterie de 64 kW, était annoncé à 546 kilomètres avec la norme NEDC, puis à 482 km après un passage via WLTP.
Le cycle WLTP a aussi su évoluer avec l’avènement de la voiture électrique et tout l’éco-système qui gravite autour. Ainsi, pour établir la consommation, le cycle WLTP prend aussi en compte les pertes lors de la recharge, pertes qui ne sont pas forcément prises en compte par le constructeur et, par conséquent, par l’ordinateur de bord. Ainsi, cela peut donc changer assez largement l’autonomie réelle.
Qu’est-ce que les pertes lors de la recharge ?
C’est un processus relativement simple, que le cycle WLTP n’a bien évidemment pas oublié dans son protocole de test, mais que les ordinateurs de bord de toutes les voitures électriques du marché ne prennent pas en compte.
Il s’agit de déperdition des kWh au niveau de l’installation électrique, de la borne, du chargeur embarqué et de la batterie. Ces déperditions peuvent se cumuler. Une récente étude allemande menée par l’ADAC a pointé du doigt le fait que les constructeurs ne mentionnaient pas ces déperditions dans le calcul des consommations, entraînant ainsi des pertes financières pour l’utilisateur.
Rien de mieux qu’un exemple pour imaginer la chose : si vous rechargez les 60 kWh de la batterie de votre voiture électrique chez vous, il est possible que votre fournisseur d’énergie vous facture 70 kWh. C’est ce qui arrive si votre chargeur embarqué à des pertes de 20 %. La consommation WLTP homologuée tient donc en compte ses pertes, contrairement à la consommation classique annoncée parfois par les constructeurs.
De ce fait, si vous êtes amenés à rouler en imitant méticuleusement le cycle WLTP, vous aurez une consommation sans doute inférieure à la consommation WLTP officielle sur l’ordinateur de bord, puisqu’il ne prend pas en compte ces pertes de charge.
C’est pour cela que certains organismes plaident notamment pour que les constructeurs améliorent l’efficience des systèmes de recharge. C’est d’ailleurs sur ce point que Renault a travaillé récemment en présentant une nouvelle architecture de recharge pour optimiser les composants actifs (semi-conducteurs) et passifs (condensateurs et composants inductifs bobinés).
Pour les recharges dites « lentes », c’est-à-dire inférieures ou égales à 22 kW, les chargeurs ne sont pas intégrés dans les bornes, mais directement dans la voiture. Grâce à cette nouvelle architecture, les pertes d’énergie sont réduites de 30 % lors de la conversion, et d’autant l’échauffement, facilitant le refroidissement du système de conversion.
Pourquoi les ordinateurs de bord ne prennent pas en compte les déperditions ?
C’est une question tout à fait légitime, mais techniquement, cela paraît bien compliqué. Même si le système qu’est en train de développer Renault, à savoir avec un chargeur intégré directement dans la voiture, devrait ouvrir quelques portes, les déperditions dépendent surtout aujourd’hui de la borne de recharge et cela impliquerait une refonte du système de calcul des consommations par l’ordinateur de bord.
Si la plupart des constructeurs jouent le jeu et communiquent sur les consommations et l’autonomie selon le cycle WLTP, certains, comme Stellantis (et uniquement Stellantis à notre connaissance aujourd’hui), préfèrent jouer sur les mots et les méthodes de calcul.
Ainsi, lors de la présentation de chaque nouveau modèle électrique, Jeep Avenger électrique, Opel Astra électrique, Peugeot e-208, Citroën ë-C4 X, les marques du groupe Stellantis communiquent sur des consommations moyennes très basses pour des voitures électriques, tout en prenant soin de préciser qu’il s’agit d’une « estimation ».
Prenons un exemple, celui de la présentation de la nouvelle Peugeot e-308. Le constructeur au lion a annoncé une consommation de 12,7 kWh/100 km, mais sans préciser sur quel type de test (WLTP mixte ou urbain). Pour avoir essayé plusieurs voitures des marques membres du groupe et qui partagent la même architecture moteur / batterie, autant vous dire que nous sommes loin des chiffres avancés sur les autres produits.
En fait, Peugeot a divisé la taille de la batterie par l’autonomie annoncée par le cycle WLTP pour établir une consommation « théorique » WLTP avant les vrais chiffres, sans prendre en compte les pertes de charge donc. À titre de comparaison, une Renault Zoé (395 km d’autonomie avec sa batterie de 52 kWh) est donnée pour une consommation de 17,2 kWh. La Peugeot e-208 (400 km d’autonomie avec sa batterie de 51 kWh) est donnée pour 14,5 kWh/100 km selon les chiffres officiels WLTP. Là encore, avant les chiffres officiels WLTP, Peugeot avait annoncé une estimation de 12 kWh/100 km.
Pourquoi peut-on encore consommer davantage à l’ordinateur de bord en comparaison du cycle WLTP ?
Compte tenu du fait que l’ordinateur de bord ne prend pas en compte les déperditions d’énergie, les consommations relevées devraient être inférieures à celles communiquées par le cycle WLTP qui, lui, les prend en compte.
Dans les faits, ce n’est pas exactement ça. Lors de nos derniers essais, effectivement, nous avons remarqué (même si les parcours étaient très aseptisés) que plusieurs voitures parvenaient sans trop de difficultés à atteindre leur consommation WLTP (la palme revient notamment au Nissan Ariya). En revanche, lors de conditions plus « normales », on observe régulièrement un écart d’environ 2 kWh (cela peut être plus, ou moins, tout dépend de la voiture) de plus qu’avec le cycle WLTP.
En réalité, même si le cycle WLTP s’approche plus de la réalité par rapport au NEDC, il y a encore trop de paramètres qui entrent en compte et que lui ne peut pas forcément intégrer. Le style de conduite par exemple, cela vaut aussi pour les voitures thermiques, est un élément déterminent, ou encore les conditions de circulation.
En d’autres termes, si votre ordinateur de bord vous donne des consommations supérieures aux normes WLTP, il n’y a rien d’anormal, en revanche, sachant qu’il ne prend pas en compte les déperditions d’énergie, sachez que ces mêmes consommations « à la prise » sont encore supérieures à ce qui est annoncé.
Quel impact dans la pratique ?
Cela ne change rien à l’autonomie de la voiture, qui sera similaire avec ou sans pertes. C’est juste qu’en prenant en compte les pertes, vous connaîtrez le prix exact d’un plein d’électricité. Communiquer sur des consommations non WLTP est donc une grave maladresse de la part de Stellantis, qui induit le client en erreur. Pire, si ce dernier veut comparer la consommation estimées des voitures Stellantis avec celle des concurrents (au format WLTP), il va penser que les premières consomment largement moins que les dernières. Ce qui n’est pas forcément vrai.
À titre de comparaison, pour la e-208, en passant d’une consommation estimée de 12 kWh / 100 kWh à 14,5 kWh / 100 km, le coût aux 100 km avec une charge à domicile varie de 2 à 2,5 euros. Ce qui n’est pas négligeable.
Heureusement, ces chiffres de consommation fantaisistes indiqués par Stellantis ne le sont que dans les communiqués de presse. Une fois que la voiture est en vente sur les sites des constructeurs du groupe Stellantis, on retrouve les « vrais » chiffres de consommation WLTP, qui prennent en compte les pertes d’énergie.
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