À partir de 2035, il ne sera plus possible d’acheter la moindre voiture thermique neuve. C’est en tout cas ce que souhaite la Commission européenne, alors que cette décision a récemment été votée par le Parlement. Sauf que les choses ne sont pas aussi simples, puisque cette mesure doit désormais être approuvée par les pays membres. Or, neuf d’entre eux refusent de jouer le jeu.
Un prix en hausse
Parmi eux, l’Allemagne. Le gouvernement souhaite que l’Union européenne intègre les carburants de synthèse dans les exemptions, tandis que Porsche travaille sur le développement de ces derniers depuis de nombreuses années. Devant l’insistance du chancelier Olaf Scholz, les grandes instances ont décidé de revoir leur copie et de proposer une solution. Mais celle-ci n’est pas vraiment un cadeau.
En effet, si les voitures thermiques pourraient toujours être vendues après 2035, l‘Europe affirme qu’elles devront rouler uniquement au e-fuel. Ce qui signifie que les constructeurs devront mettre au point un système capable de détecter la présence d’essence classique et d’empêcher le démarrage du moteur. Une mesure inquiétante selon Transport & Environnement, qui tire la sonnette d’alarme dans un rapport tout juste publié.
L’ONG, qui a récemment alerté sur la délocalisation de la production de batteries aux États-Unis s’inquiète de l’impact de cette décision sur les finances des automobilistes. En effet, le carburant synthétique coûte actuellement très cher. L’entreprise Zero Petroleum propose des bariles à environ 56 euros du litre. Bien sûr, ce tarif devrait chuter au cours des prochaines années, mais il restera élevé.
L’organisme annonce un litre dépassant les 2,82 euros en France en 2030 (selon les données prévisionnelles de l’ICCT), soit environ 50 % de plus que l’essence vendue actuellement. Il faudra compter entre 1 692 et 2 538 euros par an rien qu’en carburant, à raison d’un seul plein par mois, ce qui signifie que seuls les conducteurs les plus aisés pourront continuer de rouler en voiture thermique. Les autres devront rouler en électrique, en voiture essence ou diesel d’occasion, ou trouver des moyens de contourner les règles.
Rappelons qu’il sera encore possible de rouler avec des voitures thermiques classiques, fonctionnant à l’essence, au diesel, ou au GPL, si celles-ci sont d’occasion, et ont donc été produites avant 2035. L’objectif est de réussir à avoir un parc automobile qui ne rejette plus de CO2 d’ici 2050, puisque la durée de vie d’une voiture est d’un peu moins de 15 ans.
Un impact négatif pour l’environnement
Mais ce n’est pas tout. Car si le carburant de synthèse coûte très cher, à tel point que Porsche recherche actuellement des aides publiques pour faire baisser le prix, ce n’est pas le seul inconvénient. Sur le papier, cette alternative est pourtant très séduisante : elle ne change rien à la conduite, comme nous avons pu le tester et elle ne nécessite pas de matériaux fossiles. Mais dans les faits, c’est un peu différent.
En effet, la fabrication de l’e-fuel demande tout de même une importante quantité d’énergie et notamment d’électricité. Or, on sait que la production n’est pas propre à 100 %, à moins de n’utiliser que de l’énergie verte. De plus, le carburant synthétique n’empêche absolument pas le rejet de gaz polluants comme les dioxydes d’azote (NO2) ainsi que les oxydes d’azote (NOx) très nocifs pour la santé. L’échappement continue de rejeter du CO2, qui est censé être capturé ensuite lors de la production du carburant. Comme un circuit fermé… mais mondial.
Selon T&E, les voitures roulant avec ce type de combustible pourraient émettre jusqu’à 160 000 tonnes de NOx supplémentaires rien que dans l’Union européenne d’ici à 2030. De plus, si les véhicules thermiques roulant au carburant synthétique étaient bien autorisés après 2035, ils pourraient empêcher la vente de 46 millions de voitures électriques, jugées plus propres. Même si celles-ci ne sont pas toujours exemplaires non plus.
C’est notamment le cas des SUV, qui seraient particulièrement polluants durant leur fabrication et qui pourraient contribuer à une pénurie de batterie au cours des prochaines années. Transport & Environnement estime que l’Allemagne met en péril la transition écologique en Europe et pourrait également faire perdre de l’argent aux constructeurs qui investissent massivement dans l’électrique.
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