La lettre d’excuses (in)sensée de Samsung

 
Samsung vient de prouver que l’argent ne fait pas tout. Avec une lettre d’excuses rendue publique malgré des bénéfices mirobolants, l’entreprise soulève des questions sur les véritables indicateurs de succès dans le monde impitoyable de la haute technologie.

Malgré des bénéfices colossaux, Samsung s’est fendu d’une lettre d’excuses publique.

Samsung s’excuse malgré ses milliards

Samsung, le géant sud-coréen de l’électronique, vient de présenter ses excuses aux investisseurs via une lettre publique. Ce qui rend cette démarche particulièrement surprenante ? L’entreprise annonce également des bénéfices s’élevant à plusieurs milliards d’euros. Alors, pourquoi s’excuser quand les chiffres semblent au beau fixe ?

Commençons par les faits : Samsung prévoit pour le troisième trimestre 2024 un chiffre d’affaires de 79 000 milliards de wons (environ 53,6 milliards d’euros) et un bénéfice de 9 100 milliards de wons (environ 6,2 milliards d’euros) avant impôts. Pour le commun des mortels, ces chiffres donnent le vertige. Mais dans le monde impitoyable de la haute technologie, ils sont considérés comme… décevants.

En effet, les analystes tablaient sur un bénéfice de 10 300 milliards de wons (environ 6,9 milliards d’euros). Un écart qui peut sembler minime, mais qui a fait l’effet d’une douche froide sur les marchés. Comme l’a déclaré l’analyste Lee Min-hee à Reuters : « Les résultats sont un choc par rapport à ce que de nombreux analystes attendaient initialement ».

Mais alors, comment expliquer ce décalage entre les attentes et la réalité ? C’est là que les choses deviennent intéressantes.

Les défis cachés derrière les milliards

La lettre de Young Hyun Jun, responsable de Samsung Device Solutions, met en lumière plusieurs défis majeurs auxquels l’entreprise est confrontée. Tout d’abord, Samsung admet avoir pris du retard dans son accord de puces d’intelligence artificielle avec un client majeur. Dans un secteur où l’IA est le nouveau Graal, ce retard pourrait coûter cher à l’entreprise sur le long terme.

De plus, les rivaux chinois de Samsung augmentent leur offre de puces, mettant une pression supplémentaire sur les marges de l’entreprise sud-coréenne.

Cette situation est d’autant plus problématique que la réponse tardive de Samsung au marché des puces IA signifie que l’entreprise reste très dépendante des puces traditionnelles à faible marge. Cette dépendance la rend plus vulnérable aux fluctuations du marché, notamment à la baisse de la demande de smartphones et d’ordinateurs.

Enfin, dans la course aux puces HBM (High Bandwidth Memory), essentielles pour les serveurs d’IA, Samsung est à la traîne derrière son compatriote SK Hynix, qui fournit déjà Nvidia, le leader du marché.

Ces défis expliquent pourquoi, malgré des chiffres qui feraient rêver n’importe quelle entreprise, Samsung se sent obligé de s’excuser. L’entreprise reconnaît que sa « performance n’a pas répondu aux attentes du marché, ce qui soulève des inquiétudes quant à [sa] compétitivité technologique fondamentale et à l’avenir de l’entreprise ».

Vers un changement de stratégie ?

La lettre de Young Hyun Jun ne se contente pas de présenter des excuses. Elle annonce également un changement d’approche. Plutôt que de chercher des solutions à court terme pour booster artificiellement les chiffres, Samsung promet de se concentrer sur sa « compétitivité fondamentale ».

Cette stratégie pourrait impliquer plusieurs axes. On peut imaginer un investissement massif dans la R&D, notamment dans le domaine de l’IA et des puces haute performance.

Samsung pourrait également chercher à diversifier ses partenariats pour réduire la dépendance à un seul client majeur.

Une optimisation des processus de production pour mieux concurrencer les fabricants chinois sur les puces conventionnelles semble également envisageable.

Enfin, une accélération du développement des puces HBM pour rattraper SK Hynix sur le marché des serveurs d’IA paraît inévitable.


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