EDF : cette décision sur le nucléaire risque d’augmenter les prix de l’électricité pour certains clients

 
EDF a récemment annoncé son projet d’introduire un système d’enchères à l’échelle européenne pour la vente d’une part de sa production d’énergie nucléaire. Cette initiative suscite des inquiétudes parmi les entreprises qui craignent de perdre leur compétitivité. Mais cela pourrait aussi avoir un impact sur les consommateurs.
Source : Pixabay

En France, les gros consommateurs d’électricité (notamment dans les secteurs de la métallurgie, de la verrerie et de la chimie), ainsi que les fournisseurs alternatifs (qui revendent l’électricité aux particuliers), profitent actuellement de tarifs réduits sur l’électricité nucléaire grâce au mécanisme ARENH (Accès régulé à l’électricité nucléaire historique). Ce système, qui prendra fin le 31 décembre 2025, a permis des tarifs avantageux de 42 euros/MWh.

Une fois que l’ARENH sera terminé, une hausse du prix est attendue. EDF avait même déjà proposé de revoir ce tarif à 70 euros/MWh. Cependant cette augmentation complique le renouvellement des contrats avec les grands clients d’EDF. Résultat : l’État, son unique actionnaire, fait pression. Mais alors qu’il était espéré que l’énergéticien français adopte une approche plus conciliante, sa récente décision stratégique n’a fait qu’augmenter les tensions.

Des enchères à l’échelle européenne

Le 6 mars dernier, suite à un accord conclu avec l’État en 2023, EDF a dévoilé sa nouvelle politique commerciale. L’énergéticien prévoit la vente de contrats d’allocation de production nucléaire (CAPN) aux industriels via un système d’enchères accessible à l’échelle européenne à partir du mois de juin. Dans ce cadre, 10 TWh d’électricité nucléaire seront disponibles sur le marché, et la livraison s’effectuera à partir de janvier 2026. Cette offre cible spécifiquement les entreprises consommant au moins 7 GWh par an. Elle s’adresse aussi bien aux producteurs et fournisseurs basés en Europe, dont les clients peuvent se situer en France ou dans d’autres pays européens.

Un mécanisme qui irrite

La décision d’EDF est un coup dur pour les industriels français. Selon l’Union des industries utilisatrices d’énergie (Uniden), cette stratégie commerciale désavantage les entreprises françaises, et menace leur compétitivité. Bruno Le Maire, l’ancien ministre de l’Économie, a exprimé sur la plateforme X à ce sujet : « EDF doit fournir une électricité au prix le plus compétitif possible à tous les industriels ; le projet de mise aux enchères européennes ne répond pas à cette vocation et affaiblirait l’industrie française », écrit-il en insistant également sur le fait que l’accord de 2023 devrait être respecté.

Uniden critique vivement EDF pour sa stratégie de vendre aux plus offrants via les enchères, plutôt que de satisfaire directement les besoins des entreprises locales. « Avec cet appel d’offres et sans poursuite de discussions bilatérales avec les industriels, EDF préférerait clairement vendre aux plus offrants plutôt qu’à ceux qui en ont besoin », craint l’association, selon Connaissance des énergies. Cette initiative est d’autant plus surprenante pour Uniden que EDF a enregistré un record de rentabilité l’année passée, avec un résultat net de 11,4 milliards d’euros.

Les négociations se poursuivent

Les négociations sur les tarifs d’électricité entre EDF et les industriels s’éternisent depuis plus d’un an sans progrès. Il faut croire que les grands consommateurs étaient habitués à payer 42 euros/MWh sous le régime ARENH. Certains d’entre eux envisagent par ailleurs une délocalisation pour éviter les impacts d’une hausse drastique des coûts énergétiques.

Dans le cadre de ces négociations, EDF a réussi à signer plusieurs contrats d’intention (une sorte d’accord préliminaire) avec plusieurs gros acheteurs. Toutefois, à ce jour, un seul contrat définitif à long terme a été conclu avec l’entreprise sidérurgique ArcelorMittal, ce qui représente moins de 1 % de l’objectif fixé.

Alors que l’État continue d’exercer la pression, EDF tente de gérer les inquiétudes et les tensions autour de son initiative. Marc Benayoun, le directeur exécutif chargé du pôle clients, souligne que l’adoption du système d’enchères ne met pas fin aux négociations en cours avec les industriels. Il a également assuré que plusieurs des préaccords signés pourraient aboutir à de nouveaux contrats.

Une hausse de 19% des factures pour les consommateurs ?

Avec la fin de l’ARENH, non seulement les industriels et les fournisseurs alternatifs, mais surtout aussi les particuliers vont ressentir l’impact de la fin du prix cassé de l’électricité. Les consommateurs devraient ainsi se préparer à une hausse des tarifs d’ici l’année prochaine.

Pour aller plus loin
« L’État protège EDF, pas les consommateurs » : le prix de l’électricité va-t-il réellement exploser en 2026 ? On fait le point sur la situation

En février dernier, l’Union fédérale des consommateurs a même lancé une alerte sur un potentiel choc tarifaire résultant de la réforme du tarif nucléaire. Selon l’UFC-Que Choisir, les factures d’électricité pourraient subir une augmentation moyenne de 19 %. « Nos calculs sont clairs : avec cette réforme les consommateurs paieront en moyenne 19 % de plus, soit jusqu’à 250 € supplémentaires par an pour un foyer moyen », a prévenu l’association dans un communiqué.


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