Le vélo électrique pollue-t-il vraiment plus qu’un vélo classique ?

Décryptage

 
Pour aller au travail ou au quotidien, voire pour le loisir, le vélo à assistance électrique est autant une alternative verte qu’un véhicule ayant une empreinte carbone non négligeable. Voici un décryptage pour savoir à quel point le VAE est-il propre, ou non.
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Source : Frandroid

Vous voulez pratiquer le vélotaf, remplacer votre voiture – en partie ou totalement – dans vos déplacements, et vous vous dites que le vélo électrique serait plus vert. Mais à quel point ? Utiliser un VAE est-il vraiment écologique si l’on compare à un vélo classique ? Voici notre dossier pour voir plus clair dans l’impact du VAE sur la planète, de sa production à sa batterie en passant par sa fin de vie.

Un vélo électrique est (beaucoup) plus propre qu’une voiture

De nombreux utilisateurs remplacent leur ancienne voiture thermique – essence ou diesel – par un vélo électrique. Pour un même trajet, ce mode de transport est diablement plus écologique. Il n’émet aucun gaz d’échappement, quand une automobile rejette du CO2 – un gaz à effet de serre – renforçant le réchauffement climatique, ou des gaz nocifs tels que le monoxyde de carbone, ou les particules fines.

Précisons que nos calculs se basent sur la notion de eqCO2 comme l’explique Wikipedia. Cela permet de comparer différents gaz à effet de serre entre eux, en se référant à la base commune du CO2.

Pour le calcul du CO2, prenons la moyenne d’émission de 100 g de CO2/km – ou 10 kg/100 km à l’échappement, popur une voiture neuve en 2023, selon la PFA. Un vélo électrique consomme entre 0,5 et 1 kWh/100 km (selon le modèle, le mode d’assistance, le poids, etc.), sachant que l’électricité en France émet 54 g/kWh. Sur un kilomètre parcouru, le vélo émet donc 0,05 à 0,1 g/km, soit 500 à 1000 fois moins qu’une voiture.

Et encore, c’est sans prendre en compte le cycle de vie de l’essence et du Diesel, du puits à la roue. C’est-à-dire, sa pollution pour l’extraire, le traiter et le transporter. Si l’on prend en compte ces données, une voiture essence ou Diesel neuve émet plutôt environ 200 g eqCO2/km. Ce qui favorise encore plus le vélo électrique comme un mode de transport « propre ».

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Un vélo est moins polluant à produire, entretenir, et induit moins de routes ou parking – Source : Cupra

Quid de la comparaison avec un véhicule électrique ? Prenons en exemple un modèle de VAE avec lequel nous avons parcouru 80 kilomètres. Il est doté d’une batterie de 625 Wh, soit une consommation de 781,25 Wh/100 km (ou 0,78 kWh/100 km). Une voiture électrique, dans les mêmes conditions (ville), consomme au mieux 15 kWh/100 km (chiffre de la Peugeot e-208, voiture électrique la plus vendue en France en 2022). Ainsi, le vélo électrique consomme environ 20 fois moins qu’une voiture électrique lors de la phase de roulage.

Dans cette équation, il faut aussi prendre en compte la production des vélos électriques, et leur acheminement vers différents marchés. Un vélo électrique générerait 50 à 200 kg eqCO2 selon le modèle ou les marques. Riese & Müller communique sur 56 kg par vélo, lorsque Trek tourne plutôt autour de 200 kg.

Selon l’Ademe, l’impact total en prenant le cycle de vie est de 1,1 kg eqCO2 aux 100 km pour un VAE, 10 kg pour une voiture électrique et 22 kg pour une voiture thermique. Autre source, une étude estimait entre 7,2 et 15 g/km émis selon le matériau du cadre, pour un vélo parcourant 20 000 km.

Graphique émission CO2 vélo vs voiture
Source : Marie Verdeil via LowtechmagazineDéfinir l’image mise en avant

Qu’elle soit électrique ou thermique, la voiture entraîne aussi un entretien conséquent par rapport à un vélo : lavage, vidange de son huile, freins, pneus, liquides lave-glace, remplacement de pièces. Il est plus difficile à quantifier l’impact exact, mais il est bien plus élevé que pour un vélo, doté de moindres pièces d’usure ou secondaires.

Bon à savoir : la circulation des voitures et des poids lourds, du fait de leur poids et de leur liaison au sol avec des pneus beaucoup plus grands, dégrade bien plus rapidement la route qu’un vélo électrique. Rappelons que le poids moyen d’une voiture est de 1 233 kg en France, contre 15 à 25 kg pour un vélo électrique, soit 50 à 80 fois moins.

L’entretien des routes est donc plus régulier et plus polluant, auquel on peut ajouter des chaussées deux à trois fois plus larges. Et c’est sans aborder l’impact des parkings, ou de leur participation à la minéralisation des espaces.

La pollution due à l’usure des pneus est également à prendre en compte. C’est notamment le cas des voitures électriques, plus lourdes que leurs homologues thermiques, qui émettent davantage de particules fines liées aux pneus.

Un vélo électrique, oui, est moins propre qu’un vélo classique

Si vous êtes un habitué du vélo classique, musculaire, mécanique, bref non électrique, le VAE peut apparaître comme une aberration. Pourquoi ajouter un moteur quand les jambes peuvent faire le travail ? Le vélo électrique ne remplace pas forcément le pédalage, mais ajoute une aide supplémentaire, que ce soit pour de plus longs parcours, le vélotaf, ou pour les personnes âgées par exemple.

Un vélo électrique ajoute par ailleurs de nombreux éléments : la batterie, le moteur, le capteur de couple ou de pédalage, des commandes, souvent un écran, et du câblage. Il ne faut pas oublier aussi le chargeur. Toutes ces pièces ont un impact double : au niveau de la production, et au niveau du poids du vélo électrifié – il prend en moyenne entre 5 et 7 kg.

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Source : Anthony Wonner – Frandroid

Conséquences : leurs pneus sont aussi plus imposants, donc à plus forte empreinte environnementale et émettant plus de particules à l’usure, comme nous venons de le voir plus haut. Plus de poids, c’est également des freins de diamètre supérieur, ce qui fait aussi rejeter plus de particules.

La batterie, l’élément le plus polluant du vélo ?

Le principal élément qui différencie un vélo classique d’un VAE est la batterie. C’est le plus visible, mais surtout celui suscitant le plus de questions ou d’inquiétude quant à son impact environnemental. Bien que plus petite vis-à-vis d’une voiture électrique, elle contient de nombreux matériaux comme le plastique, l’acier ou des métaux spécifiques de type lithium.

Ce dernier est difficile à extraire, venant de mines au Chili, Australie, Chine… mais aussi d’Europe (dont la France), gourmandes en eau, puis raffinées. La batterie devient donc une des principales sources d’émissions de CO2, mais pas forcément la plus importante.

Trek a publié une étude dans laquelle elle analyse les rejets en fonction des composants. Sur son VTTAE Rail de 2019, la batterie de 500 Wh ne comptait que pour 15 % des 229 kg eqCO2 (qui prend en compte les équivalents comme le méthane ou le protoxyde d’azote). La fourche était ainsi la plus polluante (16 %), contre 12 % pour les roues, 11 % pour le cadre et 9 % pour le pédalier.

Cependant, il faut ajouter le chargeur (4 %), soit près de 20 % pour la batterie et le chargeur réunis. En tout, la partie électrique représente 28 % si l’on ajoute le moteur. Dit autrement, un vélo électrique émet 28 % de gaz à effet de serre supplémentaire lors de sa phase de production. Et c’est sans compter son utilisation, avec la pollution émise lors de la recharge, du fait du réseau électrique.

Le transport a, lui aussi, des conséquences très vastes sur le bilan final, bien plus que la production en elle-même. Riese & Müller a quantifié sa part – et celle de la distribution – à environ 80 % de l’ensemble de ses activités.

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La batterie amovible d’un vélo électrique // Source : Canyon Bicycles

Outre la production, le cycle de la batterie interroge aussi. Il suffit d’une cellule défectueuse pour qu’elle tombe en panne – bien que cela soit assez rare – alors que chaque batterie a une certaine durée de vie. On parle de nombre de cycles de recharge, en centaines voire plus de 1 000 pour les plus fiables, comme on a pu récemment le voir avec le rapport de Tesla dans l’automobile.

Une fois la capacité de la batterie tombée sous les 70 % de sa capacité initiale, l’accumulateur est toujours utilisable, mais l’autonomie est dégradée. C’est souvent le seuil que se fixent les constructeurs avant qu’une batterie doive être remplacée.

Si l’on vient à se séparer de la batterie, son recyclage n’est pas systématique, même si la filière automobile vise les 99 % de taux de recyclage avec Volkswagen, et déjà plus de 92 % chez Tesla. La France s’efforce donc de l’appliquer, notamment via son éco-organisme Corepile collectant et recyclant les batteries de VAE depuis 2017.

Oui, une batterie n’est pas propre, mais sa petite taille limite son empreinte environnementale. Enfin, rappelons qu’une batterie de vélo électrique reste petite à produire face à celle d’une voiture, comme le montre ce tweet et dans l’image ci-dessous, tirée de cet article du site Bon Pote.

Source : Aurélien Bigo pour Bon Pote

Production locale, nouveaux matériaux et initiatives vertes

Pour répondre à la problématique du transport et de la distribution, les marques font des efforts. L’exemple de Riese & Müller est intéressant : les cadres ne proviennent plus de Chine par bateau, mais par camion du Portugal. Résultats : – 23 % d’eqCO2 émis par cadre. On peut encore abaisser le tout en adoptant le train, ou des camions à énergie alternative (électrique, hydrogène, etc.).

La relocalisation est ainsi un sujet fort en France, où Moustache milite via ses usines locales, tout comme la Manufacture Française du Cycle (MFC) qui produit pour Intersport, Cycleurope, Angell, le haut de gamme Decathlon ou Arcade Cycles.

Il ne faut cependant pas confondre assemblage et la production. Les composants sont généralement issus de l’étranger, souvent d’Asie. Rebâtir une filière vélo, vœu du député Guillaume Gouffier-Cha, est un objectif majeur pour permettre aux vélos de posséder des roues, moteurs, cadres ou encore freins, provenant de France.

Précisons toutefois que les Français n’achètent pas exclusivement des vélos français (voyez les nombreux Gazelle, Giant, Kalkhoff, Cowboy, Brompton dans les grandes villes). Et les marques tricolores exportent aussi hors de nos frontières. En 2022, cela représentait près de 30 % de la production selon l’Union Sport & Cycle, soit 250 000 vélos, toutes catégories confondues.

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Pour polluer moins, il faut surtout faire local, comme s’efforce à le faire Moustache Bikes – Source : Anthony Wonner – Frandroid

Il convient enfin d’aborder le sujet des matériaux. L’aluminium envahit nos cadres depuis les années 1980, car plus léger et moins cher, mais plus polluant à produire même s’il est grandement recyclable. La marque Vélosophy a même utilisé des capsules de café pour ses cadres, économisant 27 tonnes en trois ans.

Pour s’en affranchir, certains misent sur le bambou – pas forcément plus vert, mais renouvelable – à l’image de Cyclik avec son Relief ou Möbius. Cette dernière marque y ajoute tout un ensemble vertueux : pneus Schwalbe Green à 60 % de matériaux recyclés, sellerie en cuir de raisin venant d’Italie. Elle s’engage même à recycler le vélo en fin de vie.

D’autres alternatives sont aussi apparues, comme le vélo évolutif. Le Néerlandais Roetz Life se veut modulable pour passer d’un VAE classique à un longtail sans changer de vélo. Le Lyonnais Ref Bikes adopte la même démarche avec un cadre modulable pour changer d’univers vers le gravel ou l’allongé. Plus besoin d’acheter plusieurs vélos.

Globalement, le vélo électrique est donc écologique. S’il a une empreinte plus élevée qu’un vélo classique, du fait de sa batterie et de son moteur, il reste un transport très efficient par rapport aux voitures sur les trajets du quotidien. Et les marques accélèrent sur une production plus locale, des matériaux plus verts, ou l’engagement sur un cycle de vie.

Pour résumer, si l’aspect écologique vous tient à cœur jusque dans l’achat d’un vélo, préférez le musculaire à l’électrique si aucun inconvénient rédhibitoire ne s’y oppose. Mais comme nous venons de le voir, un vélo électrique sera largement moins polluant que les autres modes de transports motorisés (voiture électrique, thermique, et les scooters).


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