« Une décision étrange qui est un coup dur pour l’industrie » : mais que fabrique le Royaume-Uni avec les vélos électriques chinois ?

 
En allégeant les taxes contre les vélos électriques et mécaniques chinois, le Royaume-Uni nous surprend et va à contre-courant des pratiques européennes et des Etats-Unis. Une catégorie de cycles est cependant exclue : les pliants, pour protéger les acteurs nationaux, dont Brompton.
E26ST // Source : ENGWE

Parti de l’Union européenne depuis le 31 janvier 2020, le Royaume-Uni applique désormais ses propres règles, comment dans celui du domaine du vélo électrique. Et surprise, le pays vient d’annoncer la suppression des taxes anti-dumping en provenance de Chine il y a quelques jours.

Ni dans l’intérêt du Royaume-Uni, ni des clients ?

L’agence gouvernementale TRA (Trade Remedies Authority) avait recommandé cette révocation l’été dernier. Elle a été acceptée par le gouvernement et est entrée en application le 7 février 2025. Auparavant, le Royaume-Uni conservait les taxes de l’époque, soit 10 à 70 % selon les fabricants.

Pashley Pathfinder E vélo ville électrique
Les vélos électriques britanniques comme ce Pashley vont subir davantage la concurrence chinoise. // Source : Pashley Cycles

« Dans ses enquêtes, la TRA a trouvé que conserver ces mesures d’importation de vélos électriques chinois n’était pas dans l’intérêt économique du Royaume-Uni », annonce le communiqué. « Supprimer la taxe sur les vélos électriques non pliants pourrait signifier en moyenne une économie de 200 livres (240 euros)” assure la TRA, « et donc permettre d’acheter des VAE moins chers« . 

Si nos voisins vont dans ce sens, c’est que la majorité des vélos électriques provient d’Asie et de Chine. Le Royaume-Uni ne possède pas de forte industrie du cycle comme c’est le cas sur le continent, avec des acteurs majeurs tels que l’Allemagne, les Pays-Bas et la France, qui possèdent de nombreux acteurs nationaux.

Les vélos électriques pliants non concernés

La mesure pourrait toutefois fragiliser les quelques marques qui fabricant localement ou en Europe (Orange, Pashley, Ribble, Wisper, Woodrup), déjà concurrencées par les nombreux rivaux chinois aux prix très attractifs. Parmi les marques potentiellement touchées, Volt, qui a déjà commenté ce changement sur BBC : « une décision étrange qui est un coup dur pour l’industrie britannique ».

Le vélo électrique pliant Brompton Electric G Line. Source : M. Lauraux pour Frandroid

Un porte-parole du gouvernement explique en parallèle que le pays « continue de mener des actions contre les vélos électriques dangereux« , notamment sur « les risques des batteries dangereuses des VAE et trottinettes électriques.« 

Toutefois, et fait très important : la mesure ne concerne pas les vélos pliants chinois, qui resteront taxés. Cela permet de préserver en priorité la pépite locale Brompton, ainsi que quelques acteurs fragiles à l’image de Gocycle, Estarli ou Volt. Cette catégorie de vélos électriques ne compterait que pour 5 % des ventes au Royaume-Uni.

Le Royaume-Uni à revers de l’UE

Depuis les années 1990, la France et l’Union européenne appliquent des taxes à l’importation des vélos en provenance de Chine. Cette mesure « anti-dumping » s’est bien sûr étendue aux vélos électriques (en 2019), et aurait dû se terminer en août 2024.

Sous la demande du lobby européen EMBA (European Bicycle Manufacturers Association), l’UE a prolongé ces mesures pour cinq années supplémentaires. « Elles ont permis de limiter les effets négatifs de l’importation de vélos chinois subventionnés et de pratiques commerciales déloyales, particulièrement sur les fabricants européens en entrée et milieu de gamme« , selon la Commission européenne.

L’UE veut protéger et encourager les vélos électriques fabriqués localement, comme ce Radior. // Source : Grégoire Huvelin – Frandroid

« Elle a aussi permis l’arrivée de nouvelles marques européennes sur le marché, ainsi que des investissements supplémentaires dans la technologie et le développement de méthodes de production plus vertes« , ajoute-t-elle.

Les États-Unis joue le protectionnisme

Coïncidence ou pas – après tout, la guerre économique bat son plein -, les États-Unis ont mis en place une vaste mesure de protectionnisme le 1er février 2025. Le pays présidé de nouveau par Donald Trump applique une nouvelle taxe d’importation générale de 10 % sur toutes les importations, intégrant donc les vélos électriques. Elle est même de 25 % sur les produits venant du Mexique et du Canada.

Contrairement à l’Europe, qui possède une forte industrie d’assemblage locale de vélos électriques, les États-Unis produisent peu. Les grandes marques Specialized, Trek ou Cannondale importent majoritairement d’Asie, et les marques aux VAE made in USA sont rares : HPC, Detroit Bikes, Electric Bike Co, Bike Friday, etc.

Bike Friday Bosch SX vélo pliant électrique
Un vélo fabriqué aux USA, mais ses composants – dont l’assistance Bosch – vont coûter plus cher. // Source : Bike Friday

De plus, l’augmentation des taxes touche de nombreux composants, dont des freins, batteries ou moteurs principalement fabriqués à l’étranger. En conséquence, les USA devraient subir une hausse des prix de vélos électriques.

En attendant, la promesse d’un renouveau de l’industrie américaine comme l’imagine le président Trump – incluant celle du cycle ou de ses composants – n’est pas assurée. Et, question de coût de main-d’œuvre, de composants et de matériaux – l’acier et l’aluminium de l’étranger sont aussi taxés – des VAE made in USA seront en théorie beaucoup plus chers.

Précision enfin que l’industrie du cycle chinoise a contesté les mesures de l’UE et des États-Unis selon BikeEco, accusant l’Union européenne de “ralentir la transition écologique en rendant les produits plus chers”.


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