Voiture électrique : non, une grande batterie n’est pas toujours préférable, voici pourquoi

 
Et si les véhicules électriques les plus intéressants n’étaient pas ceux dotés de la plus grande autonomie possible ? Nous allons nous pencher sur certaines idées reçues en ce qui concerne l’autonomie et la taille des batteries des voitures électriques dans ce dossier.

Article actualisé le 12 octobre 2022 : À quelques jours du Mondial de l’Automobile, l’Ademe donne son avis sur les voitures électriques, et notamment la taille des batteries. Son analyse confirme les informations que vous trouverez plus bas dans ce dossier. En résumé : préférez une voiture électrique dotée d’une petite batterie, pour votre portefeuille, mais aussi pour la planète. Et sans oublier le recours au train pour les longues distances.


Article original du 8 octobre 2022 : Voyager en véhicule électrique n’est pas toujours chose aisée, mais certaines voitures branchées s’en sortent très bien dans cet exercice. Quelle formule est la plus adaptée pour parcourir des centaines de kilomètres le plus rapidement possible ? Une grosse batterie est-elle nécessaire, ou, au contraire, disposer d’une voiture dotée d’une recharge ultrarapide est préférable ?

Nous allons tenter d’apporter quelques éléments de réponse en revenant sur les différences conceptuelles entre une batterie XXL et une recharge plus rapide que l’éclair. Nous verrons que certaines voitures électriques avec une plus petite batterie permettent d’arriver à destination plus rapidement, quitte à ce que les longs trajets soient plus onéreux.

Enfin, nous parlerons des solutions innovantes telles que l’échange de batteries pour minimiser les temps de trajets lorsqu’ils dépassent l’autonomie réelle du véhicule. Sans plus tarder, examinons les avantages et inconvénients d’une grosse batterie embarquée dans une voiture électrique.

Grande batterie ne rime pas forcément avec autonomie élevée

De manière assez naïve, nous pouvons penser que pour augmenter l’autonomie d’un véhicule électrique, il faut et il suffit d’augmenter la taille de sa batterie (exprimée en kWh). En effet, l’énergie nécessaire pour faire rouler une voiture électrique est stockée dans la batterie, et plus il y en a, plus la voiture peut aller loin. Toutefois, un ennemi de taille vient avec une batterie plus conséquente : le poids.

La densité énergétique actuelle permet d’équiper des voitures de taille moyenne d’une batterie d’environ 70 à 80 kWh, comme cela est le cas sur une Tesla Model 3, Hyundai Ioniq 5 ou encore MG ZS EV, tout en affichant un poids total compris entre 1 700 et 2 200 kilogrammes. Ces packs de batteries pèsent autour de 450 kilogrammes, et augmenter significativement leur capacité reviendrait à proposer des véhicules de plus en plus lourds, impliquant alors une consommation plus élevée.

Hummer EV // Source : GMC

Un véhicule de plus de 3 tonnes qui possèderait une batterie de 210 kWh par exemple ne permettrait pas pour autant de parcourir 800 kilomètres sans s’arrêter, comme le montrent les exemples des pick-ups électriques embarquant une énorme batterie pour, au final, ne pas avoir une autonomie significativement plus importante que de plus petits véhicules.

C’est ainsi le cas du Hummer EV avec son autonomie de 530 km sur cycle EPA américain (environ 600 km en WLTP européen) et sa batterie de 212,7 kWh. À titre de comparaison, la Tesla Model 3 Grande Autonomie et sa plus petite batterie de 80 kWh propose une autonomie similaire, grâce à sa consommation plus modérée.

Toutefois, une plus grosse batterie dans certains véhicules qui optimisent leur consommation possède un réel intérêt, et c’est la raison pour laquelle on retrouve des variantes de Renault Mégane e-tech, Kia EV6 ou encore Tesla Model Y avec différentes tailles de batterie. Notez cependant que l’augmentation de l’autonomie ne se fait pas dans la même proportion que l’augmentation de la taille de la batterie.

Par exemple, une Tesla Model Y Grande Autonomie a une batterie 33 % plus grosse que celle de la Tesla Model Y Propulsion (80 kWh contre 60 kWh), mais une autonomie seulement 17 % plus importante (533 km contre 455 km). La consommation passe ainsi de 14,9 à 16 kWh pour parcourir 100 km, à cause du poids en hausse (+ 247 kg) mais aussi du second moteur (pour les quatre roues motrices), qui ajoute un peu de consommation.

Nous allons d’ailleurs voir qu’embarquer un pack de batterie plus de plus grande capacité n’est pas toujours la clé pour arriver à bon port le plus rapidement possible lors de longs trajets.

Plus grosse batterie ne rime pas avec trajet plus rapide

Lors de nos exemples de grands trajets en différentes voitures électriques, nous avons mis en exergue le fait que certains voyages étaient finalement plus longs avec un véhicule qui affichait une autonomie WLTP et une batterie plus imposante qu’un autre.

La vitesse de recharge rentre bien entendu en compte dès lors que l’on parcourt plusieurs centaines de kilomètres et qu’il y a besoin de recharger le véhicule, mais l’efficience est également un facteur prépondérant. C’est pourquoi on retrouve notamment la Tesla Model 3 Propulsion dans les exemples des véhicules considérés comme des champions de la charge rapide, alors qu’elle n’arbore qu’une batterie de 60 kWh.

À gauche, Paris-Marseille en Volkswagen ID4 Pro, et à droite, en Tesla Model 3 Propulsion

Si nous la comparons, par exemple, à une Volkswagen ID.4 avec sa batterie de 77 kWh, la simulation d’un trajet Paris-Marseille donne bien la Tesla Model 3 Propulsion comme arrivant à Marseille en tête, avec près de quinze minutes d’avance. La consommation est 33 % plus importante sur ce trajet pour le SUV de Volkswagen, ne lui permettant pas de profiter pleinement de son avantage en termes de capacité de batterie.

Le meilleur des deux mondes en termes d’efficience et de capacité de batterie est pour le moment à chercher du côté de la Mercedes EQS, qui n’a pas de rivale 100 % électrique jusqu’à présent. Parcourir 1 000 kilomètres en voiture électrique n’est jamais plus rapide qu’avec la berline allemande, mais il faudra accepter son tarif XXL.

Et si l’on prend aussi en compte la vitesse de charge, alors c’est la Kia EV6 qui est la plus à même de réaliser de longs trajets le plus rapidement possible. En effet, elle réussit à récupérer 70 % de sa batterie en 18 minutes, contre 30 minutes pour l’EQS de Mercedes. À condition de trouver des bornes de recharge aussi rapides sur son trajet. La future Hyundai Ioniq 6 devrait bien rabattre les cartes avec une potentielle première place pour sa rapidité sur les longs trajets.

Nous allons voir qu’il est toutefois possible de réaliser des économies en grands voyages lorsque l’on profite d’une plus grosse batterie.

Un prix plus élevé à l’achat, mais des économies à l’usage

Il existe bel et bien des véhicules dotés d’une batterie XXL avec un fort intérêt, que ce soit pour utiliser au quotidien sans devoir recharger fréquemment, ou encore pour limiter les arrêts lors des longs trajets. En effet, avec un prix de la charge rapide qui ne fait qu’augmenter, pouvoir parcourir des centaines de kilomètres d’une traite peut être très économique.

Ainsi, la recharge à la maison équivaut à un tarif situé entre deux et trois euros les 100 kilomètres. Sur autoroute, les chargeurs rapides transforment l’addition en 10 à 20 euros les 100 kilomètres.

Ces économies à l’usage qui peuvent être de l’ordre de 70 euros pour un trajet de 500 kilomètres sont à prendre en compte lors de l’achat d’un véhicule, pour vous donner une idée du coût à l’usage. Nous avons d’ailleurs une série de dossiers simulant des trajets traversant la France en différents véhicules électriques en récapitulant les coûts associés.

Une Tesla Model Y en charge sur le réseau Totalenergies // Source : Bob JOUY pour Frandroid

La consommation au quotidien sera toutefois plus élevée avec un véhicule embarquant une plus grosse batterie, du fait du poids plus important. Ceci étant, cette consommation plus importante sera financièrement peu significative si vous chargez chez vous la nuit, où le kWh est bon marché par rapport aux opérateurs de recharge en itinérance.

Attention cependant à ne pas vous faire d’illusion, les quelques 17 000 euros qui séparent par exemple une Tesla Model Y Grande Autonomie d’une Propulsion ne seront pas comblés avant des centaines de milliers de kilomètres de grands trajets autoroutiers. Financièrement et à moyen terme, les versions moins onéreuses restent plus intéressantes, quitte à mettre un peu plus la main à la poche lors des quelques trajets annuels dépassant l’autonomie du véhicule.

L’avenir de la charge rapide semble néanmoins parti pour être encore plus onéreux qu’aujourd’hui, et les véhicules permettant d’arriver à bon port sans arrêt recharge sont de plus en plus attrayants. Une autre manière de voyager commence à pointer le bout de son nez, ne demandant pas de recharge : l’échange de batteries. Voyons alors si ce service a de l’avenir dans nos contrées.

L’échange de batteries, un service d’avenir ?

Arrivé tout droit de Chine où il rencontre un certain succès, l’échange de batteries est un concept simple, qui permet de repartir à 100 % en quelques instants. Cela demande d’avoir un véhicule prévu pour cette opération, comme le sont les Nio ET7 ou ET5, ou encore les futurs véhicules électriques du groupe MG.

En pratique, l’échange de batterie ne demande que cinq minutes environ pour voir sa batterie fraichement attachée à un niveau de charge de 90 %, là où une recharge rapide demandera environ 18 à 30 minutes pour n’être qu’à 80 % de charge. Le principal avantage réside donc dans la rapidité de la manœuvre, qui peut s’apparenter à la durée d’un plein d’essence.

Nio Power Swap Station

Toutefois, si la charge rapide est de plus en plus onéreuse, l’échange de batterie n’est pas nécessairement moins coûteux. En effet, les constructeurs proposant l’échange de batterie ne le font actuellement qu’à la condition de louer la batterie de son véhicule, pour un coût d’environ 1 600 euros par an (tarif pour la Nio ES8).

En outre, la densité des stations d’échange de batteries est pour le moment très faible, quand nous ne sommes pas dans un pays qui n’en propose pas encore. Si plus de 1 000 stations sont prévues à moyen terme par le géant CATL en Europe et ailleurs, il n’y en a à ce jour qu’une poignée en Norvège, ce qui limite fortement l’intérêt pour les habitants du vieux continent. Une nouvelle station vient d’ouvrir en Allemagne.

Le futur nous dira si ce service d’échange de batteries sera popularisé hors de Chine ou non, mais à ce jour, il ne dispense absolument pas d’avoir une grosse batterie tant les stations sont rares.

En effet, si l’on reprend l’exemple de la Nio ES8, la voiture électrique a réussi à parcourir 1 000 km sur autoroute en 9h grâce à l’échange de batterie. Mais 11h25 sur le même trajet avec des recharges rapides (sans échange de batterie) ! À comparer aux 9h15 nécessaires à la Tesla Model 3 Performance pour boucler le même exercice avec les recharges rapides.

Conclusion

Comme nous l’avons vu, une plus grosse batterie dans un véhicule électrique ne présente pas uniquement des avantages. L’autonomie théorique affichée est plus importante, mais concrètement, si la consommation est plus élevée du fait du poids embarqué plus conséquent, vous n’arriverez pas à destination plus rapidement.

Les batteries plus petites ont l’avantage de permettre de proposer un véhicule à un tarif plus raisonnable, et le surcoût engendré lors des grands voyages reste peu significatif. Une grosse batterie est en réalité synonyme de confort et de tranquillité d’esprit au quotidien comme en grand trajet plutôt que d’une nécessité pour voyager.

La densité des bornes de recharge rapide augmente significativement depuis de nombreux mois, avec de nouveaux acteurs arrivants sur le marché, rendant caduque le souci de la charge en itinérance. Enfin, dans l’intérêt de limiter le bilan carbone de la voiture électrique, choisir celle qui a une plus petite batterie prend tout son sens : de la fabrication à l’utilisation, elle est plus écologique qu’une batterie plus imposante.

Pour aller plus loin
La voiture électrique est-elle un véhicule propre ?