Rarement un sujet technologique aura engendré autant de débat que celui des voitures électriques. Alors que nous nous dirigeons vers cet avenir, il est important de considérer les implications que cela a, et si oui ou non se pencher si aveuglément sur les voitures électriques est vraiment une bonne chose. Promis, cet article n’est pas une histoire sur Elon Musk, ou Tesla ni une prise de position controversée où « le pétrole serait en réalité bon pour nous ».
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Et si la voiture électrique n’était pas la révolution annoncée ?
Les voitures électriques sont parfois annoncées comme une révolution ; sauveuses de notre dépendance à l’essence et piliers dans la lutte pour un monde plus durable. On leur donne le potentiel de considérablement améliorer la santé publique et de réduire les dommages écologiques. Même l’économie y voit un salut : les véhicules électriques seraient la prochaine frontière des startups et des rendements démesurés de grands groupes.
Des promesses ont été faites, des milliards ont été alloués par les fabricants traditionnels et des dizaines de startups ont été lancées dans le but de capturer des milliards supplémentaires. Il semble que l’adoption des véhicules électriques soit inévitable.
Si, chez Frandroid, nous soutenons les voitures électriques dans leur quête pour prendre le pas des voitures thermiques, je modère cet enthousiasme pour leurs perspectives sur la société en général. Du point de vue environnemental, il n’y a rien de différent sur le plan fonctionnel entre une voiture électrique et une voiture thermique.
La relation est la même, et elle est sans équivoque destructrice pour l’environnement. Les voitures, quelle que soit leur puissance, ne sont pas bonnes pour l’environnement, elles forcent une infrastructure de dépendance qui est aussi financièrement mauvaise et dangereuse pour nous.
Afin de construire un avenir plus durable et un monde meilleur pour l’humanité, nous devons nous attaquer aux problèmes fondamentaux qui nous ont amenés là. Oui, les voitures électriques sont moins émettrices que les voitures thermiques. Mais, l’énergie la moins émettrice est celle que l’on ne consomme pas.
Deux milliards de voitures en 2035
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Comme le marché des véhicules électriques est en croissance, le marché global des voitures augmente également. D’ici à 2035, près de deux milliards de voitures seront en circulation dans le monde. Cela présente des défis importants. En 2010, 14 % des émissions mondiales provenaient des transports. Les émissions totales ont continué d’augmenter lors la dernière décennie, la part du transport accélérant proportionnellement. C’est crucial, car si nous voulons limiter le réchauffement climatique, cela signifie que nous devrons réduire nos émissions totales.
Si nous ne le faisons pas, nous courons vers une catastrophe. Même si chaque voiture était électrique d’ici à 2035 et que toute la production était neutre en carbone (ce qui est impossible), nous ne réduirions les émissions mondiales que de 20 % maximum, bien en deçà des 55 % attendus.
Nous comparons les voitures électriques par rapport aux voitures thermiques, mais ce n’est pas ce qui doit nous intéresser. Au lieu de cela, nous devons comparer les modèles de développement. Cette distinction est essentielle, car les schémas de développement doivent inclure les nouvelles émissions des voitures, mais également les nouvelles constructions, les bâtiments existants, les infrastructures et ainsi de suite.
La simple transition vers les voitures électriques ne résout en rien la cause sous-jacente
Le défi auquel nous sommes confrontés est clair : nous devons non seulement faire la transition vers des véhicules plus propres, mais nous devons aussi faire la transition vers des environnements plus respectueux en général. La simple transition vers les voitures électriques ne résout en rien de la cause sous-jacente. Et vous vous doutez peut-être de quoi je parle depuis le début. Je parle évidemment de nos voitures privées.
Les voitures ont besoin de routes pour rouler. C’est évident. Or, ce qui est moins évident, c’est la mesure dans laquelle les routes (et les voitures) dictent la façon dont notre environnement a été construit. Concrètement, nous avons créé un monde construit autour des voitures avant tout, avec les gens, l’environnement, la faune, la flore, l’atmosphère et pratiquement tout le reste relégués au second plan. En décidant de construire d’abord pour les voitures, nous leur avons cédé une grande partie de notre environnement.
Vous allez me dire… mais a-t-on le choix ? Il s’agit d’un système pervers. À mesure que nos villes s’étendent et s’agrandissent, nous nous retrouvons éloignées des services essentiels comme les écoles, les commerces et les médecins. Si l’on habite à 30 minutes d’un centre-ville, et qu’il n’y a pas forcément de transport en commun à proximité, il n’y a pas d’autre choix que d’aller partout en voiture. Cela entretient et favorise la dépendance.
Comme le montre la pénurie actuelle d’essence, des barrières ont été érigées pour rendre presque impossible une marche arrière à notre dépendance à la voiture. Notre monde est pris en otage.
Suspendons un instant la réalité et imaginons que les voitures électriques résoudraient à elles seules tous les problèmes climatiques. Ce raisonnement suppose que l’impact environnemental est le seul problème. Aussi prometteur soit-il, il ne raconte qu’une partie de l’histoire.
Construire un monde autour des voitures présente des dangers pour chacun d’entre nous. 1,35 million de personnes dans le monde meurent chaque année dans des accidents de voiture. C’est inacceptable, mais pour une raison quelconque, c’est accepté. On ne peut rien y faire, on a le même fatalisme que celui que l’on aurait devant une catastrophe naturelle. Qu’elle soit électrique ou thermique, autonome ou non, la voiture continuera à tuer.
Et, si elle ne le fait pas à cause d’un choc, une collision indirecte ou une conduite imprudente, elles le font plus pernicieusement par une atteinte à la santé et avec des conséquences tout aussi dévastatrices. L’obésité, le diabète, les maladies pulmonaires (dues à la pollution), les maladies cardiaques ou n’importe quelles autres affections sont associées à ce mode de vie sédentaire.
Un corollaire à la détérioration de notre santé physique est celui de notre santé mentale. En effet, en voiture, les interactions spontanées sont réduites à près de zéro. Chaque rencontre doit être planifiée. De plus, nous développons des mentalités défensives. Sans oublier celles et ceux qui ne peuvent pas conduire, ou qui ne peuvent pas se permettre d’effectuer les dépenses liées à la possession d’une voiture. Surtout que le tarif des voitures électriques est abusivement élevé. Cela est vecteur de profondes injustices.
Toutes ces questions émanent d’une série de choix qui ne nous mettent pas au cœur de nos décisions. Non seulement les voitures électriques ne résolvent pas à elles seules ces nombreuses menaces pressantes, mais elles les accentuent par la perpétuation d’un système défaillant. Substituer les voitures électriques aux voitures thermiques, ne change pas le modèle de développement sous-jacent.
Nous devons nous attaquer aux causes profondes
Au lieu d’avancer sans broncher en pensant que les voitures électriques nous sauveront, nous devons nous attaquer aux causes profondes du mal qui ronge notre monde. Oui, nous devons investir dans la voiture durable et propre. Mais nous devrions également faciliter les solutions de micro-mobilité (comme le vélo, le scooter et le transport en commun). Toutes ces solutions peuvent être vertes. Plus important encore, nous devons rendre sûr et possible le fait de marcher partout où l’on en a besoin. Ainsi, avant tout, nous devons arrêter de construire des modèles de développement dépendants de la voiture. Enfin, tous ces changements doivent être fondés sur l’utilisation de technologies et de normes durables.
Si le passage aux voitures électriques est un pas dans la bonne direction, ce n’est qu’un pas. Nous pouvons apporter des changements significatifs, mais nous devons être assez courageux pour le faire.
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