Si l’Europe souhaite bel et bien un futur riche en véhicules branchés, la dépendance du vieux continent envers les fabricants de batteries ne va faire que croître. En effet, avec l’immense majorité des usines de batteries aujourd’hui présentes en Asie (CATL en Chine, LG Chem en Corée du Sud, Panasonic au Japon), il est urgent de prévoir un avenir où la production sera plus locale. Dès aujourd’hui, plus d’un véhicule neuf sur dix vendu en Europe est 100 % électrique, et ce chiffre est amené à grimper de manière conséquente d’ici 2030.
Que ce soit pour limiter l’empreinte carbone de la production d’une voiture électrique, ou même pour s’assurer une indépendance énergétique en cas de conflit, l’Union européenne ouvre ses bras pour accueillir les géants de l’industrie du secteur dans différents pays. Nous allons dans ce dossier faire le point sur ce qui est prévu pour la décennie en cours, et tenterons d’imaginer un futur où les véhicules électriques européens seront dotés de batteries fabriquées sur place.
Volkswagen veut être pris au sérieux dans la course à l’électrification
Ce n’est aujourd’hui plus un secret : le groupe Volkswagen s’électrifie massivement. En effet, outre les nombreux modèles sortis récemment sous une des marques du groupe (Volkswagen ID.4, Skoda Enyaq, Porsche Taycan ou encore Cupra Born), le géant allemand est aussi partie prenante dans le consortium Ionity, qui déploie des bornes de recharge rapide à travers l’Europe.
Le plan initial du groupe Volkswagen prévoyait deux usines de batteries en Europe, mais en 2021, de nouvelles annonces ont eu lieues. Ce sont aujourd’hui six usines différentes qui sont prévues par Volkswagen à travers l’Europe, et nous connaissons les détails de trois d’entre elles à ce jour.
Le site allemand de Salzgitter a d’ailleurs vu ses travaux débuter à l’été 2022, et l’objectif de cette usine est de produire les batteries des véhicules de la marque d’ici 2025. Volkswagen a créé à cet effet une nouvelle entreprise baptisée « PowerCo », qui s’occupe aujourd’hui de l’implantation des différentes usines de production de batteries pour le groupe.
Cette première usine allemande de « PowerCo » devrait produire jusqu’à 40 GWh de batteries par an, alors que l’usine suédoise en partenariat avec Northvolt livre déjà ses premières batteries depuis la fin de l’année 2021. Le troisième site confirmé est à Valence, en Espagne, et les trois autres usines n’ont pas encore de lieu d’implantation révélé au public.
L’ensemble des usines de Volkswagen devrait permettre de produire, à terme, jusqu’à 240 GWh de batteries chaque année en Europe. Cela serait suffisant pour équiper trois millions de voitures électriques d’une batterie de 80 kWh, rien que ça.
Tesla aurait la plus grosse usine de batteries du continent
Un autre acteur majeur de la production de batteries en Europe est un constructeur qui n’a rien d’européen : Tesla. Pionnier dans les véhicules électriques, ce n’est pas une surprise de constater que le constructeur américain souhaite s’implanter aux quatre coins du monde pour produire ses véhicules.
Jusqu’à présent, Tesla produit ses batteries aux États-Unis ou en Asie, quand il ne les achète pas à d’autres fournisseurs. Toutefois, les exigences futures de l’union européenne pour l’obtention d’un bonus écologique seront potentiellement liées à la production d’un véhicule et de ses batteries sur le vieux continent.
C’est pourquoi Tesla prévoit de construire une usine de batteries tout à côté de sa Gigafactory de Berlin, en Allemagne. Pour son entrée en matière, l’usine de production de batteries aurait une capacité de 100 GWh annuelle, avec une extension possible à 250 GWh. Rien qu’avec 100 GWh de capacité par an, ce serait ainsi 800 000 Tesla Model Y qui pourraient être produites pour l’Europe, avec des batteries issues de cette usine.
Compte tenue de la production actuelle de la Gigafactory de Berlin (autour de 30 000 véhicules au dernier trimestre 2022), il est difficile d’imaginer une usine de batterie aussi importante à ce jour. Toutefois, Tesla a déjà montré sa capacité à drastiquement augmenter sa cadence de fabrication de voitures par le passé, et produire sept fois plus de véhicules en 2030 qu’en 2022 à Berlin est loin d’être inaccessible.
Attention cependant : avant la validation définitive de cette usine européenne, il se peut que Tesla choisisse un autre continent pour implanter son usine de batteries, selon les règles et politiques du moment. Le plan Biden prévoit en ce moment même une réduction des taxes pour les véhicules électriques produits en intégralité aux USA, et il est possible que Tesla mette en pause son usine de batteries européenne au profit d’une usine nord-américaine.
Trois usines prévues en France
Cocorico : la France aura bel et bien ses propres usines de fabrication de batteries, puisque trois d’entre elles sont déjà prévues dans l’hexagone. Tout à côté de Dunkerque, l’entreprise industrielle française Verkor a annoncé en février 2022 la construction d’une usine de batteries bas-carbone, d’une capacité initiale de 16 GWh en 2025.
Cette production permettra d’équiper plus de 300 000 citadines électriques dès 2025, et a l’ambition de produire 50 GWh de batteries en 2030. Cette production sera en partie destinée à Renault, qui a signé un partenariat stratégique avec Verkor. Le groupe français a également un autre partenaire à Douai pour produire des batteries : Envision AESC.
Le site de Douai est stratégique, avec la proximité du port de Dunkerque pour l’approvisionnement en matières premières par bateau d’une part, et l’usine Renault située à 100 mètres d’autre part. Enfin, la troisième usine française est elle aussi dans les Hauts-de-France, où un projet porté par ACC (Automotive Cells Co.) est en train de sortir de terre.
Le début de la production serait pour la fin de l’année 2023, avec une production d’au moins 8 GWh la première année. À l’horizon 2030, cette usine d’ACC serait en capacité de produire entre 24 et 32 GWh de batteries par an, soit peu ou prou de quoi équiper 500 000 Renault Zoe ou Peugeot e-208.
Au mois de mai 2023, nous avons appris qu’un nouveau projet allait voir le jour en France, sous la forme d’une usine de batterie solides expérimentale, pour une mise en service en 2026. Ce seront autour de 48 GWh qui sont attendus en sortie des lignes de production chaque année, toujours autour de Dunkerque. C’est le taïwanais ProLogium qui a annoncé s’implanter sur ce site français.
L’Allemagne deviendrait le premier producteur européen de batteries
Si la France et ses trois usines de batteries d’ici la fin de la décennie peut impressionner, ce n’est rien vis-à-vis de l’Allemagne, qui entame sa transition de la construction de la voiture thermique à l’électrique. En effet, en totalisant tous les projets d’implantation sur son sol en ce qui concerne la production de batteries, ce sont pas moins de douze usines qui sont prévues de part et d’autre du pays.
Au total, la production devrait atteindre près de 435 GWh par an d’ici 2030, soit de quoi fournir des batteries à environ cinq millions de voitures électriques. Et ce chiffre ne correspond qu’à l’Allemagne, qui deviendrait bien le plus gros producteur européen de batteries. La première usine allemande vient justement de démarrer la production.
Le reste de l’Europe n’est pas mis à l’écart pour autant. En Italie, trois usines sont prévues, totalisant 200 GWh de production. Au mois d’août 2022, le chinois CATL a annoncé l’implantation d’une usine en Hongrie, qui a une capacité de 100 GWh à elle seule. Les constructeurs Mercedes, BMW, Stellantis et Volkswagen seront parmi les premiers clients, puisqu’ils disposent tous d’usines d’assemblage en Hongrie.
Une Europe sur le devant de la scène
Comme vous pouvez le constater, l’horizon 2030 sera riche en batteries produites en Europe. Les estimations actuelles indiquent une production dépassant les 700 GWh de batteries, ce qui pose une question : que va-t-on faire de toutes ces batteries ?
Bien entendu, le nombre de véhicules électriques vendus va drastiquement augmenter durant la décennie en cours, ce qui implique des besoins croissants en batteries. Mais avec 700 GWh annuels, cette production suffirait à équiper dix millions de voitures électriques dotés d’une batterie de 70 kWh.
À la fin de l’année 2022, les ventes de véhicules électriques représentent autour de 10 % des immatriculations à l’échelle européenne, soit moins de 1 500 000 véhicules. Est-il raisonnable d’imaginer ce chiffre être multiplié par sept d’ici huit ans ?
Pour aller plus loin
Comment le réseau électrique français va-t-il supporter l’augmentation du nombre de véhicules électriques ?
Si l’on en croit les dernières prévisions, c’est en effet le cas, mais cela implique de vendre des véhicules qui sont dotées de grosses batteries, ce qui est loin d’être idéal. En effet, outre le côté superflu pour de nombreux usages, le poids embarqué d’une batterie de 70 kWh est tel qu’il n’est pas envisageable aujourd’hui d’équiper une citadine électrique d’une si grosse batterie.
Quoiqu’il en soit, si la production devient excédentaire en Europe, plusieurs possibilités existeront : les batteries supplémentaires pourront soit être exportées, soit destinées à d’autres usages, comme le stockage d’énergie. Ce dernier segment pourrait d’ailleurs être primordial pour les usages du futur que sont le V2G ou le V2L.
Utilisez-vous Google News (Actualités en France) ? Vous pouvez suivre vos médias favoris. Suivez Frandroid sur Google News (et Numerama).
Ce contenu est bloqué car vous n'avez pas accepté les cookies et autres traceurs. Ce contenu est fourni par Disqus.
Pour pouvoir le visualiser, vous devez accepter l'usage étant opéré par Disqus avec vos données qui pourront être utilisées pour les finalités suivantes : vous permettre de visualiser et de partager des contenus avec des médias sociaux, favoriser le développement et l'amélioration des produits d'Humanoid et de ses partenaires, vous afficher des publicités personnalisées par rapport à votre profil et activité, vous définir un profil publicitaire personnalisé, mesurer la performance des publicités et du contenu de ce site et mesurer l'audience de ce site (en savoir plus)
En cliquant sur « J’accepte tout », vous consentez aux finalités susmentionnées pour l’ensemble des cookies et autres traceurs déposés par Humanoid et ses partenaires.
Vous gardez la possibilité de retirer votre consentement à tout moment. Pour plus d’informations, nous vous invitons à prendre connaissance de notre Politique cookies.
Gérer mes choix