La voiture électrique est vue comme certains comme une voiture propre. Ce n’est pas le cas, puisqu’elle pollue indirectement, lors de sa phase de production, et lors des recharges, à travers le réseau électrique. En revanche, il est vrai qu’elle n’émet pas de CO2 puisqu’elle n’a pas de pot d’échappement du fait de l’absence de combustion d’un carburant fossile (essence ou diesel).
Il y a quelques mois, nous avions publié un article intitulé « pourquoi certaines voitures électriques polluent plus qu’une berline thermique (mais pas en France) ». Celui-ci faisait suite à une étude américaine, qui s’attardait sur la pollution du Hummer EV, le pickup 100 % électrique du constructeur américain GMC. Les conclusions de l’étude étaient que celui-ci polluait davantage qu’une petite voiture thermique… mais pas en France, grâce à notre énergie électrique, majoritairement bas carbone.
Les grosses voitures électriques comparées aux petites voitures essence
Une nouvelle étude américaine s’intéresse au potentiel de réchauffement climatique des grosses voitures électriques comparées aux petites voitures thermiques. C’est le fameux Wall Street Journal qui s’y colle, aidé par les données en libre accès de Carboncounter.
C’est un outil mis en place par le MIT qui permet de calculer le rejet de CO2 d’une voiture sur tout son cycle de vie, selon différents paramètres. Parmi eux, on trouve notamment le pays de fabrication ou le pays d’utilisation. Comme nous l’avons vu dans notre article précédent, ces deux paramètres sont extrêmement importants, puisqu’ils conduisent à des résultats différents.
Ainsi, selon les données, aux États-Unis et comme on peut le voir avec l’infographie du média américain, les plus grosses voitures électriques émettent autant de CO2 sur leur durée de vie que les voitures thermiques les moins gourmandes. C’est par exemple le cas du Ford F-150 Lightning qui émet alors autant de gaz à effet de serre qu’une petite Mitsubishi Mirage. Le Rivian R1T fait encore moins bien, en émettant autant de CO2 sur toute sa durée de vie qu’une Honda Civic.
Les voitures électriques plus « propres » que les thermiques
Mais attention, il y a trois écueils à éviter ici. Le premier, très simple, c’est qu’il faut comparer ce qui est comparable. Ainsi, une voiture thermique émettra largement plus de CO2 que sa version électrique. Le second, c’est qu’il faut tenir compte du réseau électrique qui a alimenté l’usine de production et qui alimentera les bornes de recharge. Enfin, le troisième est qu’il faut prendre en compte l’évolution du second point dans le temps puisque les réseaux électriques utiliseront de plus en plus d’énergie bas carbone.
Pour prendre un exemple concret, le Ford F-150 thermique (V6 2,7L Ecoboost) émet environ 300 g de CO2 / km sans tenir compte des émissions liées à sa production. La version électrique Lightning émet environ 130 g de CO2 / km aux États-Unis sans prendre en compte la production de ses batteries, mais seulement… 20 g de CO2 s’il est rechargé en France !
Bien entendu, il faut ajouter les émissions de gaz à effet de serre qui ont été rejetés lors de la phase de production de la voiture et notamment de sa batterie. Mais même dans ce cas, comme nous l’avons vu plus haut, la voiture électrique est bien moins polluante que son homologue thermique.
Aux États-Unis, la version électrique d’une voiture émet sur son cycle de vie (production, utilisation et recyclage) environ deux fois moins de gaz à effet de serre que sa version thermique. En France, cela peut être six fois plus, selon le modèle et son lieu de fabrication.
Le problème des SUV
Cette nouvelle étude met toutefois en lumière une réelle problématique : celle du format des voitures, qu’elles soient électriques, ou non. Il est clair qu’un SUV consommera davantage qu’une berline équivalente. On le voit avec la Tesla Model Y Propulsion avec une autonomie annoncée à 455 km contre 510 km sur la Tesla Model 3 Propulsion avec une batterie identique et 150 kg de moins sur la balance. Ce qui se traduit dans les faits par une consommation plus élevée.
La question qui se pose n’est donc pas de savoir s’il vaut mieux passer à la voiture électrique ou rester au thermique. La réponse à cette question est très simple comme nous venons de le voir plus haut puisque la voiture électrique aura un impact largement inférieur à la voiture thermique sur le réchauffement planétaire.
En revanche, la question est de savoir si nous avons vraiment besoin d’autant de lourdes, grandes et hautes voitures, c’est-à-dire de SUV. Récemment, l‘Agence Internationale de l’Énergie a tiré la sonnette d’alarme. La part des SUV dans la vente de voitures neuves est passée de 8,5 % dans le monde en 2010 à 31,4 % en 2022. Pire, au sein des voitures électriques, cette part a atteint 51 % en 2022 contre 37 % en 2020.
Un malus au poids… ou à la consommation ?
Un malus au poids est déjà en vigueur dans certains pays, comme en France. Mais n’est-ce pas finalement une fausse bonne idée ? Plus que le poids, l’élément le plus important d’une voiture, c’est son efficience, autrement dit sa consommation. Moins elle consomme d’énergie, et moins elle sera nocive pour la planète.
En plus d’interdire la vente de voitures thermiques, ne faudrait-il pas imposer un bonus-malus lié à la consommation ? Puisqu’il est possible dans la pratique d’avoir des voitures lourdes qui consomment moins que des voitures plus légères. C’est ce que démontre Mercedes avec sa berline EQS et ses 2,5 tonnes données pour une consommation théorique de 14 kWh / 100 km (sans prendre en compte les pertes lors de la recharge). Pour comparer, on peut prendre la Tesla Model Y Grande Autononomie et ses 2 tonnes qui annonce une consommation théorique similaire malgré 500 kg de moins sur la balance.
Et c’est normal, car le poids a un impact assez faible sur la consommation des voitures à hautes vitesse. En ville, la consommation sera plus impactée par le surpoids. Mais hors d’agglomérations, c’est l’aérodynamisme de la voiture, et donc sa forme, qui ont un impact plus important que le poids sur la consommation.
La voiture électrique ne sauvera pas la planète, mais y participera
Pour résumer, oui, une (très) grosse voiture électrique peut dans certains cas émettre plus de gaz à effet de serre qu’une petite voiture thermique. Mais dans certains pays uniquement, et pas sur le long terme puisque les énergies carbonées (charbon, gaz, fioul, etc.) devraient laisser leur place à des énergies bas carbone (nucléaire et énergies renouvelables).
C’est d’ailleurs là tout l’esprit de la partie trois du Master Plan d’Elon Musk. Celui-ci prévoit de passer toute la flotte automobile mondiale à la voiture électrique, afin de diviser par deux la quantité d’énergie nécessaire au transport léger, comme le résume le média Numerama.
N’oublions pas pour autant que la voiture électrique émet toujours des particules fines lors des phases de roulage, notamment à cause des pneus. Les transports en commun et les mobilités douces, comme les vélos (électrique ou non), les trottinettes et la marche sont alors souvent une meilleure alternative.
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