Oui, stationner sur une place dédiée à la recharge des voitures électriques peut vous coûter très cher

 
Il n’est pas rare de ne pas pouvoir recharger sa voiture électrique à cause d’un véhicule thermique garé sur les places dédiées à la recharge. Un stationnement abusif qui porte plusieurs noms et qui aussi courant de la part de véhicules thermiques que de véhicules électriques. Une pratique qui pénalise les électro-automobilistes et qui peut pourtant coûter très cher aux étourdis ou provocateurs qui s’en rendent responsables !
Source : Vincent Sergère // Frandroid

Imaginez. Vous êtes sur la route, votre jauge à essence vient de s’allumer, il vous faut vite une pompe à essence. Ouf ! La prochaine station n’est qu’à quelques kilomètres, suffisamment pour vous donner quelques sueurs froides le temps d’arriver. Et là sur place, c’est la stupeur : les pompes ne sont pas accessibles. Des voitures sont garées devant. Pire : des voitures électriques !

Cette situation qui paraît ubuesque pour qui roule en voiture thermique est pourtant le quotidien pour qui roule en électrique : les places réservées à la recharge des voitures dites « zéro émission » sont souvent squattées par des automobiles qui n’ont rien à y faire. Et ce aussi bien dans un petit village, que sur des places dédiées dans un parking de supermarché ou même dans des stations réservées à l’électrique !

Oui, mais il y a un « mais » : par rapport à notre récit inversé du véhicule qui ne peut pas remplir son réservoir, le stationnement abusif n’est pas forcément le fait d’une voiture thermique. C’est même parfois le contraire, avec une voiture électrique qui ne charge pas… Ou qui a fini de se charger depuis longtemps ! Ou quand les électro-automobilistes se tirent eux-mêmes une balle dans le pieds !

Exemple d’une Dacia Spring électrique stationnée sans se recharger. // Source : Mael Pilven

Pure méchanceté ou simple méconnaissance des règles ? Jalousie ou étourderie ? Je-m’en-foutisme ou revendication ? Une chose est sûre, et on va le voir, c’est que cela peut coûter très cher à qui stationne de manière abusive sur ces places réservées à l’électrique !

Appelez-les EVhole ou ICEing

Ce phénomène de stationnement abusif sur les places dédiées à la recharge des voitures électriques est déjà tellement répandu à travers le monde qu’il a un nom. Même plusieurs. On parle notamment d’ICEing, qui se base sur l’acronyme ICE en anglais signifiant Internal Combustion Engine, comprenez les voiture à combustion interne, ou thermique. On y ajoute « -ing » pour en faire un verbe, que l’on pourrait traduire par « thermiquer ».

Autre nom qui s’applique plus largement à ces voitures ventouses qui bloquent ceux qui voudraient charger leur voiture en ions : EVhole. EV étant l’acronyme d’Electric Vehicle, là encore dans la langue de Shakespeare, et « -hole » pour se rapprocher de l’insulte anglaise « asshole », dont la traduction française est très proche d’un certain fromage baptisé « Trou du cru ». CQFD.

Si au départ ce phénomène visant à bloquer des places vient surtout des États-Unis, où le stationnement pick-ups devant des Superchargeurs Tesla traduisait l’aversion qu’ont certaines personnes vis-à-vis de la voiture électrique (il existe également le « coal-rolling » consistant à noyer une voiture électrique dans un nuage de fumée noire), chez nous il est certainement plus nuancé.

Une voiture thermique sur une place réservée à l’électrique

Commençons par le cas des voitures thermiques qui se garent sur les places réservées aux voitures électriques. Et surtout à leur recharge ! Si le pictogramme au sol avec en général une voiture entourée d’une prise (quand ce n’est pas écrit « Électrique » en toutes lettres) et la borne au bout de la place ne suffisent visiblement pas à mettre la puce à l’oreille de l’automobiliste qui vient squatter une place, cela peut être dû à plusieurs raisons.

Il y a ceux qui avaient leurs habitudes à cet endroit avant que ce ne soit une place dédiée. Il y a l’étourderie. Le fait que les places dédiées à l’électrique soient encore souvent vides… Quel que soit le cas de figure, la loi dit la même chose : c’est une infraction.

Source : Vincent Sergère

Ce que dit la loi :

Aussi « récentes » soient les voitures électriques et l’installation de bornes de recharge sur nos routes, le stationnement gênant d’une voiture sur une place destinée à la recharge d’une voiture électrique est bel et bien inscrit dans le code de la route.

Plus précisément dans la Section relative à l’arrêt ou au stationnement dangereux, gênant ou abusif, dans l’article R417-10. Voici ce qu’il dit :

« Est considéré comme gênant la circulation publique, l’arrêt ou le stationnement d’un véhicule (…) devant les dispositifs destinés à la recharge en énergie des véhicules électriques. »

Quelles sanctions ?

Toujours dans cet article R417-10 du Code de la Route, il suffit de descendre un peu plus bas pour en apprendre plus sur les sanctions prévues :

« Tout arrêt ou stationnement gênant prévu par le présent article est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la deuxième classe ».

L’amende forfaitaire de deuxième classe est de 35 euros. Mais cela peut-être pire si le propriétaire du véhicule ou le conducteur refuse de faire cesser le stationnement abusif, l’immobilisation du véhicule ou la mise en fourrière peut-être demandée.

Source : Vincent Sergère

Une voiture électrique doit se charger sur les places destinées à la recharge

Peut-on se garer sur une place marquée « électrique » sans se recharger ?

Le stationnement abusif sur les places destinées à la recharge de véhicules électriques n’est pas le fait d’une opposition entre voitures thermiques et électriques. Et souvent même, ce sont des voitures zéro émission qui bloquent leurs homologues, qu’elles soient électriques ou hybrides rechargeables. Mais pourquoi ça ? Tout simplement à cause d’une simple confusion, sans doute due à un manque d’information.

« Recharger » n’est pas « stationner »

Tout le nœud du problème vient de la confusion entre le simple stationnement réservé à une voiture électrique, et le stationnement pour recharger. Car on parle bien de places de stationnement « destinées à la recharge d’une voiture électrique », et c’est ainsi que c’est écrit dans le Code de la Route. D’où la borne de recharge qui n’est pas qu’un artifice.

Donc non, on a beau rouler en voiture électrique, si l’on n’a pas l’intention ou le besoin de se recharger, alors les places marquées pour les véhicules électriques sont tout autant interdites qu’à des véhicules thermiques. Et vu le nombre de fois où ça arrive, c’est qu’il y a forcément un manque d’information auprès des électro-automobilistes. Et clairement un manque de jugeote.

Sur les quatre voitures stationnées ici, seules deux étaient branchées ! // Source : Mael Pilven

Ce que dit la loi :

Vous roulez en véhicule électrique, certes, mais pour autant, si vous vous garez de manière abusive sur une place destinée à ce type de véhicules, mais sans vous recharger, alors votre véhicule est considéré comme gênant, au même titre qu’un véhicule thermique à la même place.

Quelles sanctions ?

Et selon l’article R417-10 du Code de la Route, cela veut dire une amende forfaitaire de deuxième classe, soit 35 euros, voire l’immobilisation ou la mise en fourrière de votre véhicule électrique.

Recharge terminée, jusqu’à 55 euros l’heure en plus

Et puis il y a le cas, là aussi considéré comme abusif, de la voiture électrique qui est stationnée à une place qui lui est destinée. Et qui est branchée. En quoi est-ce abusif alors ? Et bien tout simplement qu’il ne recharge plus, qu’il est à 100 % de charge de la batterie, et qu’il squatte la place. Une voiture ventouse qui devient donc aussi illégitime que si elle ne se chargeait pas, même encore raccordée à la borne, puisqu’elle empêche un autre automobiliste qui en aurait besoin, de venir se brancher.

Et dans ce cas, attention, car ça peut coûter à l’automobiliste négligent très très cher. Bien au-delà même de l’amende forfaitaire de 35 euros !

Les frais d’occupation injustifiée

Certains opérateurs de recharge appliquent en effet ce que l’on appelle des « frais d’occupation injustifiée » qui peuvent très vite faire grimper la facture. Et certains ont déjà eu de très mauvaises surprises au moment de recevoir le reçu de la charge.

Voici les prix affichés par quelques opérateurs qui facturent des frais d’occupation injustifiée :

  • Belib : 10 euros/heure au-delà de 14 heures
  • Tesla Superchargeur : 0,50 euros /min après 5 min – 1 euros/min si la station est pleine / entre 22,50 et 55 euros de l’heure
  • TotalEnergies : 0,20 euros/min au-delà de 45 min

Exemple :

Prenons maintenant un simple exemple : vous laissez votre voiture (Tesla ou autre) une heure de trop à un Superchargeur. Une heure « seulement ». Vous avez branché votre voiture alors qu’elle avait effectivement besoin d’être chargée. Mais pris d’une soudaine fièvre d’achat, votre séance shopping s’allonge un peu. Problème, vous en oubliez votre voiture branchée au Superchargeur situé sur le parking de la zone commerciale. Et dont la batterie est déjà remontée à 100 %.

Sur l’heure de trop, vous serez facturé ainsi : 55 minutes x 0,50 centimes = 22,50 euros. Ça fait cher l’heure ! Et encore dans votre malheur, vous avez de la chance : les Tesla ne se bousculent pas au Superchargeur ce jour là. Car dans le cas contraire, ce sont 55 euros qui pourraient vous être facturés pour l’heure en trop !

Quelles solutions ?

Étourderie, provocation ou je-m’en-foutisme, quelle que soit la cause de ces stationnement abusifs sur les places dédiées à la charge des véhicules électriques, il faut absolument que cela cesse. Alors quelles seraient les solutions pour endiguer ce phénomène ?

La manière forte…

Il y a bien la manière forte. À l’instar de certaines opérations coup de poing comme en Suède où des groupes de propriétaires de Tesla sont allés se garer à des pompes à essence pendant quelques minutes pour sensibiliser les propriétaires de voitures thermiques. Il est fort à parier que le message passe effectivement, mais ce genre d’opération ne fait sans doute que renforcer le clivage absurde que certains font entre électrique et thermique. Alors qu’on est avant tout automobiliste, on partage les mêmes routes.

Dans la même veine, il y a la manière encore plus forte, pour ne pas dire violente, de certains automobilistes américains qui sont allés jusqu’à faire une démonstration de force en tractant les véhicules perturbateurs avec leur modèle électrique. Et un Model X n’a aucun mal à traîner un pick-up un peu plus loin pour libérer la place. Mais là encore ça ne ferait que renforcer l’animosité, alors que le but c’est de sensibiliser.

…et la manière qui fonctionne !

Si la sanction chez nous revient parfois presque au même prix que le ticket de stationnement, alors il faudrait peut-être aller carrément plus loin et mettre des amendes carrément dissuasives. Comme en Australie qui est passé il y a quelques semaines à la vitesse supérieure en faisant la chasse aux voitures qui stationnent sans se charger sur les places destinées à la recharge électrique. Les voitures thermiques sont tout autant visées que les électriques non branchées !

Ainsi dans l’État de Nouvelle-Galles du Sud (NSW ou New South Wales), l’amende est fixée non pas à 35 euros comme en France mais à 1760 euros (2875 dollars), tandis que dans le Queensland, ça grimpe à 3200 dollars, l’équivalent chez nous de 1960 euros. Près de 2000 euros d’amende pour s’être garé au mauvais endroit, ça a de quoi dissuader, non ?

Sans peut-être arriver à de telles extrêmes, il n’y a plus qu’à espérer que la sensibilisation se fasse naturellement avec l’augmentation parallèle du nombre de véhicules électriques et du nombre de bornes en France et ailleurs, et donc de nouveaux électro-automobilistes qui comprennent mieux les enjeux de la recharge.


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