Plantons le décor : depuis janvier, Tesla a décidé de baisser les prix de ses modèles phares, les Model 3 et Model Y, offrant ainsi un excellent rapport qualité-prix. Les modèles d’entrée de gamme sont tous éligibles au bonus écologique. Les véhicules « importés », tels que le MG4 et la Model 3, figurent donc parmi les voitures électriques les plus vendues en France. Cela ne plaît guère aux constructeurs européens qui peinent à rivaliser avec cette tendance à la baisse des prix.
Le bonus écologique en France est censé soutenir les acheteurs de véhicules électriques en leur donnant un petit coup de pouce financier. Toutefois, le problème se pose lorsque ce bonus profite à des véhicules conçus hors du territoire européen. Par exemple, la Tesla Model 3 et la MG4, qui bénéficient de ce bonus, sont fabriquées en Chine.
Emmanuel Macron lance une réforme du bonus écologique pour les voitures électriques
Comme on s’y attendait, Emmanuel Macron a décidé de réformer le bonus écologique pour les voitures électriques. Et pourquoi donc ? Pour « prendre en compte l’empreinte carbone » de leur production et favoriser les véhicules fabriqués en Europe. Un raisonnement en apparence louable, mais qui laisse entrevoir une pointe de sarcasme, comme si les constructeurs automobiles du reste du monde étaient en train de polluer l’atmosphère à tout-va, tandis que nos constructeurs européens étaient les seuls à s’efforcer de réduire leur empreinte carbone.
Emmanuel Macron a pour ambition de faire de la France « le premier pays européen à réviser les critères d’octroi du bonus automobile dans le cadre du projet de loi, afin de mieux intégrer l’empreinte carbone liée à la production du véhicule et pour que l’aide publique soit spécifiquement orientée vers ces objectifs. ».
Emmanuel Macron n’a pas oublié de mentionner que ce n’est pas du protectionnisme. Au lieu de cela, il suggère que l’argent du contribuable français ne devrait pas servir à « accélérer l’industrialisation non -européenne ». Emmanuel Macron a donc annoncé que les critères d’attribution de ce bonus écologique réformé seront définis d’« ici la fin de l’année ». Bercy dit avoir élaboré un modèle permettant d’évaluer l’empreinte carbone de la construction d’un véhicule, « de la batterie à la construction du moteur ».
Les constructeurs devront donc justifier qu’ils respectent ces critères écologiques requis pour pouvoir bénéficier du bonus écologique. Emmanuel Macron
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En théorie, ils ont donc prévu de considérer l’aspect environnemental de la batterie dans leur évaluation. Cependant, il est à espérer que leur analyse ne se limite pas à l’assemblage final du produit, mais englobe également le lieu de production. Cela pourrait garantir une évaluation plus précise et significative de l’empreinte carbone globale du véhicule, reflétant ainsi de manière plus fidèle les efforts réels déployés en matière de durabilité.
Cette mesure pourrait aussi inciter les constructeurs internationaux à construire des usines en Europe. Tesla possède déjà une Gigafactory en Allemagne, le groupe chinois Geely a une usine Volvo en Belgique, et BYD, ou encore VinFast, prévoient également la construction d’usines en Europe. Le leader mondial CATL de la batterie, qui possède déjà une usine en Allemagne, va en construire une seconde en Hongrie.
Rappelons que nos constructeurs européens, qui se plaignent de la concurrence étrangère, se fournissent en batteries… en Chine ! Eh oui, la plupart des fournisseurs de batteries sont chinois. Ironie du sort, la fabrication de ces batteries est l’élément le plus émetteur de CO₂ lors de la production d’un véhicule électrique, bien plus que la carrosserie ou les moteurs.
À quelles conséquences s’attendre ?
La réforme du bonus écologique envisagée par Emmanuel Macron pourrait bien conduire à une réorientation stratégique significative pour les constructeurs automobiles. Les fabricants non européens, notamment ceux basés en Chine, en Corée, au Japon et aux États-Unis, pourraient être incités à intensifier leurs investissements en Europe, une tendance déjà observée.
Cependant, cette réforme pourrait également avoir un impact sur la compétitivité de certains constructeurs. Par exemple, Tesla pourrait initialement ressentir l’effet sur sa Model 3 fabriquée en Chine. Toutefois, la firme américaine a la capacité de produire ses modèles les moins chers à Berlin, en Allemagne. Le constructeur chinois BYD, qui prévoit également de produire en Europe, pourrait être touché à court terme.
Le groupe SAIC, sous la marque MG, pourrait être affecté, en particulier son modèle populaire MG4, une petite berline dont les ventes explosent. Le groupe Renault pourrait également ressentir l’impact sur la Dacia Spring, produite en Chine. De même, Citroën, qui fait partie du groupe Stellantis, fait fabriquer son modèle Ami au Maroc. D’autres constructeurs, tels que Nio, ne seraient pas affectés, car leurs véhicules sont déjà trop coûteux pour bénéficier du bonus écologique.
Cette réforme pourrait s’avérer complexe pour les constructeurs coréens tels que Kia et Hyundai, mais aussi pour les constructeurs japonais. Ces derniers, qui ont traditionnellement une empreinte de production hors de l’Europe, pourraient se retrouver confrontés à un défi significatif pour s’adapter à ces nouvelles exigences.
Par ailleurs, certaines marques européennes sont déjà bien positionnées pour répondre aux critères de cette réforme. Prenons par exemple Renault : la batterie de sa Mégane E-Tech est produite en France, à Cléon, et ses batteries en Pologne, par LG. Pareillement, la batterie de la Peugeot 208 électrique, qui a été la voiture électrique la plus vendue en 2022, est fabriquée en Slovaquie, à Trnava, l’une des usines les plus performantes du groupe PSA. De même, l’ID.3 de Volkswagen est assemblée dans l’usine de Zwickau, en Allemagne.
Cette réforme pourrait aussi avoir des conséquences inattendues. En effet, bien qu’elle soit conçue pour protéger et favoriser l’industrie automobile européenne, cette stratégie pourrait se retourner contre elle. En mettant l’accent sur la production locale, les constructeurs européens pourraient se retrouver moins compétitifs sur les marchés internationaux.
Avec ce bonus écologique qui prend en compte le lieu de fabrication de la voiture et de la batterie, la France compte emboîter le pas aux États-Unis avec son Inflation Reduction Act. Cette réglementation américaine ressemble toutefois davantage à du protectionnisme qu’à une volonté d’industrie verte.
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