Faut-il vraiment éviter de recharger sa voiture électrique sur des bornes rapides ? Ce que disent les chiffres

Oui, mais dans quelle mesure ?

 
Certains conducteurs de voitures électriques veulent à tout prix éviter la recharge rapide, de peur de dégrader leur batterie. Mais qu’en est-il en pratique ? Voici nos chiffres.
Tesla Model Y Propulsion en recharge

Faisant partie des inconvénients avancés par les réfractaires à la voiture électrique, la charge rapide serait responsable de la dégradation de la batterie. Si cette affirmation est vraie, elle est à nuancer par les chiffres issus de la réalité du terrain.

Les grands voyages en voiture électrique deviennent de plus en plus aisés, grâce à l’augmentation de la densité des points de charge d’une part, mais aussi à la capacité de charge rapide des nouveaux véhicules.

Certaines championnes de la charge rapide mettent moins de 20 minutes à atteindre environ 80 % de batterie, quand d’autres promettent la même chose en moins de dix minutes, comme avec la Zeekr 001 ou la Zeekr 7X disponibles en Europe (mais pas encore en France). BYD va même encore plus loin, avec une recharge en moins de 10 minutes sur les nouvelles Han L et Tang L.

Cependant, cette charge rapide n’a pas que des avantages, notamment en ce qui concerne l’accélération du vieillissement des cellules de la batterie.

Nous allons revenir sur ce questionnement afin de déceler le vrai du faux, et de voir éventuellement s’il est nécessaire d’éviter la charge rapide, dans le but de conserver le plus longtemps possible la bonne santé des batteries.

La dégradation de la batterie est inévitable

Les habitués des objets possédant une batterie le savent bien : avec le temps, les appareils fonctionnent moins longtemps. Apple a même ajouté en 2018 une fonctionnalité pour voir en un clin d’œil la santé de la batterie de son iPhone, qui cachait jusqu’alors un secret de polichinelle.

Usine Audi
Usine Audi

Les batteries des voitures électriques n’échappent pas à la règle, et sont soumises aux mêmes lois de la physique que le reste des cellules lithium-ion du marché.

Une partie de la dégradation visible est simplement due au temps qui passe (la dégradation calendaire), quand l’autre partie est quant à elle due à l’utilisation qui est faite de la batterie. Nous résumons ces concepts dans un dossier dédié sur la durée de vie des batteries, si vous souhaitez aller plus loin sur le sujet.

La charge rapide : beaucoup de contraintes sur les cellules

Une voiture électrique peut aujourd’hui se recharger à une puissance phénoménale, bien loin des quelques dizaines de watts permis sur les smartphones récents. Nous parlons en effet d’un ordre de grandeur se comptant en centaines de kilowatts.

Les contraintes sur les cellules qui composent un pack de batterie sont donc réelles, avec en premier lieu celles liées à la température. En effet, pour charger le plus rapidement possible, non seulement les cellules doivent être chaudes (autour de 30 degrés), mais en plus de cela, le fait de se charger à une puissance très élevée a pour conséquence d’élever encore plus la température.

Tesla Superchargeurs V4

Nous mesurons fréquemment des cellules à une température de plus de 50 degrés lors des sessions de charge rapide de nos Tesla Model 3 ou Model Y, alors qu’en utilisation classique, la température est plutôt située 20 à 30 degrés en-dessous.

Il est donc tout naturel d’observer un vieillissement prématuré des batteries effectuant beaucoup de charges rapides, mais dans quelle mesure cela impacte-t-il l’autonomie des véhicules ?

Jusqu’à 17 % de dégradation de batterie supplémentaire selon une étude

L’entreprise AVILOO Battery Diagnostics a récemment publié une étude révélant que la dégradation des véhicules utilisant la charge rapide en courant continu est plus marquée que celle ne chargeant que lentement en courant alternatif.

Ce constat met en évidence ce que beaucoup imaginaient, mais il permet en plus de le quantifier avec des données réelles issues du terrain. Ainsi, pour les véhicules ayant près de 200 000 kilomètres au compteur avec leur batterie d’origine, et qui sont exclusivement chargés rapidement, c’est jusqu’à 17 % de dégradation supplémentaire qui sont constatés.

Pour les véhicules moins kilométrés (entre 80 000 et 100 000 kilomètres), c’est une dégradation de 7,5 % supplémentaire qui est quant à elle mesurée, dans les cas les plus extrêmes. L’échantillon est composé de 160 véhicules électriques de différentes marques.

Il est toutefois important de prendre du recul face à ces chiffres, qui ne sont pas assez détaillés pour pouvoir en tirer des conclusions. Il serait bien faux de dire qu’une voiture usant et abusant de la charge rapide va perdre 17 % d’autonomie en plus en 200 000 kilomètres par rapport à une qui ne l’utilise pas.

Pour aller plus loin
Non, recharger rapidement une voiture électrique ne dégrade pas réellement la batterie

Mais d’autres études vont en sens inverse, et montrent, sur des Tesla, que la recharge rapide ne dégrade pas forcément plus rapidement les cellules.

Une dégradation plus marquée, mais quel impact réel ?

Ce qui intéresse sans aucun doute les conducteurs de voiture électrique, c’est de savoir dans quelle mesure ils peuvent utiliser la charge rapide sans pour autant dégrader leur batterie bien plus rapidement.

Il faut garder en tête que lorsque l’on acquiert une voiture électrique, on est en droit de vouloir s’en servir au maximum de ses capacités, et pas nécessairement de la manière la plus précautionneuse qui soit pour les cellules.

En d’autres termes, une voiture électrique vendue pour traverser le pays sans encombre, en proposant de se recharger en moins de 20 minutes avant de pouvoir continuer son trajet, est bien souvent achetée spécialement pour effectuer ce genre de voyage.

Il faut s’imaginer en réalité que les clients malmènent leur batterie, en ce sens où ils vont probablement utiliser la charge rapide lorsqu’ils en ont besoin. Les constructeurs ne s’attendent pas à ce qu’un client fasse un voyage en deux jours, avec une recharge la nuit, plutôt qu’en une journée avec une charge rapide de quelques minutes.

Il est donc utopique de penser qu’en voyant une étude montrant que la charge rapide dégrade beaucoup les cellules, les conducteurs de véhicules électriques vont restreindre leur utilisation.

Qui plus est, les divers rapports des géants du secteur affirment depuis des années que l’écrasante majorité des charges sont effectuées à domicile, et que la charge rapide n’est donc qu’utilisée avec parcimonie.

Si l’on reprend les chiffres de l’étude d’AVILOO mentionnée ci-dessus, et que nous les comparons à notre Tesla Model 3 Grande Autonomie de 2019, nous pouvons estimer la dégradation imputable à l’utilisation de la charge rapide. En effet, après 135 000 kilomètres, nous avons mesuré une dégradation de 13 % de la batterie, avec 60 % de charges rapides et 40 % de charges lentes.

Selon AVILOO, une voiture ayant entre 80 000 et 100 000 kilomètres avec 60 % de charges rapides affiche une dégradation moyenne de 10 %, là où une n’ayant jamais effectué de charge rapide a une dégradation de 4 % seulement. De même, sur les véhicules ayant parcouru entre 180 000 et 200 000 kilomètres, la dégradation est de l’ordre de 6 % sans charge rapide, contre 20 % avec 60 % de charges rapides.

Il n’est pas précisé l’âge des batteries dans les conclusions de l’étude, ce qui ne nous permet pas d’évaluer plus finement l’impact calendaire de celui lié à la charge rapide.

Mais en prenant le pire cas de figure, sur notre Model 3 avec 13 % de dégradation, nous pouvons en imputer la moitié à la charge rapide. En pratique donc, cela signifie que nous avons perdu 6 % de batterie parce que nous avons utilisé les Superchargeurs Tesla et autres bornes de recharge rapide.

Sur une autonomie initiale de 500 kilomètres, ce sont 30 kilomètres qui se sont envolés au fur et à mesure du temps, et qui auraient en théorie pu être conservés.

Un choix à faire entre confort et autonomie

Il y a donc bel et bien un choix à faire lorsqu’on est propriétaire d’une voiture électrique que l’on souhaite garder le plus longtemps possible. D’un côté, l’autonomie à long terme que l’on peut maximiser en évitant trop de charges rapides, et de l’autre, le confort d’utilisation en grands voyages, où les charges les plus rapides possibles sont primordiales pour arriver à destination promptement.

Comme nous l’avons montré plus haut, il y a quelques pour-cent de batterie qu’il est possible de conserver en limitant au maximum les charges rapides. Cependant, les batteries restent garanties par les constructeurs, généralement pour 8 ans ou 200 000 kilomètres.

Si une dégradation extrême se produit pendant cette période, la batterie est remplacée conformément à ce qui est promis. De plus, la durée de vie d’une batterie est globalement plus grande que le reste de la voiture, ce qui ne devrait donc pas inquiéter les propriétaires.

Enfin, la dégradation d’une cellule, quelle qu’elle soit, est accentuée au début de son cycle de vie. Et en termes de chimie de batteries, toutes ne se valent pas sur la conservation le plus longtemps possible de leur capacité d’origine.

D’anciennes Nissan Leaf ou Renault Zoe qui n’ont jamais été chargées rapidement en courant continu approchent de 80 % de capacité résiduelle au bout de 10 ans, tandis que certaines Tesla Model S accusent moins de dégradation, alors qu’elles n’ont été chargées qu’en Superchargeur.


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