L’industrie automobile est un monde en perpétuelle évolution, et même si elle est globalement plus « lente » que certaines autres industries, à commencer par celui des smartphones ou encore des objets connectés, l’évolution de l’automobile en l’espace de quelques décennies peut donner le tournis.
Alors certes, l’automobile est l’une des industries les plus règlementées au monde, ce qui explique notamment une évolution plus lente par rapport à d’autres. L’exemple le plus criant, c’est sans doute la conduite semi-autonome de Tesla, à la pointe il y a encore cinq ans et aujourd’hui quasiment reléguée au second rang en raison, notamment à cause de normes sécuritaires parfois très (trop ?) restrictives.
Chaque évolution technologique dans une voiture, surtout quand elle concerne la sécurité des usagers, fait l’objet d’une analyse de la part du législateur. Pour expérimenter ces nouveautés, le meilleur laboratoire, c’est évidemment le sport auto, et la technologie dont nous allons vous parler aujourd’hui, à savoir le système brake by wire, fut éprouvé en Formule 1 avant de se « démocratiser » sur certaines de nos voitures modernes.
Enfin, cette dernière affirmation n’est pas tout à fait vraie. En fait, il faut remonter au début des années 2000 pour avoir une bride de ce système de freinage « électronique ». Cela coïncide avec les débuts des voitures hybrides. Et qui était le pionnier de la voiture hybride à cette époque ? Toyota.
C’est donc en 2001 que la firme japonaise introduit le système « Electronically Controlled Brake » (ECB) dans les Estima et Alphard, un monospace pour le premier, un van pour le second, deux modèles que nous n’avons jamais vus en France. Ce système a marqué en quelque sorte le début d’une révolution en termes de compacité et de précision de régulation de la pression de freinage grâce à une approche électro-hydraulique.
Pourtant, il lui a fallu plusieurs années avant de se démocratiser, et surtout avant que les manufacturiers mettent au point ce système à plus grande échelle et sans système hydraulique.
Les principes de base du freinage « by wire »
La mécanique du système de freinage d’une voiture repose généralement sur un système hydraulique, où des canalisations remplies de liquide transmettent la pression générée par l’actionnement de la pédale de frein.
Cette pression est ensuite utilisée pour appuyer sur les plaquettes de freins, provoquant ainsi le frottement contre les disques et ralentissant le véhicule. Cependant, avec l’avènement du freinage IBS (Integrated Brake System), les ingénieurs se sont penchés sur quelques évolutions.
Bien que le système conserve toujours son aspect hydraulique, la connexion directe entre la pédale de frein et le circuit hydraulique est remplacée. Dans les systèmes modernes, la pédale fonctionne essentiellement comme une « seringue », reliée à un potentiomètre plutôt qu’à un maître-cylindre hydraulique.
Techniquement, ce potentiomètre indique au calculateur la profondeur à laquelle la pédale est enfoncée, permettant au module électro-hydraulique contrôlé par le calculateur de prendre en charge le freinage en ajustant la pression pour chaque roue, en fonction de la force exercée sur la pédale. En d’autres termes, la pédale de frein agit davantage comme une interface électronique.
Cette approche rappelle le fonctionnement d’une pédale de jeu dans un simulateur vidéo. Au lieu d’une liaison directe, le calculateur contrôle un module électro-hydraulique, déclenchant ainsi la pression de freinage adaptée pour chaque roue. Le liquide hydraulique est acheminé vers le boîtier ABS/ESP, où la répartition et la régulation de la pression sont gérées.
De base, ce système doit offrir un freinage plus précis et efficace en fonction de la force appliquée sur la pédale. Dans les faits, c’est un peu différent, car il y a eu quelques loupés…
L’importance du sport mécanique
Des loupés, il y en a notamment eu sur quelques-unes des voitures commercialisées, avec un freinage difficile à doser. Il y en a aussi eu en Formule 1, qui a aussi un peu servi de laboratoire à ciel ouvert à cette technologie.
Sur les Formule 1, le système de freinage arrière présente des similitudes avec celui des freins avant, mais avec une particularité : le potentiomètre est constitué d’un mini circuit hydraulique. En résumé, la pédale de frein est connectée à un maître cylindre qui génère une pression dans un circuit fermé. Cette pression est mesurée par un capteur, qui transmet l’information au calculateur.
Le calculateur prend ensuite le contrôle d’un actionneur situé sur un autre circuit hydraulique, spécifique au système de freinage arrière. Cette configuration est similaire au système IBS précédemment expliqué, avec la différence notable du mini circuit hydraulique dédié aux freins arrière.
Revenons dix ans en arrière en F1, à la « bonne époque » diront certains, où un certain Lewis Hamilton écrasait la concurrence. Les aficionados se souviennent peut-être de l’édition 2014 du Grand Prix du Canada, où les deux F1 de l’écurie Mercedes (pilotées par Lewis Hamilton et Nico Rosberg) avaient souffert d’une panne du MGU-K (pour Motor Generator Unit Kinetic, une sorte de frein régénératif qui convertit l’énergie cinétique en électricité, ndlr), qui avait provoqué la rupture des disques arrière de Lewis Hamilton et son abandon.
En 2015, à la fin du Grand Prix de Bahreïn, les deux Mercedes ont souffert simultanément d’une panne du système de freinage électronique, provoquée par des réglages censés améliorer l’exploitation des pneumatiques. La coupure du “brake by wire” a privé les pilotes Mercedes de toute la puissance de freinage.
Annoncé comme cela, on pourrait croire que ce système ne présente pas beaucoup d’avantages. Pourtant, on imagine bien que s’il est employé en Formule 1, où l’objectif est d’aller de plus en plus vite (et donc, paradoxalement, de toujours mieux freiner…), le système brake by wire a bien des avantages.
Les avantages (et les inconvénients) du brake by wire
Ce système présente plusieurs avantages significatifs par rapport aux systèmes de freinage traditionnels. Tout d’abord, il est plus léger et moins encombrant, ce qui rend les véhicules moins lourds (donc plus sobres) et réduit les coûts de construction en éliminant la nécessité de composants tels que les pompes à vide.
L’utilisation d’un module électrique pour le contrôle du freinage offre une finesse accrue dans le processus, éliminant toute interférence de la pression du pied humain et permettant à la machine de gérer le freinage des quatre roues de manière plus efficace.
Ce système facilite aussi la transition vers des véhicules autonomes, car il isole les commandes humaines du processus de freinage, simplifiant ainsi le système global et réduisant les coûts associés. Enfin, l’absence de vibrations dans la pédale lors de l’activation de l’ABS améliore l’expérience de conduite.
Pour les voitures électriques et hybrides, cela permet en outre de doser plus finement le mix entre freinage régénératif, contrôlé par les moteurs électriques, et le freinage « mécanique », dont s’occupent les plaquettes et les disques de frein.
C’est bien beau tout ça, mais les amateurs de conduite sportive, eux, ne partagent pas forcément le même avis et signalent sur certains modèles qui en sont équipés un certain manque de feeling et de remontée d’informations. Une problématique similaire à celle rencontrée lors du passage des directions assistées hydrauliques aux versions « steer by wire », qu’embarque par exemple le Tesla Cybertruck.
Qui utilise le brake by wire aujourd’hui ?
S’il y a plus d’avantages que d’inconvénients, on imagine que tout le monde l’utilise ? Si les équipementiers proposant des directions « by wire » se multiplient, ceux travaillant sur le freinage sans liaison hydraulique sont moins nombreux : Hella, Brembo, Continental, ZF ou encore Hitashi pour les Japonais.
Même s’il y a eu des prémices en 2001 avec Toyota, les premiers systèmes de freinage by wire ont vraiment vu le jour en même temps que leur introduction en Formule 1 à cette époque, c’est-à-dire en 2014. Bosch a présenté le système « iBooster » fin 2013, Continental a à son tour lancé le « MK C1 » en 2016.
Du côté des thermiques, il y a Alfa Romeo avec sa très séduite Giulia qui utilise ce système (de bien belle manière), tandis que Chevrolet et sa Corvette C8 a su se laisser séduire également.
Et du côté des voitures électriques aussi, là aussi sur du haut de gamme avec Audi et son e-tron Sportback, Porsche et son Taycan et Tesla.
Notons tout de même que la réglementation (toujours elle) implique, notamment en Europe, de maintenir un système électro-hydraulique en redondance, si jamais le système « by wire » venait à lâcher. Il serait en effet fâcheux de se retrouver avec une voiture dont les freins ne répondent plus.
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