Pourquoi un pneu de voiture électrique est différent : autonomie, bruit et longévité, on fait le point avec des experts

 
Motorisation, poids, autonomie… Les voitures électriques diffèrent des thermiques sur un grand nombre de points. L’un d’entre eux n’est pas forcément des plus évidents, puisqu’il s’agit des pneus. Afin de réduire au maximum la consommation et le bilan carbone global, les manufacturiers ont développé des solutions bien spécifiques. Exemple avec Pirelli.
Pirelli P Zero R Elect // Source : Jean-Baptiste Passieux – Frandroid

Avec leurs lourdes batteries dans leurs planchers, leurs moteurs électriques puissants et silencieux et leurs besoins aérodynamiques, le passage à l’électrique modifie profondément l’architecture de nos véhicules.

Des contraintes qui nécessitent des réponses spécifiques à bien des niveaux, y compris du côté des pneumatiques. En parallèle de la présentation de leurs pneus connectés au Festival of Speed de Goodwood, au Royaume-Uni, nous nous sommes entretenus avec plusieurs responsables de Pirelli pour en savoir plus sur les dessous des pneus dédiés aux voitures électriques.

Des solutions pour baisser les consommations

On le sait : augmenter la taille de la batterie n’est pas forcément le meilleur choix pour proposer la plus grande autonomie possible ; travailler sur la consommation permet d’obtenir des résultats bien plus vertueux.

Pirelli Elect // Source : Jean-Baptiste Passieux – Frandroid

Dans cette optique, outre évidemment l’aérodynamisme, les pneumatiques peuvent jouer un rôle déterminant. Prenons l’exemple de Pirelli, qui a bien saisi l’opportunité avec la création de toute une gamme dédiée aux voitures électriques, baptisée « Elect ».

On avait déjà parlé de leurs pneus hiver permettant de gagner 50 km d’autonomie par rapport à une monte traditionnelle, cette rencontre fut l’occasion d’en savoir plus sur les recettes utilisées pour y parvenir.

Piero Misani, le Chief Technical Officer de Pirelli, a répondu à nos questions. La clef pour obtenir un bon pneu dédié aux électriques, selon lui, ne se situe pas au niveau de ses composants, mais plutôt de sa structure.

Le Porsche Taycan est également chaussé de Pirelli Elect (ici, des P Zero R et P Zero Trofeo RS) // Source : Pirelli

Un élément est au centre des préoccupations : la surface de contact entre le pneu et la route, dont l’optimisation est capitale pour de bonnes performances. Pour cela, un élément clef sera ajusté en conséquence : la rigidité de la carcasse, notamment à cause du poids de la voiture.

Une rigidité insuffisante d’un pneu monté sur une voiture électrique entraînera son affaissement, de quoi augmenter la surface de contact et donc les frottements, entraînant une consommation en hausse… et donc une autonomie en baisse, sans oublier une usure accélérée. À proscrire, donc.

Silence, ça roule

Autre caractéristique des voitures électriques à conserver : le silence de fonctionnement. Le contact des pneumatiques avec la chaussée est bruyant par définition, mais pas si important dans une voiture thermique, le moteur couvrant les nuisances.

La mousse acoustique à l’intérieur du pneu // Source : Pirelli

Évidemment, le silence de fonctionnement des moteurs électriques met ce problème en exergue. Pirelli, comme beaucoup d’autres manufacturiers, l’a résolu par l’ajout d’une bande de mousse à l’intérieur des pneus, absorbant les vibrations produites par la résonance de l’air contenu dans le pneu. Pirelli annonce une baisse de 20 % du bruit perçu dans l’habitacle.

Améliorer l’impact écologique global

Autre intérêt de la voiture électrique : son bilan carbone, plus avantageux qu’une thermique équivalente. Toutes les études s’accordent dessus : si la voiture électrique part avec un déficit écologique en sortie de chaîne de production (notamment dû à la fabrication de la batterie), l’excellent rendement de sa chaîne de traction et le bilan carbone bien plus favorable de son énergie contrebalancera ce déficit le long de sa durée de vie.

Un avantage qui peut s’accroitre, ici aussi, avec les pneus. Du côté de Pirelli, on l’a bien compris avec toute une série de mesures, dont le P Zero E en est l’ambassadeur.

Les logos « Elect » et « Sustainable » sur un Pirelli P Zero E // Source : Jean-Baptiste Passieux – Frandroid

Citons, pêle-mêle, des matériaux recyclés et/ou naturels, tels que du caoutchouc naturel, de la lignite ou des résines, avec un logo spécifique sur le flanc du pneu dès que leur proportion dépasse les 50 % du total. Notons également une volonté d’insérer une partie toujours plus importante de caoutchouc naturel répondant à la certification FSC, là aussi avec un logo l’attestant.

Précisons tout de même que la proportion minimale de caoutchouc FSC à atteindre pour ce fameux logo est de 15 % seulement de la masse totale du pneu – pas grand chose, donc. Pirelli nous a annoncé s’engager à augmenter cette proportion, mais en ne s’avançant ni sur la hausse, ni sur le calendrier.

Un intérêt commercial (et législatif) avant tout

Toutes ces démarches de développement de pneus dédiés aux véhicules électriques et de développement durable, vous vous en doutez bien, n’est pas seulement là pour sauver la planète : Pirelli y voit bien entendu un intérêt commercial.

La Hyundai Ioniq 5 N dispose également de Pirelli Elect // Source : Hyundai

Andrea Casaluci, son PDG, ne s’en cache pas : « Pirelli suit la demande » des consommateurs et des marques automobiles, attaché avant tout à asseoir sa place de numéro un des pneumatiques sportifs.

Un autre élément se cache derrière ces engagements : les obligations légales des pneus, et notamment concernant leurs émissions polluantes. La norme Euro 7, par exemple, encadrera beaucoup plus fermement les émissions liées à l’abrasion des pneumatiques.

On l’aura compris : les pneus jouent donc un rôle déterminant dans la consommation et la sécurité des voitures électriques. N’oublions pas que la taille des pneumatiques peut également influencer la consommation des véhicules, quelles que soient leurs motorisations.

BMW avait innové sur son i3 électrique avec des pneus extrêmement fins // Source : Nokian

Xiaomi l’avait bien prouvé lors de la présentation de sa SU7 : avec des Michelin e-Primacy en 19 pouces, des pneus privilégiant la consommation aux performances, la voiture électrique annonce jusqu’à 810 km en cycle d’homologation chinois CLTC ; toujours en 19 pouces mais en Bridgestone, on passe à 800 km CLTC, en gagnant cependant 25 km/h de vitesse de pointe. Quant aux 21 pouces (en Pirelli P Zero), cette dernière chute à 725 km CLTC, au bénéfice de performances encore plus affûtées.


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