Vous l’avez peut-être remarqué si vous êtes à la recherche d’une voiture neuve électrique depuis le début de l’année : le prix des leasings a fortement augmenté ces derniers mois. Les raisons sont multiples, entre perte du bonus écologique pour certaines, et arrêt du leasing social pour d’autres.
Au début de l’année, on pouvait par exemple trouver des modèles comme la Citroën ë-C3 à seulement 54 euros par mois, certes avec de généreuses subventions accordées par le leasing social, ou encore des Renault Twingo E-Tech à seulement 40 euros. L’an dernier, la MG4 pouvait se trouver à 99 euros par mois.
Regardons maintenant ce qu’il en est. Si la Citroën ë-C3 était encore disponible à partir de 99 euros par mois au début de l’été, il faut désormais compter 149 euros par mois en LOA à l’heure où nous écrivons ces lignes. La Renault Twingo quant à elle a disparu du catalogue, tandis que la MG4 s’affiche désormais à… 249 euros par mois. Mais que s’est-il passé en l’espace de quelques mois sur les financements des voitures électriques neuves ?
Les constructeurs et les financiers ne s’y retrouvent plus
Et en regardant d’une manière plus globale le marché, il semblerait que cette tendance ne soit pas prête de s’arrêter, bien au contraire, même si le leasing social en France, qui sera reconduit en 2025, viendra jouer les trouble-fête.
Mais pourquoi les loyers augmentent-ils encore alors que les prix sont encore, pour la plupart, subventionnés ? Le mécanisme est plutôt simple : la faible valeur de revente des voitures électriques a poussé les captives (les entreprises qui gèrent les offrent de financement, NDLR) qui dirigent le marché automobile européen à doubler leurs prix au cours des trois dernières années. Certaines menacent même de quitter complètement le secteur si les régulateurs les obligent à passer trop vite à l’électrique.
Sans entrer dans les détails, sachez simplement que le montant d’une mensualité est conçu pour tenir compte de la dépréciation d’un véhicule durant la période de location (en règle générale sur trois, quatre ou cinq ans), en fonction des prix de revente estimés ou des valeurs résiduelles. En d’autres termes, les spécialistes doivent, effectivement, regarder dans leur boule de cristal avec les indices qu’ils ont sous la main pour « deviner » le prix d’une voiture d’ici trois, quatre voire cinq ans, en anticipant les potentiels remous du marché.
En revanche, si les prix des véhicules d’occasion s’avèrent inférieurs aux prévisions à la fin du contrat de location, les sociétés de leasing subissent une perte financière lorsqu’elles récupèrent le véhicule, puisqu’il sera revendu en occasion à un prix inférieur à sa valeur résiduelle.
Pour diverses raisons, comme la baisse des prix de Tesla en passant par les inquiétudes concernant l’infrastructure de recharge, la durée de vie des batteries ou encore l’afflux de véhicules électriques chinois plus abordables, les prix des voitures électriques d’occasion sont en baisse en Europe depuis qu’ils ont atteint un pic fin 2022.
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En d’autres termes, si les clients acceptent de plus en plus les véhicules électriques d’occasion, ceux-ci doivent être bon marché. Si les véhicules sont chers, les gens n’en veulent pas. Et c’est exactement ce qui se passe actuellement. Les prix des voitures électriques d’occasion sont chers parce que leur valeur résiduelle est élevée – cette même valeur résiduelle élevée qui permettait d’avoir des mensualités basses au lancement.
MG a eu cette stratégie pour écouler ses MG4 à son arrivée sur le marché français, sauf que les premiers retours montrent que les voitures arrivent trop chères sur les parcs occasions et qu’elles ne se vendent pas.
Comment inverser la tendance et quel impact pour le client ?
Pour éviter d’en arriver là avec un parc saturé de voitures électriques d’occasion trop cher, certains constructeurs, comme Renault par exemple, ont pris le taureau par les cornes.
Avec sa Renault 5 E-Tech par exemple, les valeurs résiduelles sont plus basses et cela fait indéniablement monter les mensualités. Et comment sait-on que la valeur résiduelle est haute ? En regardant tout simplement ce que vous payez sur trois ans de location.
Car sur les dernières offres de LLD analysées par nos soins chez Renault, le client paye entre 40 et 48 % du prix de la voiture, soit quasiment la moitié, en l’espace de seulement trois ans, alors que la décote de ce type de voiture oscille plutôt entre 30 et 35 %. Cela veut dire que Renault anticipe une baisse des prix des voitures d’occasion d’ici les prochaines années par rapport à aujourd’hui, du fait notamment de la multiplication de l’offre sur le marché et l’augmentation des ventes de voitures électriques.
Si vous voyez des LOA ou des LLD « limitées » à 30 000 km sur trois ans par exemple, c’est notamment pour anticiper le kilométrage et ainsi s’assurer d’une certaine cohérence entre ce qui a été calculé il y a trois, quatre ou cinq ans.
Car la voiture intègre ensuite le réseau de l’occasion, et il ne vaut mieux pas se tromper sur le calcul initial de la valeur résiduelle (VR) si on veut s’assurer une bonne revente. D’ailleurs, si vous dépassez le kilométrage prescrit, le constructeur vous facturera chaque kilomètre en plus (environ 0,20 cts en moyenne, cela varie en fonction des marques).
Les parcs de voitures d’occasion électriques saturent
Preuve que ce système de financements avec des VR très hautes n’est pas tenable, regardons simplement l’état des parcs d’occasion à l’heure actuelle. Souvenez-vous, à l’après Covid, il était impossible d’avoir une voiture neuve en moins de six mois, et par conséquent la demande sur le marché de l’occasion a explosé.
Sauf que depuis moins de deux ans, c’est l’effet inverse qui se produit. Les parcs sont pleins, et les prix ont tendance à diminuer. Regardez par exemple chez Tesla, quand il fallait encore se battre pour avoir une Model 3 d’occasion il y a deux ans, il y a désormais l’embarras du choix. Pareil pour les Model Y, surtout que la version restylée ne va pas tarder à pointer le bout de son nez.
On pourrait dire que c’est un bien mauvais calcul de la part des constructeurs et des établissements financiers, et à vrai dire, si c’était à refaire, peut-être que les VR seraient (un peu) moins élevées et les loyers un peu plus haut.
Mais pour des marques comme MG qui cherchent à pénétrer un marché, ce n’est pas forcément un problème, car les clients qui ont financé une MG neuve il y a deux ou trois ont peut-être été fidélisés et sont peut-être repartis sur un nouveau modèle de la marque. C’est donc aussi un excellent moyen de conquête qu’afficher des prix agressifs d’entrée.
Composer avec les affres du marché
Pour le moment, les captives refusent de donner des détails sur les pertes éventuelles pour les contrats de véhicules électriques dues à la chute des valeurs résiduelles. Toutefois, des signes d’une crise qui s’annonce sont apparus quand on lit à travers les lignes les déclarations de certaines entreprises de location de voiture.
Hertz par exemple, a fait état de dépréciations d’environ 150 millions de dollars pour les quelque 20 000 véhicules électriques qu’il a vendus à des prix considérablement réduits, tandis que Sixt a déclaré que la baisse des valeurs résiduelles des véhicules électriques avait réduit ses bénéfices de 40 millions d’euros en 2023.
Le schéma que l’on observe actuellement en France n’est donc pas si anormal. Selon un cabinet d’analyse financier, en août 2021, la location d’un véhicule électrique à 45 000 euros coûtait 284 euros par mois, soit bien moins que les 473 euros d’un modèle équivalent thermique à l’époque. La raison ? L’énorme apport dissout par le bonus écologique, ce qui faisait considérablement baisser les mensualités.
Aujourd’hui, les loyers de ce même véhicule électrique ont plus que doublé pour atteindre 621 euros, tandis que celui du véhicule thermique est tombé à 468 euros (avant certainement de remonter en 2025 avec la hausse programmée des prix des thermiques pour s’aligner avec la réglementation CAFE).
La solution, c’est donc d’essayer de compenser ces pertes et les captives louent désormais leurs véhicules électriques plus longtemps que des voitures thermiques afin de réduire les risques à la revente. Certains engagent même un second cycle, comme Volkswagen avec des ID.3 de première génération disponibles à partir de 189 euros en LLD.
D’une manière générale, les établissements financiers s’attendent à une volatilité des prix des véhicules électriques au cours des cinq à dix prochaines années à mesure que le processus d’électrification s’intensifie. Cette volatilité sera aussi palpable au niveau des prix des voitures électriques et, par conséquent, des LOA et des LLD.
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