Depuis le début de l’année, les résultats commerciaux des voitures électriques ne sont pas aussi bons qu’espérés. Sans être catastrophiques comme en Allemagne, grâce notamment au maintien du bonus écologique et au leasing social, les analystes s’attendaient à de meilleurs résultats.
Plusieurs facteurs expliquent ce ralentissement de la progression, à commencer par la baisse des aides de 2023 à 2024 avec un resserrement des critères d’éligibilité, mais aussi un contexte économique compliqué.
Depuis le début de l’année, la part de marché des voitures électriques en France oscille entre 15 et 20 %. En novembre 2024, la voiture électrique représentait 17,4 % de part de marché (sur une moyenne de 17 % depuis le début de l’année). Cette part de marché s’est effondrée de 24,4 % en novembre 2024 avec 23 255 unités par rapport à la même période l’an dernier.
C’est un mauvais signal, car si l’on met de côté les thermiques (-31,5 % ; 33 411) et diesel (-33,3 % ; 8 821), dont l’offre des constructeurs diminue, l’électrique est l’énergie qui enregistre la plus forte contraction. Les clients se tournent davantage vers les modèles hybrides, qui enregistrent une progression de 38,7 % une part de marché de 38,8 %. Dans ce segment, sont inclus les micro-hybrides, qui représentent une forte majorité des hybrides comptabilisées dans ces statistiques.
Mais en 2025, l’électrique devrait regagner du terrain, pour plusieurs raisons, à commencer par la pluralité de l’offre de voitures électriques, la multiplication de modèles plus accessibles, mais aussi parce que les constructeurs auront une sacrée épée de Damoclès au-dessus de la tête.
Les normes CAFE font trembler les constructeurs
La norme CAFE, en vigueur depuis plusieurs années, impose aux constructeurs de maintenir une moyenne annuelle d’émissions de CO2 par véhicule vendu. À compter de janvier 2025, cette moyenne devra descendre de 95 grammes de CO2 par kilomètre à 81 grammes, un objectif difficile à atteindre pour de nombreux modèles thermiques. Par exemple, une Renault Clio thermique émet actuellement 120 g/km, contre 95 g/km pour sa version hybride.
Jusqu’à présent, la plupart des constructeurs respectaient cette norme grâce à l’essor des ventes de véhicules électriques et aux progrès réalisés sur l’efficacité des modèles thermiques et hybrides. Cependant, depuis la fin de l’année 2023, les ventes de véhicules électriques marquent le pas. Ceux-ci représentent désormais 12,5 % des ventes de voitures neuves en Europe, un chiffre inférieur aux prévisions.
Pour respecter la norme CAFE, les constructeurs doivent réduire les ventes de modèles thermiques tout en baissant le prix des véhicules électriques pour stimuler leur adoption. Les enjeux sont considérables : un non-respect des objectifs de 2025 pourrait entraîner des amendes estimées à environ 13 milliards d’euros pour l’ensemble du secteur.
La pénalité s’établit à 95 euros par gramme excédentaire et par véhicule vendu. Pour nos constructeurs français, avec les résultats actuels, l’amende serait de près de 4 milliards d’euros pour le groupe Renault, et près de 2 milliards d’euros pour Stellantis.
Le président de Renault et de l’ACEA (Association des constructeurs européens d’automobiles), Luca de Meo, a récemment exhorté l’Union européenne à activer une procédure exceptionnelle afin de repousser de deux ans l’application des nouvelles réglementations. « Nous avons besoin d’un peu de flexibilité », avait-il déclaré début septembre, avertissant contre des échéances strictes et des amendes rigides, laissant peu de marge d’adaptation à l’industrie.
D’après un document adressé à Bruxelles, les constructeurs devraient réduire la production de véhicules thermiques de plus de deux millions d’unités pour échapper aux pénalités, ce qui entraînerait la fermeture de huit usines en Europe et des pertes d’emplois conséquentes.
Par ailleurs, certaines marques envisagent d’acheter des crédits d’émissions auprès de constructeurs moins polluants. Des entreprises comme Tesla ou Volvo, qui respectent déjà les nouvelles normes, pourraient ainsi céder leurs crédits à des groupes en difficulté tels que Volkswagen ou Ford, affichant un retard d’environ 28 g/km.
Réorienter les clients vers le 100 % électrique
L’autre levier, et c’est celui qui concernera sans doute les clients, c’est la baisse progressive du prix des voitures électriques. Le principal grief des clients concernant ces véhicules, c’est leur prix, encore plus élevé par rapport à leur équivalence thermique. En Chine, grâce à la baisse du prix des batteries, certains modèles électriques sont désormais moins chers que leurs équivalents thermiques.
La baisse du prix des batteries se propage aussi en Europe (notamment grâce à une production européenne qui débute) et plusieurs études et analystes s’accordent à dire que l’équilibre des prix entre thermique et électrique pourrait arriver en 2026.
Mais ça ne signifie pas forcément que les prix des voitures électriques vont drastiquement baisser. Cela veut aussi dire que les tarifs des modèles thermiques vont aussi augmenter. Cela a déjà commencé en cette fin d’année, avec une petite hausse des prix sur certaines citadines thermiques comme la Renault Clio.
D’une manière générale, les analystes estiment que les prix des modèles thermiques pourraient augmenter de 10 à 15 % l’an prochain. De quoi se rapprocher, voire même surpasser le prix de certains modèles électriques (surtout s’ils sont encore subventionnés) et ainsi encourager les clients à se tourner vers l’électrique.
Ce schéma va être particulièrement visible sur les prix de façade, mais aussi sur les loyers des financements. Comme nous vous l’avions expliqué dans un précédent sujet, les prix des loyers ont considérablement augmenté cette année pour diverses raisons, mais ces mêmes loyers pourraient diminuer pendant que ceux concernant les véhicules thermiques devraient logiquement augmenter.
La baisse du bonus en France sera-t-elle un frein ?
Malgré un marché qui n’avance plus, la France est encore moteur en Europe, contrairement à l’Allemagne. Le pays a d’ailleurs fait machine arrière récemment et a réintroduit des subventions pour certains canaux, tandis que le chancelier, Olaf Scholz, plaide pour des aides à l’échelle européenne.
Pour rappel, voici le barème du bonus écologique pour 2025 dans l’Hexagone :
- Les cinq premiers déciles (jusqu’à 16 300 euros de revenus par part) passent de 7 000 à 4 000 euros ;
- Les 6 aux 8° déciles (entre 16 300 et 24 200 euros) passent de 4 000 à 3 000 euros ;
- Les 9 et 10° déciles bénéficieront d’une aide de 2 000 euros.
Pour ce qui est du leasing social ou encore des aides pour les utilitaires et les poids lourds électriques, il faudra attendre le premier semestre 2025 pour avoir tous les détails.
Nous savons simplement que ces aides ne verront pas le jour avant le second semestre 2025 et que le financement ne se fera pas par l’État, mais par les certificats d’économies d’énergie alimentés par les fournisseurs d’énergie. Le gouvernement promet « aucune différence pour l’acquéreur », mais reste silencieux sur les modalités du leasing.
Nous devrions retrouver des voitures électriques à 100 euros par mois, mais il faudra sans doute oublier les Renault Twingo à 40 euros par mois et autres Citroën ë-C3 à 54 euros par mois auxquelles nous avons eu le droit cette année.
L’Europe reste attentive à l’évolution de marché
Pendant à peu près toute l’année, l’Europe est restée inflexible aux demandes des constructeurs concernant l’échéance de 2035, mais surtout celle de 2025 expliquée plus haut.
Mais depuis quelques semaines, ce sont les gouvernements qui montent au créneau, à commencer par les gouvernements italiens et tchèques, mais aussi allemand dont l’industrie est en grande difficulté et où le groupe Volkswagen cristallise à peu près tous les maux. En France, avant la démission de l’ex-gouvernement, plusieurs voix s’étaient élevées aussi pour une révision de ces normes.
Toutefois, l’Union européenne poursuit son objectif de supprimer les moteurs thermiques en 2035, une position confirmée il y a quelques semaines par Teresa Ribera, vice-présidente de la Commission européenne chargée de la Transition écologique. Néanmoins, afin de prendre en compte les préoccupations des constructeurs, Bruxelles pourrait envisager des compromis.
Parmi les options évoquées : suspendre les sanctions prévues dès 2025 pour les constructeurs qui ne parviennent pas à réduire de 15 % les émissions de leurs nouvelles immatriculations. Une telle mesure pourrait offrir un répit stratégique à une industrie frappée par une crise profonde, tout en favorisant une transition plus progressive vers les véhicules électriques.
Il ne s’agit là encore que de pistes que l’Europe pourrait explorer dans le courant de l’année 2025, en fonction de l’évolution du marché de la voiture électrique. Ces options bénéficient toutefois du soutien du Parti populaire européen (PPE), auquel appartient la CDU de la présidente Ursula von der Leyen. Cette dernière aurait promis d’examiner personnellement ce dossier sensible.
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