On a essayé le Ford F-150 Lightning : la légende américaine passe à l’électrique

Le pickup le plus connu dans le monde

Les pick-ups américains en mode électrique ne se limitent pas aux spécialistes que sont Rivian et Tesla. Au contraire, celui qui fait bouger le plus les lignes à ce jour est le leader des bons vieux trucks adorés des conducteurs US : il s’agit de Ford avec la version 100 % batteries de son F-150, baptisé Lightning. Un sacré un coup d’essai, testé sur ses terres du Michigan. Where else ?
Ford F-150 Lightning Frandroid – 00003
 

Imaginez, quand la voiture la plus vendue ici est une petite Clio, aux USA, c’est un pick-up qui tient la tête du podium depuis des années : le bon vieux Ford F-150, qui a certes su évoluer au fil des générations, mais reste un engin on ne peut plus traditionnel, pour un public qui l’est tout autant, loin des early adopters de Toyota Prius et Tesla des côtes est et surtout, ouest.

Rien que l’an passé, il s’en est vendu pas moins de 700 000 unités, avec de bons gros moteurs thermiques old school et il tient la tête des ventes depuis… 44 ans, suivi des Ram et Silverado, ses concurrents directs. Il faut dire que ce sont des engins utilitaires en plus de prendre un usage familial au quotidien.

Un succès non démenti, qu’étonnamment, sa version électrique, le F-150 Lightning, semble être en mesure de faire perdurer. Car depuis son lancement, le Lightning allonge la liste d’attente de ses futurs clients, qui sont désormais 200 000 (une année d’attente…) alors que la capacité de production annuelle de l’unité flambant neuve du site de Rouge à Dearborne, près de Detroit, monte en cadence pour réussir à sortir 150 000 unités annuelles, employant environ 500 personnes, en deux shifts de 10 heures.

Nous avons pu visiter cette usine dédiée au Lightning, immaculée et rythmée par l’avancée lancinante, mais inexorable des pick-ups XXL. En tout, il faut un jour pour finir la fabrication d’une auto ici, sur des chaînes très automatisées, mais avec des interventions humaines presque à chaque étape. Mark Shkoukani, le patron de l’usine, nous explique que chaque employé est fier de travailler ici, et qu’il reçoit de nombreuses demandes des autres secteurs du complexe historique de Ford.

Un signe des temps, alors que le président Joe Biden himself a exprimé un fort soutien à la filière lors du salon de Detroit en septembre.

Fiche technique

Quelques chiffres pour prendre la mesure du potentiel de performances de l’engin : il développe 588 chevaux avec ses deux moteurs qui lui donnent naturellement une traction intégrale, ainsi qu’un couple camionesque de 1 050 Nm. Résultat, il s’arrache de l’arrêt pour atteindre 100 km/h en seulement 4 secondes, comme une supersportive ! Mais quelles sont les sensations que cela peut bien donner au volant ?

Modèle Ford F-150 Lightning
Catégorie Pick up
Puissance (chevaux) 588 chevaux
0 à 100km/h 4 s
Niveau d’autonomie Conduite semi-autonome (niveau 2)
Taille de l’écran principal 15,5 pouces
Prise côté voiture Type 1
Prix entrée de gamme 62000 euros
Prix
Essayez-la   Fiche produit

Design, habitabilité et technologies embarquées

Voilà venu le moment de prendre possession de notre F-150 Lightning, qui fait 3 tonnes pour une longueur de 6 mètres.

Approchant la bête, on la reconnaît à sa face avant qui a cédé à la tentation si répandue d’installer un bandeau de LEDs pour clamer son fonctionnement à la fée électricité. Mais à part quelques logos et détails, la carrosserie construite en aluminium pour ne pas encore plus alourdir la bête reste très proche de son modèle thermique d’origine.

Un choix pour ne pas dépayser les futurs clients, contrairement à Chevrolet qui différencie plus nettement son Silverado électrique, attendu l’an prochain. C’est gros, c’est haut, c’est large, bien campé sur d’immenses jantes de 22 pouces, mais en grimpant à bord, on se sent facilement à l’aise : la position de conduite est proche de celle d’une voiture classique, le siège (cuir, massant, ventilé et chauffant ici) est particulièrement moelleux et les commandes, instinctives.

Il faut dire que notre haut de gamme a droit au même bel écran vertical de 15,5 pouces que le Mustang Mach-e, avec son système d’exploitation Sync 4A avec reconnaissance vocale, en plus de l’instrumentation numérique de 12 pouces. Une astucieuse tablette peut être déployée sur la console centrale pour travailler avec un portable, une fois le levier de sélection de transmission rétracté (commande électrique).

On se sent bien avec le toit ouvrant panoramique, la sono Bang & Olufsen et ses 18 haut-parleurs prêts à cracher de la country music, et les passagers arrière sont bien traités avec beaucoup d’espace aux jambes. Pour les bagages et tout ce vous pourriez avoir envie d’emmener, pas la peine de faire des sacrifices, vous pouvez tout prendre.

Avec 885 kg de charge utile, l’immense benne (avec ridelle électrique, s’il vous plaît) pourra embarquer un déménagement complet. Mais le Lightning cache aussi une botte secrète inédite dans un pick-up : l’immense capot, sans gros V6, libère une soute de 400 litres, soit le coffre d’une bonne berline compacte, pour emmener les affaires les plus importantes au sec et en sécurité.

Conduite

Un monstre gentil : voilà le qualificatif qui vient à l’esprit alors qu’on commence à prendre la mesure de l’engin sur les routes parcourant les banlieues de Detroit. Confortable, avec un peu d’inertie, mais facile et étonnamment vif, le pick-up se montre surtout très civilisé. Certes, on sent bien que ses suspensions sont conçues pour supporter des charges plus lourdes, sa rigidité n’est pas exemplaire, sa direction pas très directe mais qu’importe, l’agrément est bien là, quelle que soit l’humeur.

Envie de coller vos passagers aux sièges ? Check. L’engin impressionne avec ses accélérations effectuées avec une sonorité artificielle pour une fois réussie. Envie de conduite souple ? Pas de souci, il s’y prête parfaitement et pourra emmener les enfants en douceur, sans même toucher aux freins en utilisant la fonction one pedal, bien dosée.

Le comportement est plus efficace et moins rustique qu’avec la plupart de ces engins, grâce à l’architecture avec des roues arrière indépendantes, contrairement aux autres F-150. Presque une voiture, quoi, mais de pratiquement 3 tonnes, avec côté aides à la conduite, les fonctionnalités que l’on connaît bien avec une capacité semi-autonome de niveau 2 qui sera bien utile sur les highways.

Autonomie, batterie et recharge

Notre exemplaire est un haut de gamme Platinum, avec un équipement maximum et une grosse, très grosse batterie de 131 kWh utiles, qui demande juste 41 minutes pour repasser de 15 à 80 % grâce à sa charge DC de 150 kW.

Au total, 75 000 point de charge sont accessibles sans avoir besoin de carte (la voiture est reconnue avec le système Plug & Charge) grâce au service BlueOval sur le territoire US.

Évidemment, sur une simple prise de courant de 240 volts à 30 ampères, il faudra emporter quelques jeux de société et des duvets : compter 19 heures. Le double à 120 volts. Son chargeur embarqué de 19,2 kW permet de charger en 8 h avec une wallbox à 80 ampères.

Les prises pour brancher tous types d’ustensiles (9,6 kW de puissance, c’est énorme) en charge bidirectionnelle sont légion dans la cabine, le frunk ou le plateau arrière.

Sa batterie lui permet une autonomie théorique de 480 km, avec une consommation homologuée selon les normes américaines EPA d’environ 31,7 kWh / 100 km. C’est énorme. À titre de comparaison, une Tesla Model X Plaid est donnée pour 23 kWh / 100 km.

Sur notre essai, le véhicule avait parcouru environ 355 km pour une consommation moyenne de 28 kWh.

Prix et concurrence

Enfin, attention, rouler en Lightning a un prix, qui peut aller du simple au double selon la version et la batterie embarquée, de 50 000 dollars hors taxes pour le modèle de base et à partir de 96 874 dollars pour notre haut de gamme Platinum. Soit environ 120 000 euros TTC si le pickup était vendu en Europe.

2023 sera une année de vérité pour les pick-ups électriques, avec l’arrivée des Chevrolet Silverado, GMC Hummer et surtout, Tesla Cybertruck, aux côtés des start-ups spécialisées comme Rivian avec son R1T ou Lordstown Motors. Gageons que cela donnera lieu à de beaux tests comparatifs dans les médias US, et que le Ford y tiendra son rang.

Un combat fratricide que nous verrons de loin ici, alors que notre culture auto, nos routes et nos habitudes de consommation sont à des années-lumière de ce Lightning. Mais quelle expérience plaisante d’avoir pu apprécier la maîtrise du constructeur de Dearborne pour ce premier essai.

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